Cahiers Albert Cohen N°25
134 pages
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Cahiers Albert Cohen N°25 , livre ebook

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Description

Au nom d’Albert Cohen est attachée l’image d’une œuvre inclassable, qui échappe à toutes nos normes, qui bouscule nos habitudes de lecteur. Radicalité comique, lyrique, polémique : on trouve là une façon souveraine et absolument inattendue de renouveler le genre romanesque. Si l’écrivain a affirmé avoir cessé de lire dans la trentaine, son œuvre est pourtant marquée par ce qui pourrait tenir lieu d’une lutte avec et contre la littérature. Car ses textes regorgent d’allusions, de citations, de parodies, de pastiches, de réécritures parfois dissimulées, parfois affichées, où l’écriture se questionne elle-même dans le miroir de celle des autres. Les études réunies ici auscultent les nombreuses facettes de ce rapport avec la littérature, questionnent le rôle des modèles et contre-modèles, des influences et des inspirations, qui déterminent la manière inédite dont Cohen construit tant son esthétique qu’une éthique de la littérature.

Informations

Publié par
Date de parution 22 février 2016
Nombre de lectures 4
EAN13 9782304045611
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les cahiers d Albert Cohen
Albert Cohen : la littérature à l épreuve

Mathieu Bélisle

2016
ISBN:9782304045604
Cet ebook a été réalisé avec IGGY FACTORY. Pour plus d'informations rendez-vous sur le site : www.iggybook.com
Dans la même collection
Cahiers Albert Cohen n° 8, Lectures de Belle du Seigneur , 2008
Cahiers Albert Cohen n° 13, Visages d’Albert Cohen , 2013
Cahiers Albert Cohen n° 15, Ô vous frères humains , 2005
Cahiers Albert Cohen n° 16, É criture et identité : Hommages à Norman David Thau , 2006
Cahiers Albert Cohen n° 17, Albert Cohen et la modernité littéraire , 2007
Cahiers Albert Cohen n° 18, Animal et animalité dans l’œuvre d’Albert Cohen , 2008
Cahiers Albert Cohen n° 19, Cohen « humorialiste » : Hommages à Judith Kauffmann , 2009
Cahiers Albert Cohen n° 20, La folie dans l’œuvre d’Albert Cohen , 2010
Cahiers Albert Cohen n° 21, Figures de l’étranger , 2011
Cahiers Albert Cohen n° 22, Retour sur Mangeclous , 2012
Cahiers Albert Cohen n° 23, La géographie imaginaire d’Albert Cohen , 2013

 
 
