Tout contre le réel
181 pages
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Tout contre le réel , livre ebook

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Description

Compris comme phénomène social à visée anthropologique, le fait divers marque l'histoire intellectuelle du XXe siècle : l'esthétique rencontre l'histoire et le politique, le phénomène social est soumis à l'interprétation critique. En prenant le parti de la rencontre entre trois arts - littérature, théâtre et cinéma - profondément marqués par l'émergence d'une modernité dont le fait divers est contemporain, cet ouvrage interroge la tension qui se joue dans le regard des créateurs entre un ancrage dans le réel et une résistance à sa représentation. À travers l'analyse d'oeuvres précises ou à partir d'approches transversales, les textes le composant dessinent une cartographie de formes plurielles, qui renouvellent les catégories de pensée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 février 2021
Nombre de lectures 1
EAN13 9782304005837
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0750€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Sous la direction d’Emmanuelle André,
Martine Boyer-Weinmann et
Hélène Kuntz
Tout contre le réel Miroirs du fait divers
Littérature, théâtre, cinéma
Éditions Le Manuscrit Paris


Les maquettes de l’ouvrage et de la couverture sont la propriété exclusive des Éditions Le Manuscrit.
Toute reproduction est strictement interdite.
Couverture © Collection particulière – Damien Lepetitgaland
© Éditions Le Manuscrit, 2008
ISBN : 9782304005820 (livre imprimé) ISBN : 9782304005837 (livre numérique)
Ouvrage publié avec le concours de l’Université Lumière Lyon 2.

Les auteurs de cet ouvrage remercient chaleureusement Rémi Fontanel pour le soin qu’il a apporté au traitement des images.


« L’Esprit des lettres »
Collection coordonnée par Alain Schaffner et Philippe Zard
« L’Esprit des lettres » présente, dans un esprit d’ouverture et de rigueur, toutes les tendances de la critique contemporaine en littérature française ou comparée. Chaque proposition de publication fait l’objet d’une évaluation scientifique par les directeurs de collection ainsi que par des spécialistes reconnus du domaine concerné.


Dans la même collection
Agnès S piquel et Alain S chaffner (éd.), Albert Camus, l ’ exigence morale. Hommage à Jacqueline Lévi-Valensi , 2006.
Jeanyves G uérin (éd.), La Nouvelle Revue française de Jean Paulhan , 2006.
Isabelle P oulin , Écritures de la douleur. Dostoïevski, Sarraute, Nabokov, 2007.
Philippe M arty, L e poème et le phénomène , 2007.
Philippe Z ard ( éd.), Sillage de Kafka , 2007.
Jeanyves G uérin (éd.), Audiberti , 2007.


