Néandertal ou le pouvoir de la branche qui siffle

Jean-Louis Jouanneaud

Description

Org et Toum, deux adolescents inséparables, vivent une enfance néandertalienne ordinaire dans le clan de Rouf, le chef de leur tribu. Un jour, la jeune Org découvre l'étrange pouvoir de la ''branche-qui-siffle'' et sauve Toum d'une mort certaine. Elle veut alors fabriquer d'autres ''sifflets'' mais, dans sa tribu, les filles ne sont pas autorisées à tailler des outils. Mortifiée, elle dérobe subrepticement une lame au Vieux-Gourk, le tailleur de pierres du clan.Org se retrouve alors bannie pour l'hiver qui s'annonce. Elle se réfugie dans une caverne connue seulement d'elle et de Toum. Ce dernier ne tarde d'ailleurs pas à la rejoindre en cachette de tous. Réussiront-ils à survivre aux rigueurs de la mauvaise saison ? Pour le savoir, suivez les traces de nos deux héros en plongeant sans hésiter dans les pages de ce petit roman haletant qui non seulement vous fera vivre une incroyable aventure mais aussi connaître la vie au temps de Néandertal.

Sujets

• Jeunesse

Informations

• Publié par: Le Verger des Hespérides
• Date de parution: 16 juin 2021
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782365873727
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Table des matières


Table des matières
Néandertal ou le pouvoir de la branche qui siffle
Première partie
1
2
3
4
5
6
7
Deuxième partie
1
2
3
4
5
6
Troisième partie
1
2
3
4
5
Quatrième partie
1
2
3
4
5
6
7
8
Cinquième partie
1
2
3
4
5
Épilogue
As-tu bien suivi l’histoire ?
Petites notes historiques
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Néandertal ou le pouvoir de la branche qui siffle
Jean-Louis JOUANNEAUD
Illustrations Minna Yu




Première partie




1


– Toum, tu viens ? On va jouer à se cacher !
Le garçon a hésité un instant. Org était son amie, mais il avait de bonnes raisons de se méfier de ses idées saugrenues. C’était elle qui, la dernière fois, l’avait fait grimper dans un arbre plein d’abeilles pour y voler du miel. Elle encore qui avait décidé de descendre dans un gouffre d’où il avait eu tant de mal à remonter…
– Et comment on se cache ?
Org a secoué son épaisse chevelure noire en montrant la rivière, dont les eaux bouillonnaient tout près d’eux.
– C’est facile ! On traverse sur les grosses pierres plates, là-bas. Sur l’autre rive, il y a des grands roseaux. On pourra s’y cacher en attendant que Barg et Ahn aient fini leur travail.
Toum a jeté un regard vers leurs mères, occupées à relever les filets. On faisait provision de poisson avant le départ du clan vers le sud et la grotte de l’Ours, où l’on passerait l’hiver. Mais pour les deux enfants, il était encore temps de s’amuser.
– Elles ne nous regardent pas, a dit Org à voix basse. Allons-y ! Tu me suis ?
Sans attendre de réponse, la fille, suivie de près par Toum, pas vraiment rassuré, a filé vers les pierres pour franchir la rivière. Sous leurs pas, l’eau courait en grondant. Elle a vite pénétré entre les hauts roseaux qui bordaient le cours d’eau. Derrière eux, Ahn et Barg manœuvraient pour extraire les poissons prisonniers du filet, avant de les jeter à terre.
– On commence à jouer, a expliqué Org. Tourne-toi et ferme les yeux jusqu’à ce que tu ne m’entendes plus siffler. Après, tu devras essayer de me trouver.


Ses bras longs et puissants ont saisi son ami pour qu’il lui tourne le dos. Elle s’est alors mise à siffler au creux de son oreille.
– Fuiiii… fuiiii. Tu n’ouvres pas les yeux tant que tu entends ça, c’est compris ?
Toum a hoché la tête tandis qu’elle reculait sans le perdre des yeux. Ses cheveux en broussaille, qui faisaient une touffe au sommet de sa tête, paraissaient aussi clairs que ceux d’Org étaient noirs.
–  Fuiiii… fuiiii
Elle a sans bruit écarté de ses deux mains vigoureuses un bouquet de roseaux qui lui bouchaient le chemin. Laissant les végétaux se remettre à leur place derrière elle, elle s’est mise à ramper pour atteindre un endroit sablonneux, où ne poussait qu’une plante aux épaisses clochettes mauves retombant en épis. Elle s’y est allongée, tout en cessant de siffler. Toum mettrait certainement quelque temps avant de la trouver ici.



2


Toum a tendu l’oreille. Org ne sifflait plus. Le grondement de la rivière couvrait les voix de leurs mères. Un vent vif s’infiltrait dans la haie de roseaux qui craquait.
– Org ?
Elle n’a pas répondu. Il fallait qu’il la cherche.
– Org ? Où es-tu ?
Le regard du garçon a fait le tour du lieu. Comme la plupart des membres de leur clan, son amie ne savait pas flotter. Il ne l’avait pas non plus entendue qui marchait sur les pierres. Ses sifflements s’étaient éloignés vers l’intérieur de la haie. Elle devait être par là, pas bien loin. Les yeux experts de Toum ont tout de suite repéré le bouquet de roseaux dont les tiges demeuraient un peu trop écartées. Org s’y était faufilée ! Toum a suivi la piste. Devant lui, la terre devenait sableuse. Quelque chose, doucement, a sifflé. C’était Org !
– Je t’ai trouvée. J’ai gagné ! À ton tour de me chercher !
Faute d’avoir obtenu une réponse, Toum a encore progressé de quelques pas, pour mieux voir d’où provenait le sifflement.
– Ce n’est pas toi ?
Quand il a fait demi-tour, le sifflement est revenu. Plus long, mais plus discret que celui de son amie. Le garçon s’est retourné, soudain inquiet. Une chose invisible écartait les tiges fluides des roseaux. Il a battu en retraite, mais trop tard. Un ruban aussi rugueux que froid a encerclé ses chevilles : un serpent-qui-étouffe. Une espèce sans venin, mais capable d’étrangler un jeune renne !
– Un serpent ! Un serpent ! Au secours !


