Blond Cendré
194 pages
Français

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Blond Cendré , livre ebook

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Description

Cet ouvrage est une bouffée d’oxygène face à la morosité d’un monde fabriqué de mythes et d’obscurantismes. Il dépeint l’épopée fantastique d’une vie ordinaire à travers un chemin d’humilité et de partage d’une parentalité bousculée.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 janvier 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332855756
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-85573-2

© Edilivre, 2015
Blond Cendré
 
 
Mon grand-père s’est pendu dans la grange. Il était tailleur de pierre, il avait sa carrière, un homme tourmenté cependant, car il fut déporté jusque dans l’actuelle Pologne, en Poméranie, dans la région de Gdansk, dans une ferme collective russe, retenu de longues années durant. Il est revenu cinq ans après la fin de cette guerre du nazisme, il a connu ma grand-mère, d’un second mariage, pour lui donner deux enfants, mon oncle et ma mère. On racontait qu’il s’agissait de quelqu’un d’autoritaire, la séquelle aussi, l’étroitesse d’esprit, comme l’outrage la réminiscence du captif se peut être finalement. Maman disait qu’elle regrettait de sa mère son gâteau de riz, dont elle a manqué de consigner la recette.
Moi je suis arrivé en plein boum du Peace and Love, né d’un monde orphelin, Jimi Hendrix venait de trépasser. J’étais un dur à cuire comme on dit, maman a dû me travailler toute la journée, j’ai néanmoins poussé mon premier cri à cinq heures du matin, malheureusement sans qu’elle ne puisse même aller aux toilettes, au grand dam des médecins. Aussi elle était souffrante, mais ma naissance eut raison de son infection pulmonaire, et elle guérit cependant de sa longue maladie.
De mon berceau je n’ai conservé que le souvenir d’une pierre d’église. Papa était un humble monsieur, il avait délaissé sa campagne, le fermage familial de bêtes, de vignes, de bois et de champs aux terres boueuses, la rivière et les chevaux qu’il avait tronqués pour l’existence pénible d’un ouvrier de base. Il possédait sa qualification mais ce n’était guère aisé. D’une mission de maintenance qu’il effectuait sur le site prestigieux de la cathédrale de la ville, il avait pu récupérer, dans les remblais des bombardements de la guerre, une belle pierre de façade qui m’est aujourd’hui revenue. Il avait ainsi pris contact avec le vicaire des lieux et je fus baptisé d’entre ces murs d’histoire nationale, en même temps donc, si bien que je m’y suis retrouvé aussitôt enterré.
De mémoire première nous habitions le logement privilégié d’une de ces infrastructures suburbaines tout juste sorties du sol, cette nouvelle ville qu’on qualifiait volontiers d’envergure haussmannienne à l’époque. On ne savait pas encore les ghettos que les coupe-gorges allaient en faire. La jalousie qui détruit tout, c’est le copiste, pédéraste et stérile. Mon père était pourtant un homme vaillant, mais il a toujours été rabattu par la malédiction de ce conformisme ignorant qui courait la cabale comme on chasse le lapin, la faribole chrétienne, la religion exotique d’une tradition ridicule, qui ne percevait de la force de nos audiences, la justesse du verbe, que l’assassine poursuite de barbares sans nom. Des drôles de malandrins de trop grossière convoitise, d’une perversion grotesque, de maître à esclave, d’une suspicion mue par la crainte affublée des conditions de nécessiteux qu’ils nous réclamaient au défaut de leur propre folie, parce que l’obscurantisme n’a jamais brillé plus que la lumière cinglante de l’assassin aveugle, la poisseuse paranoïa exacerbée. Nous étions des gens d’intention plus que de confusion. Ceux-là de basse mesquinerie voulaient voir Jésus mais ils acclamaient encore Barrabas.
La vérité sera toujours un nom propre.
Voilà comment je me revois encore trôner ce boudoir de bois, percher sur cette chaise de bébé, laissé seul l’espace d’un instant dans la petite cuisine aux rideaux de vichy rouge et blanc, pendant que mes parents s’affairaient dans la pièce adjacente. Je me suis retrouvé abandonné, aussi je poussais des hurlements, gigotant tellement pour les rejoindre que je finis par faire basculer en arrière le malheureux promontoire qui alla s’écraser en fracas sur la dalle. Enfin ils accouraient. C’est le premier souvenir véritable que je garde de mon existence.
Maman avait les jambes toutes poilues, et j’avais regardé cela d’un œil pessimiste, elle devra envisager son remède. Les boîtes de conserves aussi étaient encore primitives, elles étaient toutes dépourvues du moindre packaging, d’aucun attrait visuel, elles demeuraient tout ce qu’il y a de plus ordinaire, sans couleur, sans image, ternes et tristes.
Mais depuis la petite société s’est égayée, les hommes comme les femmes font peau neuve, et l’artifice a supplanté la nature. Pourtant cette humanité est devenue plus imaginaire que jamais, la modestie ne s’identifie désormais qu’à son seul décor, exit le paysage, sa mémoire demeure photogénique, des souvenirs éphémères qu’on se fabrique pour l’inexistence d’un monde de plastique et d’apparence, un monde policé qui se cherche encore, définitivement oublié.
