Quartiers périphériques et mutations urbaines - article ; n°4 ; vol.6, pg 285-298
17 pages
Français

Quartiers périphériques et mutations urbaines - article ; n°4 ; vol.6, pg 285-298

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
17 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Méditerranée - Année 1965 - Volume 6 - Numéro 4 - Pages 285-298
14 pages

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Michel Coquery
Quartiers périphériques et mutations urbaines
In: Méditerranée, 6e année, N°4, 1965. pp. 285-298.
Citer ce document / Cite this document :
Coquery Michel. Quartiers périphériques et mutations urbaines. In: Méditerranée, 6e année, N°4, 1965. pp. 285-298.
doi : 10.3406/medit.1965.1175
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medit_0025-8296_1965_num_6_4_1175QUARTIERS PERIPHERIQUES
ET MUTATIONS URBAINES :
LE CAS D'ORAN (ALGÉRIE)
Comme la plupart des villes du Maghreb, Oran a connu dans la
période contemporaine un accroissement spectaculaire de sa populat
ion qui, dépassant 400 000 habitants en 1961, a pratiquement doublé
en vingt ans. Si l'élément européen ou assimilé, longtemps prédomin
ant, s'est lui-même renforcé jusqu'à cette date, l'afflux de ruraux
et les fortes natalités ont déterminé une poussée plus rapide encore
de la population d'origine musulmane (cf. figure 1).
L'arrivée de populations déshéritées, venues de campagnes en
crise où régnaient le chômage et l'insécurité, accentua les contrastes
d'une morphologie urbaine déjà soumise à des forces contradictoires.
La ville s'étendit d'une façon désordonnée, dans un contexte alourdi
par le déclenchement de l'insurrection de novembre 1954. Certes,
pendant de longues périodes, Oran put donner l'impression de
rester à l'écart des événements et même offrir le spectacle d'une
activité accrue sinon d'une relative prospérité. Cette impression,
ressentie surtout par les Européens, assez peu inquiets et maîtres
de la ville jusqu'en 1960, masquait cependant la réalité. Le réveil
fut brutal. Les troubles de 1955-1956, violents mais localisés à certains
quartiers, ne furent qu'un épisode par rapport au drame sanglant
qui secoua la ville entière en 1961-1962. La fin de la guerre d'Algérie
et l'indépendance furent marquées, comme on sait, par le départ
massif des Européens, mais aussi par une recrudescence de l'exode
rural et par le retour ou la venue de nombreux réfugiés.
Il est sans doute difficile de chiffrer de façon rigoureuse ces
divers mouvements ; il peut paraître prématuré d'en tenter l'analyse.
Le géographe doit-il pour autant s'abstenir de rendre compte des
mutations urbaines originales, rapides et sans précédents, obser- 286 MICHEL COQUERY
milliers
d'hab.
400
Agglomération
d'ORAN
300
Fig. 1. — L'évolution de la population oranaise (1886-1964).
vables à Oran, (1) dans le contexte plus général d'une décolo
nisation difficile ?
1. Population et morphologie urbaines à la veille du cessez-le-jeu.
Les étapes successives de la croissance d'Oran sont assez bien
connues et se lisent dans le paysage urbain lui-même (2). Alors que
la courbe de la population européenne apparaît régulièrement ascen
dante depuis la fin du xixe siècle, avec une seule rupture, dans le
sens de l'accélération à partir de 1956, celle de la population mu
sulmane, quasi étale jusqu'au lendemain de la première guerre
mondiale, bondit assez rapidement à partir de 1930 et connaît une
accélération effrénée à partir de 1956-1957. C'est ainsi qu'Oran, ville
européenne pour plus des 4/5 de sa population jusqu'en 1930, vit
(1) Cet article fait suite à un séjour d'un an à Oran en 1959-1960 et à une mission
subventionnée par le C.N.R.S. en septembre 1963. Il reprend le texte d'une communic
ation au Congrès International de Géographie (Londres, juillet 1964).
(2) Cf. bibliographie ; figures 1 et 2, cliché 1. PÉRIPHÉRIQUES ET MUTATIONS URBAINES 287 QUARTIERS
B
Fie. 2. — ORAN à la veille de l'indépendance : morphologie urbaine et population.
1. limites de la commune d'Oran. - 2. limites de l'espace urbanisé. - 3. prin
cipaux axes routiers. - 4. voie ferrée. - 5. zones portuaire et industrielle. -
