Les services informels entre ménages : une dimension méconnue du bénévolat - article ; n°1 ; vol.368, pg 3-31
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Economie et statistique - Année 2003 - Volume 368 - Numéro 1 - Pages 3-31
Les services informels entre ménages: une dimension méconnue du bénévolat
Le bénévolat informel est un comportement mal connu et peu reconnu en France. Il est constitué de l’ensemble des services non rémunérés rendus hors du foyer et en dehors de tout cadre organisé. L’enquête Insee de 1998-1999 sur les emplois du temps permet d’en appréhender un aspect important, celui des services rendus pour d’autres ménages, qu’ils soient apparentés ou non. Près d’un Français sur deux a réalisé de tels services informels dans les quatre semaines qui précédaient l’enquête, avec toutefois des fréquences très variables. Les profils des participants sont assez nettement distincts selon les types de services réalisés, mais aussi selon que les bénéficiaires des aides appartiennent au réseau familial ou non. Les contraintes que font peser les autres temps sociaux, particulièrement ceux consacrés à l’activité professionnelle et aux tâches domestiques, ne sont pas sans effet sur ce comportement bénévole, mais leur influence n’est ni mécanique, ni univoque. Recevoir une aide de tiers prédispose à en apporter soi-même à autrui. Le bénévolat informel s’inscrit donc dans le cadre de l’entretien de réseaux de réciprocité. Parce qu’il est aussi un moyen de tisser et d’entretenir des contacts interpersonnels, il répond également à des motivations d’ordre relationnel.
Los servicios informales entre hogares: una dimensión desconocida del voluntariado
El voluntariado informal es un comportamiento mal conocido y poco reconocido en Francia. Es constituido por la totalidad de los servicios no remunerados realizados fuera del hogar y fuera de todo marco organizado. La encuesta Insee de 1998-1999 sobre los horarios permite abarcar un aspecto importante de este comportamiento, el de los servicios realizados para otros hogares, sean o no aparentados entre sí los hogares. Alrededor de uno de cada dos franceses ha realizado dichos servicios informales en las cuatro semanas anteriores a la encuesta, con frecuencias muy variables sin embargo. Los perfiles de los participantes son bastante distintos según la clase de servicios realizados, y también según si los beneficiarios de las ayudas pertenecen o no a la red familiar. Las obligaciones que generan los demás tiempos sociales, en especial aquellos dedicados a la actividad profesional y a las tareas domésticas, no son sin consecuencia sobre ese comportamiento voluntario, pero su influencia ni es mecánica ni unívoca. El recibir una ayuda por parte de un tercero predispone a que uno la ofrezca también al otro. El voluntariado informal se da entonces dentro de la esfera del mantenimiento de redes de reciprocidad. Por ser también una manera de tejer y de mantener unos contactos interpersonales, responde igualmente a unas motivaciones de tipo relacional.
Erbringung informeller Dienste zwischen Haushalten: eine verkannte Dimension der unentgeltlichen Arbeit
Die informelle unentgeltliche Arbeit ist in Frankreich nur wenig bekannt und wird kaum anerkannt. Sie umfasst alle unbezahlten Dienste, die außerhalb des eigenen Haushalts und außerhalb jeden organisierten Rahmens erbracht werden. Die INSEE-Erhebung von 1998-1999 über die Beschäftigung während des Tages gibt Aufschluss über einen wichtigen Aspekt, nämlich die Dienste, die anderen Haushalten erbracht werden, ganz gleich, ob es sich um Verwandte handelt oder nicht. Nahezu jeder zweite Franzose hatte in den vier Wochen vor Durchführung der Erhebung solche informellen Dienste erbracht, allerdings mit sehr unterschiedlicher Häufigkeit. Die Profile der Erbringer solcher Dienste unterscheiden sich deutlich nach Art dieser Dienste, aber auch je nach dem, ob die Begünstigten dem familiären Netz angehören oder nicht. Die Belastung durch die anderen gesellschaftlichen Tätigkeiten, insbesondere den Beruf und die Hausarbeit, wirkt sich zwar auf diese unentgeltliche Arbeit aus; ihr Einfluss ist aber weder automatisch noch einheitlich. Wer die Unterstützung eines Dritten in Anspruch nimmt, ist in der Regel auch bereit, selbst einem anderen zu helfen. Mithin ist eine informelle unentgeltliche Tätigkeit Teil eines auf Gegenseitigkeit beruhenden Netzes. Da sie zudem ein Mittel darstellt, um Kontakte zu knüpfen und aufrechtzuerhalten, wird sie auch zwischenmenschlichen Anliegen gerecht.
