Pourquoi les pays en voie de développement ont-ils des rythmes de croissance aussi différents ? Un survol critique de quelques orthodoxies contemporaines - article ; n°129 ; vol.33, pg 31-66
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Pourquoi les pays en voie de développement ont-ils des rythmes de croissance aussi différents ? Un survol critique de quelques orthodoxies contemporaines - article ; n°129 ; vol.33, pg 31-66

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Description

Tiers-Monde - Année 1992 - Volume 33 - Numéro 129 - Pages 31-66
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Gérard Grellet
Pourquoi les pays en voie de développement ont-ils des rythmes
de croissance aussi différents ? Un survol critique de quelques
orthodoxies contemporaines
In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°129. La fin des hyperinflations en Amérique latine. pp. 31-66.
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Grellet Gérard. Pourquoi les pays en voie de développement ont-ils des rythmes de croissance aussi différents ? Un survol
critique de quelques orthodoxies contemporaines. In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°129. La fin des hyperinflations en
Amérique latine. pp. 31-66.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1992_num_33_129_4672POURQUOI LES PAYS
EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT
ONT-ILS DES RYTHMES DE CROISSANCE
AUSSI DIFFÉRENTS ?
Un survol critique
de quelques orthodoxies contemporaines
par Gérard Grellet
Quae nocent decent
Ce que l'on entend par théorie du développement cherche à répon
dre à trois questions :
1 / Pourquoi sommes-nous si riches et les pays du Sud si pauvres ?
2 / Comment expliquer que les pays du Sud aient des taux de crois
sance de leur production et de leur bien-être différents ?
3 / Que faire ? Quelles stratégies adopter ?
La théorie du développement n'a guère répondu à la première ques
tion si l'on excepte la théorie des facteurs de production (« ils sont si
pauvres parce que leur environnement naturel est si pauvre ») qui
aujourd'hui ne convainc plus grand monde (le Brésil, le Zaïre, voire la
Jamaïque disposent de davantage de ressources naturelles que le Japon)
et la théorie dite de la dépendance (« ils sont pauvres parce que exploit
és ; nous sommes riches parce que exploiteurs »), théorie qui n'explique
toutefois ni pourquoi des pays « aux taux d'exploitation comparables »
— disons le Ghana et la Côte-d'Ivoire — connaissent des taux de déve
loppement divergents, ni pourquoi certains pays sont plus dépendants
que d'autres.
Remarquons d'autre part que la troisième question ne découle pas
nécessairement de la seconde. Même si nous savions pourquoi un pays
Revue Tiers Monde, t. XXXIII, n° 129, janvier-mars 1992 32 Gérard Grellet
a connu un développement plus rapide que son voisin, ceci n'implique
pas nécessairement que la stratégie du premier doive être adoptée par le
second. D'une part en effet les conditions socio-économiques sont rar
ement transposables d'un pays à l'autre ; d'autre part les conditions pas
sées dans lesquelles les stratégies ont été mises en œuvre ne se reprodui
ront sans doute pas. En d'autres termes, la seconde question relève de
l'Histoire alors que la troisième du futur. Nombre de pays ont ainsi
appris à leurs dépens qu'il ne suffisait pas pendant les années 80 de sui
vre la stratégie que la Corée du Sud a mise en œuvre dans les années 60
pour connaître un développement similaire.
Dans ce travail nous examinerons les réponses qui ont été apportées
par la théorie économique pendant les années 80 à la seconde question :
comment expliquer les larges différences entre les taux de croissance
dans les pays du Sud ? Un des intérêts que l'on peut porter à cette ques
tion est que l'évolution des pays du Sud dans la seconde moitié
du XXe siècle a régulièrement ridiculisé les prévisions des économistes.
L'on constate en effet que ce sont des petits pays sans ressources
naturelles et surpeuplés comme Singapour et la Corée du Sud qui ont
connu les taux de croissance les plus élevés alors que des pays richement
dotés en matières premières et bénéficiant de transferts importants de
capitaux comme le Zaïre, le Brésil et l'Argentine ont connu des crises
économiques récurrentes et ont vu s'appauvrir une large partie de leur
