À bientôt
142 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

À bientôt , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
142 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

« À l'aube de ma vie, j'ai grandi à l'ombre du racisme et de l'antisémitisme. Mes parents et mon frère sont morts à Auschwitz en 1943. J'avais sept ans lorsque nous nous sommes quittés en 1939. L'OSE, l'œuvre de secours aux enfants, m'avait accueilli dans l'une de ses maisons d'enfants, le Masgelier, dans la Creuse, qui regroupait déjà de futurs orphelins. Des “Justes” juifs et non juifs m'ont sauvé de la barbarie nazie. Je me suis rendu à Auschwitz en 2009, le plus grand cimetière du monde, sans tombes, que des cendres. Là, je me suis surpris, tout le long de ma visite funèbre, à murmurer des paroles qui s'adressaient à ma famille. J'avais envie de lui raconter mon histoire, la suite de la leur ; et surtout qu'elle me réponde. Je savais que c'était impossible... Pourtant ce ne fut pas le cas. Ce livre, presque joyeux, fait revivre une seconde fois par l'écriture mon père, ma mère et mon frère. J'y apprends qu'ils connaissent tout de ma vie que je retrace en quelques épisodes. Je constate également qu'ils observent la Terre de là-haut, la France en particulier, son histoire et son devenir qui continuent de se dérouler sous leurs yeux. Ce dialogue “fictionnel”, je le situe à Auschwitz qui, après avoir été ce que l'Humanité a connu de plus sombre, pourrait servir de tremplin pour son renouveau. En voici le récit. »

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 janvier 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342033847
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

À bientôt
Charles Lew
Société des écrivains

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Société des écrivains
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
À bientôt
 
 
 
À ma femme,
À mes enfants,
À mes petits-enfants…
 
 
 
Un grand merci à ma fille Mylène pour son aide qui m’a été précieuse…
 
 
 
 
 