Informal Services among Households: A Little Known Aspect of Voluntary Work
Informal voluntary work is a little known and barely acknowledged phenomenon in France. It consists of all unpaid services provided outside of the household and external to any organised structure. INSEE’s 1998-1999 time use survey reveals the importance of services provided to other households, whether they are part of the family or not. Nearly half of the French population had provided such informal services in the month preceding the survey, although frequencies varied a great deal. Participants’ profiles differ quite distinctly by type of service provided, but also depending on whether the recipients are family members or not. Other social time constraints, especially employment and domestic time constraints, are not without their effect on this voluntary behaviour. However, their influence is neither automatic nor unequivocal. The fact of receiving assistance from a third party makes the recipients more inclined to assist another. Informal voluntary work therefore falls within the framework of maintaining mutual assistance networks. In addition, it satisfies relational motives since it is also a way of making and maintaining interpersonal contacts.
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2003
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Langue Français

Extrait

Les services informels entre ménages : une dimension méconnue du bénévolat Lionel Prouteau et François-Charles Wolff*
SOCIÉT
Le bénévolat informel est un comportement mal connu et peu reconnu en France. Il est constitué de l’ensemble des services non rémunérés rendus hors du foyer et en dehors de tout cadre organisé. L’enquête Insee de 1998-1999 sur les emplois du temps permet d’en appréhender un aspect important, celui des services rendus pour d’autres ménages, qu’ils soient apparentés ou non. Près d’un Français sur deux a réalisé de tels services informels dans les quatre semaines qui précédaient l’enquête, avec toutefois des fréquences très variables. Les profils des participants sont assez nettement distincts selon les types de services réalisés, mais aussi selon que les bénéficiaires des aides appartiennent au réseau familial ou non. Les contraintes que font peser les autres temps sociaux, particulièrement ceux consacrés à l’activité professionnelle et aux tâches domestiques, ne sont pas sans effet sur ce comportement bénévole, mais leur influence n’est ni mécanique, ni univoque. Recevoir une aide de tiers prédispose à en apporter soi-même à autrui. Le bénévolat informel s’inscrit donc dans le cadre de l’entretien de réseaux de réciprocité. Parce qu’il est aussi un moyen de tisser et d’entretenir des contacts interpersonnels, il répond également à des motivations d’ordre relationnel.
