Cadres de la prostitution
170 pages
Français

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Cadres de la prostitution , livre ebook

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Description

Le cadrage de la prostitution est la manière dont celle-ci est représentée, dont elle est réglementée et l'articulation entre les images qui sont véhiculées et le droit appliqué. Deux communautés d'opinion s'affrontent pour la détermination des normes : réglementaristes et abolitionnistes. Cette étude met en évidence la discrimination institutionnalisée qui sévit, en France de nos jours, dans l'espace des échanges économico-sexuels.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 juin 2009
Nombre de lectures 64
EAN13 9782296222847
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Remerciements à tousceux
qui ont contribuédirectement
ouindirectement à la réalisation de cetravail.Table des matières
INTRODUCTION 9
Le concept de cadrage 1111
PREMIERE PARTIE
Qualification prostitutionnelle de la pornographie 1919
222 2Faisceaud’indices
Le sens des mots 2323
Petite histoire prostitutionnelle de la pornographie 2828
La confusion des genres sociaux 3636
Confusion des prestations 37
Confusion des acteurs 42
4949Objections
Le rapport au client 449 9
Le choix des partenaires 50
La pornographie des amateurs 5252
556 6Conséquences
Un proxénétisme à échelle industrielle 556 6
Laproduction 57
Ladiffusion 59
Lapublicité 63
Un droit à géométrie sociale variable 6565SECONDE PARTIE
Cadres sociaux de la prostitution 6969
772 2Unproxénétismemultiforme
Les médias du sexe vénal 7373
Les salons de massage 7777
Réseaux institutionnels et réseaux fantasmés 881 1
888 8Intégrationet exclusion
De la compétence des travailleurs du sexe 8888
Lesprestations des stars du X: beauté, souplesse,risque
etbusiness 89
D’autrescompétences : massage, danse,escorting… 94
Lesnon-compétences de larue: accessibilité,anonymat
etpetits prix 9988
Le travail de légitimation au sein de la prostitution 102
LaconsécrationduX 102
Autresmodes de légitimation des «cadres»de la prostitution 110808
L’échecdelarue 116
Célébration, répression 119119
Lastarisationdes prostituéesde luxe 111199
Un« sous-prolétariat» persécuté 126
CONCLUSIONS 139139
Annexe
InterviewdeGGuy Parent,responsable
dela brigade derépression duproxénétisme 147
Indicesbibliographiques 163Introduction
La prostitution interpelle. Elle fait partie du possible de
chacun : en tant que client(e) ou prostitué(e) potentiel(lle),
nous y avons sans doute tous pensé. Le terme appartient
d'ailleurs à notre langage familier. Les expressions telles que
"putain!", "coup de pute", "sale pute" ou encore "quel
bordel!" ont intégré notre quotidien et banalisent, en quelque
sorte, l'accessibilité de la prostitution. Il est déjà intéressant de
remarquer que pratiquement toutes ces expressions relatives à
la prostitution ont une connotation négative pour l’individu
qui les prononce. En fait, dans les paroles comme dans les
1actes,laputeeststigmatisée.
La prostitution semble d’ailleurs être un terrain de
prédilection pour les jeux de mots, ne serait-ce que pour les
opérations de qualification et de disqualification des activités.
Certains refusent l’appellation «prostitution» pour parler de
ce qu’ils font alors qu’ils présentent au public des activités
sexuelles rémunératrices et prétendent accéder à un certain
rangsocialparleurs pratiques.
Les analyses de Peter Berger et Thomas Luckman sur la
construction sociale de la réalité, ou celles de Luc Boltanski
sur la constitution d’un groupe social au travers de ses
représentations sont ainsi pertinentes pour saisir les
mobilisations à l’œuvre des acteurs de la pornographie –
1
Sur la stigmatisation de la putain, voir Pheterson Gail, Le prisme de la prostitution,Paris,
L’Harmattan, 2001.10 Cadresdelaprostitution
cadres pour ainsi dire de la prostitution – qui s’émancipent
2dans leurrevendicationidentitaire.
Mais il ne s’agit pas uniquement de (dis)qualification
sociologique. Le sujet est éminemment juridique et les acteurs
de la prostitution sont soumis à un droit, extrêmement
variable à travers les âges et l’espace et qui fait souvent débat.
La qualification juridique des activités prend un sens tout à
fait particulier qui peut impliquer dans de nombreux pays des
privations de liberté importantes (peines de prison) et même
