Les loups de tchernobyl

Nicolas Dagorn

Description

Bannie de son clan, contrainte à l'exil, Fancy, la louve grise, fuit la zone d'exclusion de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Guidée par un instinct énigmatique, elle se lance dans une épopée qui la mène aux confins des steppes russes, là où le pergélisol atteint le paroxysme de sa fonte, libérant dans l'atmosphère quantité de bactéries qui ne demandent qu'un hôte réceptif pour se répandre. Plusieurs scientifiques et journalistes, inquiets de la disparition de la louve et des risques liés à son potentiel génétique mutant, se lancent à sa recherche pour tenter de percer le mystère d'une fuite qui ressemble à s'y méprendre à une quête avide de mort et de destruction. Au fil de leur périple, le groupe de chercheurs va être confronté à des changements environnementaux majeurs et à des événements hors de contrôle qui pourraient bien conduire à l'extinction inéluctable de l'espèce humaine.

Informations

• Publié par: Edilivre
• Date de parution: 03 décembre 2020
• Nombre de lectures: 1
• EAN13: 9782414479313
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Nicolas Dagorn
Les loups de

TCHERNOBYL
----------------------------INFORMATION---------------------------Couverture : Edilivre
[Roman (130x204)]
NB Pages : 464 pages
- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 32,48

---------------------------------------------------------------------------Les loups de Tchernobyl

Nicolas Dagorn
32,48 1015504
Nicolas Dagorn










Les loups de Tchernobyl

























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Texte intégral

Dépôt légal.
© Edilivre, décembre 2020


ISBN papier : 978-2-414-47932-0


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« Nous autres, civilisations, nous savons
maintenant que nous sommes mortelles. »
Paul Valéry
« Quand l’homme n’aura plus de place
pour la nature, peut-être la nature
n’aura-t-elle plus de place pour
l’homme. »
Stefan Edberg