6. emprises militaires. - 7. parc municipal.
A. Quartiers européens. — a) anciens et densément peuplés. Tissu urbain serré ;
b) quartier juif (I) ; c) tissu urbain périphérique plus lâche (pavillons, habitat
individuel largement prédominant) ; d) réaménagement (front de mer) et grands
immeubles collectifs récents) ; e) cimetière (Tamashouet) ; f) hôpital civil.
B. Quartiers algériens. — a) très densément peuplés : intégrés à la trame
urbaine organisée (Ville Nouvelle, Lamur, Victor-Hugo) ou spontanés (Planteurs) ;
b) Médina Jdida (Ville Nouvelle) ; c) spontanés en « dur », mais relativement
desserrés ; d) spontanés, de type bidonville. 288 MICHEL COQUERY
cette proportion s'amenuiser progressivement aux 3/4 en 1936, aux
2/3 en 1948. En 1960, les deux courbes se rejoignaient, chaque com
munauté comptant plus de 200 000 personnes.
Population (milliers) Indice (base 100 en 1936) Agglomération
d'Oran Européens Européens Musulmans Musulmans
100 1936 156 49 100
1948 174 91 111 185
1954 181 131 116 257
1960 213 220 136 448
1963 350 16 700 25
Durant toute cette période la ville s'est étendue et transformée
selon des processus originaux encore que fréquents en pays à
structures sociales et économiques contrastées.
C'est aux quartiers européens, à leurs annexes portuaires et
industrielles qu'Oran doit ses aspects de grande ville, en l'absence
de médina ou de vieille casbah caractérisées. L'urbanisation, surtout
à partir de 1950, s'est faite de façon aussi spectaculaire qu'impro
visée : l'ébauche de quelques rocades ne peut suffire à définir une
quelconque organisation de l'espace. La difficile élaboration d'un
plan régulateur en 1953 n'a pas résisté aux pressions des spécu
lations foncières et immobilières, dans le contexte d'un reflux sur
Oran de plus-values agricoles et commerciales de type colonial,
renforcées par un afflux de capitaux et d'initiatives, tant privées
que publiques, d'origine métropolitaine après 1954.
En moins de dix ans, la ville a changé de visage. Si le centre
actif (commerce, administration et services) a conservé sa physio
nomie propre, de la place Foch à la place des Victoires, de part
et d'autre du boulevard Clemenceau et des deux grandes rues com
merçantes (rue d'Alsace-Lorraine et rue du Général-Leclerc) , il
s'est profondément modifié sur ses marges nord (entre la rue de la
Vieille-Mosquée et le boulevard du Front-de-Mer) et est (de part
et d'autre du boulevard de Lattre-de-Tassigny, quartier de la nou
velle préfecture). Le front de mer a perdu une à une ses maisons
cossues entourées de jardins et s'est littéralement hérissé d'immeub
les atteignant parfois vingt étages. Cette densification de l'espace
urbain s'est effectuée sans plan d'ensemble, sinon celui d'occuper QUARTIERS PERIPHERIQUES ET MUTATIONS URBAINES 289
au mieux un site de « façade ■» maritime propice aux opérations
immobilières lucratives, comme il est fréquent sur d'autres rives
de la Méditerranée.
Ainsi se sont définis de nouveaux quartiers de résidence aisée
d'une architecture plus tapageuse que celle d'Alger, qu'on voulait
imiter. Il y eut dans les années 50, une véritable fièvre du béton ;
de nombreux immeubles furent entièrement souscrits sur « plan >,
et parfois même revendus avant d'être construits ; les chantiers
s'enchaînèrent et se conditionnèrent mutuellement, au gré de mani
pulations de fonds parfois périlleuses. De vieux oranais cédant à la
mode du logement « grand standing ■», de nombreux européens de
petites villes de l'intérieur, désireux d'affirmer leur ascension sociale
tout en opérant un placement estimé avantageux, acquirent un ou
plusieurs appartements de ce type. Avec l'afflux d'un assez grand
nombre de métropolitains (fonctionnaires, officiers, hommes d'affaires)
les loyers montèrent vite, accentuant une ségrégation sociale déjà
nette.
Plus diffuse, mais non moins spectaculaire apparaît l'extension
auréolaire du tissu urbain périphérique. Au-delà de faubourgs
d'apparence souvent médiocre (Eckmuhl, Sananes, Saint-Eugène, Gam-
betta...) premi

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents