Romantisme - Année 1996 - Volume 26 - Numéro 94 - Pages 111-124Dans l'espace littéraire hybride où les médecins fin-de-siècle échangent leur scalpel contre la plume, l'article révèle le chevauchement des modes médicaux et littéraires chez Paul Abaur, Pol Demade, Georges Camuset et le Dr. E. Monin. La manière dont romantiques et décadents interprètent les gravures de Pieter Brueghel La Cuisine maigre et La Cuisine grasse {Les Gras et Les Maigres) est examinée pour montrer comment l'allégorie morale, sociale et politique s'associe au motif humoristique de l'« obésité » de la littérature et de la Muse afin de prescrire un régime agressivement médicalisé d'esthétique et de poétique « décharnées ». La Décadence traite les textes comme des corps enflés, visités, cautérisés ou charcutés. Ce principe anatomique est illustré par les modifications imposées par Jean-Louis Dubut de Laforest à six de ses nouvelles, publiées à l'origine comme des « contes » et retravaillées afin de servir les exigences pseudo-scientifiques de sa Pathologie sociale (1897). Textes et images servent ainsi à faire la publicité de comprimés et de pommades, préparations capiteuses qui font de lire et de regarder des exercices physiologiques éprouvants et libérateurs. In a hybrid poetic arena where fin-de-siecle medics swap their scapel for a pen, the article reveals the perpetual overlapping of medical and literary habits in the work of Paul Abaur, Pol Demade, Georges Camuset and Dr. E. Monin. The manner in which romantic and fin-de-siecle writers interpret Pieter Brueghel's etchings The Poor (or Meagre, or Hungry) Kitchen and the Rich (or Opulent, or Fat) Kitchen is developed to show how the moral, social and political allegory combines with humoresque motifs regarding the obesity of literature and her muse, finally prescribing an agressively medicalised diet of prevalently skinny esthetics and poetics. Decadence treats texts as swollen bodies, examined, cauterised and sawn up. This anatomical principle is illustrated by Jean-Louis Dubut de Laforest's alterations to six short stories, first published as tales , and republished to serve the pseudo-scientific requirements of his Pathologie sociale (1897). Hence the discovery that texts and images also serve to advertise medicines, pills and ointments in a heady conconction whereby reading a story is tantamount to drinking a philtre and provides equal relief. 14 pages Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.