Régicide et Initiation. La limitation des règles et le cycle initiatique dans les monts Mandara (Cameroun, Nigeria) - article ; n°1 ; vol.65, pg 5-34
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Régicide et Initiation. La limitation des règles et le cycle initiatique dans les monts Mandara (Cameroun, Nigeria) - article ; n°1 ; vol.65, pg 5-34

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Journal des africanistes - Année 1995 - Volume 65 - Numéro 1 - Pages 5-34
Régicide et initiation la limitation des règnes et le cycle initiatique dans les monts mandara (Cameroun et nigeria). Françoise Dumas-Champion La corrélation entre le temps du pouvoir royal et le cycle initiatique peut-elle avoir valeur structurale pour expliquer le régicide ? A partir de plusieurs chefferies sacrées des monts Mandara - Mofu-Diamaré, Mofu-Gudur, Mafa, Margi (Sukur et Gulak) - qui ont en commun la fête du taureau-marûry, l'auteur montre que partout où il y a un trait constitutif de la limitation du règne, c'est en relation avec une nouvelle classe d'âge. Si, par exemple, le prince mofu peut avoir un règne long c'est qu'il est à la fois organisateur et acteur du système initiatique. Cette maîtrise sur le temps, il l'exerce tout spécialement en ordonnant la fête du maray - cérémonie du renouveau qui, par la médiation des victimes substitutives, lui permet d'échapper au régicide.
Regicide and initiation temporality of reigns and initiation in the mandara mountains (CAMEROON AND NIGERIA). Françoise Dumas-Champion Does the correlation between the temporality of royal power and the initation cycle provide a structural explanation to regicide ? From the study of several sacred chieftaincies in the Mandara Mountains - Mofu-Diamare, Mofu-Gudur, Mafa, Margi (Sukur and Gulak) -, who all celebrate the bull-maray ceremony, the author infers that whenever a limitation in time of a reign is apparent, it is in relation with a new age group. In effect, if the mofu prince succeeds in having a long reign, it is because he is both organiser and actor in the initiation cycle. In this way he controls time by organising the maray ceremony of renewal, and by the sacrifice of substitute victims, avoiding his own death.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Françoise Dumas-Champion
Régicide et Initiation. La limitation des règles et le cycle
initiatique dans les monts Mandara (Cameroun, Nigeria)
In: Journal des africanistes. 1995, tome 65 fascicule 1. pp. 5-34.
Résumé
Régicide et initiation la limitation des règnes et le cycle initiatique dans les monts mandara (Cameroun et nigeria). Françoise
Dumas-Champion La corrélation entre le temps du pouvoir royal et le cycle initiatique peut-elle avoir valeur structurale pour
expliquer le régicide ? A partir de plusieurs chefferies sacrées des monts Mandara - Mofu-Diamaré, Mofu-Gudur, Mafa, Margi
(Sukur et Gulak) - qui ont en commun la fête du taureau-marûry, l'auteur montre que partout où il y a un trait constitutif de la
limitation du règne, c'est en relation avec une nouvelle classe d'âge. Si, par exemple, le prince mofu peut avoir un règne long
c'est qu'il est à la fois organisateur et acteur du système initiatique. Cette maîtrise sur le temps, il l'exerce tout spécialement en
ordonnant la fête du maray - cérémonie du renouveau qui, par la médiation des victimes substitutives, lui permet d'échapper au
régicide.
Abstract
Regicide and initiation temporality of reigns and initiation in the mandara mountains (CAMEROON AND NIGERIA). Françoise
Dumas-Champion Does the correlation between the temporality of royal power and the initation cycle provide a structural
explanation to regicide ? From the study of several sacred chieftaincies in the Mandara Mountains - Mofu-Diamare, Mofu-Gudur,
Mafa, Margi (Sukur and Gulak) -, who all celebrate the bull-maray ceremony, the author infers that whenever a limitation in time
of a reign is apparent, it is in relation with a new age group. In effect, if the mofu prince succeeds in having a long reign, it is
because he is both organiser and actor in the initiation cycle. In this way he controls time by organising the maray ceremony of
renewal, and by the sacrifice of substitute victims, avoiding his own death.
Citer ce document / Cite this document :
Dumas-Champion Françoise. Régicide et Initiation. La limitation des règles et le cycle initiatique dans les monts Mandara
(Cameroun, Nigeria). In: Journal des africanistes. 1995, tome 65 fascicule 1. pp. 5-34.
doi : 10.3406/jafr.1995.2413
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1995_num_65_1_2413Françoise DUMAS-CHAMPION
Régicide et initiation
Limitation des règnes
et le cycle initiatique dans les monts Mandara
(Cameroun et Nigeria).