*LEN-CEBS de la Faculté des sciences économiques de l’Université de Nantes.Lionel Prouteau appartient au François-Charles Wolff appartient au LEN-CEBS de la Faculté des sciences économiques de l’Université de Nantes, à la Direction des recherches de la Cnav et à l’Ined. Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 368, 2003
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es difficultés récurrentes que connaît l’État Lprovidence conduisent à repenser l’articu-lation de l’action des pouvoirs publics avec celle des réseaux d’aides privées qui s’expri-ment dans le cadre de la famille, bien sûr, mais aussi dans celui du voisinage ainsi que par le biais des associations. Une telle situation incite à mieux connaître ces solidarités de proximité pour en comprendre les dynamiques, en appré-hender l’ampleur mais aussi les limites. À ce titre, le comportement bénévole requiert évi-demment une attention spécifique. Mais en ce qui le concerne, l’investigation empirique n’est pas chose aussi aisée qu’on pourrait le penser de prime abord. En effet, qu’est-ce qu’être bénévole ? La réponse à cette question ne va pas de soi. Les représentations du bénévolat sont marquées du sceau de l’hétérogénéité : elles portent l’empreinte des idiosyncrasies nationa-les, des appartenances sociales et culturelles, des affiliations idéologiques. Les difficultés de repérage qu’engendre cette variabilité des per-ceptions spontanées pourraient être atténuées par l’effort des chercheurs en sciences sociales pour dégager une définition commune de ce comportement. Mais à ce niveau également, c’est la diversité qui prévaut. Cnaan, Handy et Wadsworth (1996), à partir de l’analyse de plusieurs définitions tirées d’études américaines, distinguent quatre dimensions constitutives de cette hétérogénéité. L’une d’entre elles paraît plus particulièrement inté-ressante lorsqu’il s’agit d’éclairer l’importance prise par les activités bénévoles en France (1). Elle concerne le contexte dans lequel les per-sonnes agissent. Pour les uns, le bénévolat doit être circonscrit aux activités volontaires et non rémunérées qui se déroulent au sein d’une orga-nisation. Pour d’autres, son champ doit être étendu à ce que les Anglo-Saxons appellent informal volunteering, c’est-à-dire le bénévolat informel, que Blanchet (1990, p. 8) appelle éga-lement « bénévolat spontané » et que les Cana-diens francophones nomment parfois « bénévo-lat non encadré » (Duchesne, 1989). Une partie du bénévolat est réalisée en dehors des associations Par bénévolat informel, il faut entendre les dons de temps réalisés à l’extérieur de la sphère domestique et en dehors de toute appartenance organisationnelle. Le champ de ces aides paraît assez vaste. Y sont inclus les services qui sont rendus à d’autres ménages comme par exemple faire les courses pour son voisin âgé qui a des
difficultés de mobilité. Il peut s’agir aussi d’aides directement apportées à la communauté. Ainsi, dans une agglomération de montagne, le déneigement d’une rue ou d’un trottoir, effectué spontanément et éventuellement par alternance, est un service rendu à tous les résidents du voi-sinage (y compris celui qui réalise l’activité) et non à un ménage précis. Les actions réalisées à titre individuel visant la protection de l’environ-nement (évacuer les détritus sur une plage) peu-vent également être évoquées au registre de ces services à la collectivité.(1) Négliger le bénévolat informel présente l’incon-vénient d’introduire un biais dans les comparai-sons internationales en matière de comporte-ment bénévole. Ce risque existe plus nettement lorsque l’exercice est mené entre pays ayant des niveaux de développement très différents, puis-que l’importance relative de la participation informelle tend à être d’autant plus grande que le pays est économiquement moins développé (Davis Smith, 1999). Mais même dans un cadre a priorimoins hétérogène, ignorer ces services informels peut avoir des conséquences fâcheu-ses. Reed et Selbee (2000) soulignent ainsi, s’agissant du Canada, que les types de contribu-tion diffèrent d’une région à l’autre. Ils consta-tent notamment qu’au Québec, les individus ont une plus forte tendance à rendre service de manière informelle, mais affichent moins d’attrait pour le bénévolat encadré. Ne retenir que ce dernier entraîne donc une sous-estima-tion de l’inclination des habitants de la « Belle Province » à donner de leur temps. Notant que les différences régionales se trouvent être subs-tantiellement atténuées si sont agrégés les béné-volats formel et informel, ces auteurs concluent que l’étude des contributions volontaires ne peut être réalisée «de façon appropriée que par des mesures du bénévolat et de l’aide encadrés et informels, chacun de ces éléments n’étant pas suffisant en soi» (Reed et Selbee, p. 8). Bien que l’inscription de ces activités informel-les dans le champ de la participation bénévole ne fasse nulle part consensus, elle paraît soule-ver en France plus de réticences qu’ailleurs. L’image prévalente du bénévolat y est sujette à une double restriction : il n’est d’engagement bénévole que dans le cadre d’organisations, et celles-ci sont généralement réduites aux seules associations. Simonet (1998, p. 58) traduit bien 1. Les trois autres dimensions sont relatives au caractère volon-taire de l’acte, à l’existence et à la nature d’un éventuel retour et, enfin, à la nature des bénéficiaires de l’activité bénévole.
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