Transhumance - No 3 : Agence reporters associés
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Description

Jusqu’où peut aller l’avidité des gens? Comment peut-on exploiter les rêves d’adolescent en les amenant sur le sentier de la drogue, de la prostitution et pire encore, comment peut-on les vendre pour leurs organes ou des plaisirs sexuels outre-mer? L’agence «Reporters Associés» va-t-elle enquêter sur simple pressentiment d’une mère inquiète qui n’a que son intuition, mais n’est-ce pas plus fort que n’importe quelle preuve?
C’est pire que ce qu’ils avaient imaginé. Comment des êtres humains peuvent faire fi de leurs émotions et vendre leurs semblables. L’argent est-il le seul moteur ou y a-t-il des blessures si graves et si profondes que l’on veuille exorciser en remettant œil pour œil, dent pour dent. Rien ne peut être pire que ce que l’on a vécu, alors la vengeance n’est que normale et permise, mais, éteint-elle la douleur? Nos reporters vivront des moments d’angoisse extrême où le système ne peut punir les vrais coupables. Impossible que cela se passe au Québec... en êtes- vous certains?

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 12 mai 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782925117414
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0548€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

1
Je suis Julie Hamelin, j’ai vingt-cinq ans et ma vie est finie. La folie me guette. Les scènes de ma vie repassent en boucles dans ma tête comme si je les revivais pour une énième fois. Suis-je prédisposée au malheur, au mal qui m’habite ? Je suis en prison au centre de détention Leclerc à Laval, en attente d’un procès qui scellera ma destinée à tout jamais. N’ai-je pas été emprisonnée depuis ma naissance, le bonheur et la liberté ne faisaient pas partie de mon quotidien ? Pourquoi une petite fille n’a pas le droit à l’amour et à la protection de ses parents ? Pourquoi on ne m’a jamais aimée ? Je n’ai été importante pour personne, ni pour mon père, ni pour ma mère et pourtant, j’étais leur seule enfant. Personne ne s’intéresse à moi, je ne suis rien, une moins que rien, jamais personne ne m’a témoigné ne serait-ce qu’un tout petit peu d’affection pour la fillette ou l’enfant que j’étais. J’ai souffert de la faim, mes parents n’avaient pas le temps de s’occuper d’une braillarde comme moi. Je me souviens, avant même la maternelle, que je passais souvent des nuits seule à la maison, toute recroquevillée sur un matelas de fortune à repousser des fantômes qui étaient si réels à mes yeux. La petite fille de quatre ou cinq ans déjeunait avec des croûtes de pizzas laissées la veille par ses parents et amis qui avaient fait la fête toute la nuit et qui dormaient encore à deux heures de l’après-midi. Les fins de semaine étaient des cauchemars et les semaines un peu mieux parce que mes parents allaient travailler et qu’ils gagnaient suffisamment d’argent pour payer leur drogue et leur boisson qu’ils ingurgitaient jour après jour. Pourquoi moi ? Pourquoi cela m’est-il arrivé ? À cinq ans, on ne mérite pas l’indifférence et le mépris, pourquoi MOI ? J’aurais tout donné pour un câlin, une caresse, un mot gentil. À cet âge, je me tenais à carreau en m’effaçant la plupart du temps pour ne pas souffrir de la rage de mes parents, défoncés ou en manque de leur dose. Plus je vieillissais, plus les coups augmentaient, verbalement et physiquement, on aurait dit que le défoulement était total lorsque je ne bougeais plus, laissée presque pour morte. La punition s’accompagnait de réprimandes attestant que j’avais couru après et qu’ils ne méritaient pas d’avoir une enfant comme moi, sans gratitude pour tout ce qu’ils faisaient pour moi. Moi, je ne voyais que du mépris et de la déception dans leurs yeux et je me punissais de surcroît d’être aussi ingrate, car je les croyais. Tout ce qu’ils me disaient était vrai à mes yeux. Je méritais amplement les corrections qu’ils m’avaient infligées. J’ai bien compris depuis que mes parents sont mes bourreaux, ils m’ont vendue dès l’âge de dix ans pour prostitution et ces hommes m’ont fait vivre l’enfer. À cet âge, j’aurais préféré être morte et brûlée vive pour ne plus souffrir de ces agressions quasi quotidiennes qui me confirmaient que je n’étais rien sauf un boulet pour mes parents. Je ne pouvais pas m’échapper puisque mes abuseurs venaient à la maison. Pendant tout le temps que ces hommes profitaient de moi, mes chers parents descendaient au sous-sol après avoir encaissé les sommes requises pour quinze, trente ou soixante minutes. On apprend vite à compter, à estimer la souffrance à venir et à développer son imagination pour ne pas rencontrer dame folie qui rode durant tout le temps que vous êtes sous le joug de ces pédophiles. Au début, je criais et me débattais, mais cela aggravait mon cas et je recevais la fessée et de mon bourreau et de mes parents. Devenant un produit rentable, ils ne voulurent pas trop abîmer la marchandise et ils ont troqué les corrections physiques qui laissaient des bleus pour m’embarrer dans ma chambre au début, puis me jeter dans le coffre de la voiture stationnée au garage du sous-sol, glacial hiver comme été, pour m’aider à réfléchir, disaient-ils. Comme la qualité de la marchandise avait un impact sur le prix, mes parents prenaient soin de moi.
