Marcel Aymé devant l Histoire
236 pages
Français

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Marcel Aymé devant l'Histoire , livre ebook

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Description

Voici, enfin, une étude historique très documentée de l'évolution politique de Marcel Aymé tout au long de sa vie (1902-1967). Des hommes de lettres, à la fois juges et partie, des universitaires hâtifs ou des documentalistes mal informés en ont souvent fait un homme de droite, voire un collaborateur. Or, la vérité est autrement plus complexe. Cet essai, riche en informations et absolument passionnant, est un document indispensable aux hommes et aux femmes de bonne volonté qui ont le souci de l'honnêteté intellectuelle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 janvier 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782414005413
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-00539-0

© Edilivre, 2017
Exergue

Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire.
Voltaire
Avant-propos
Quand on connaît bien l’œuvre d’un auteur et sa vie, on est toujours agacé, irrité ou révolté de lire certains jugements hâtifs de journalistes, de prétendus spécialistes d’histoire ou… des commémorations nationales. On s’indigne, on prend la plume pour envoyer aux intéressés des lettres caustiques, voire blessantes et puis, le temps passe. On finit par se dire que tous ces gens ne connaissent peut-être pas véritablement l’écrivain en question et qu’ils sont passés à côté de certains textes. On a eu beau les publier, ils ne sont peut-être pas parvenus jusqu’à eux. Même un Académicien français qui écrit un volume pour tenter de disculper son père, ce qui est louable, peut avoir quelques lacunes dans ses connaissances littéraires. On peut imaginer aussi qu’il a manqué de temps ou de curiosité intellectuelle pour savoir exactement quelle avait été l’attitude de Marcel Aymé, lorsqu’il l’a présenté parmi « les plus accommodants avec l’occupant » ou quand il le fait figurer dans une énumération d’« auteurs collaborationnistes ou sympathisants 1 », comme Brasillach, Drieu et Jouhandeau.
On se dit que le temps est peut-être venu de faire plus que ce que l’on a tenté jusqu’alors. On éprouve le besoin de reprendre les textes essentiels de l’écrivain en ce qui concerne ses liens avec la politique. On remonte même jusqu’à l’enfance, ignorée de beaucoup, et l’on essaie de faire comprendre son importance dans sa relation avec les responsables de la vie publique. On le suit pas à pas pour mettre en lumière ses réactions devant les différents événements historiques qu’il a vécus. On tente surtout d’expliquer en quoi il faut se méfier des apparences et des assimilations sans fondement. On réunit ainsi ce que l'on doit savoir sur l’œuvre et sur l’homme avant de les vouer aux gémonies et de les piétiner allègrement. On essaie d’être honnête en espérant que les détracteurs finiront par le devenir et trouveront leur chemin de Damas.
Bernard Frank a bien effectué ce trajet. On se dit que d’autres le suivront peut-être. Ainsi est né ce volume destiné à tous les hommes de bonne volonté, s’il en reste !
ML
1 . Ramon. Dominique Fernandez. Livre de poche, 2008, rééd. 2010 .
Chapitre 1 Un traumatisme de jeunesse
En 1929, Marcel Aymé, alors âgé de vingt-sept ans, devint célèbre grâce à La table aux crevés, qui reçut le prix Renaudot. C’était un roman où l’on retrouvait les paysans que l’écrivain avait côtoyés durant son enfance à Villers-Robert, petit village au sud de Dole, dans le Jura. Le sens de l’observation des mœurs de la campagne et la qualité du style séduisirent les membres du jury qui voulurent récompenser un auteur plein d’avenir. On s’émerveilla devant une intrigue pittoresque et originale, sans voir qu’elle cachait une blessure profonde chez l’auteur. Il est vrai qu’il l’avait bien dissimulée car les querelles politico-religieuses qui l’avaient tant fait souffrir n’y apparaissaient pas au grand jour. « Il y avait les calotins et les républicains », apprend-on au début du chapitre V. « À Cantagrel, les gens avancés étaient tout simplement républicains. […] Les calotins avaient conservé le nom que les premiers républicains, sous l’Empire, donnaient à la grande majorité de Cantagrel attentive aux conseils du curé payé par l’Empereur. » […] Mais, en définitive, « les calotins étaient républicains sans l’avouer. Comme tout le monde, ils pensaient que deux hommes tout nus sont égaux. » Bref, les différences n’étaient pas si grandes. Marcel Aymé n’avait pas voulu trop en dire. Il s’était contenté d’effleurer le sujet.
