Notes sur les langues artificielles au XIXe siècle - article ; n°25 ; vol.9, pg 179-189
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Notes sur les langues artificielles au XIXe siècle - article ; n°25 ; vol.9, pg 179-189

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Description

Romantisme - Année 1979 - Volume 9 - Numéro 25 - Pages 179-189
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 17
Langue Français

Extrait

Charles Porset
Notes sur les langues artificielles au XIXe siècle
In: Romantisme, 1979, n°25-26. pp. 179-189.
Citer ce document / Cite this document :
Porset Charles. Notes sur les langues artificielles au XIXe siècle. In: Romantisme, 1979, n°25-26. pp. 179-189.
doi : 10.3406/roman.1979.5280
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1979_num_9_25_5280Charles PORSET
Notes sur les langues artificielles au xix* siècle
1. On se souvient que, dans une lettre fameuse, Descartes avait
soutenu que l'invention d'une langue artificielle dépendait de la vraie
philosophie et supposait pour passer dans les faits « que tout le monde
ne fût qu'un paradis terrestre, ce qui, ajoutait-il, n'est bon à proposer
que dans le pays des romans ». On sait aussi que Leibniz, pourtant
prévenu, ne renonça pas à cette chimère malgré quelques essais tardifs
de simplification des langues naturelles (du latin en particulier) ; c'est
ainsi qu'il pouvait écrire aux environs de 1679 :
« Quoyque cette langue dépende de la vraye philosophie, elle ne dépend
pas de sa perfection. C'est-à-dire cette langue peut estre établie, quoyque
la philosophie ne soit pas parfaite : et à mesure que la science des hommes
croistra, cette langue croistra aussi. En attendant elle sera d'un secours
merveilleux et pour se servir de ce que nous sçavons, et pour voir ce qui
nous manque, et pour inventer les moyens d'y arriver, mais sur tout pour
exterminer les controverses dans les matières qui dépendent du raisonne
ment. Car alors raisonner et calculer sera la même chose. » ({Opuscules et
fragments inédits extraits de la bibliothèque Royale de Hanovre par Louis
Couturat. Paris, 1903 ; Hildesheim, 1966, p. 28).
Si, par certains côtés, on développe au xvin* siècle le projet
leibnizien d'une langue universelle qui reprendrait le noyau rationnel
des langues naturelles, on paraît cependant renoncer à la lingua philo
sophica même lorsque à l'instar des idéologues on se propose de
constituer une langue parfaite. L'on sait maintenant « que toute idée
d'appliquer aux sciences mixtes les expressions numériques, ou les
procédés de l'algèbre, ne saurait être qu'une chimère. » (De Gérando,
Des signes et de l'art de penser, Paris, 1800, IV, 562, cité par J. Knowlson,
Universal Languags Schemes in England and France 1600-1800, Toronto,
1975, p. 189 ; voir également G. Gusdorf, Les sciences humaines et la
pensée occidentale, VIII [Paris, Payot, 1978], p. 414 qui, après avoir
cité des réflexions de Destutt de Tracy sur le projet de de Maimieux,
commente : « II existe dans les langues des éléments non rationnels,
impossibles à résorber entièrement. C'est pourquoi Tracy estime qu'il
vaudrait mieux adopter comme langue internationale le grec ou le 180 Charles Porset
latin, en corrigeant principalement les principales irrégularités. L'une
des tâches de l'idéologie est d'ailleurs de travailler à la normalisation
des idiomes existants ».)
C'était déjà, du reste, l'attitude de Maupertuis (Dissertation sur
les différents moyens dont les hommes se sont servis pour exprimer
leurs idées [1754], § XXXV: «On a donc souhaité dans ces derniers
temps non de ramener toutes les nations à ne parler qu'une même
langue ; la chose est visiblement impossible ; mais de former une nouvelle dans laquelle toutes les nations pussent s'entendre. »),
ou de Faiguet, « trésorier de France », à qui l'on doit l'article Langue
Nouvelle qu'on trouve dans l'Encyclopédie, IX, [1765], 268-271 a.
« Mon dessein, écrit Faiguet, n'est pas [...] de former un langage universel
à l'usage de plusieurs nations. Cette entreprise ne peut convenir qu'aux
Académies savantes que nous avons en Europe, supposé encore qu'elles
travaillassent de concert et sous les auspices des puissances. J'indique
seulement aux curieux un langage laconique et simple que l'on saisit
d'abord, et qui peut être varié à l'infini ; langage enfin avec lequel on est
