Kaléidoscope
228 pages
Français

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Description

Cet ouvrage retrace une traversée de plus d’un demi-siècle côtoyant petite et grande histoire... Par des guerres, des conflits sociaux, des règlements de comptes au sein d’entreprises, des aventures autour du monde, des succès, des échecs Kaléidoscope raconte une succession rapide et changeante d’impressions, de sensations.
Ni roman, ni biographie, il s’agit d’une réflexion sur la vie, un formidable espoir dans la vie pour les nouvelles générations.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 03 juin 2014
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332720016
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-71999-7

© Edilivre, 2014
Kaléidoscope : au sens figuré : succession rapide et changeante d’impressions, de sensations
Le Robert illustré 2013
Citation



« Je me souviens donc je crée »
Des photos fugitives de vies professionnelles surgissent comme les images d’un kaléidoscope aux couleurs et formes changeantes selon l’éclairage et l’orientation des souvenirs. Dans une vie ce qui nous semble unique est souvent universel !
Chaque homme naît vieux, emmailloté dans les mots et les préjugés qu’on lui inculque. Devenir jeune en vieillissant, c’est se libérer de la peur, moins céder aux pesanteurs sociales.
Jean Sulivan Parole du passant Le centurion Panorama aujourd’hui 1980
1 Salaud ou héros
– Adjudant Stick…
la voix rauque sort d’un corps trapu, moustache rousse, sous la veste camouflée se dégage un large poitrail bravant le vent glacial de Kabylie en ce mois de décembre. L’haleine explique que l’alcool remplace avantageusement tout autre vêtement…
– A votre service…
Jeune lieutenant, j’arrive d’Arzew, centre d’immersion obligatoire pour tout officier débarquant en Algérie. Pendant quinze jours se sont succédés exposés sur la guerre psychologique, parcours du combattant, ramper sous tir à balles réelles, conférences géopolitiques, organisation du FLN (Front National de Libération), de l’ALN (Armée de Libération Nationale), principes de l’action psychologique héritée de l’Indochine perdue, etc. J’ai découvert en train l’Algérie d’Oran à Dra-el-Mizan avec étape à Alger au fameux hôtel Aletti. Je rejoins le commando de chasse( * ) pour remplacer un officier tué récemment lors d’un accrochage. Je dévisage cet adjudant véritable légende des guerres passées, de nombreuses palmes et étoiles ornent ses décorations précédées de la médaille militaire. Je comprends les paroles du chef de bataillon, lors d’un entretien téléphonique :
– s’il vous accepte vous aurez le plus fidèle des compagnons capable de se faire tuer pour vous, sinon ce sera invivable…
Déporté à 16 ans, il survit à Dachau, rencontre sa future femme sur le chemin du retour, elle-même survivante de cet enfer. Il s’engage pour l’Indochine. Après plusieurs séjours, il devient conducteur du train la Rafale, cible favorite des viets, il bat tous les records de déraillements. Ces retours en France sont écourtés par des bagarres, de rapides départs lui évitent de perdre les galons gagnés sur le terrain.
En 1954, il part de Saigon pour rejoindre Marseille, mais débarque directement à Alger suite au 1er novembre sanglant. Il continue sa vie de baroudeur et accomplit maintenant son deuxième séjour.
Stick me confie à un aspirant qui annonce :
– les officiers sont tous en opération, retour prévu en fin d’après-midi, vous les verrez ce soir au dîner.
Traversée rapide du camp formé de baraques en parpaings éparpillées parmi des arbres, il me conduit jusqu’à une chambre que je vais partager avec un autre officier. Je suis loin de l’image d’un bataillon opérationnel… Le soir je me dirige vers une petite maison, appelée mess des officiers, située à quelques pas de l’entrée du camp. Je suis accueilli par le chef de bataillon apparemment ivre, qui me place face à lui. A côté, un médecin inculte, des officiers bouffons qui se régalent de plaisanteries de plus en plus grossières. Je vis mal ce repas… A l’arrivée du café, en silence, tous retirent leurs galons et les jettent sur la table.
– A vous de rétablir la bonne hiérarchie !
Quelle épreuve pour un jeune officier, croyant encore à la hiérarchie… A part quelques erreurs, chef de bataillon pris pour le médecin et inversement, je ne me fais pas d’ennemi ce soir-là !
A la sortie le capitaine DOP( * ) me prend par le bras et me demande de l’accompagner :
– il faut vous mettre tout de suite dans le coup. Nous avons pris aujourd’hui un salopard, il faut qu’il parle… Ce que nous allons faire ne s’apprend ni à Cyr, ni à Arzew… »
Nous entrons dans un baraquement à l’écart des bâtiments qui abritent le commando et autres unités du bataillon. A moitié nu, le visage ensanglanté, un algérien d’une trentaine d’années récupère me semble-t-il d’une épreuve de punchingball.
– il ne veut pas parler, annonce un sergent, d’un mètre quatre-vingt-dix, plus de cent kilos, cela fait deux heures, il faut passer à la vitesse supérieure.