Et c’est tellement heureux d’aimer ses enfants.
Je me souviens encore de ma petite enfance, quand maman avait peur des chiens, du berger allemand qui rôdait sur l’herbe des espaces verts qui enjolivaient le périmètre, quand il fallait se dépêcher de rentrer de peur que la bête n’eût l’idée folle de nous attaquer et croquer ma chair tendre. L’hiver avait parfois triste allure et la neige était une bénédiction. C’est ainsi qu’un de ces jours blancs, près de la passerelle qui menait au petit centre commercial où se trouvait l’enseigne d’un Coop , le magasin d’alimentation qui délivrait ses belles images d’indiens qu’on collectionnait, avec en face aussi, la librairie du programme télé, c’est ainsi, donc, qu’à cet endroit précis, je découvrais une pièce de cinq francs. Elle brillait rutilante dans son éclat argenté, et nous en étions incroyablement surpris, c’était le don même du ciel qui se manifestait à nous. Et la chose la plus étonnante fut que le prodige se produisit plusieurs fois, maman me disait de regarder encore en passant et je brassais la neige avec mon petit pied et la pièce apparaissait comme la manne. Nous étions d’un statut modeste, sans être pauvres toutefois. Papa n’avait point l’orgueil, mais il était fier les beaux jours.
Mes deux parents travaillaient, je passais tout mon temps chez une nourrice qui m’expédiait au lit avec mon morceau de bœuf-mode encore en bouche, une viande si élastique qu’écœurante que je ne pouvais pas avaler. Et j’avais précautionneusement dissimulé mon affliction, quand je dormais, coincé entre la joue et la mâchoire quand je parlais, pour la confondre plus tard. Ma mère qui était venue me reprendre fut stupéfaite de constater que le repas du midi était encore entre mes dents. J’entendis des hauts de voix, ceux de maman qui assignait cette nourrice tyrannique à sa médiocrité. Je ne suis jamais revenu.
Bien que Noël fût une fête que j’appréciais particulièrement, j’étais toujours déçu de n’avoir pas les jouets dont je rêvais, quand je retournais encore et toujours le petit carnet de publicité qui les cataloguait. Je consignais pourtant mes lettres au père Noël, mais elles ne servaient qu’à déstabiliser mes parents que je devais bouder lorsque je retrouvais, au matin de la fête, le sapin encombré d’une mauvaise garniture. Au fond, je savais bien qu’il n’existait pas ce monsieur qui réjouissait les enfants pendant que d’autres n’avaient pas cette chance. Ils découvraient le monde les yeux baissés, consignés pour toujours à l’exubérance choquante de ces foires qui dérangent, moins dénaturés toutefois que ces roublardises aux intentions cinglantes des pires trônes d’agressions, d’autant de tricheurs demeurant plus idiots qu’usurpateurs finalement. C’était le martyr d’un Jésus qu’il fallait pleurer contraint à l’hérésie de ceux qui le courtisaient. La confusion put être séduisante dans sa peine, mais d’autant erronée que ce perpétuel défilé lapidaire de la prostitution d’un obscurantisme dans son avération trop populiste. J’étais désabusé, et Noël avait perdu sa magie, de recoupements erronés, la vanité d’une imposture en son délit d’oblitération, l’ignorance pétrifiée d’un rendez-vous manqué, il était tard mais ce n’était pas une balance, c’était la lettre qui faisait la différence, parce que l’enfant que j’étais n’avait fait que jouer au père Noël. De filouterie se voyant confondue la bêtise, on venait d’inventer la vie.
Il avait grêlé ce jour-là, et le parking formant comme une cour intérieure entre les immeubles, tapissé de cette mélasse givrée qui venait s’amonceler dans les coins et rebords des bâtiments en tas jonchés de glaçons qu’on avait déblayés à la hâte, prenait des allures décrépies au regard du dimanche ennuyé, de paysages éteints que fuyait la course éperdue d’un hiver si lâche de légitimité.
Nous allions chez ma grand-mère paternelle, celle de la transhumance de ces moutonnades qui nous avaient toujours séparés, des champs tristes à perte de vue, des croix de panurges qui la convainquaient encore de médiocrité, elle qui n’avait rêvé que d’édifier un grand domaine, d’une sanction demeurée trop égoïste cependant, l’œuvre d’une nature morte seulement, d’un œuf de poule qui repose désormais à six pieds sous terre.
La ferme était boueuse, la vieille femme voutée était veuve depuis longtemps, et je restais retranché dans mon for intérieur, le chocolat et la brioche au goût moisi ne m’avait pas convaincu. Ils disaient que j’étais timide, mais je tenais ma réserve, surplombant la situation, l’on me jetait la pierre mais je dominais toujours.
Papa avait le reproche de sa mère qui l’avait relégué aux travaux des purins lorsqu’il décida de rejoindre la ville et d’abandonner les siens.
Il se présentait toujours comme le mal-aimé de la famille, et nous suggérant la tyrannie dont il avait dû s’accommoder, il nous racontait que sa mère stockait les récoltes de ses pommiers dans sa chambre sans qu’il n’eût jamais son mot à dire, d

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