À Élodie et à Fancy, étoiles filantes.
1
Prologue
Dans la banlieue d’Orange, au Canada, Lucie Mercier,
cinq ans, s’amuse sur le portique à balançoires qui domine
le Saint-Laurent. En contrebas de la falaise, les toits
d’aluminium reflètent la clarté de la lune qui resplendit à
l’aplomb de l’ancienne cité engloutie par les eaux.
En ce milieu du mois de juin, la chaleur étouffe la ville,
mais la brise portée par le fleuve caresse le visage pâle de la
fillette et atténue la brûlure de l’air.
Depuis plusieurs années, les températures s’affolent.
Chaque été paraît sans cesse plus chaud que le précédent. En
cette même place, l’an dernier, le mercure a atteint plus de
quarante-deux degrés durant six semaines consécutives. Un
record ! Aujourd’hui, il en affiche déjà trente-neuf et le
printemps n’est pas encore terminé. Des avertissements de
chaleur intense sont diffusés tous les jours et la population,
surtout la plus vulnérable, est appelée à faire preuve de
prudence.
Autour de la belle Lucie, l’agitation règne. Malgré l’heure
avancée du soir, beaucoup de familles sont venues ici pour
profiter de la fraîcheur nocturne et permettre aux bambins de
se défouler un peu. Lucie aime courir sous les étoiles. Elle se
prend souvent à penser que, parmi elles, se cachent des fées ou
des lutins malicieux.
9 Dans le parc à jeux, un groupe d’enfants s’amuse sur la
vaste construction représentant l’épave d’un galion pirate
jaillissant du sol. En ces temps perturbés, le passé renaît et le
présent sombre. Sur le pont du majestueux navire, un capitaine
hardi tient la barre, tandis que son équipage prend d’assaut une
frégate imaginaire chargée d’or et de diamants. Dans les cales
éventrées du bateau de forbans, d’autres aventuriers se perdent
en hurlant dans le dédale de parois et de tunnels qui serpentent
et s’entrecroisent sous des lumières fluorescentes.
Lucie apprécie ses moments hors du temps qui lui font
oublier, l’espace de quelques heures, l’absence de ses parents.
Elle s’enivre des odeurs portées par le vent. Juchée sur sa
balançoire, la fillette oscille sous les étoiles. Chaque
mouvement descendant provoque des chatouillements de
papillons dans le bas de son ventre. Elle adore cette sensation.
Bientôt, les parents de Lucie seront de retour pour quelques
jours. Lucie a hâte de les retrouver. Ils lui manquent tant !
Chaque séparation est un déchirement. Une puissance
destructrice qui écrase son petit cœur d’enfant. Si Lucie aspire à
se blottir entre leurs bras, l’événement qui l’excite par-dessus
prend à nouveau forme dans son esprit.
À la fin des vacances, Lucie commencera l’école. Pour de
vrai ! Elle attend cet instant depuis si longtemps ! D’ici peu, elle
sera enfin une grande ! Maman lui répète sans cesse qu’elle a
hâte de la voir en tenue d’écolière.
Tout en se balançant, l’enfant sourit et pense à cette
prochaine rentrée scolaire. Si loin. Si proche. Une rentrée dont
elle ne profitera pas puisque dans deux mois, Lucie Mercier
sera morte.
10 2
Fancy
Voilà près de six lunes que Fancy a quitté son groupe,
chassée par Baïka, la dominante. Azul, le mâle alpha de la
troupe s’intéressait trop à la jeune femelle et la matriarche
ne l’a pas supporté. Baïka a longtemps toisé Fancy de ses
yeux froids et ténébreux. Queue dressée, poil hérissé, la
doyenne a grondé avant de mordre. Derrière elle, Akira,
Blue et Charbon, trois des subalternes, ont fait front. Fancy
a vite compris qu’elle n’était pas de taille.
L’exil est devenu inéluctable.
Avant de tourner le dos à son ancienne vie, Fancy a jeté
un dernier regard au clan qui l’a vu naître. Puis elle s’est
éclipsée, la queue basse, sans bruit. Depuis son entrée dans
l’adolescence, Fancy était l’éclaireuse, celle sur qui tous
comptaient pour repérer les points d’eau, mettre à jour les
refuges ou débusquer du gibier. Ses aptitudes dans l’art de la
traque supplantent celles des autres. Aujourd’hui, la voilà
exclue, bannie, solitaire, ou presque.
Dans la fraîcheur du sous-bois, ses pas légers font
craquer des brindilles. La nuit tombe.
Elle progresse dans les herbes hautes, se glisse sous les
branches basses, contourne les bosquets d’épines. À
intervalles réguliers, elle s’arrête pour humer l’air, goûter le
11 vent, marquer les traces. Elle connaît cette terre dans ses
moindres détails.
À l’Ouest s’étalent les vastes plaines cultivées, territoire
hostile et inhospitalier sur lequel plusieurs des siens ont
laissé la vie.
Au Sud, les espaces souillés s’étirent à perte de vue. Les
animaux et la végétation contaminée ont, en ces lieux, repris
la place aux hommes.
Au Nord, aux confins de la grande rivière, s’étend
l’empire du clan d’Amadeus et Bahamut, ennemis
ancestraux des siens.
À l’Est, enfin, au-delà de la haute colline, commence le
Nouveau Monde, inconnu, obscur, imprévisible. C’est vers
cette contrée inexplorée qu’elle se dirige, longeant le cordon
sombre du cours d’eau qui serpente en contrebas et qui
délimite la frontière entre la horde du Nord et la sienne.
Fancy avance dans la pénombre bleutée de ce soir d’été.
Dans ce petit coin de Biélorussie, le soleil n’est pas tout à
fait couché que, déjà, le disque blanc de la nuit pointe
derrière la crête escarpée des monts bas qui bordent la
rivière Pripiat.
Le tumulte de l’eau résonne à ses oreilles comme un
doux glapissement.
Mue par la sécheresse qui enflamme sa gorge, la jeune
louve sort du sous-bois. Elle s’engage à découvert sur les galets
encore chauds d’une plage dissimulée par la végétation. La
quiétude de l’endroit l’apaise et l’alerte. Elle sait que les
secondes passées à boire la rendent vulnérable. Si près du
territoire ennemi, la prudence s’impose, mais Fancy a besoin
d’étancher la brûlure du manque. Elle compte sur la nuit
naissante pour l’envelopper et la camoufler aux yeux du
monde.
12 La jeune louve scrute les environs, évalue le danger et
s’avance avec circonspection dans le courant. Elle absorbe
plusieurs lentes et profondes lampées. Le liquide froid
emplit son corps, noie sa souffrance et apaise dans l’instant
ses chairs meurtries par le voyage. La caresse du breuvage la
fortifie. Une vigueur nouvelle l’assaille. La soif est assouvie.
Reste la faim.
La douleur vorace de la disette irradie son ventre et
ronge ses entrailles depuis plusieurs jours. Fancy se fatigue.
Elle doit manger.
Pas maintenant.
Des appels retentissent des contreforts du Nord.
Par-delà la rivière, les cris d’une meute qui approche
parviennent jusqu’à ses oreilles. Sur l’autre rive, dans la
combe qui ouvre sur la plage, le clan ennemi donne la
chasse. Fancy perçoit le bruit des branches qui se brisent,
des pierres qui chutent et des pattes qui retournent les