Mesures des pauvretés et de l appauvrissement   - article ; n°142 ; vol.36, pg 257-278
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Mesures des pauvretés et de l'appauvrissement - article ; n°142 ; vol.36, pg 257-278

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Description

Tiers-Monde - Année 1995 - Volume 36 - Numéro 142 - Pages 257-278
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pierre Salama
Jacques Valier
Mesures des pauvretés et de l'appauvrissement
In: Tiers-Monde. 1995, tome 36 n°142. pp. 257-278.
Citer ce document / Cite this document :
Salama Pierre, Valier Jacques. Mesures des pauvretés et de l'appauvrissement . In: Tiers-Monde. 1995, tome 36 n°142. pp.
257-278.
doi : 10.3406/tiers.1995.5762
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1995_num_36_142_5762MESURES DES PAUVRETES
ET DE L'APPAUVRISSEMENT1
par P. Salama et J. Valier2
La pauvreté dans le Tiers Monde est l'objet depuis cinq à six ans de
nombreuses publications, où est discutée la relation entre les politiques
d'ajustement et l'appauvrissement des diverses couches de la population
de ces pays. Hier, il était quelque peu iconoclaste d'analyser les liens
entre le service de la dette extérieure et le développement de la misère.
Certains le firent3, mais ils furent peu nombreux, la majorité préférant se
pencher sur les « cauchemars des banquiers » devant la forte probabilité
que les pays en voie de développement ne puissent honorer leurs dettes.
L'évolution des inégalités dans l'ensemble des Etats du Tiers Monde,
l'augmentation de la pauvreté extrême dans la plupart sont telles
aujourd'hui, après une décennie de plans d'ajustement, qu'on ne peut
échapper à cette interrogation sur les relations entre ces politiques et de l'appauvrissement.
Les mots « appauvrissement », « enrichissement », « pauvres »,
« riches », peuvent être trompeurs. On qualifiera ainsi d'appauvrisse
ment, et à l'inverse d'enrichissement, une situation qui évolue dans un
sens négatif (positif) quel que soit le niveau de revenus. L'amélioration
de la situation des plus pauvres ne correspond pourtant pas à un enri
chissement mais simplement à des difficultés moins grandes pour vivre
décemment. Il y a quelque outrecuidance à parler ď « enrichissement »
dans ce cas. De même Û est mal venu de d'appauvrissement des
couches moyennes et supérieures du fait de la crise ou de l'inflation.
Mieux vaudrait utiliser un terme plus neutre comme dégradation (rela-
1 . Le texte qui suit est, pour partie, une reprise actualisée du chapitre 1 de notre Uvre intitulé : Pauvretés
et inégalités des revenus dans le Tiers Monde, édité aux Editions La Découverte en 1994.
2. GREITD-CEDI, Paris XIII et GREITD, Paris X.
3. Dont nous-mêmes, dans un article intitulé « Endettement et disette urbaine », voir P. Salama (1983).
Revue Tiers Monde, t. XXXVI, n° 142, avril-juin 1995 258 P. Salama et J. Valier
tive) du niveau de vie1. Les termes « pauvres » et « riches » ont de telles
connotations qu'il vaut mieux également se référer à la définition la plus
objective qui soit, fût-elle quelque peu réductrice, pour traduire les
niveaux de vie, les rendre comparables dans le temps et dans l'espace.
LES ÉVOLUTIONS MESURÉES DE LA PAUVRETÉ
La pauvreté est distincte de l'appauvrissement : le premier terme
désigne les conditions sociales de reproduction des individus, le second
les conditions de vie de ces individus. Quand bien même ils peuvent être
parfois ressentis avec la même intensité par les personnes concernées, il
convient de les distinguer afin de les mesurer. Nous présenterons ici les
études menées à partir de mesures dites indirectes de la pauvreté, selon
la terminologie de Sen, et nous traiterons dans la section suivante celles
menées en terme de « nécessités de base insatisfaites », dites directes.
Ligne de pauvreté, ligne d'indigence
Dans l'approche statistique classique, définir la pauvreté revient à
déterminer des seuils de revenu : on parlera de pauvreté pour les revenus
inférieurs à la ligne de pauvreté, et de pauvreté extrême en dessous de la
ligne d'indigence. La détermination de ces lignes, bien que difficiles à cons
truire (elles nécessitent des enquêtes très lourdes), obéit à des principes
