Lettre à M. Zaborowski sur l état et l avenir des populations de l Algérie et de la Tunisie - article ; n°1 ; vol.9, pg 388-408
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Lettre à M. Zaborowski sur l'état et l'avenir des populations de l'Algérie et de la Tunisie - article ; n°1 ; vol.9, pg 388-408

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Description

Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris - Année 1898 - Volume 9 - Numéro 1 - Pages 388-408
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1898
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Laupts
Lettre à M. Zaborowski sur l'état et l'avenir des populations de
l'Algérie et de la Tunisie
In: Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, IV° Série, tome 9, 1898. pp. 388-408.
Citer ce document / Cite this document :
Laupts . Lettre à M. Zaborowski sur l'état et l'avenir des populations de l'Algérie et de la Tunisie. In: Bulletins de la Société
d'anthropologie de Paris, IV° Série, tome 9, 1898. pp. 388-408.
doi : 10.3406/bmsap.1898.5780
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0301-8644_1898_num_9_1_578021 juillet 1898 388
périodiques (Articles à signaler).
Revue Ecole d'Anthropologie (45 juillet 1898). — G. Hervé : Les
Mongoloïdes en France ; — E. Pitard : 59 crânes valaisiens de la
vallée du Rhône.
Mittheil. Anthropolog. Gesellsc. Wien (1898, h. m). — L. H. Fis
cher : Eine neolithische Ansiedelung in Wien ; — Ph. Paulits-
chke : Prahistorische funde aus dem Samâllande.
PRÉSENTATIONS.
M. Fourdrignier présente des silex taillés de l'époque mousté-
rienne provenant d'Egypte.
Lettre à H. Zaborowskl sur l'état et l'avenir des populations de
l'Algérie et de la Tunisie.
Par le Dr Laupts.
M. Zaborowskl — J'ai reçu, avec mission de la communiquera
la Société, la lettre suivante. L'auteur, qui signe Dr Laupts, pen
dant une résidence en Algérie et en Tunisie de trente-six mois et qui
dure encore, est allé dans toutes les régions de notre colonie. Il est
resté « des semaines entières dans des villages arabes, sans un
seul Européen avec lui ». En raison de ses fonctions, par curiosité
scientifique et par goût, il a été en contact intime, avec « quant
ité d'Arabes, cheiks, caïds, cadis, etc. ». Détail qui a bien de
l'importance, en allant de village en village, en tenue civile, et
souvent sans se faire connaître, il ne s'est jamais exposé à aucune
insulte, à aucune avanie de la part des indigènes.
Voici cette lettre
« Monsieur,
« Vous avez bien voulu, répondre à la note que j'ai publiée
dans la Revue scientifique sur l'assimilation et l'utilisation des
indigènes en Tunisie *. Vous l'avez fait en termes élogieux qui
m'ont fort louché, et vous avez engagé la discussion comme il
convient entre gens qui n'ont qu'un désir : celui de constater et
de dire la vérité. Je ne veux point revenir sur les points qui nous
1 11 septembre 1897. LADPTS. — POPULATIONS DE L'ALGÉRIE ET DE LA TUNISIE 389
peuvent séparer, mais je désire à nouveau, sur certaines ques
tions, préciser ma pensée. Je commence, bien entendu, par vous
assurer de mon entier détachement de tout ce qui peut toucher la
politique, les intérêts des uns ou des autres, les miens propres qui
sont nuls en ce pays.
« Nous causerons en gens de science, pour lesquels les mots ara-
bopkobie, arabophilie, n'ont que la valeur indicatrice de passions à
étudier, inaccessibles nous-mêmes à de semblables sentiments, car
ils impliquent souvent blâme ou approbation a priori, car ils nous
portent à interpréter de certaine façon plutôt que d'autre, tels ou tels
phénomènes. Nous étudions des hommes et des groupes d'hommes,
les actions et les réactions de ces et de ces groupes. Nous
ne sommes plus ni Roumis ni Arabes ; nous voulons voir comme
feraient des savants, c'est-à-dire de la façon la plus désintéres
sée; nous sommes gens de laboratoire, et nous n'avons pas plus à
prendre parti, que nous ne devons dans une expérience de chi
mie, porter nos préférences sur tel ou tel élément : le carbone ou
l'oxygène.
« L'étude est fort longue et nécessiterait des volumes. Je ne veux
aujourd'hui que vous présenter quelques observations sur des
points essentiels. Pour rendre plus aisée la lecture d'une note fo
rcément très synthétique, je la divise en paragraphes, dont cha