Le fracas de la rivière a recouvert sa voix. Barg et Ahn étaient loin, et Org peut-être davantage. Ses deux mains ont tenté de saisir l’animal qui montait de ses chevilles vers ses hanches pour lui faire lâcher prise. Mais il était trop fort. Le garçon a réussi à le prendre par la tête, ce qui a amené le reptile à resserrer davantage son étreinte sur ses jambes. Sa fine langue fourchue est venue se balancer devant les yeux de Toum, dans lesquels les siens, d’un jaune vif, ont plongé. Il fallait résister. Et surtout, se maintenir debout !



3


Contente de sa cachette, Org s’était allongée sur le sable. Elle connaissait bien T oum. Elle et lui étaient nés dix hivers plus tôt, à trois lunes d’intervalle. Il savait observer et écouter à merveille. À présent, il devait observer les roseaux, essayer d’y remarquer quelque chose d’anormal, de trouver une trace d’elle. Peu de temps lui serait nécessaire pour réussir à la rejoindre.
Dans l’attente de le voir arriver, Org admirait le ciel, dont le bleu déjà pâle annonçait l’arrivée des premières fraîcheurs. La veille, autour du feu que les femmes allumaient chaque soir, Gourk-le-vieux, dont les mains avaient reçu des esprits le don de travailler la pierre, avait demandé la parole.
– Parle, avait dit Rouf, le chef du clan. Quelles nouvelles apportes-tu ?


La tête ovale de Gourk semblait étirée par la lueur des flammes qui dansaient. Le vieillard avait saisi une pincée de sable pour qu’elle puisse s’écouler entre ses doigts précis.
– La saison du soleil passera comme cette terre entre mes doigts, avait-il dit. Les rennes ont déjà commencé à marcher vers les terres que le grand froid n’atteint pas. Cette nuit, j’ai entendu les loups hurler. Ils vont se rassembler pour prendre la direction du pays des montagnes. Nous pouvons nous aussi préparer le retour du clan vers la grotte de l’Ours.
Rouf avait hoché la tête :
– Gourk sait parler en sage. Ses yeux voient, et ses oreilles entendent. Nous pêcherons et chasserons jusqu’à ce que nos réserves nous permettent de partir. Arm-le-sorcier consultera l’Esprit des ancêtres pour savoir s’il y est favorable.
Les yeux s’étaient tournés vers Arm. Capable de prédire l’avenir, grand connais seur des plantes qui guérissent le mal, mais aussi de celles qui tuent, le sorcier était à la fois redouté et respecté.
– La lune sera bientôt pleine, avait-il répondu. Ce sera le moment pour poser la question à l’Esprit des ancêtres. Il faudra lui offrir un jeune renne fraîchement capturé. Foush et Rhim m’aideront.
Foush et Rhim avaient acquiescé : offrir un sacrifice était la promesse d’un délicieux repas de viande grillée pour tout le clan. Rouf, soucieux de garder des réserves, savait se montrer généreux en présence de l’Esprit.
Le reste de la soirée s’était écoulé sans autre sujet d’inquiétude. La lune, presque ronde, éclairait les visages, parmi lesquels celui de Trom, au nez large et busqué. Plus tard, quand Rouf serait devenu trop vieux pour pouvoir guider le clan, c’est lui qui lui succéderait. Ainsi en avait décidé l’Esprit. Rhim était le grand frère d’Org. Premier enfant de Barg, âgé de treize hivers, il avait obtenu depuis peu le droit de s’asseoir parmi les chasseurs.
Les étoiles scintillaient dans le ciel lorsque Rouf a ordonné à Foush, dont le nom signifiait « Étranger » car il avait été recueilli par le clan alors qu’il n’était qu’un enfant, de faire le tour du campement pour vérifier l’absence d’animaux dangereux. Comme chaque nuit, les hommes veilleraient tour à tour sur le feu.
Chacun avait ensuite pu tranquillement s’endormir sous la tente en peau de renne, soutenue par d’énormes ossements de mammouth, qui servait de refuge au clan de Rouf.



4


Toum mettait plus de temps que prévu à retrouver Org. Il devait y mettre de la mauvai se volonté. C’était parfois comme ça avec lui. Il n’aimait pas trop jouer, et se prétendait vite fatigué. Org s’était relevée. Tout près d’elle, les fleurs mauves embaumaient. Avaient-elles des vertus guérisseuses ?
La jeune fille a cassé une branche d’un coup sec. Elle était aussi creuse qu’un roseau ! Avec précaution, elle y a posé ses lèvres et soufflé doucement. Cela a produit comme un petit cri très aigu. Amusée, elle a recommencé, avant de se retourner brusquement. Au grondement des eaux se mêlait un autre bruit, plus lointain, comme un appel angoissé. Quelqu’un criait son nom.
–  O oo rg !
C’était la voix de Toum. Il était en danger !
Elle a jeté le morceau de branche-qui-siffle au fond de l’étui en cuir pendu à son cou, a dévalé des fossés, volé par-dessus des rochers. En moins de temps qu’il ne faut au lapin pour rejoindre son terrier, elle avait retrouvé son ami, allongé sur le sol, immobile, ses deux bras prisonniers de l’étreinte du serpent-qui-étouffe. Elle a plongé sur la bête pour lui faire lâcher prise.
– Laisse-le, laisse-le !
Un puissant