Le capitaine explique, que depuis quelques mois, un fellaga important, fait prisonnier, doit tenir quatre heures avant de parler, laps de temps nécessaire pour que les correspondants, sans nouvelles, s’évanouissent… Une partie des chefs algériens ont vécu comme sous-officier ou officier la deuxième guerre et les opérations d’Indochine, ils en ont tiré des enseignements. Le prisonnier doit parler rapidement ! J’ai droit à la démonstration du parfait tortionnaire, gégène, litres d’eau versés sur un chiffon enfoncé dans la bouche, version économique de la baignoire, brûlures de cigarettes et autres inventions… Pétrifié, je regarde sans réagir pour montrer que je suis du même bois que ces tortionnaires et digne de prendre la tête du commando… Au bout d’une heure, le supplicié donne des informations qui empêchent un attentat à Alger et sauvent de nombreuses vies… Quittant la salle d’interrogatoire, le capitaine se contente de dire « corvée de bois ». Quelques minutes plus tard, une brève rafale de mitraillette à l’extérieur du camp. Regardant le capitaine, il me répète seulement « corvée de bois ». Le lendemain deux gendarmes viennent rédiger le procès-verbal : « un rebelle algérien a essayé de s’enfuir, après sommation, le caporal-chef… a tiré une rafale de pistolet-mitrailleur qui a tué le fugitif ». Continuant ma formation le capitaine précise que lors des sorties du commando, dès qu’il y a mort d’homme(s) le même cérémonial se déroulera. Je dois déclarer avoir fait les sommations avant de tirer, même s’il s’agit d’une embuscade montée par nos soins. Nous ne sommes pas en guerre mais dans une opération de simple police…
Cinquante ans après, je pose toujours la question : a-t-on le droit de torturer pour sauver d’autres vies ? A-t-on le droit de s’avilir à ce point au nom de la nation ? Je crois que la décision de quitter l’armée a commencé à germer à ce moment, pour éclore quatre ans plus tard.
Je prends rapidement le rythme du commando. Composé d’une centaine d’hommes, il comprend une vingtaine de français dits de souche, selon le vocabulaire de l’époque. La plupart sont de jeunes repris de justice à qui l’on a promis le blanchiment de leur casier judiciaire s’ils se comportaient en braves… Quatre-vingt harkis, complètent le commando, combattants émérites, anciens bellounistes ( *) venant du Sud ou des Kabyles dont les frères et les cousins ont choisi ou se sont trouvés par hasard ou par menace dans les rangs de la rébellion. Il est fréquent, durant les accrochages, de les entendre s’injurier en s’appelant par leur nom.
Les surnoms donnés à un sous-officier et à un caporal-chef m’inquiètent. J’ignore s’ils les ont emmenés avec eux du civil ou gagnés durant leur séjour en Algérie : le chourineur et l’incendiaire…
Nous partons pour trois ou quatre jours dans le Boumahni, zone interdite de Kabylie. En tenue camouflée, parfois en djellaba pour repérer, suivre et traquer avec l’aide sporadique des avions T6, les survivants des katibas qui ont échappé aux deux opérations K16 et K16bis (800 fellaghas au tapis à chaque opération). Maintenant ce sont des commandos de quelques hommes qui se dirigent vers Alger pour poser leurs bombes ou apporter des armes. Après deux jours de repos, nous repartons. Les kabyles m’apprennent comment extraire et découper un morceau de gâteau de cire dans un nid d’abeilles endormies pour l’hiver dans un tronc d’arbre. Comment recracher rapidement la cire et les abeilles avant que la chaleur de la bouche ne les réveille. Ce miel délicieux constitue une source énergétique agréable et coupe les rations froides qui nous alimentent durant nos missions. Cela permet aussi de diminuer le poids de la nourriture que nous emportons et de prendre une deuxième unité de feu plus sécurisante que des boîtes de conserves lors d’un accrochage. J’apprends à dormir peu et par très courtes périodes.
Beaucoup de chouf (observation), des heures immobiles pour suivre les moindres déplacements. Plus aucun kabyle ne doit résider dans cette zone interdite, mais peu à peu des familles se sont échappées des camps où elles étaient regroupées, pour éviter le mot déportées. Camps qui les emprisonnent plus qu’ils ne les abritent. Nous apercevons, à proximité des mechtas, les robes colorées jaunes, oranges ou rouges des femmes et des jeunes filles. Je suis frappé par le nombre de femmes enceintes dans cette région interdite aux hommes ! Des heures en embuscade, des déplacements de nuit, de rares accrochages de quelques secondes, des courses à la poursuite de fuyards, la pose de quelques mines bondissantes, placées sur les pistes empruntées par les rebelles. Mines que je retire trois jours après en espérant que personne n’ait déplacé le piège pour nous faire sauter… Un soir, après un rapide accrochage, nous ramenons un fellagha blessé au ventre, il s’est trouvé face à l’éclaireur de pointe, au moment où nous rejoignions discrètement le convoi qui ravitaille une section du bataillon en poste sur un piton. Je fais déposer le blessé sur un brancard avant d’aller prendre une douche, instant de bonheur après quatre jours et quatre nuits passés dans la nature sans se laver, se raser et les pieds trempés et détrempés pour avoir dès la première nuit marché des kilomètres dans l’eau d’un oued pour camoufler notre progression. A nouveau civilisé,

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