Les moments fondateurs de quelques villes coloniales. - article ; n°81 ; vol.21, pg 375-388

Alain Sinou

Description

Cahiers d'études africaines - Année 1981 - Volume 21 - Numéro 81 - Pages 375-388
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: CAHIERS_D-ETUDES_AFRICAINES
• Publié le: 01 janvier 1981
• Nombre de lectures: 20
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Monsieur Alain Sinou
Les moments fondateurs de quelques villes coloniales.
In: Cahiers d'études africaines. Vol. 21 N°81-83. 1981. pp. 375-388.
Abstract
A. Sinou—The Founding Moments of Some Colonial Towns.
One should not think that the roots of urban settlements along the penetration routes starting from St. Louis-du-Senegal, have
been imagined according to a planner's rationality. In fact, the explanations given as to the choice of the sites refer to different
categories of reasons; a multiplicity of arguments influenced the actual choice of locations and builders, when beginning to build,
were determined by arguments which came out more from a system of taies than from technical evidence.
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Sinou Alain. Les moments fondateurs de quelques villes coloniales. In: Cahiers d'études africaines. Vol. 21 N°81-83. 1981. pp.
375-388.
doi : 10.3406/cea.1981.2320
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cea_0008-0055_1981_num_21_81_2320histoires de villes
ALAIN SINOU
Les moments fondateurs de quelques villes coloniales
Nous envisageons pas ici de tracer un panorama exhaustif des
moments fondateurs des villes reconnues comme coloniales mais nous
nous limiterons raconter accouchement de quelques établissements
qui ponctuent un itinéraire colonial le chemin tracé depuis Saint-Louis
du Sénégal en direction de intérieur de Afrique Avant de nous inter
roger sur histoire des villes qui sont nées de ce projet de pénétration
dans le continent il est nécessaire de rappeler les caractéristiques des
premiers établissements coloniaux dans cette partie du monde
Du comptoir la ville
Les premiers établissements
partir du xvne siècle des Européens viennent séjourner en Afrique
afin de commercer Seuls les récits des navigateurs qui ont parcouru ces
mers depuis le xve siècle leur ont fourni au départ quelques informations
sur ce continent le long des fleuves et des côtes donc ils fondent des
comptoirs La proximité une voie eau envisagée alors comme unique
voie de circulation et la présence de populations non hostiles leur venue
sont les premières conditions recherchées par ces commer ants pour
établir Les terres où ils installent sont loin de répondre des critères
de salubrité avant de fonder le comptoir de Saint-Louis sur île de
Dar les premiers colons étaient implantés sur autres îles plus au
sud mais les fréquentes inondations qui emportaient les habitations les
obligèrent se déplacer vers le site actuel mieux protégé des eaux mais
recouvert de sable et dépourvu de source mara 1968)
Outre les employés de la compagnie de commerce quelques soldats
représentant autorité royale sont envoyés aux colonies où ils résident
dans des forts le plus souvent construits dans les comptoirs Pour éta
blir on choisit de préférence des sites comme les îles qui assurent une
défense naturelle plus fiable que les murailles de terre des forts laminées
par les eaux au xixe siècle le commerce et la sécurité sont les seuls
impératifs qui déterminent implantation un établissement quant
son organisation elle est guère envisagée
Les récits des voyageurs décrivent ces places comme des agglomérats
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de bâtiments de toute sorte mal entretenus les murailles des forts
tombent en ruine les habitations des Européens sont souvent identiques
aux cases des indigènes qui attirés par ce nouveau pôle activité
viennent agglutiner en désordre Souvent il est pas possible de dis
cerner des groupes précis intérieur de ces établissements Saint-
Louis des commer ants se sont installés dans le fort les Blancs se mêlent
aux autochtones et les métis sont nombreux Ce brassage des personnes
cette absence ordre dans organisation des comptoirs inquiètent les
voyageurs qui les visitent et leur paraissent être cause de la mortalité
qui sévit