dans d’autres la mort. En Chine, par exemple, on exécute des
proxénètes. Au sein de l’Union européenne, le consensus
n’existe pas et alors que l’on va jusqu’à pénaliser les clients en
Suède, on autorise les bordels en Allemagne ou en Espagne.
En France, le débat est vif entre les deux camps; le féminisme
lui-même semble avoir perdu toute homogénéité idéologique
sur le sujet tant les argumentations fusent dans des directions
3diamétralement opposées.
Entre l’interdiction et l’organisation, nous verrons
qu’audelà des apparences la France adopte un système
intermédiaire, avec un ensemble d’activités prostitutionnelles
régies par un droit d’inspiration réglementariste coexistant
avecd’autres pratiques désormais interdites selondes préceptes
abolitionnistes. Ainsi, au sein de l’espace prostitutionnel
français, des agents sociaux semblent profiter d’un système de
droit professionnel protecteur – il s’agirait des «cadres» –
tandis que d’autres subissent des réglementations pénalisantes,
quipeuvententraîner amendesetpeinesdeprison–ils’agirait
du «prolétariat». Selon quelles logiques des personnes qui ont
des comportements similaires vont être qualifiées de façon
2 Berger Peter, Luckman Thomas, La construction sociale de la réalité,Paris,Armand
èmeColin, 2006, 2 édition ; Boltanski Luc, Les cadres : la formation d’un groupe social,Paris,Les
Editionsde Minuit, 1982.
3 S’il s’agissait ici de citer les principaux auteurs féministes qui se prononcent dans un sens
abolitionniste ou réglementariste surle sujet,cette page ne suffiraitpas.11Cadresdelaprostitution
positive, accéder à un emploi réglementé, voire à une certaine
reconnaissance sociale, tandis que d’autres seront disqualifiées,
poursuivies et parfois condamnéesen justice ? Comment ce
qui apparaît donc dans la recherche comme un arbitraire se
met-ilenplace?
Cette réflexion rappelle celle que nous avons
précédemment menée sur la drogue, et en particulier sur le
cannabis en France aujourd’hui:desactesdumêmeordre
entraînent pour certains des privations de liberté tandis que
4d’autres ne sont jamais inquiétés. Notre étude a par
conséquent pour ambition de porter davantage sur les
dysfonctionnements de notre société, au premier rang
desquels on soulignera l’état de non-droit auquel sont
confrontées certaines personnes qui se prostituent, que sur la
prostitution en elle-même. Le cadrage de l’objet en apprend
plussurlesprocessusdecadragequesurl’objetvisé.
Leconceptdecadrage
Cadrer un objet social, c’est saisir les interactions entre
représentations (idéologiques, médiatiques) et droit. Le
cadrage, pour Jacques Gerstlé, est "l'ensemble des considérations
qui sont utilisées par certains groupes, par certaines forces, pour
5imposer les normes". Le cadrage de la prostitution est donc la
manière dont celle-ci est représentée, dont elle est réglementée
etl’articulationentrenormesetreprésentations.
La personne qui se prostitue, que nous appellerons ici la
prostituée, est mal aimée, mal cadrée pour ainsi dire. La
considération péjorative de la prostitution contribue sans
aucun doute à sa condamnation légale dans de nombreuses
4 Perseil Sonny, Politique,mœurs et cannabis :rétablir le droit ?,Paris,LeMédiateur,2003.
5 Gerstlé Jacques, Becker Howard S., «Autour du cadrage: méthodes et concepts », in : Perseil
Sonny, Rinck Séverine (sous la direction de), Le cadrage politique de la drogue. Autour de
Howard S. Becker,, Paris, Editions Pepper, 2004.12 Cadresdelaprostitution
sociétés. Actuellement, deux communautés d’opinion – deux
ensembles non homogènes d’entrepreneurs de morale
pourrait-on dire – s’affrontent pour la détermination du droit
6applicable. Cela rappelle le débat sur les drogues. En ce qui
concerne la prostitution: réglementaristes contre
abolitionnistes; pour les toxicomanies: légalisateurs contre
7prohibitionnistes. Le cadrage – communicationnel, culturel,
politique, juridique – est effectué par le travail de ces agents
sociaux, qui mobilisent des médias, des œuvres culturelles, des
chercheurs, et in fine des politiques, pour tenter d’imposer
dans le droit des représentations conformes à leurs jugements
8devaleur,uncadrenormatifquileurconvient.
Tout comme pour la drogue, la labellisation paraît être un
processus délicat. Les viticulteurs ou les fabricants de tabac
refusent par exemple d&

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