Ai-je fait pire que l’on m’a fait ? Je suis une victime, qui depuis ma tendre enfance, cherche à me venger et j’y étais presque, ma soif de réparation n’était pas assouvie lorsque ces trois reporters sont venus démanteler mon trafic si lucratif. Ils vont me le payer, je ne sais pas encore comment, mais ils paieront pour ce qu’ils m’ont fait, d’autres sont morts pour moins même si je ne les ai pas tués moi-même. Mon problème est que je n’ai pas de contact avec l’extérieur, personne n’est venu à mon aide, personne ne s’est aperçu de ma disparition. Où étaient-elles ces bonnes personnes qui me condamnent aujourd’hui, où sont-ils les défenseurs ? Moi, j’ai rencontré toute ma vie des persécuteurs, des violeurs et des tueurs, ce sont mes modèles, mes références. Je ne sais pas pourquoi je réclame vengeance puisque je suis morte la journée de mes dix ans. Ma tête le sait que je n’avais pas le droit de reproduire le mal que l’on m’a fait, mais mon corps réclame justice, toutes mes cellules sont imprégnées de l’ADN de mes bourreaux. J’ai autant de droits sur eux qu’ils en ont eu sur moi. Ils ont payé ou leurs descendants ont payé pour leurs instants de plaisir avec une petite fille même pas pubère.
Vais-je connaître un jour la paix intérieure ou serais-je toujours poursuivie par ces démons qui continuent de me violer psychologiquement tous les jours ? Moi qui ai amassé une fortune me retrouve sans le sou, la justice m’ayant saisi tous mes avoirs. Il me faut donc un bon comptable pour dissocier l’argent propre de l’argent sale; ce ne sont pas toutes mes compagnies qui ont servi la criminalité après tout.
Si l’on cumulait tous mes crimes, ils seraient assez nombreux pour la peine de mort dans certains états américains, mais ici au Québec, je m’attends à une sentence à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant vingt-cinq ans. On va me juger pour trafic de stupéfiants, réseau de prostitution, trafic d’humains et tentative de meurtre. Y a-t-il au moins un avocat qui saura voir en moi une victime et acceptera de me défendre en sachant les crimes horribles dont j’ai été l’instigatrice ?
Mon cœur alterne entre la satisfaction de ma réussite financière et le dégoût de moi-même, une femme sans scrupules. Il ne faudrait pas me demander mon sens des valeurs, car je ne saurais quoi répondre, à part l’argent. Tout se résume à une question monétaire. Avec de l’argent, on peut tout se payer, maison, bateau, avion et même du sexe avec des enfants. Impossible de se faire prendre quand le pouvoir de l’argent nous protège. Les vrais riches s’en sortiront alors que les moins bien nantis paieront la note de leurs vies ou de la suppression de leur liberté, car ce seront eux les coupables désignés. Qu’est-ce que j’ai fait ou pas fait pour me faire prendre ? Je ne suis pas assez riche ? Faut-il additionner notoriété et argent pour se sortir de toutes les situations ? Faut-il être un haut placé au gouvernement ou un chef de la mafia pour passer sous le spectre de la culpabilité ? Trop de têtes vont tomber si on inculpe telle ou telle personne, alors on vise juste au-dessous pour un semblant de justice. Encore là, je n’étais pas à la hauteur, si tu n’es pas tout, tu n’es rien et il me manquait quelques échelons pour atteindre l’intouchabilité.
Je dois me reprendre et ne pas discuter avec les démons de mon enfance qui reviennent pour me dire que je mérite ce qui m’arrive et d’accepter d’être sévèrement punie.
– Non, non et non, je n’ai plus dix ans pour subir sans réagir.
C’est toutefois sans grande conviction que Julie ébauche un projet pour sa défense. Elle a des circonstances atténuantes et ce sera facile de le prouver. Il doit bien y avoir encore un rapport à la DPJ pour prouver les sévices dont elle a été victime. Aux dernières nouvelles, ses parents étaient encore vivants, probablement à la recherche de clients dans le Vieux Montréal, se prostituant eux-mêmes maintenant pour payer leurs doses. Elle doit se dépêcher de les retrouver, car à la quantité de pilules de fentanyl qu’ils avalent, ils ne seront peut-être plus de ce monde dans quelques semaines. Quand même incroyable qu’après tout ce qu’elle a enduré, qu’elle ne se soit pas droguée pour apaiser sa douleur ou se créer un monde meilleur. Non, elle voulait une vengeance et la meilleure était de réussir, de faire payer ses douleurs à quiconque avait des rêves, car elle, on ne lui avait pas permis d’en avoir et elle s’était jurée de ruiner tous ceux des autres. Si elle ne pas pouvait en avoir, personne de son entourage n’en aurait le droit. Est-ce que la vengeance garde en vie ? Elle ne pouvait répondre à cette question, mais elle pouvait affirmer qu’elle était un bon carburant pour y arriver.
La vie, la vie, sa destinée allaient se décider, elle devait choisir un procès devant juge seul ou jury. Sa décision fut très rapide, plus facil

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