 
Septembre 2009
Mes parents et mon frère sont partis en fumée en août 1943 à Auschwitz. Crimes contre l’humanité ou d’inhumanité.
Sur le tard, il y en a qui veulent rencontrer Dieu pour se mettre en ordre avec l’au-delà ; moi, j’ai voulu rencontrer mes parents et mon frère là où ils ont disparu, gazés d’abord, et enfournés ensuite dans le four crématoire.
Je n’ai jamais voulu aller à Auschwitz avant, par peur peut-être, par faiblesse aussi ; la crainte d’être traumatisé encore plus par ces disparitions que je ne l’étais déjà, l’emportait sur « le devoir de mémoire ».
J’ai eu comme premier objectif celui de vivre, et j’ai vécu pleinement. C’est le meilleur hommage que j’ai pu rendre à ma famille disparue.
J’ai pensé que j’avais des choses à leur dire avant de partir moi aussi, et que l’endroit pour le faire serait sur place, sur le lieu de leur sépulture, le plus grand cimetière du monde.
Allons, courage, après avoir fui, je me trouvais devant la fameuse porte du camp de concentration, au bout de l’interminable voie ferrée qui y menait, détruite maintenant.
Auschwitz n’est pas le Louvre, et pourtant la postérité le transformera en musée. Elle a déjà d’ailleurs commencé. Le tourisme de la mémoire va s’y installer.
Impossible avant d’entrer sous le portail de ne pas penser aux cérémonies du 11 novembre 2004, où l’on voyait le président Chirac serrer la main des survivants de la « boucherie » qu’a été la guerre de 14-18. Ils n’étaient plus que trois, morts depuis. Dans une dizaine d’années, ce sera la même chose pour les déportés survivants et les fils et filles de déportés de France. Les témoignages de vivants n’existeront plus. Il reste encore ce temps-là pour combattre tous les négationnistes et ceux qui considèrent la déportation des Juifs, des Tziganes, des maquisards comme un « détail de l’Histoire ».
Le président Chirac, en reconnaissant la responsabilité de l’État français durant l’occupation allemande dans la déportation des Juifs de France, a inscrit dans l’histoire de notre pays son véritable visage.
Je savais que j’allais à la rencontre d’ombres, peut-être de fantômes. Le Père-Lachaise en est peuplé à Paris, mais les visiteurs qu’on y croise ne sont pas tristes. Serait-ce le cas ici aussi, car certains y viennent encore pour retrouver des souvenirs ?
Allons ! On ne s’est pas vus depuis 1939. Mes parents vivaient dans la France occupée et moi en zone dite libre. Ce n’était en tout cas pas le moment de faire ici la tête, ni la fête.
À Auschwitz, comme chacun sait , il n’y a pas de tombes. Il n’y a que des cendres qui se mêlent au gravier des allées. J’en ai ramassé un peu, de quoi remplir un petit sachet. La mémoire de ma famille était peut-être là. J’avais lu et revu, parcouru tout ce qui a été dit, écrit et montré sur les camps, les « bourreaux » de « la nuit et du brouillard », avec en tête la chanson de Jean Ferrat qui ne me quitte jamais. J’étais préparé, mais je n’ai pas échappé comme tant d’autres au choc émotionnel.
Une chanson encore du film de René Clair, À nous la liberté , me revenait à l’esprit : « La liberté, c’est toute l’existence, mais les humains ont créé les prisons. » Et les camps de concentration, aurait-il dû ajouter… Mais il ne savait pas encore en 1937.
Ce livre ne vient pas en plus des nombreux déjà écrits sur l’indicible. Il n’est qu’un support et souhaite emmener le lecteur ailleurs… Mais dans le cadre du camp, car c’est là qu’habite toujours ma famille.
C’est au pied d’un châlit, c’est-à-dire de lits superposés en bois brut vieilli, où s’entassaient les déportés pour dormir, qu’une voix m’arrêta net.
« Haïm », c’est mon nom en yiddish, Charles en français. Je levai la tête… Personne. Je cherchai autour de moi… Personne encore. Je rêvais, le lieu ne s’y prêtait pas… Mais l’émotion peut-être.
Mon nom se fit entendre à nouveau. Impossible ! Je croyais l’entendre. Mais la voix se fit plus présente, joyeuse même, et dans un français parfait, j’entendis :
— Ta mère, ton frère et moi, ton père, nous t’attendions depuis longtemps. Nous nous demandions si tu viendrais. C’est fait. Nous allons pouvoir se parler. Nous te suivons depuis notre mort… Notre seconde vie.
Je crus que j’étais devenu fou. Répondre , c’était entrer dans le processus de la folie.
D’autres visiteurs de la « nuit » passaient ; s’ils avaient vu et entendu des sons sortir de ma bouche, ils se seraient précipités vers les services de sécurité qui veillaient à l’entrée de chaque bâtiment, pour leur indiquer que quelqu’un s’était échappé d’un asile et profanait la quiétude du lieu.
Je restai sur le bord du châlit. Je regardai autour de moi. Toujours personne. Et je finis par murmurer :
