Témoignage d un Dyan de Diébougou incorporé dans les troupes coloniales africaines (1898-1901) - article ; n°1 ; vol.68, pg 272-291
21 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Témoignage d'un Dyan de Diébougou incorporé dans les troupes coloniales africaines (1898-1901) - article ; n°1 ; vol.68, pg 272-291

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
21 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Journal des africanistes - Année 1998 - Volume 68 - Numéro 1 - Pages 272-291
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Bé Watara
Témoignage d'un Dyan de Diébougou incorporé dans les
troupes coloniales africaines (1898-1901)
In: Journal des africanistes. 1998, tome 68 fascicule 1-2. pp. 272-291.
Citer ce document / Cite this document :
Watara Bé. Témoignage d'un Dyan de Diébougou incorporé dans les troupes coloniales africaines (1898-1901). In: Journal des
africanistes. 1998, tome 68 fascicule 1-2. pp. 272-291.
doi : 10.3406/jafr.1998.1178
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0399-0346_1998_num_68_1_1178272 Journal des Africanistes
Wuld Habat, Ahmad 1994. Fî ba'di al-ansâb ash-shanqîtiyya, manuscrit
annoté par Lamîn Yahya w. Muhammad, maîtrise, Université de
Nouakchott.
Wuld HâmidÛN, Al-Mukhtâr 1994. Rayât mûrîtâniya : jughrâfiyya, Rabat,
Institut des Etudes Africaines.
Wuld Shakh Sidiyya, Sîdî Baba 1992. Imâratâ Idaw'îsh wa Mashzûf, Etude
et annotation par Izîd Bîh W. Muhammad Mahmûd, Thèse de 3ème cycle,
Université de Nouakchott.
Manuscrits
al-Gasrî. Nawâzil al-Gasrî, Bibliothèque Nationale, Fonds des manuscrits
arabes, 7221, f. l-508v.
al-LamtûnÎ. Muhammad Nbârak. Nazm Muhammad Nbârak al-Lamtûnî
li-dawlat lamtûna, ms, IMRS, n° 2339.
AL-MÂMÎ, Muhammad. Jumân al-bâdiyya, ms, Bibliothèque privée, Yahya w.
al-Bara, Nouakchott.
Wuld AL-Hâjj IbrâHÎM, Abd Allah. Risâlat ar-rawdfi ansâb ahl al-Hawd
ms, n° 2755, Nouakchott, IMRS.
Wuld al-Mukhtâr AL-KuntÎ, Sîdî Muhammad. Ar-Risâlat al-Ghallâwiyya,
ms, n° : 3273, IMRS.
Bé WATARA
Témoignage d'un Dyan de Diébougou incorporé
dans les troupes coloniales africaines (1898-1901)
C'est au cours d'une prospection géographique dans le sud-ouest de la
Haute- Volta (actuel Burkina Faso), qu'Henri Barrai rencontra à Diébougou,
au printemps 1963, un solide vieillard de 80 ans environ, qui l'entretint
pendant quelques heures des événements qu'il vécut à la fin du siècle dernier,
se rapportant à la conquête de l'Afrique occidentale et centrale. Très intéressé
par la relation que m'en fit Henri Barrai, je décidai d'aller enregistrer, sans
tarder, les souvenirs surprenants de précision d'un témoin africain ayant
participé, en qualité de supplétif des armées françaises, à cette tragique
période coloniale.
Pour faciliter le suivi de ce récit, l'insertion de quelques documents
cartographiques a para indispensable : ils ont été (en grande partie) empruntés
à l'ouvrage du général Joalland, Le drame de Dankori. Par ailleurs, pour en
conserver la fraîcheur, la sensibilité et l'émotion, la transcription de ce long
récit a été réalisée en respectant scrupuleusement le style, les expressions, les
onomatopées utilisées par Bé Watara. Une précision encore : avant d'en venir
Journal des Africanistes 68 (1-2) 1998 : 261-291 Notes et documents 273
à des épisodes bien connus de la période coloniale, Bé Watara évoque un
événement antérieur qui s'est déroulé dans la région de Diébougou, ayant trait
à un conflit entre deux villages voisins, qui se traduit par des escarmouches
répétées mais s'achèvera par une réconciliation.
Savonnet*
G.
Diébougou le 22 juillet 1963
Un Européen m'a demandé de venir au campement de Diébougou pour
que je lui parle de ce qui se passait autrefois à Diébougou et dans les
environs...