population.
Quelles sont les causes de la croissance des jeunes nations ? Pour
répondre à cette question a été élaboré pendant les années 50 ce que
nous appellerons l'orthodoxie indépendantiste du développement. Cette
orthodoxie qui définissait le développement à partir de la rupture avec
les liens de dépendance néo-coloniale a servi de mythe économique fon
dateur du début des années 50 à la fin des années 60 dans des pays aussi
différents que l'Inde de Nehru, la Chine de Mao Tsé-toung, l'Egypte
nassérienne ou le Ghana de Nkrumah. A partir des années 70 il est tou
tefois devenu de plus en plus évident que cette ancienne orthodoxie se
soldait par un échec global alors que quelques-uns des pays qui ne
l'avaient pas mis en œuvre comme la Corée du Sud ou Taiwan connais
saient des réussites remarquables. Ce que nous appellerons la nouvelle
orthodoxie explicative du développement, élaborée pendant les
années 80 a été établi dans une large mesure pour expliquer cet échec
historique.
Toutefois l'opposition entre ces deux orthodoxies repose sur une
ambiguïté, celle de la définition du développement. L'on peut en effet
considérer que les explications du développement divergent parce que Survol critique de quelques orthodoxies contemporaines 33
tous les économistes ne sont pas d'accord sur ce qu'est le développement
dès lors que celui-ci est considéré comme quelque chose d'autre que la
croissance du pnb et prend en compte des valeurs éthiques comme
l'indépendance nationale, l'égalité sociale, le droit de choisir la taille de
sa famille ou de pouvoir s'exprimer librement.
En fait la question n'est pas tant de savoir si tel ou tel critère du
développement doit être retenu — il s'agit d'un débat éthique sur lequel
chacun peut avoir son opinion — que de savoir qui va décider des
objectifs du développement.
Une première conception, que nous rattacherons dans une large
mesure à l'ancienne orthodoxie, est de supposer qu'existe une fonction
de préférence sociale objective qui permette d'expliciter et de hiérarchi
ser les différents objectifs du développement et d'en effectuer la mesure.
Il appartiendrait alors à l'Etat de mettre en œuvre des stratégies capa
bles d'atteindre ces objectifs.
Selon la seconde conception de tradition libérale une telle fonction
n'a pas de sens et est socialement pernicieuse puisqu'elle se substituerait
aux préférences des agents. Il est donc préférable que ceux-ci s'expr
iment directement, le marché étant considéré comme le lieu le plus adé
quat pour une telle coordination sociale.
Plus fondamentalement ces deux façons de définir le développement
renvoient à deux conceptions de l'homme des pays du Sud. Selon la
première conception il serait ignorant et exploité et ce serait la tâche des
économistes et des responsables politiques « éclairés » de le transformer.
Selon la seconde conception les agents économiques seraient les seuls qui
puissent décider de leur propre intérêt et le développement pourrait alors
être défini comme « l'expansion de ce dont les gens sont capables »l. Entre
ces deux conceptions il est difficile d'intercaler des positions intermédiaires.
I - L'ANCIENNE ORTHODOXIE EXPLICATIVE DU DÉVELOPPEMENT
Les paradigmes économiques ne sont pas neutres en ce sens qu'ils
reflètent à la fois des éléments idéologiques ou politiques, des éléments
analytiques souvent tirés d'autres disciplines et Г « expérience de l'His
toire » dans la mesure où celle-ci a un sens.
La dimension politique de l'ancienne orthodoxie a été la notion
1 . Selon l'expression d'A. Sen dans une allocution devant la Development Studies Association
en 1982. 34 Gérard Grellet
d'Etat indépendant. La logique politique exigeait alors que le sous-
développement soit expliqué par la dépendance coloniale ou néo
coloniale. Toute stratégie de développement devait alors se fixer pour
objectif l'autonomie progressive de l'appareil productif, voire la rupture
avec le marché mondial.
Pour comprendre la dimension analytique de l'ancien paradigme il
convient de revenir à l'état de la science économique des années 50,
alors largement marqué à la fois par la pensée keynésienne et par la
théorie néo-classique de la croissance. De la les anal
ystes du développement retinren

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