— Bonjour.
Trois voix me renvoyèrent en écho ce bonjour.
— Bonjour, mon fils.
— Bonjour, mon frère.
Ma mère m’accueillait et mon frère parlait. Pourtant, il était parti des vivants sourd et muet, assassiné à sept ans.
— Tu peux nous appeler “Papa” et “Maman”, ton frère s’appelle toujours Simon.
— Comme Simon Futeral, mon cousin germain qui vient de mourir une seconde fois, après être rentré des camps de la mort.
— Oui, on le sait, on essaie de prendre contact avec lui, mais les voies célestes sont très encombrées. Il nous cherchera. On se parlera forcément, comme on le fait avec le frère de ta maman.
— Pourquoi se parler, vous ne vous voyez pas ?
— Non. Nos yeux ne perçoivent que les vivants. On t’a vu grandir, te transformer et maintenant vieillir.
— Alors, vous savez tout de moi et de mes proches ?
— Oui.
Mon père reprit :
— En mai 1940, je t’ai vu pour la dernière fois, tu avais sept ans, au “Masgelier” dans la Creuse, la maison d’enfants de l’OSE qui t’avait accueilli après l’entrée des Allemands en France et leur victoire que nous pressentions. Nous avons su, ta mère et moi, à mon retour à Paris, que nous ne te reverrions pas avant longtemps. Ta mère a essuyé quelques larmes. Puis les Allemands ont défilé dans Paris. Ensuite, nous n’avons jamais pu avoir de tes nouvelles ou t’en donner. Nous n’écrivions pas le français et seules les cartes-lettres étaient censées circuler d’une zone à l’autre.
T’écrire en yiddish, nous savions que tu le comprenais, c’était nous démasquer et en 1940, la peur nous tenaillait déjà.
Nous avons tenu jusqu’en juillet 1943 en travaillant clandestinement rue Corbeau, date à laquelle nous avons été arrêtés, transférés à Drancy et nous sommes partis pour Auschwitz le 31 juillet 1943, convoi 58. Nous étions mille, dont deux cent cinquante enfants.
Sache que tout ce que nous avons vécu n’est pas racontable. Ceux qui ont essayé de le faire sont encore loin de ce qui s’est passé réellement, tout en ayant eu raison de le dire avec leurs pauvres mots.
Ma mère continua :
— Le 3 novembre 1939, c’est ton père qui t’a accompagné à la gare d’Austerlitz pour rejoindre les enfants qui, comme toi, partaient pour le Masgelier.
L’OSE t’a pris en charge pendant treize ans, de 1939 à 1952.
Nous voulions te protéger au début de la guerre. Les alertes sur Paris nous obligeaient déjà à nous réfugier la nuit au métro Goncourt, qui servait d’abri à l’époque.
Au moment de nous quitter, je t’ai serré dans mes bras avec des larmes dans la voix. Je t’ai dit au revoir, mais c’était un adieu. Je l’ai compris par la suite.
Ensuite, nous avons vécu sans toi et avec ton souvenir. Nous te savions en sécurité en zone libre et bien vivant. Quelques cartes-lettres nous arrivaient de temps en temps, adressées en français à mon frère à Paris.
En août 1943, au moment de notre mort, de notre seconde vie, lorsque nous avons compris que notre “statut” nous permettait de percevoir et de voir la vie sur Terre, nous nous sommes précipités au Masgelier et t’avons aperçu, heureux parmi d’autres enfants. Je l’étais également, car je te voyais enfin grandir et quand je le désirais.
Je te disais bonsoir tous les soirs, en espérant que le vent porterait mes baisers vers toi.
— Oui, la bise du soir qui caressait mon visage, cela devait être toi.
— Tu as été un petit garçon vif. Le français a été vite appris malgré ton bégaiement prononcé. Tu étais manifestement heureux et bien intégré dans cette communauté qui avait accueilli de futurs orphelins.
Nous avons lu aussi ton livre, Le Masgelier , que tu as écrit il y a quelques années et qui résume bien l’état d’esprit dans lequel tu as évolué de l’enfance à l’adolescence. Nous avons admiré les éducateurs des diverses maisons d’enfants que tu as traversées et les Français non juifs qui t’ont accompagné et ont contribué à te sauver pendant la guerre. Nous aussi, nous les appelons les “Justes”.
— Et puis, il y a aussi les “Justes anonymes”. Tous les Français en connaissent au moins un qui, pendant la guerre, a rempli son devoir d’homme ou de femme en sauvant un Juif de la déportation. L’État les pourchassait, beaucoup de Français les sauvaient.
La maman de Jean-Marie Guillotin, le beau-frère de ma femme Liliane, est l’une de ceux-là.
La scène se passe dans le métro à Paris. En le prenant, Lucienne Guillotin remarque en montant une jeune fille portant l’étoile jaune. Dans la rame d’à côté, elle entend quelques cris. La police de Vichy procède à une rafle. Lucienne n’hésite pas une seconde, elle enlève son manteau et en recouvre les épaules de la jeune fi

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents