Le blues des oranges
58 pages
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Le blues des oranges , livre ebook

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Description

Les Noirs, les Blancs et les autres hommes se regardent d’un œil mauvais. Les oranges elles aussi sont en colère. Est-il vrai que l’on a choisi de modifier l’identité orange ? Est-il vrai que charlatans et scribes ont chatouillé la poudre ? Est-il vrai que se sont affolés, plans et armes de guerre ? Certaines oranges se disent Auttoques, les autres Allaux. Mais qui sait si les Auttoques renonceront à leur préséance ? Qui sait si elles se soumettront à l’insolence d’oranges nées de la dernière pluie ? Le feuillage sent le soufre ! L’Inattendu, sceptre immatériel, se tient pourtant là, au cœur de la violence qui monte…

Informations

Publié par
Date de parution 25 octobre 2016
Nombre de lectures 13
EAN13 9782312048628
Langue Français

Extrait

Le blues des oranges
Josué Guébo
Le blues des oranges
Halo en 15 planches
LES ÉDITIONS DU NET
126, rue du Landy 93400 St Ouen
À Bernard Dadié










Cette pièce a été écrite à Lomé, en 2011.
© Les Éditions du Net, 2016
ISBN : 978-2-312-04862-8
Prologue
Je ne suis pas Noir, je suis Marron. Le jour où les prétendus Noirs cesseront de se prendre pour des Noirs, l’humanité aura fait un pas de plus vers la vérité. Je ne suis pas Noir. Je ne le suis ni du point de vue chromatique, ni d’aucun point de vue. Là-bas, sur les hauteurs verdoyantes de Guékouzaliè, dans le Bois Djiboua, mes ancêtres ne se considéraient pas comme des « Noirs ». Ils se savaient juste des hommes. D’ailleurs, quand ils virent débouler des étrangers venus par bateau, ils les surent différents, certes, mais ne les désignèrent guère, par leur couleur. Ils les appelèrent « Troukpia » (Les-grands-minces, les échalas). Ils ignoraient que ces nouveaux arrivants étaient juste amaigris par de longs mois de diète imposée par une traversée souvent périlleuse. Les nouveaux arrivants les appelèrent les « Noirs » et se désignèrent eux-mêmes comme les « Blancs ». On peut se demander comment les « Troukpia » eux-mêmes se désignaient avant la rencontre avec ceux qu’ils appelèrent les « Noirs ». Avant d’avoir rencontré les autres peuples, il est presque sûr que les « Blancs » ne se considéraient pas comme « Blanc ». Ils se savaient juste Hommes, comme le savaient mes parents sur les hauteurs verdoyantes de Guékouzaliè. Puis survint la chute originelle : la langue de l’autre et ses pièges idéologiques. Le jour où les Hommes commencèrent à se prendre pour des « Blancs », ils cessèrent d’être des hommes, devenant ainsi les pions d’un jeu de dupes où l’échec humanitaire est l’issue la plus évidente. Le jour où les Hommes acceptèrent d’être « Noirs », ils cessèrent d’être des hommes, devenant ainsi la poche d’immoralité d’une humanité en mal de bouc-émissaire. Mais les couleurs ont la peau dure. Et il nous faut sortir de la nasse de leur charge idéologique. S’il faut à tout prix avoir une couleur, porter vaille que vaille les couleurs et les douleurs d’une équipe, je sortirais bien volontiers le « Noir » et le « Blanc » de la chaîne de la compétition. Leur charge idéologique fausse depuis trop longtemps le jeu de la minimale cordialité nécessaire à tout échange civilisé. Il ne sert à rien de cesser d’être Nègre quand on demeure Noir. « Nègre » est censé être une injure, « Noir » pas. Cela relève de la rigolade. Tout se passe comme si on pouvait biffer toute la charge négative, par un strict changement de niveau de langue. Rigolade. Moi, je suis Marron. Marron à l’image de ceux qui surent sortir de l’enclos de la servitude. Marron, en hommage à ceux qui eurent la force de dire non aux barbelés et à l’ignominie. Marrons comme ceux des miens qui comprirent très tôt que le Noir – comme sa variante le Blanc – avaient cessé, depuis longtemps, d’être des couleurs. Marrons comme ceux qui surent que le Blanc et le Noir n’étaient depuis des lustres que des blasons de la vieille querelle normative engagée entre une certaine idée du Bien et une idée certaine du Mal. Je ne suis pas Noir, je suis Marron. Le jour où les prétendus Noirs cesseront de se prendre pour des Noirs, l’humanité aura fait un pas de plus vers la vérité. Je ne suis pas Noir. Je ne le suis ni du point de vue chromatique, ni d’aucun point de vue. Là-bas, sur les hauteurs verdoyantes de Guékouzaliè, dans le Bois Djiboua, mes ancêtres ne se considéraient pas comme des « Noirs ». Ils se savaient juste des hommes. D’ailleurs, quand ils virent débouler des étrangers venus par bateau, ils les surent différents, certes, mais ne les désignèrent guère, par leur couleur. Ils les appelèrent « Troukpia » (Les-grands-minces, les échalas). Ils ignoraient que ces nouveaux arrivants étaient juste amaigris par de longs mois de diète imposée par une traversée souvent périlleuse. Les nouveaux arrivants les appelèrent « Les Noirs » et se désignèrent eux-mêmes comme les « Blancs ». On peut se demander comment les « Troukpia » eux-mêmes se désignaient avant la rencontre avec ceux qu’ils appelèrent les « Noirs ». Avant d’avoir rencontré les autres peuples, il est presque sûr que les « Blancs » ne se considéraient pas comme « Blanc ». Or voici poindre le soufre. Le feuillage sent le soufre. Le soufre touche aux hommes. Aux plantes. Aux pierres. Aux fruits. Aux oranges. Les Noirs, les Blancs et les autres hommes se regardent d’un œil mauvais. Les oranges elles aussi sont en colères. Est-il vrai que l’on a choisi de modifier l’identité orange ? Est-il vrai que charlatans et scribes ont chatouillé la poudre ? Est-il vrai que se sont affolés, plans et armes de guerre ? Certaines oranges se disent Auttoques, les autres Allaux. Mais qui sait si les Auttoques renonceront à leur préséance ? Qui sait si elles se soumettront à l’insolence d’oranges nées de la dernière pluie ? Le feuillage sent le soufre ! L’Inattendu, sceptre immatériel, se tient pourtant là, au cœur de la violence qui monte…
Personnages
Oguititè : C hef de l’assemblée des Auttoques
Pracsis : Officier supérieur de l’armée des Allaux
Xuzu : Aide de camp du Chef des Auttoques
L’un : Polémiste de la cité des Auttoques
L’autre : Polémiste de la cité des Auttoques
Le tout autre : Polémiste de la cité des Auttoques
Replète : Ambassadeur plénipotentiaire des Mandarines modifiées
Nauvatis : Parlementaire de la chambre des Allaux
Kossou : Officier supérieur de l’armée des Auttoques
Océane : Orange de la race des Allaux
Marthault : Orange du pays des ombres
Eschatault : Orange du pays des ombres
Soleille : Orange née d’Océane et de Kossou
L’assemblée : L’auditoire des Auttoques
Halo I
L’assemblée forme un demi-cercle. Une orange, d’âge respectable, se tient devant toutes. Elle s’adresse à l’auditoire.
O GUITITÈ
Citoyens, vous le savez, les vents frappent à nos sens, par trois portes distinctes : le tronc, les feuilles, la cime.
L’ ASSEMBLÉE
Instruisez-nous, Grand maître, instruisez-nous !
O GUITITÈ
À parler aux troncs, ils nous alertent de dangers mineurs. À confier aux feuilles leurs sentences, ils évoquent des tourments imminents.
L’ ASSEMBLÉE
Instruisez-nous, Grand maître, instruisez-nous !
O GUITITÈ
Mais à dialoguer avec les cimes, les vents n’ont que parole de menace ! Les vents ont parole amère. Nous avons jadis connu des orages, bravé bien des guerres mais, l’épreuve à nos portes est feu hors de raison !
L’ ASSEMBLÉE
Instruisez-nous, Grand maître, instruisez-nous !
O GUITITÈ
Pour en avoir le cœur net, j’ai commandé aux souffles de redire, sept aubes et sept aurores, leur sentence. Leur parole est sans appel : à nos portes s’élève une grande menace ; des vagues incandescentes blessant la berge d’un terrible feu…
L’ ASSEMBLÉE
C’est cela, Grand maître, c’est cela !
O GUITITÈ
Qu’en savez-vous, peuple de flagorneurs ? Je puis vous le dire : vous n’avez aucune idée du péril à nos portes !
L’ ASSEMBLÉE
Instruisez-nous, Grand maître, instruisez-nous !
O GUITITÈ
Ah ! De l’instruction ? De l’instruction ? Vous n’en voulez qu’aux heures graves, vous n’en voulez qu’en temps d’orages… Vous n’en réclamez qu’à l’article de la mort !
L’ ASSEMBLÉE
Instruisez-nous, Grand maître, instruisez-nous !
O GUITITÈ
J’ai toujours voulu porter à cette cité, la confidence des éléments. Mais la voix de vos grelots, chaque jour, a couvert celle de mes sentences , le bruit de vos rires, toujours, a noyé le dire de mes maximes. Et vous voudriez de l’instruction ? Aujourd’hui de l’instruction ?
L’ ASSEMBLÉE
Instruisez-nous, Grand maître, instruisez-nous !
N OIR
Halo II
Une assemblée. Bruit sourd de paroles mêlées. Une voix surplombe, soudain, les autres…
L’ UN
Avec un brin de colère.
Quel est donc ce my

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