Les institutions scolaires aux États-Unis et en France - article ; n°1 ; vol.10, pg 3-26
25 pages
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Description

Annales. Économies, Sociétés, Civilisations - Année 1955 - Volume 10 - Numéro 1 - Pages 3-26
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1955
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Roger Thabault
Les institutions scolaires aux États-Unis et en France
In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 10e année, N. 1, 1955. pp. 3-26.
Citer ce document / Cite this document :
Thabault Roger. Les institutions scolaires aux États-Unis et en France. In: Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 10e
année, N. 1, 1955. pp. 3-26.
doi : 10.3406/ahess.1955.2402
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ahess_0395-2649_1955_num_10_1_2402ÉTUDES
LES INSTITUTIONS SCOLAIRES AUX ÉTATS-UNIS
ET EN FRANCE
Le séjour de six semaines que j'ai été appelé à faire aux États-Unis, du
25 février au 13 avril 1954, est dû à la généreuse initiative du Département
d'État qui, dans le dessein de « promouvoir la compréhension et l'amitié
entre les peuples », a organisé un programme d'échanges internationaux. Il
m'a permis d'étudier les institutions scolaires des États-Unis. J'ai pu visiter,
la plupart du temps seul, avec la plus grande liberté, des elementary schools,
des high schools, des vocational schools, des universities à Washington D. С,
Littlekok (Arkansas), San Francisco et Berkeley (Californie), Chicago (Ill
inois), Boston (Massachusets), New-Haven (Connecticut) et New York. Et je
dois rendre hommage à la façon parfaite dont mon voyage avait été organisé,
à la courtoisie et à l'amitié avec lesquelles j'ai partout été reçu.
Il faudrait un séjour beaucoup plus long pour être en mesure de rédiger
une étude complète sur les institutions scolaires des États-Unis. Les pages
qu'on va lire n'ont aussi bien d'autre prétention que de s'efforcer de
mieux discerner et mieux comprendre, en les comparant les uns aux autres,
quelques-uns des problèmes de l'Enseignement en France et aux États-Unis.
Le rapprochement de solutions différentes à des problèmes identiques, abordés
dans des esprits très voisins l'un de l'autre, éclaire ces problèmes d'un jour
singulier et met en relief les différences historiques, sociales, économiques
et culturelles des deux pays. Il va de soi que je vais par là-même être obligé
d'insister sur les différences entre les États-Unis et la France. Mais il serait
navrant — et contraire aux faits — de conclure par là que nous sommes
étrangers les uns aux autres ; Homo sum.... Nulle part au monde, sans doute,
le contact humain n'est si facile à établir qu'aux États-Unis.
Je pourrais conter cent anecdotes témoignant de l'extrême amabilité du
peuple américain, de la facilité avec laquelle il donne sa confiance et même
son amitié, de sa générosité, de l'intérêt peut-être nouveau, mais certain,
qu'il porte aux choses et aux gens d'Outre- Atlantique. Il est par ailleurs
singulièrement émouvant et significatif de retrouver chez ceux qui enseignent
aux États-Unis l'idéal même des enseignants français. J'ai vu à Chicago, au
moment où j'entrais dans une elementary school, la directrice de l'école
gronder un jeune garçon noir qui faisait l'école buissonnière. La maman
noire était là. Elle criait et pleurait. La directrice, avec une humanité, un 4 ANNALES
sang-froid admirables, mettait au point les reproches passionnés de la mère
et obtenait du jeune garçon la promesse de ne pas recommencer. Il me semb
lait voir une de nos meilleures directrices d'école aux prises avec des diff
icultés du même ordre et réagissant de la même manière.
A Washington, j'ai retrouvé chez un directeur de vocational school
(école technique) les manières toutes particulières des directeurs d'écoles
techniques françaises : même autorité un peu brusque et cordiale, même rapi
dité de décision, même netteté de jugement, ne s'embarrassant point de
nuances. En parlant avec le principal d'une high school (lycée) de Broo-
kline près de Boston, il me semblait parler avec un proviseur français des
problèmes que soulève en France l'organisation de « classes nouvelles » et
j'ai retrouvé enfin chez les professeurs d'Université le même amour désin
téressé de l'étude et des idées, la même large culture qui est l'honneur des
grands universitaires français.