Bien avant l'arrivée des Blancs, j'ai vu la guerre entre nous : les Dyans
et les Birifors ; elle a duré sept ans entre les Dyans de Diébougou et les
Birifors de Loto-Bapla. J'avais à cette époque 15 ans ; je ne combattais pas,
mais je faisais le ravitaillement de flèches auprès des combattants dyans. Les
combats se passaient à Loto. On se battait parce qu'il y avait eu un vol de
chèvres : les Birifors nous avaient volé deux chèvres. Alors on discute, on
discute... Un jour de marché, ils (les Birifors) sont allés cacher les chèvres
dans leur village (Loto). Plus tard, le propriétaire des chèvres a vu que l'on
avait égorgé ses chèvres au marché. En regardant les têtes des chèvres, il dit :
« Ça, c'est une tête que je connais. » Le Birifor lui dit : « Comment, tu
connais ? — C'est la chèvre qui a été perdue et je ne l'ai pas retrouvée ;
maintenant, je viens au marché et je trouve la tête de ma chèvre... Si vous
voulez, on va jurer devant le dieu de Kompa (en dyan), Namwi (en birifor) ;
l'autel est au milieu du marché (c'est un autel protecteur du marché). » On
discute d'abord, le Birifor dit : « Oui, c'est comme vous voulez, mais ce n'est
pas ta chèvre ! C'est la mienne, ce n'est pas pour toi, on va jurer sur l'autel
du marché ! Si la chèvre t'appartient et que moi, je viens de mentir, alors il
y aura la guerre ; il faut régler çà entre nous. » Huit jours après, ils ont
commencé la guerre. Alors c'est chaud ! c'est chaud ! Les Birifors, ils perdent
toujours. Quand il y a une attaque, ce sont les Birifors qui perdent (celui qui
a volé les chèvres s'appelle Dié). On combat avec des flèches, on ne fait pas
de prisonniers : quand on en prend un, on le tue tout de suite... La guerre a
duré sept ans comme ça !
Un jour d'attaque, un cavalier dyan (il s'appelle Issaka) dit : « Dié, tu
es là ? — Oui, je suis là. » Issaka lui répond : « Aujourd'hui, le sabre
m'appartient, je suis cavalier, j'ai ma lance, je ne te flèche pas ; mais
apprête-toi avec ton arc et tes flèches ; moi je viens avec ma lance. » II prend
sa corne et souffle : pon-pon-pon-pon... « Aujourd'hui, tu ne mangeras pas,
tu es prêt ? — Oui, je le suis... » Alors Issaka lance son cheval contre Dié ;
il retourne une fois, revient et renverse Dié sur le dos ; le cavalier lui donne
un coup de lance sur la poitrine... Dié tire un coup avec son arc... Issaka fait
Directeur de recherche à l'ORSTOM.
Journal des Africanistes 68 (1-2) 1998: 261-291 274 Journal des Africanistes
monter son cheval sur le dos de Dié... Tous ses parents (de Dié) arrivent.
« Voilà un koba10 qui est venu monter sur notre grand chef ! »
Ils ont couru et on (les Dyans) les poursuit jusqu'à leur village... « Tu
vois, Dieu ne ment pas, tu vois, je n'ai pas donné un coup de flèche ; toi tu
as tiré comme tu voulais ; j'ai lancé mon cheval deux fois, je t'ai renversé,
voilà le cadavre aujourd'hui» dit Issaka...
Alors, la guerre continue ; comme c'était un grand homme, le Birifor,
la guerre continue : les Birifors perdent tout le temps ! Les Birifors perdent
tout le temps !
... Au bout de sept ans, les Birifors envoient un type qui s'appelle
Kaboré, il vient parlementer ; il va chez l'oncle de Bé Watara11 (qui
Aldiouma) et discute avec lui : « Le chef des Birifors m'envoie : comme la
guerre que nous faisons, c'est inutile, il faut qu'on soit d'accord pour aller
dans nos champs ; pendant l'hivernage, on n'a pas la tranquillité pour cultiver.
Si vous voulez, on viendra signer la paix. »
Quinze jours après, ils sont venus (quarante personnes) avec le nouveau
chef. Là (à Diébougou) où il y a le marché, Aldiouma a fait prévenir mon
oncle (qui est chef de terre) que les Birifors sont venus pour faire la paix ;
ils ont apporté un poulet blanc, un mouton blanc et de la farine de mil. Le
chef des Birifors a dit : « C'est nous les Birifors qui avons eu tort : on a
toujours juré que la chèvre nous appartenait, on vous a insultés ; on voit
aujourd'hui que les affaires ne vont pas. Nous sommes venus pour signer la
paix, pour que tout le monde soit tranquille pour travailler dans les champs.
Pendant l'hivernage, on a peur d'aller au champ. Comme cela, nous sommes
venus pour demander la paix. »
Les gens de Diébougou acceptent. Ils demandent qu'on leur apporte un
mouton blanc, un poulet blanc et de la farine pour la délayer dans de l'eau.
Chacun va parler dans l'eau, puis on boit un peu. On a versé un peu de cette
eau sur le fétiche du marché, puis on a égorgé le poulet blanc : il tombe, il
périt sur le dos, signe que tout le monde a accepté la paix... Comme cela,
il n'y aura plus de guerre !
Le

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents