Tiers Monde, développement : de la socio-économie à la sociologie - article ; n°112 ; vol.28, pg 759-776
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Tiers-Monde - Année 1987 - Volume 28 - Numéro 112 - Pages 759-776
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 11
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Yves Goussault
Tiers Monde, développement : de la socio-économie à la
sociologie
In: Tiers-Monde. 1987, tome 28 n°112. pp. 759-776.
Citer ce document / Cite this document :
Goussault Yves. Tiers Monde, développement : de la socio-économie à la sociologie. In: Tiers-Monde. 1987, tome 28 n°112.
pp. 759-776.
doi : 10.3406/tiers.1987.4533
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1987_num_28_112_4533TIERS MONDE, DÉVELOPPEMENT :
DE LA SOCIO-ÉCONOMIE A LA SOCIOLOGIE
par Yves Goussault*
« La signification devient le mode de penser
du monde moderne, un peu comme le "fait"
a constitué précédemment l'unité de réflexion
de la science positive. »
Roland Barthes,
L'aventure sémiologique ,
Paris, Seuil, 1985.
Il y a pour toute discipline une manière de progresser qui lui est fournie
par sa concurrence avec les sciences voisines. Il en est ainsi de la sociologie
sur le terrain du Tiers Monde et du développement : son évolution y est
moins affaire de questionnements internes que capacité à intervenir dans
les débats auxquels sont mêlées les sciences sociales. Intervenir à sa façon,
bien entendu, c'est-à-dire en apportant une saisie particulière, un enr
ichissement et, pourquoi pas, un point de vue perturbateur au sein des
regards pluridisciplinaires.
C'est dans ce sens qu'on peut parler d'élargissement du champ des
recherches sociologiques au cours des dernières années et, plus significatif
encore, de reformulation des thèmes et objets. Si beaucoup de travaux
demeurent sur la lancée des modes de traitement antérieurs et si les terrains
habituels — classes et mouvements sociaux, questions urbaine et agraire,
Etat et forces politiques, interventions et projets, etc. — constituent encore
une part substantielle du champ de l'activité sociologique concernant le
Tiers Monde et le développement, il y a une tendance de plus en plus
sensible à dépasser les méthodologies à dominante socio-économique et à
considérer ces mêmes thèmes et objets de recherche dans ce qu'ils ont de
proprement sociologique en rétablissant leur dimension symbolique, idéelle
et culturelle.
♦ Professeur à l'Université de Paris I.
Revue Tiers Monde, t. XXVIII, n» 112, Octobre-Décembre 1987 760 YVES GOUSSAULT
Deux exemples pris dans l'actualité politique et scientifique la plus
sollicitante permettront d'illustrer l'évolution de la sociologie et les condi
tions nouvelles dans lesquelles elle se fait partie prenante des débats. Il
s'agit de la controverse sans précédent qui a opposé « anti-tiers-mondistes »
et « tiers-mondistes » sur l'existence du Tiers Monde, et, presque simul
tanément, d'une polémique beaucoup plus argumentée que la précédente
sur l'opportunité et la validité du concept de développement. Les deux
débats sont d'ailleurs très liés puisque dans l'un et l'autre cas il existe
un même flou de la part des sciences sociales. Flou entretenu avec une
négligence pas toujours innocente dans la mesure où celles-ci ne souhai
taient ni remettre en cause le domaine qui fonde leur compétence ni se
livrer à une clarification scientifique dévoilant la vulnérabilité de leurs
positions et dans certains cas le caractère idéologique de celles-ci.
Les chercheurs étaient pourtant avertis. Dès l'émergence des premiers
travaux se réclamant des sciences sociales du développement dans les
années 60, et à peine amorcés les échanges entre économistes, sociologues
et politologues de continents différents un peu plus tard, la question avait
été posée et les réponses ne manquèrent pas. Qu'on se rappelle : Perroux,
Lebret, Sauvy, Moussa, Ardant, Freyssinet, Lacoste, Gendarme, Leduc,
pour ne parler que des Français; tous s'attellent à la définition du Tiers
Monde, du sous-développement et leurs premières publications sont de
cette époque, certaines même la précèdent1. La sociologie est absente de
cet effort qui mobilise presque exclusivement des économistes; l'anthro
pologie de même, à quelques exceptions près2. En fait le problème sera
éludé parce que s'impose alors la problématique d'inspiration marxiste
Centre/Périphérie, empruntée à la politologie anglo-saxonne3, et qui sera
acceptée telle quelle par les sociologues peu conscients à l'époque de la
connotation économiciste prise par cette notion. Vidée de son contenu
géopolitique originel elle renvoyait essentiellement à l'acception écono
mique de l'impérialisme, de la division internationale du travail et du
sous-développement. Implicitement, le concept de périphérie vint à recouvrir
celui de Tiers Monde, tandis que le terme « transition » communément
employé alors pour désigner l'incorporation au capitalisme ou le passage
au socialisme était censé rendre compte de la catégorie développement.
Il n'y eut pas remise en cause de ces concepts par les sociologues et
c'est à l'intérieur de ce champ théorique que furent produits les travaux
sociologiques sur la dépendance et les formations sociales.
1. Tous ces auteurs sont recensés dans J. Poirier (sous la dir. de), Ethnologie générale,
Encyclopédie de la Pléiade, Paris, Gallimard, 1968, p. 1620 sq.
2. G. Balandier, Le Tiers Monde, sous-développement et développement, Paris, puf, 1962.
3. E. Shils, Center and Periphery , Chicago University Press, 1975 (réédition). DE LA SOCIO-ÉCONOMIE A LA SOCIOLOGIE 761
Les conséquences de cette subordination à la théorie économique
seront analysées plus loin. Elles ne furent pas toutes négatives si on
considère les acquis importants de la socio-économie du développement
au cours des deux décennies 1960 et 1970, la sociologie fonctionnant
comme étude des problèmes et changements sociaux induits par la
croissance. Par contre elles prirent un tour plus aigu quand vint la crise
mondiale et, avec elle, une prise de conscience des impasses économiques,
sociales et idéologiques où avait mené la conception dominante du déve
loppement. C'est de ce moment que date la remise en cause qui, au Nord
comme au Sud, allait conduire les sociologues à prendre conscience de
leur retard et à déployer leur capacité scientifique à la dimension des
problèmes posés. En outre le caractère fortement idéologisé et souvent
passionnel de certains débats, en particulier sur le Tiers Monde, appelait
une réponse spécifique de la sociologie et à un niveau allant bien au-delà
de ses compétences socio-économiques.
Aux deux débats — disparition ou non du Tiers Monde? impasse ou
non du modèle de développement? — qu'apportent donc les sociologues
et quelle est leur démarche ?
Notons d'abord que, à première vue, les deux questions ne concernent
pas de la même manière la sociologie. Si en effet l'objet « développement »
apparaît directement saisissable parce qu'il désigne une formation sociale
en mouvement et offre à l'analyse les aspects multiples de sa transformation,
il n'en est pas de même de l'objet « Tiers Monde ». Celui-ci renvoie à une
entité géopolitique non intégrée socialement, fondée essentiellement sur
des coalitions d'intérêts nationaux et sur des alliances entre Etats. S'il y a
donc une saisie sociologique et une place éventuelle pour une sociologie
du Tiers Monde* ce ne peut être qu'à partir des formations sociales qui
s'en réclament et autour des mouvements (Non-alignés, « 77 ») qui portent
leurs revendications. On mesure tout de suite la difficulté d'appréhender
et d'évaluer la réalité d'un tel front social, de la nature des forces qui le
composent, de leur cohésion et unité d'action. C'est ce qui explique le
peu de travaux existant sur cette question prise globalement mais aussi
l'intérêt d'examiner sur quels types d'analyses et selon quelle méthode
s'ébauche aujourd'hui une problématique sociologique.
4. Cette question intéresse également l'enseignement donné à I'iedes dans le cadre du dea
« Sociologie du Tiers Monde » dont la formulation, fixée par le ministère de l'Education natio
nale, pouvait paraître surprenante de prime abord.

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