cun traitera des sujets dont je veux dire quelques mots.
« Les malentendus entre Arabes et Roumis. — La politesse arabe. —
Les mœurs. — Entre le Roumi et l'Arabe, le malentendu est cons
tant; la raison en est qu'ils parlent une langue différente, que
leurs mœurs, leurs idées et leur tournure d'esprit ne se ressem
blent pas. La politesse des Arabes est fort grande et leur forma
lisme rappelle celui de nos paysans de France; il est compliqué
et implique de longs préliminaires. Reçu par un Arabe, vous de
vrez accepter ce qui vous est offert; encore faut-il savoir que dans
bien des maisons il est de bon ton de commencer par un refus l
éger et poli, et de n'accepter qu'à la deuxième invitation. Sur la
route, les « salemalecs » sont indispensables. Le Roumi qui
passe, surtout s'il est d'éducation et de culture médiocres, se sou
cie extrêmement peu de ces procédés. Il ne salue pas, et souvent
ne rend pas le salut ; s'il demande un renseignement, c'est bruta
lement, sans échange préalable de politesses, en langue euro
péenne ou dans un arabe inintelligible. L'Arabe est balourd, il est
lent, il ne comprend pas; l'impolitesse le choque, il hésite, il 21 juillet 1898 390
prend un air stupide ; ici interviennent l'insulte, parfois la cra
vache ou la matraque (I). Le Roumi s'éloigne furieux en déclarant
que l'Arabe est la dernière des brutes. Cette scène est infiniment
fréquente ; elle témoigne que l'Arabe a l'intelligence lente et que
l'Européen fait preuve d'un manque absolu de connaissance des
populations indigènes, souvent de bon sens et de faculté d'obser
vation.
« Les mœurs européennes sont, pour l'Arabe, un sujet de scan
dale; cependant, partout où un Roumi s'est montré juste, ferme,
— fût-il dur, — d'une dignité de vie parfaite et de mœurs irrépro
chables, il a acquis sur les indigènes une influence considé
rable. Ainsi s'explique que, dans des villages reculés, des agents
subalternes ont quelquefois une autorité que pourraient envier des
personnages beaucoup plus puissants. Le Coran n'est pas plus in
tolérant que tel autre code religieux, peut-être moins. Pour
l'Arabe, le Roumi., qui atteint à la sainteié ou fait preuve de hautes
qualités morales, est un marabout; c'est un marabout de secte
dissidente, disciple de Christ, un de leurs prophètes. Ils se sou
mettront à l'autorité de l'homme juste et charitable. Dans bien des
campagnes françaises, un homme vertueux, s'il n'est point catho
lique d'origine, aura bien du mal à désarmer les préjugés amass
és contre lui.
« L'indigène tunisien est docile; il est malléable; il est souvent
difficile de lui donner à entendre ce que l'on exige de lui; il faut
de la patience et de la fermeté. C'est tout le secret du succès de
ceux qui « se donnent la peine » de se faire comprendre
« Les mœurs tunisiennes sont douces; elles ne sont pas toujours
pures; en certaines villes, dans beaucoup d'oasis, la pédérastie est
fréquente; mais elle se cache.
« En règle générale la pudeur de l'Arabe dépasse toute ima
gination; l'Arabe est un pharisien; il tient beaucoup à l'appa
rence extérieure; ce sentiment bannit entre parents certains su
jets de conversation, cache comme choses honteuses non seul
ement les actes de la reproduction, mais encore les phénomènes
physiologiques répugnants. Aussi les Latins, chez lesquels cette
pudibonderie n'existe pas, et dont l'esprit est naturellement porté
à plaisanter ce qui est malpropre (à preuve le succès d'auteurs
comme Armand Sylvestre), choquent et blessent souvent l'Arabe.
« Des fonctionnaires, désignés pour commander en des provinces
importantes, ont montré, au siège de leur résidence, des femmes — POPULATIONS DE L'ALGÉRIE ET DE LA TUNISIE ÏJW LAtJPTS.
auxquelles, au vu et au su de tous, ils obéissaient, et dont la mise
excentrique et les mœurs ultra-légères choquaient même les Euro
péens. Ils furent tôt déconsidérés, méprisés.
« Bien des Européens, en conversant avec des indigènes, ne se
doutent point de la répulsion et du dégoût que certains de leurs
propos, certaines de leurs questions, certains de leurs actes, et
non point leur religion, inspirent à leurs interlocuteurs.
« L'Européen auquel on fait ces remarques répond qu&

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