Si la question du régicide a été, depuis Frazer, au centre des recherches sur
les royautés sacrées, la corrélation entre la limitation des règnes et le temps in
itiatique a rarement été soulignée par les auteurs ; bien que, dès 1911, Frobenius
ait relevé « la curieuse relation » existant entre la circoncision et le régicide à pro
pos des Daka du Nigeria et des Mundang du Tchad. Il écrivait alors : « l'annonce
de la mort du roi donnait le signal des cérémonies de la circoncision des jeunes
garçons »... « aucun roi ne pouvait survivre à plus d'une période de circoncision
et à l'écoulement sanguin qu'elle provoque »... « le sang qui s'écoulait de la ci
rconcision tuait les rois » (Frobenius 1925/1987). Les Mundang que Frobenius rap
prochait des Daka présentent les mêmes caractéristiques concernant la limitation
du règne. Le nouveau gô de Léré est véritablement intronisé lorsqu'il proclame
l'ouverture d'un camp d'initiation. Abordant ce thème quelques décennies plus
tard, A. Adler écrit : « Quand cette inauguration initiatique prend fin, on peut dire
que c'est déjà pour le roi le commencement de la fin. Il y a et il ne peut y avoir
qu'une seule initiation par règne » (1982 : 376).
La connexion entre le temps du pouvoir royal et le cycle initiatique peut-elle
avoir valeur structurale pour expliquer le régicide ? Ce principe nous servira de fil
directeur pour comprendre la périodicité des règnes dans quelques chefferies
sacrées des monts Mandara, sachant que des enjeux comparables s'y révèlent.
L'exemple des Mofu-Diamaré qui montre une correspondance entre l'intronisation
et l'avènement d'une nouvelle classe d'âge servira de modèle pour examiner le
bien-fondé de cette corrélation, bien qu'il n'y ait ni circoncision ni mise à mort
rituelle du chef. Les incursions que nous mèneront dans les populations voisines,
Mofu-Gudur et Mafa, puis au Nigeria, les Margi de Sukur et de Gulak, nous per
mettront d'apporter des données ethnographiques sur la fête du taureau et les
classes d'âge ou sur d'autres initiations qui serviront de révélateur pour appréhen
der le sens caché du système.
Journal des africanistes 65 (1) 1995 : 5-34 FRANÇOISE DUMAS-CHAMPION
LES MONTS MAND ARA I
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Journal des africanistes 65 (1) 1995 : 5-34 REGICIDE ET INITIATION
LOCALISATION ETHNIQUE: CHAMBA/DAKA
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Journal des africanistes 65 (I) I995 : 5-34 DUMAS-CHAMPION FRANÇOISE
PRÉSENTATION DES SOCIÉTÉS MOFU-DIAMARÉ,
MOFU-GUDUR, MAFA, MARGI (SUKUR ET GULAK)
Ensemble ethnique composite, les Mofu-Diamaré qui se désignent eux-
mêmes comme « les hommes des rochers », parlent six langues différentes et
connaissent des formes de pouvoir contrastées. J.-F. Vincent dénombre une tren
taine d'unités politiques différentes mais seules les grandes chefferies du sud -
celles de Duvangar, Durum et Wazang - sont dirigées par un chef que cet auteur
choisit d'appeler « prince » et non « roi » en raison de l'absence d'un véritable
appareil d'Etat et de la modestie de son territoire. Leurs voisins du sud, les Mofu-
Gudur, récemment différenciés en tant que groupe distinct, selon leur propre
volonté de se présenter comme « un ensemble totalement différent » (Vincent
1991 : 89 note 9), possèdent, outre une langue qui leur est spécifique, une cheffe-
rie sacrée au passé prestigieux qui leur confère une place toute particulière
dans la région. « Une quinzaine d'ethnies revendiquent une origine ou un passa
ge à Gudur : les Giziga, les Mundang, les Gidar, les Hina, les Mofu-Diamaré, les
Daba, les Kapsiki, les Bana, les Gude, les Jimi, les Wula, les Mafa, les Margi, les
Higi. » Redevable à sa situation géographique, Gudur fut le cadre de nombreuses
vagues migratoires (Seignobos 1991 : 225). « Son influence s'étendait jadis larg
ement en plaine, sur les monts Mandara centraux et bien au-delà sur le revers occi
dental, grâce à son relais : Sukur » (Van Beek 1981, cité par Seignobos).
La fondation de Gudur - bien que difficilement datable - remonterait « à la fin
du 16e siècle ou au début du 17e siècle » (Jouaux 1989 : 262). Ce qui nous inté
ressera, c'est le récit étiologique de la conquête du pouvoir par Biya qui possède
les schemes communs aux mythes d'origine en vigueur dans la région :
- le parcours du taureau qui guide le héros jusqu'au lieu de fondation en s'en-
fonçant en terre ;
- le don d'un élément matériel (le sel) et spirituel (les pierres de pluie) grâce
auquel l'étranger obtient la chefferie du chef autochtone (Jouaux 1989 : 263)1.
Originaire du Wandala, Biya devient le successeur du vieux chef de Movo.
Comme dans la plupart des récits de fondation de cette aire culturelle, on retrou
ve l'image du chef qui, à la veille de la mort, est sans héritier - soit parce q

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