simples. Il s'agit, d'abord, de déterminer quel est le panier de biens néces
saires à la stricte reproduction de l'individu (ou du ménage). On calcule
donc le nombre de calories nécessaires à la survie qu'on convertit en une
série de biens d'alimentation liés aux coutumes alimentaires de l'ensemble
de la population2. Une fois ces biens définis, on les convertit en argent. Le
prix utilisé est différent du niveau général des prix ou de tout autre indice
de prix, dans la mesure où il reflète la composition du panier. La somme
d'argent nécessaire pour acheter ces biens définit la ligne d'indigence. Une
fois obtenue cette ligne, on lui applique un multiplicateur dit d'Engel pour
1 . Le sentiment d'être devenu pauvre, ou plus pauvre, modifie les comportements ; l'épargne est alors
souvent moins importante, sauf si l'appauvri considère que le futur pourrait être pire que le présent déjà dif
ficile ; le patrimoine est partiellement liquidé lorsqu'il existe. Dans ce sens, voir M. Haubert (1987), chap. 2.
2. La population concernée n'est pas limitée aux seuls pauvres afin d'éviter de ne tenir compte que des
biens qu'ils peuvent se procurer en raison de leur faible revenu. Si on avait limité la population enquêtée aux
seuls pauvres, on aurait défini la pauvreté, et les pauvres, par rapport aux pauvres. Notons que certaines
enquêtes (celles faites par la COPLAMAR au Mexique par exemple) cherchent à déterminer le panier de
consommation en se référant aux goûts des ménages qui se situent au septième décile de revenu (S. Levy,
1994). Mesures des pauvretés et de l'appauvrissement 259
tenir compte des dépenses nécessaires en habillement, transport, loge
ment, et on obtient la ligne de pauvreté, réservant le terme de ligne d'indi
gence pour le revenu nécessaire à la reproduction exclusivement « calo
rique » de l'individu. On élargit au besoin cette ligne de pauvreté (et la
ligne d'indigence) au foyer en appliquant des coefficients de réduction
pour les membres de la famille au-delà et surtout en deçà d'un certain âge
(10 ans ou 12 ans selon les enquêtes).
Lorsqu'on cherche à comparer les niveaux de pauvreté selon les
pays, il convient d'homogénéiser les données sur plusieurs points. Le
nombre de calories requis doit être le même, le coefficient d'Engel per
mettant de construire la ligne de pauvreté doit être identique. De plus, il
est évident qu'une devise clé n'a pas le même pouvoir d'achat dans
chaque pays et que par conséquent le taux de change officiel ne peut être
utilisé pour convertir le revenu monétaire délimitant la ligne de pauvreté
pour établir une comparaison internationale1. Il faut donc utiliser un
taux de change, dit de parité de pouvoir d'achat, ce qui alourdit encore
plus les calculs.
L'indicateur de pauvreté le plus simple est le rapport entre le nombre
de pauvres (ou de foyers pauvres) et le nombre d'habitants (ou de foyers),
soit H = qln. Cet indicateur connaît des limites tenant à la manière dont il
est construit2. Certaines peuvent être dépassées, d'autres non (voir encad
ré). En tant que tel, il conserve cependant une grande utilité.
On observe que la pauvreté est très importante dans les pays d'Asie du
Sud, également en Afrique subsaharienne, importante en Afrique du
Nord, plus faible en Amérique latine et qu'elle est relativement faible en
Asie de l'Est.
La comparaison des colonnes est instructive. L'Asie du Sud (dont
l'Inde) compte presque 30 % de la population considérée ici (pays en
voie de développement dont l'Europe de l'Est), mais plus de la moitié de
ses pauvres, et a un indicateur de pauvreté très élevé. L'Asie de l'Est
(dont la Chine) compte 40,2 % de la population mais seulement 17,3 %
de ses pauvres et a un de relativement bas. L'Amér
ique latine est relativement peu peuplée (11,2 %), ses pauvres sont en
proportion moins nombreux puisqu'ils ne représentent que 8,3 % de
l'ensemble des pauvres, son indicateur de pauvreté est cependant relati-
1 . Un exemple suffira : 10 000 yens permettent d'acheter 14 kg de riz au Japon mais 298 kg en Chine.
La même somme permet d'acquérir 80 1 d'essence au Japon et 379 1 en Chine. L'écart est important ma

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