Malgré ces récits peu de mesures sont prises par les autorités pour
mettre fin ce désordre Les places se développent sans règle spatiale pré
cise mais selon des manières de faire qui laissent une large part im
provisation et ne produisent pas de modèle établissement
partir du xixe siècle les gouverneurs qui se succèdent dans ces colo
nies commencent interroger sur leur salubrité Les quelques mesures
ils proposent ne sont guère appliquées par les colons qui ne les envi
sagent pas comme des moyens de lutter contre la mortalité mais comme
des contraintes restreignant leur liberté action Il faut attendre la venue
de Faidherbe pour que des opérations destinées assainir ces lieux soient
effectivement mises en place Saint-Louis et Goree de nouvelles voies
sont tracées des plans établissement sont érigés et doivent être appli
qués les constructions parasitaires les paillottes être suppri
mées
La première grande opération aménagement dans cette colonie est
la fondation de la ville de Dakar dont le développement doit suivre les
prescriptions un plan directeur établi dès 1862 Cette ville est envisagée
comme le futur port de la colonie son site se caractérisant par la présence
une rade protégée Si la île du cap Vert paru pendant longtemps
inquiétante aux autorités en raison de son insalubrité et de la proximité
des populations indigènes il faut noter que ce cap possède néanmoins
une qualité appréciable il est connu par tous les navigateurs qui longent
cette côte et décrit avec précision Il se distingue par son relief mais
aussi par la couleur de la végétation et contraste avec les côtes plates
sablonneuses et peu accessibles En choisissant ce site Faidherbe installe
autorité fran aise en un lieu évoqué par tous les voyageurs
La fondation de Dakar est pas un projet isolé mais une des figures
travers lesquelles cette colonie pensée comme un réseau continu se
matérialise Il ne agit pas encore de construire un corps territorial
homogène mais de réunir des places alors dispersées En même
temps que Saint-Louis est organisé et Dakar fondé des lignes télégra
phiques sont construites entre les différents établissements et un chemin
de fer est prévu pour relier Saint-Louis Dakar une mosaïque de comp
toirs repliés sur eux-mêmes et indépendants Faidherbe substitue des
réseaux matérialisés ponctués escales VILLES COLONIALES 377
Carte de situation
Les postes et les villes de intérieur du continent
Si la fondation de Dakar et son agencement apparaissent comme des
opérations issues un projet bien élaboré celles-ci ont pas valeur
exemple et ne sont pas théorisées En dehors de cette place Faidherbe
et ses successeurs se contentent améliorer les établissements existants
Il fait bâtir de nouveaux forts dans les comptoirs du fleuve un Podor
où le précédent était en ruine autre Medine Les autorités ne tentent
pas de construire des villes nouvelles imaginées comme des modèles éta
blissement mais se limitent organiser les anciennes places selon les pro
cédés en vigueur des forts en matériaux durables sont édifiés des voies
orthogonales sont tracées dans le village qui entoure le fort Ph Il ne
agit pas arranger ces places selon des réglementations hygiéniques
mais assurer leur défense la voirie permettant une meilleure circulation
et une surveillance plus aisée De plus en structurant ces comptoirs les
autorités veulent les différencier des établissements indigènes aux ruelles
étroites et tortueuses où les militaires se perdent
Ces décisions ne résultent pas un discours cohérent sur aménage
ment de espace elles sont inspirées par les récits des voyageurs qui ont
parcouru ces pays Ainsi la fondation de Medine est pas seulement
saisir comme une des figures matérialisant la puissance fran aise comme
une place installée en vue une conquête ce fort est avant tout destiné
protéger le commerce de cette région et encourager le négoce avec
intérieur du continent idée est pas venue un théoricien de la colo
nisation elle est née un récit de Caillié qui suggère établir extré
mité de la partie navigable du Sénégal un comptoir permettant de rece
voir les productions du bassin du Niger Faidherbe ne fait que poser la
première pierre de ce réseau
Cette conception de la colonie comme réseau commercial et non comme ALAIN SINOU 378
territoire rationnellement exploité