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Description
Informations
Publié par | Iggybook |
Date de parution | 23 mai 2016 |
Nombre de lectures | 0 |
EAN13 | 9782363155818 |
Langue | Français |
Informations légales : prix de location à la page 0,0006€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
2065
CHRISTELE AUBRY
2016
Cet ebook a été réalisé avec IGGY FACTORY. Pour plus d'informations rendez-vous sur le site : www.iggybook.com
PROLOGUE
L’hiver deux mille soixante-cinq s’annonçait comme un des plus froids jamais répertorié. Le réchauffement climatique de la planète entrait dans une ère nouvelle. Les étés de plomb qui avaient asséché le continent faisaient place à des températures polaires.
En deux mille cinquante, après plusieurs années de dérèglement avéré, le ministère de l’éducation avait décidé de modifier, dans ses manuels scolaires, le chapitre sur le climat tempéré des plaines océaniques de l’Europe occidentale.
Les ravages des inondations et des cyclones observés de toute part dans le monde au début des années deux mille avaient précédé les premières alertes émanant des plus grands scientifiques. La controverse naissante sur l’origine de ces désordres n‘allait faire que croître au fil du temps.
Pourtant, en dépit de nombreuses études sur le sujet, personne n’avait prévu une telle accélération du processus.
La peur montait d’année en année et, à chaque record de températures, les suicides étaient soigneusement comptabilisés au même titre que les décès dus à la chaleur ou au froid. Devant l’impuissance de tous, le gouvernement avait décidé, avec l’accord du collège des sciences et de la presse, de contrôler toute communication sur le sujet.
DIANE
Diane claqua la porte de son appartement et s’engouffra dans l’ascenseur. Il venait d’être réparé après une panne consécutive au gel du début de semaine. Elle pensa à la vieille dame du douzième étage qui s’éreintait depuis deux jours à monter l’escalier de secours en béton. Elle pensa aussi aux enfants mais il n’y en avait plus beaucoup.
Il faut dire que l’urbanisme prôné au siècle dernier avait fait long feu. On avait cassé les barres qui hébergeaient les classes populaires et on ne les avait pas remplacées.
Après plusieurs années d’immobilisme où quelques architectes avaient été mis en avant pour leur concept résidentiel « un toit, un jardin » d’un esthétisme relatif et sans grande portée pour résoudre l’ampleur du problème, une crise sociale liée à un déficit de logements sans précédent avait menacé d’implosion l’ensemble de la société.
Dans l’urgence, on s’était mis alors à construire de hautes tours à la périphérie des villes selon des programmes qui rappelaient étrangement les grands chantiers d’après guerre comme celui qu’avait connu la ville du Havre.
C’est à cette date qu’avait été créée la cellule « Habitat 2100 » sous la tutelle du ministère du logement pour tous et de l’urbanisme. Elle avait la lourde responsabilité de piloter l’ensemble des projets jusqu’au siècle suivant et sa permanence après quarante années, tenait au fait qu’aucun gouvernement n’avait osé la démanteler, n’ayant aucun substitut à proposer.
Les premières subventions versées et les premiers programmes achevés, on en était revenu à un rythme de croisière certes plus favorable aux finances de l’état mais guère compatible avec les objectifs assignés. Ceci-dit, même si la situation demeurait tendue, tout le monde avait vu au moins un proche, un enfant, voire avec un peu de chance sa propre famille, bénéficier d’une place dans une de ses nouvelles tours providentielles. La colère était retombée pour un moment, et c’était le principal.
Diane serra le col de sa veste autour de son cou. L’écharpe qui recouvrait ses oreilles ne suffisait pas à la réchauffer. Elle grelottait et regretta vivement de ne pas avoir profité du samedi pour s’acheter un bonnet. La marée humaine qui avançait en ordre serré sous un cortège ondulant de chapkas, de cagoules et autres couvre-chefs de tout poil lui rappelait douloureusement son insouciance. L’entrée du métro affichait moins onze degrés, normal pour la saison. Heureusement, un train était à quai, elle n’aurait pas à attendre.
Le convoi s’ébranla et une douceur bienvenue se répandit dans le wagon. Elle se cala contre la vitre, et ferma les yeux.
Rodolphe Buray pénétra dans l’enceinte de la cour pavée qui abritait le siège de la cellule « Habitat 2100 ». Depuis que le centre de Paris était interdit aux véhicules motorisés, il prenait le métro.
Il n‘aimait pas beaucoup. La promiscuité l’avait toujours dérangé.
Cette masse de gens mal réveillés, parfois mal lavés, ces murs sales, le couinement des trains, le martèlement des portes, c’était déprimant. On s’étonnait d’ailleurs qu’une chose aussi ancienne que le métro ait pu durer. La réfection des stations, la pose de peintures non dégradables, le rafraîchissement des couloirs par des designers en vue, avaient du mal à cacher la misère. C’était un vieux dédale, hanté par des machines à bout de souffle, plein de rats et de graisse malodorante.
Rodolphe avait consulté un jour le dossier Métropolitain 2000 aux archives. Enfin un embryon de dossier puisque le projet était mort-né. Toutes les études montraient que le démantèlement était irréalisable. La ville n’aurait pas survécu à la poussière des travaux et à toutes les substances corrosives qui n’auraient pas manqué de se volatiliser dans l’air à la première tranchée. Sans compter la paralysie à la surface et l’insoluble question des millions de tonnes de gravats à déplacer.
Personne n’avait eu le courage, ou l’inconscience, de s’attaquer à la modernisation du métro de Paris.
Rodolphe sortit son badge IS -Identité Société- et la double porte en verre s’ouvrit. Le hall était désert. Il s’avança vers l’ascenseur et sélectionna l’étage après avoir montré son badge IP -Identité Personnelle- devant l‘écran Orange où le mot ACCES clignotait comme une invitation au voyage. Au cinquième étage, il se présenta devant la porte qui arborait un sigle discret « HABITAT 2100 » et appuya avec son pouce sur le carré gris à droite.
Un clic juste perceptible, il entra.
Le chauffage était à fond. Pétra, l’assistante de Direction qui virevoltait de la photocopieuse au téléphone le héla d’un - salut toi ! – enthousiaste. La familiarité de cette fille l’exaspérait. Elle était plutôt mignonne, du genre de celle qu’on recrute aussi pour l’effet à produire sur le visiteur ou