Dans les classes, l'enseignement est très voisin. Il est courant d'y entendre
parler de Descartes, de Galilée et le maître affirmer avec conviction : « Ce
sont les pères de notre civilisation. » Le programme des cours sur la civilisa
tion américaine part de la Grèce. Et je ne connais pas de musée de peinture
français qui ait l'équivalent de ce que possèdent les musées de Chicago et de
Boston, en fait de Toulouse-Lautrec, de Cézanne, de Van Gogh, de Renoir.
Mais si les éducateurs américains ont le même idéal que les français, l'orga
nisation de l'enseignement aux États-Unis et en France est très différente.
Un système d'éducation est, en effet, adapté par l'esprit général qui
l'anime, par son organisation, par ses programmes à la société qui l'a créé et
qui l'entretient. Il serait donc extrêmement naïf de le vouloir copier. Et aux
États-Unis, les éducateurs français, quelle que soit la prodigieuse réussite
du pays qu'ils visitent, doivent être bien persuadés que, s'ils peuvent
s'inspirer d'exemples, de méthodes ou de procédés témoignant d'un état
d'esprit démocratique qui est aussi le leur, ils auront à repenser le problème
en fonction de leur propre pays : aussi le principal avantage d'une telle
visite réside-t-il dans l'effort qu'elle conduit à accomplir pour juger un sys
tème d'enseignement qu'on peut être obligé, si l'on n'y prend garde, à
considérer comme naturel, et ne posant aucune question.
I
Ce qui frappe le plus aux États-Unis, c'est qu'ils ne sont à l'échelle ni de
la France ni de n'importe quel autre pays d'Europe, Russie exceptée. On
met tout un jour en chemin de fer pour traverser l'État de Virginie ; l'État de
Tennessee est aussi grand que la Grande-Bretagne ; la Californie recouvrirait
les trois quarts du sol de la France, sa limite nord se trouve à la latitude de
Bordeaux, sa limite sud à celle de Marrakech ; le Texas à lui seul est plus
vaste que la péninsule ibérique. Est-il besoin de dire que, du fait même de
son immensité, le territoire des États-Unis est très varié ? On y trouve tous
les sols, tous les climats, mais aussi les types humains les plus divers : beau
coup d'Anglos-Saxons, cela va sans dire, ou d'Américains de vieille souche INSTITUTIONS SCOLAIRES AUX ÉTATS-UNIS 5 LES
que le climat et les habitudes ont curieusement modelés de façon semblable,
mais aussi d'immenses hommes du Nord de l'Europe, des hommes petits et
bruns des bords de la Méditerranée ou du Mexique, des Nègres, des Jaunes,
etc.... Cette variété n'est pas uniforme ; il y a davantage de Nègres dans le
Sud, de Jaunes dans l'Ouest, de Mexicains dans le Sud-Ouest, de Germains
dans le Nord-Est, etc., mais, dans n'importe quelle ville, donc dans n'importe
quelle école, on peut voir des hommes ou des enfants présentant toutes les
variétés de types humains de la terre, parlant américain et qui sont citoyens
américains, voire très sincères citoyens américains, même s'ils ne parlent
pas encore bien la langue anglaise. Ils sont attachés aux États-Unis, parce
qu'ils y sont libres et qu'ils gagnent bien leur vie.
D'où une différence, à notre sens fondamentale, entre le patriotisme amér
icain et le patriotisme français. Le premier est un patriotisme d'hommes
actifs, libres, sans attaches avec le sol ou même avec un métier quelconque,
dont l'imagination s'étend à quarante-huit États, même s'ils préfèrent celui
où ils vivent, et qui, associés à l'un des ensembles humains les plus impo
sants du globe, respirent en lui une atmosphère grisante de sécurité indivi
duelle et collective, de prospérité infinie. Le second est un patriotisme
d'hommes attachés à leur coin de terre ; c'est un amour charnel de la terre de
France ; il tient à des habitudes, à une longue hérédité de terr

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