Avant-propos
Emmanuelle ANDRÉ,
Martine BOYER-WEINMANN et
Hélène KUNTZ
Le fait divers est une figure de style.
Claude Chabrol
D’abord compris, dans une visée anthropologique, comme phénomène social, le fait divers trouve son accomplissement artistique au xx e siècle. Il croise alors une modernité issue d’une rencontre inédite avec le réel et d’un intérêt accru pour les sciences de l’homme. Rivé à une pensée de l’homme en mutation, le fait divers tel qu’il est saisi par le regard du philosophe – Merleau-Ponty, Foucault –, du critique – Barthes – ou de l’écrivain – Perec – marque l’histoire intellectuelle du xx e siècle. Avec ses figures monstrueuses, son défi à la normalité et à la loi, il hante l’imaginaire de notre temps et renouvelle les catégories de la pensée : l’esthétique rencontre l’histoire et le politique, le phénomène social est soumis à l’interprétation critique.
Ce livre à plusieurs voix se situe au carrefour de ces préoccupations. Il prend le parti de la rencontre entre trois arts – littérature, théâtre et cinéma – profondément marqués par l’émergence d’une modernité dont le fait divers est contemporain. À travers les circulations, passages et échanges s’opérant entre ces arts, il entend saisir les éclats, anamorphoses et autres diffractions du réel que le fait divers invente dans le regard des créateurs. C’est que les multiples réponses artistiques apportées au fait divers convergent vers une même question. Parce qu’il sonde l’écriture de la réalité, le fait divers dégage une pensée de la représentation. Les images, dessinées, gravées et photographiées qui le décrivent, les œuvres littéraires, théâtrales ou cinématographiques qui s’en emparent procèdent d’une double volonté, d’ancrage dans le réel et de résistance à sa représentation. C’est cet écart que les auteurs, universitaires spécialistes des études littéraires, théâtrales ou ciné matographiques, ont cherché à cerner, au cours d’un colloque qui s’est tenu à l’Université Lumière-Lyon 2, en mai 2004, à l’initiative de l’équipe de recherche Lecture et Réception du Texte Contemporain. À travers l’analyse d’œuvres précises ou à partir d’approches plus transversales, les textes dessinent une cartographie des formes plurielles que le fait divers a investies depuis un siècle. Se dégage alors une coupe transversale dans l’histoire des représentations : le fait divers redistribue la carte des genres, ce dont témoigne chacune des parties de l’ouvrage.
La fortune artistique du fait divers marque d’abord un renouveau du réalisme. Issu d’un monde banal, le fait divers tel qu’il s’offre en pâture à la presse constitue un fragment de réel en apparence insignifiant. Mais faire de ce matériau une œuvre écrite, mise en scène ou filmée, c’est déjà le placer sous le régime du sens pour le donner à voir et à interpréter dans un miroir déformant. Ainsi le fait divers sert-il de prétexte narratif à une critique du réel, inscrite dans une reconstitution historique ou ouverte sur un questionnement de l’immédiat contemporain. Là n’est pas le moindre de ses paradoxes : information autonome, décontextualisée, le fait divers tend à devenir une voie d’accès privilégiée à la prise de position, au discours moral et politique.
Mais le fait divers impose aussi une contrariété au réel, dont il déjoue les règles habituelles de fonctionnement. La rubrique que lui consacre la presse dessine une « carte de l’ inexplicable contemporain », écrivait Roland Barthes, suggérant que ce « rebut inorganisé de nouvelles informes » trouve son pouvoir de séduction dans un trouble de la causalité 1 . Ainsi le fait divers oscille-t-il entre un discours qui cautionne la véracité d’un événement et une construction de la surprise privilégiant l’unique et le spectaculaire. À l’opposé du traitement que laisse attendre le fait divers, les œuvres qui s’en inspirent s’écrivent aussi contre le réel, qu’elles opèrent selon un refus affiché du réalisme ou tendent à le perturber selon des voies plus détournées. Dès lors, l’écriture du fait divers engendre de multiples résistances esthétiques.
De la gravure au cinéma, en passant par le dessin ou la photographie, le fait divers rencontre des problématiques d’images. Mais les œuvres qui s’en saisissent exercent un autre effet que la séduction de l’inexplicable, de l’exceptionnel, du monstrueux. Au cœur d’une tension entre un ancrage réaliste et le paysage fantasmatique que dégage le fait divers, elles inventent différentes solutions figuratives et narratives, qui obligent par exemple à reconsidérer le partage du réel et de la fiction. Entre « petites causes » et « grands effets », pour reprendre le vocabulaire de Barthes 2 , entre l’ancrage dans l’actualité et le décrochage du réel, le fait divers dessine ainsi les frontières d’une forme en devenir.


1 . Roland Barthes, « Structure du fait divers » [1962], in Essais critiques , Paris, Seuil, coll. « Points », 1964, p. 192 et p. 188.

2 . Ibid ., p. 193.


Prologue


Territoires politiques et esthétiques du fait divers
Hélène KUNTZ
Mort à Vilnius . Tel est le titre du livre que Stéphane Bouchet et Frédéric Vézard, journalistes au Parisien-Aujourd’hui en France , quotidien qui réserve une place importante aux faits divers, ont publié en 2004. Cet ouvrage ne relate pas seulement les événements de la nuit de juillet 2003 où Bertrand Cantat a porté plusieurs coups mortels à sa compagne Marie Trintignant. Présenté comme une enquête « en profondeur » sur l’affaire Cantat-Trintignant, Mort à Vilnius se veut aussi une réponse au « cri cathartique » de Nadine Trintignant : les auteurs rappellent que Ma fille, Marie , paru en 2003, s’est vendu à plus de 200 000 exemplaires en France.
Dans notre pays, l’affaire Cantat-Trintignant aura davantage fait pour la notoriété de Vilnius que l’entrée de la Lituanie dans l’Europe. Le fait divers confère une célébrité soudaine, et paradoxale, à des lieux jusqu’alors neutres. Ainsi la Vologne, charmante rivière vosgienne, est-elle depuis l’affaire Villemin indissociable du meurtre du petit Grégory : la découverte, en octobre 1984, du corps de Grégory Villemin a marqué le début d’une longue enquête, qui a bénéficié d’une couverture médiatique sans précédent.

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