bientôt en état de parler et d'écrire, de manière à n'être entendu que par
ceux qui en auront la clé. »
On ne s'étendra pas sur cette langue qui pourtant, ainsi que certains
critiques l'ont indiqué, n'est pas sans rappeler la plupart des procédés
que l'espéranto systématisera ; on se bornera à observer qu'elle est
un des projets les plus complets de langue auxiliaire a posteriori,
c'est-à-dire partant d'éléments empruntés à une langue naturelle, avec,
il faut le dire, le projet de latin simplifié d'un certain Carpophorophilus
qui date de 1734.
2. Au xixe siècle on voit se développer, et pulluler bientôt, ces
systèmes a posteriori ; Couturat et Léau, qui en ont écrit l'histoire
(Histoire de la langue universelle, Paris, 1903 ; Les Nouvelles langues
universelles, Paris, 1907) en dénombrent :
— 25 principaux entièrement a posteriori : la Communications-
sprache de Shipfer (1839); la Pantos-dîmou-glossa de L. de Rudelle
(1858); VUniversal-Sprache de Pirro (1868); la Weltsprache de Volk
et Fuchs (1883) ; la Langue néo-latine de Courtonne (1885), la Pasilingua,
de Steiner, la Weltsprache de Eichhorn (1887), l'Espéranto de Zamenhof
(1887), les projets de l'American Philosophical Society (1887-1888), la
Lingua Franca Nuova de Bernhard (1888), le Kosmos de Lauda (1888),
la Lingua (1888) et le Latinesce de Henderson, l'Anglo-Franca, de P.
Hoinix (1889), la Myrana de Stempfl (1889) et, du même, la Communia
(1894), le Nov-Latin du Dr Rosa (1890), la Mundolingue de J. Lott (1890),
la Langue catholique de Liptay VAnti-Volapûk de Mill (1893),
l'Universala de Heintzeler (1893), le Novilatiin de Beermann (1895), le
Nuove-Roman de Puchner (1897), la Lingua Komun de Kurschner (1900),
Y Idiom Neutral de l'Akademi international de lingu universal (1902),
de Latino sine flexione de Peano (1902).
— 12 qu'ils qualifient de mixtes parce qu'en effet ils contiennent
un certain nombre d'éléments a priori : en 1860 le Programme de J.
von Grimm, le Volapuk de Schleyer (1880), le Nal Bino de Verheggen
(1886), l'imitation du Volapuk de Ch. Menet (1886),, le Bopal de St.
de Max (1887), le Spelin de Bauer (1888), le DU de Fieweger (1893), le
Balta de Dormoy (1893), l'Orba de Guardiola (1893), le Veltparl de
W. von Arnim (1896), le Dilpok de Marchand (1898), la Langue Bleue
de Bollack (1899). sur la langue artificielle au XIX* siècle 181 Notes
— et une dizaine entièrement a priori, dont: le Solresol de Sudre
(1817), le projet de Grosselin (1836), la Langue Universelle analytique
de Vidal, les projets de Letellier (1852), de Sotos Ochando (1852), la
Lingualumina de Dyer (1875), la Langue internationale étymologique
de Reimann (1877), la Langue naturelle de Maldant (1887), le Spokil
de Nicolas, la Zahlensprache de Hilbe (1901) et la Vôlkerverkerhrs-
sprache de Dietrich (1902).
Ce qui frappe, lorsqu'on parcourt cette liste c'est le nombre rela
tivement réduit d'essais a priori, alors qu'aux époques antérieures ils
représentaient l'essentiel des projets ; c'est aussi leur concentration
en fin de siècle. On s'est demandé ce qui avait pu conduire les
linguistes dans les voies encombrées de l'a posteriorisme et pousser à
la constitution de systèmes aussi bizarres — car, à première vue, on
ne voit pas bien le rapport entre la Sténographie de Vidal et le romant
isme déclaré du Cromwell de Hugo, non plus qu'entre le volapuk
et les Dieux antiques de Mallarmé (sauf, peut-être à considérer que
Mallarmé écrivait en volapuk...). Alessandro Bausani, à qui l'on doit un
travail très stimulant sur les langues universelles (Geheim- und
Universalsprachen : Entwicklung und Typologie. Stuttgart, Kolhammer,
1970, traduit en italien sous le titre Le Lingue inventate, Rome, Ubaldini,
1974), fait observer que cette conjonction ne peut surprendre que
ceux qui considèrent que les langues auxiliaires inventées sont « qual-
cosa di astratto e illuministico » (p. 116), au lieu qu'elles ne sont que
le prétexte « d'un puro gioco creativo verbigerante » (id.).
Pour s'en expliquer A. Bausani nous renvoie à la première partie
de son ouvrage consacrée à l'invention linguistique. En voici les
grandes lignes: trop souvent on ne retient du langage que sa fonction
de communication, alors que la langue couvre un domaine immense
dont la pure expression et la rela

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