Il y revint malgré tout, en 1933, avec La jument verte. Les haines qui dressaient les villageois de Claquebue les uns contre les autres en raison de leurs conceptions différentes de la religion et de la vie publique y occupèrent une place plus grande, mais furent en partie masquées par celle de la sexualité. D’ailleurs, on a peine à croire aujourd’hui qu’elle pût autant indigner certains lecteurs. Et pourtant, ce fut tout à fait le cas, car un critique comme l’abbé Bethléem, dans sa Revue des lectures , très influente dans les milieux catholiques, rangea l’ouvrage dans la catégorie des « romans mauvais, dangereux ou inutiles pour la généralité des lecteurs » en s’insurgeant contre ceux qui en conseillaient la lecture. La conclusion était sans appel puisqu’elle déclarait : « La vérité, c’est que ce roman constitue bien un outrage aux bonnes mœurs, dans toute l’acception du mot. La critique littéraire n’a rien à y voir. Ce serait au Parquet d’intervenir » (15 août 1933). Cet homme d’église était peut-être un peu prude, mais son jugement reflétait bien celui du public de l’époque. On fut surtout sensible aux propos de la Jument sur les mœurs assez libres de la famille où elle avait vécu et l’on oublia le reste. On acheta le livre, on le lut et on s’empressa de le ranger à l’abri des regards indiscrets des adolescents dont il fallait protéger la pureté. Il y resta une bonne trentaine d’années, jusqu’à ce que les mœurs évoluent singulièrement. Marcel Aymé lui-même pensa un temps que ses gauloiseries avaient pu indisposer certains de ses amis. Sans nouvelles de Pierre Varillon, directeur des pages littéraires de L'Action française , avec lequel il avait sympathisé, il crut que la verdeur de ses propos était en cause. Il lui écrivit : « Ma femme avait promis à Mme Varillon de lui amener Colette [ fille d’un premier mariage de Mme Marie-Antoinette Aymé ] dès son arrivée à Paris, mais j’étais si peu à l’aise dans ma réputation de pornographe que je lui ai demandé d’attendre. »
Il faut dire que, dans La jument verte , la sexualité l’emportait sur tout et qu’elle constituait le critère essentiel. Ainsi, « […] tous les républicains soupçonnaient leurs adversaires non pas d’être impuissants, puisqu’ils se reproduisaient, mais de fonctionner à un régime diminué, avare. De leur côté, les réactionnaires les considéraient comme des dévorants, des frénétiques de la bagatelle, des imprévoyants de l’au-delà, et ils éprouvaient un sentiment de jalousie, comparable à celui d’une femme honnête pour une fille qui prodigue son ventre. » Somme toute, « à Claquebue, les convictions sincères, religieuses ou politiques, naissaient dans le bas du ventre. » De tels propos ne pouvaient que faire diversion. On s’arrêta à la grivoiserie et l’on oublia de considérer ce quelle dissimulait. L’apparence l’emporta sur la réalité d’une blessure profonde, celle de la haine due aux divergences d’opinions politiques et religieuses, celle de la guerre permanente engendrée par l’intolérance. Marcel Aymé en a considérablement souffert durant son enfance et jamais il ne s’en est guéri. Les traumatismes de la jeunesse sont indélébiles.
Toutefois, même quand ils sont conscients, ils ne s’avouent pas facilement. On les refoule au plus profond de soi, surtout quand on est pudique comme Marcel Aymé. On connaît la difficulté qu’il a toujours eue à se confier aux journalistes et cette réputation n’est pas surfaite. Marcel Aymé n’avait rien d’un cabotin qui livre ses pensées et ses sentiments intimes aux foules. Il préférait la discrétion et la dérobade à l’exhibitionnisme. Aussi devra-t-on attendre longtemps avant de comprendre ce qui s’est réellement passé à Villers-Robert et qui a été si déterminant dans sa sensibilité et dans son attitude fondamentale. Il s’est pourtant intéressé à plusieurs reprises aux enfants, mais il s’est bien gardé d’évoquer la blessure qui était la sienne. Le 26 septembre 1934, il publia dans Marianne un article consacré aux écoliers, en évitant toutefois de parler de lui. Il en fut également ainsi dans Vu , le 26 octobre 1935 et le 18 décembre 1935, à nouveau dans Marianne. Même, en 1936, quand il préfaça le recueil de photos d’Ergy Landau intitulé Enfants , il ne fit aucune confidence sur ses premières années. L’occasion était pourtant belle, cependant il n’en fit rien. Il se contenta de vanter les mérites et le talent de la photographe, sans évoquer quoi que ce soit de sa propre jeunesse.
Il faudra attendre 1958 pour apprendre quelque chose et commencer à comprendre. L’âge venu, l’écrivain a mûri et il peut désormais se dévoiler. Il a aussi beaucoup souffert et cherche à se libérer. Les premières confidences apparaissent dans la préface au livre de Paul Sérant : Où va la droite ? (Plon, 1958). La politique l’a meurtri, mais elle lui sert alors de catharsis. « J’étais âgé de deux ans lorsque mourut ma mère, explique-t-il, et mes grands-parents maternels qui m’avaient recueilli étaient des républicains fervents et militants. Mon grand-père l’était déjà sous l’Empire et, après avoir été maire de son village pendant trente ans, avait passé la mairie à son fils qui devait la garder pendant plus de quarante ans. Dès l’âge le plus tendre, j’ai entendu sonner contre la réaction, j’ai appris qu’il fallait être vigilant par-devers les cléricaux, être prêt à déjouer leurs complots et craindre le retour offensif des curés. » Marcel Aymé était né à Joigny, dans l’Yonne, en 1902, et après le décès de sa mère, il fut effectivement confié à ses grands-parents de Villers-Robert, dans le Jura, qui lui apportèrent beaucoup de tendresse, tout en lui causant aussi beaucoup de difficultés avec certaines familles du village. On était alors à l’époque où les Républicains cherchaient à soustraire l’État à la tutelle de l’Église. Cette lutte devait se solder par leur victoire en 1905, lorsque furent votées les lois insti

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