Les poussées centrifuges du capitalisme urbain : l intégration des villes côtières chinoises dans le réseau des métropoles portuaires asiatiques - article ; n°147 ; vol.37, pg 569-597
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Les poussées centrifuges du capitalisme urbain : l'intégration des villes côtières chinoises dans le réseau des métropoles portuaires asiatiques - article ; n°147 ; vol.37, pg 569-597

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Description

Tiers-Monde - Année 1996 - Volume 37 - Numéro 147 - Pages 569-597
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 7
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

François Gipouloux
Les poussées centrifuges du capitalisme urbain : l'intégration
des villes côtières chinoises dans le réseau des métropoles
portuaires asiatiques
In: Tiers-Monde. 1996, tome 37 n°147. pp. 569-597.
Citer ce document / Cite this document :
Gipouloux François. Les poussées centrifuges du capitalisme urbain : l'intégration des villes côtières chinoises dans le réseau
des métropoles portuaires asiatiques. In: Tiers-Monde. 1996, tome 37 n°147. pp. 569-597.
doi : 10.3406/tiers.1996.5058
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1996_num_37_147_5058LES POUSSEES CENTRIFUGES
DU CAPITALISME URBAIN:
L'INTÉGRATION
DES VILLES CÔTIÈRES CHINOISES
DANS LE RÉSEAU DES MÉTROPOLES
PORTUAIRES ASIATIQUES
par François Gipouloux*
La carte de l'Asie orientale englobant la Chine reproduite ci-dessous
peut être vue de deux façons différentes. La première perspective est cen
trée sur Chongqing, si l'on admet que la capitale industrielle de la pro
vince du Sichuan est le lieu géométrique de l'immensité continentale chi
noise : Pékin, Shanghai, Huhehot, Lhasa, en sont à la même distance :
1 500 km. La seconde suit la diagonale qui court de Tokyo à Manille.
Shanghai, mais aussi Dalian, Tianjiu, Qingdao, Xiamen, Canton, sont
alors intégrés dans un corridor où sont également situés d'autres grands
ports asiatiques : Kaohsiong, le principal port de Taiwan, Pusan, à la
pointe de la péninsule coréenne, Yokohama. En d'autres termes, la pre
mière perspective nous donne du chapelet des villes côtières chinoises
une vision périphérique par rapport à ce cœur massif qu'est la Chine
dans sa dimension impériale, étendue jusqu'aux confins avec l'Inde et la
Mongolie. La seconde fait au contraire apparaître les villes côtières part
ie intégrante d'un réseau de villes asiatiques, dont le dynamisme est
renforcé par la croissance économique de la région.
Ces villes formaient autrefois un réseau actif. La prise du pouvoir par
le Parti communiste, puis la guerre froide ont gelé cette dynamique pen
dant près de quatre décennies, jusqu'à la fin des années 70. Depuis, les
réseaux urbains et portuaires sont réactivés et les villes chinoises du li
ttoral redeviennent partie prenante des échanges intra-asiatiques. Leur
* Chargé de recherche, CNRS.
Revue Tiers Monde, t XXXVII, n° 147, juillet-septembre 1996 François Gipouloux 570
rayonnement est aujourd'hui renforcé par le développement des liaisons
aériennes, du transport conteneurisé, des télécommunications, etc. Mais
aussi et surtout par le mouvement des hommes : ingénieurs, stagiaires
ont succédé aux marchands et aux négociants. Ce faisant, ce sont bien
deux Chine que nous découvrons là, qui ne se recouvrent pas exacte
ment : l'une continentale, arc-boutée sur son dessein impérial d'enserre- des marches (Tibet, Xinjiang, Mongolie), l'autre ouverte, cosmop
olite, marchande, polycentrique, projetée vers l'Asie et le monde.
Il s'agit de montrer ici non pas comment ces deux Chine se fragmentent
ou se recomposent, mais plutôt les villes côtières chinoises s'intè
grent dans les synergies régionales qui, en Asie, ont de grandes métropoles
portuaires - Hong-kong, Singapour, Kobé, Pusan - pour epicentre. Cet
article s'attache en particulier à évaluer la puissance économique des villes
côtières chinoises que leur taille, et la complexité de leur tissu social placent
de plain-pied au sein d'un réseau de villes marchandes appelées à jouer un
rôle central dans le capitalisme polycentrique qui s'impose en Asie.
Carte 1 . — Centres et périphéries dans les visions
de la Chine et de l'Asie orientale Les poussées centrifuges du capitalisme urbain 571
I - LA RUÉE VERS L'EST OU LA DISTRIBUTION TRÈS DÉSÉQUILIBRÉE
DE L'URBANISATION CHINOISE
Le poids de l'histoire
Un système de cités liées par des échanges commerciaux a perduré
pendant des siècles en Asie. L'histoire montre la trace d'un système de
villes très ancien, lié par des échanges commerciaux à la périphérie de
l'Asie maritime1. L'irruption des puissances coloniales, au XIXe siècle,
n'a fait qu'étendre leurs ramifications. Il est significatif que les anciennes
cités coloniales, qu'il s'agisse de Saigon ou de Shanghai, s'efforcent
désormais de redevenir membres du réseau de cités asiatiques dont elles
faisaient partie autrefois.
Dès 1853, Shanghai avait dépassé Guangzhou en termes de volume
commercial, et grâce au développement du chemin de fer Shanghai-
Hangzhou et Shanghai-Nanjing, Shanghai était capable de drainer des
produits agricoles de l'intérieur2. Dalian, second port chinois après
Shanghai, traitait environ 70 % du total des exportations de la Chine du
Nord-Est. Fuzhou, située à l'extrémité de la «route maritime de la
soie », reliant la Chine à l'Asie occidentale et l'Europe était, dès l'époque
Tang (618-907), l'un des centres de la Chine continentale les plus actifs,
gérant les échanges avec l'archipel des Ryûkyû (aujourd'hui Okinawa)
et Taiwan. Xiamen fut le port principal pour le commerce de l'opium et
les exportations de main-d'œuvre chinoise durant la seconde moitié du
XIXe siècle.
Les périmètres des espaces transnationaux qui apparaissent en Asie
orientale, et à la périphérie desquels se trouvent les zones côtières chi
noises, sont aujourd'hui délimités par une chaîne de cités et de ports qui
n'opèrent pas seulement comme des centres d'échanges entre les écono
mies intérieures et le réseau du commerce international. La fonction de
débouché à l'articulation des économies rurales et de l'économie mond
iale, traditionnellement assumée par la ville, alors que le commerce
international était fait de produits agricoles et de ressources naturelles,
cède progressivement la place à une fonction de nœud dans le réseau
régional ou mondial. En effet, si les cités sont les principales créatrices
1. Cf. Yue-man Yeung, Pacific Asia in the 2 1st Century, Hong-kong, Chinese University Press, 1993 ;
Gilbert Rozman, Urban Networks in Ch'ing China and Tokugawa Japon, Princeton, Princeton University
Press, 1973 ; Denys Lombard et Jean Aubin, Marchands et hommes d'affaires asiatiques dans l'océan Indien et
la mer de Chine, 1У-201 siècles, Paris, Éd. de l'EHESS, 1988.
2. Ka-iu Fung, Zhong-Min Yan, Yue-min Ning, Shanghai : China's World City, in Yue-man Yeung
and Xu-wei Hu (éd.), China 's Coastal Cities : Catalysts for Modernisation, Honolulu, University of Hawaii
Press, 1992, p. 129. 572 François Gipouloux
de la richesse, elles sont aussi les foyers de concentration du savoir, de la
recherche-développement, de l'innovation technologique. Elles sont en
concurrence les unes avec les autres pour attirer capitaux, technologies,
et compétences. La ville-port n'est plus dans ce contexte un territoire
fermé, mais projeté vers l'échange international.
Le contraste est cependant très marqué entre l'essor des métropoles
portuaires en Asie, partie intégrante du développement urbain, et l'e
xtraordinaire stagnation de la population urbaine chinoise, en particulier
durant la période qui va du début des années 50 à la fin des années 70.
Le phénomène est d'autant plus surprenant si on le compare avec ce
qu'il advient dans d'autres pays en voie de développement à la même
époque1. Il ne s'explique que par la volonté délibérée du Parti commun
iste de contrôler et restreindre l'urbanisation. Après 1978, la mainmise
des autorités sur le développement urbain se desserre quelque peu. En
particulier le hukou, l'assignation policière des résidences, perd de son
caractère contraignant, au niveau économique : dès lors que les denrées
autrefois rationnées sont en vente sur un marché libre, des flux de
migrants s'accroissent en direction des villes. Aujourd'hui, avec la proli
fération des centres marchands et industriels de taille intermédiaire, et le
développement d'industries rurales exportatrices dans les régions
côtières, ce continuum ville/campagne qu'évoquait Elvin à propos de

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