 
© Éditions Le Manuscrit, 2016
EAN : 9782304045604
 
Cahier Albert Cohen n° 24, Théâtralité d’Albert Cohen , 2015
Avant-propos
 

 
Mathieu Bélisle et Maxime Decout
Que reste-t-il aujourd’hui d’Albert Cohen ? L’image d’un romancier inclassable, chantre d’une passion exténuée dans un XX e  siècle marqué par l’engagement puis l’autotélisme littéraire, porte-parole d’une judéité intempestive et contradictoire, explorateur du social et de ses vils manèges. Et surtout un rapport extrême des lecteurs qui va de l’engouement inconditionnel à la répugnance. Cohen ne laisse pas indifférent. Mais un préjugé perdure, et l’écrivain n’est pas étranger à sa fabrication : c’est celui d’une œuvre marginale, presque météoritique, à l’écart des écoles et des mouvements, comme soustraite aux influences, une œuvre que la critique savante peine parfois à comprendre et à situer, et à propos de laquelle elle préfère souvent se taire. Il est vrai que l’œuvre de Cohen ne ressemble à aucune autre, par les questions qu’elle affronte et l’imaginaire qu’elle déploie, par sa langue vivante et généreuse, à laquelle se mêlent des rythmes étonnants et des accents anciens, par les personnages plus grands que nature dont elle raconte les aventures. Et surtout, par l’ambition et la confiance qui l’animent, elle qui ne cesse jamais, à l’ère du soupçon généralisé, de la crise du roman et de la littérature en voie d’épuisement, de croire aux ressources infinies du langage et à la capacité du roman de se mesurer au monde, de révéler une part inconnue de l’expérience, bref d’être encore et toujours le lieu par excellence de l’exploration de l’existence humaine. Œuvre à la fois neuve et ancienne, qui parle de son époque mais vise l’universel, elle parvient à rénover la langue en profondeur, en bousculant le rôle de l’adjectif et de la métaphore, à donner au sujet romanesque une qualité de présence et d’authenticité sans jamais sacrifier à l’exigence de lisibilité.
Mais le « silence » de la critique au sujet de l’œuvre de Cohen tient aussi en partie aux raisons qui l’ont rendu célèbre à la fin de sa vie, lui qui n’a jamais cessé, dans ses interventions nombreuses et très médiatisées, de vouloir se démarquer de ses collègues, les écrivains, érudits et autres gens de lettres, en laissant entendre qu’il était un amateur, que la littérature était le dernier de ses soucis, qu’il ne lisait plus depuis longtemps, ou alors si peu, juste assez, en fait, pour constater que les œuvres de ses contemporains étaient sans intérêt ou sans rapport avec la sienne. Si bien qu’on peut être porté à croire que Cohen, au contraire de Proust, Gide, Borges, Perec, Robbe-Grillet ou Duras, qui en marge de leur œuvre romanesque proprement dite ont livré une œuvre critique souvent généreuse, n’a jamais sondé, pour les renouveler ou seulement les comprendre, les fondements de l’écriture, qu’il a écrit son œuvre dans l’ignorance souveraine de toute littérature. Or les textes que nous réunissons dans ce dossier font la preuve qu’on ne saurait se tromper davantage.
La grande originalité de Cohen tient au fait qu’il choisit d’exprimer sa pensée critique non pas en dehors de ses romans mais à travers eux , comme s’il cherchait à penser la littérature en acte , dans le mouvement même de l’écriture et de l’invention. Ses textes sont remplis de pastiches, de parodies, d’allusions, de citations, de réécritures, de coups de fouet contre les normes littéraires instituées et de coups d’encensoir à destination d’esthétiques désuètes et contradictoires, une présence « critique » qui jamais ne porte ombrage au récit ni ne l’emporte sur lui mais contribue simplement à le travailler de l’intérieur. Ces œuvres marquent leur dette à l’égard de modèles décisifs, ouvertement revendiqués ou partiellement cachés (Cervantès, Rabelais, Diderot, Rousseau, Stendhal, Joyce, Zangwill, Spire, Fleg, Meredith, Benda, Proust), expriment leur refus de certains écrivains (Kafka, Racine, Tolstoï) et attestent des influences plus diffuses, sous la forme d’ornements ou de mots d’esprit corrosifs (Sartre, Bergson, Corneille, Hugo). La diversité des références, les attitudes et les idées contraires qu’elles génèrent, tout cela place l’œuvre de Cohen dans une sorte d’entre-deux, dans le lieu de l’indécidable. Car s’il n’est pas un auteur réconcilié avec le vaste panthéon de la littérature et reste de ce fait un impensé, s’opposant à toute idée de système, de classement, d’anthologie factice d’une littérature unifiée et pacifiée, il n’est pas non plus possible de le placer sur le terrain d’une littérature émancipée de toute attache, d’une fiction de l’œuvre sui generis . Tous ses modèles et contre-modèles, ses influences et ses inspirations, dont la liste donne le vertige, il ne s’agit pas seulement de les décrire et d’en mesurer l’importance, mais de réfléchir à la manière dont ils fondent une esthétique, une éthique, et – pourquoi pas – une mystique de l’œuvre, lesquelles se définissent par ce qu’il faut bien considérer comme une lutte avec et contre la littérature.
C’est là l’autre grande marque d’originalité de l’œuvre de Cohen que de chercher à embrasser la littérature dans son ensemble – la littérature de tous les siècles, de toutes les traditions, de tous les genres – plutôt qu’un nombre restreint d’œuvres, comme c’est le cas de la plupart des esthétiques marquantes au XX e  siècle (Sartre contre le naturalisme et Mauriac, Robbe-Grillet contre Balzac, Blanchot aux côtés de Kafka, Mallarmé et Rilke). La mise en fiction de ce rapport à la littérature est précisément ce qui empêche les refus et les détestations de se « figer » en un ensemble de prescriptions. C’est que la moindre proposition est susceptible de recevoir des lectures contradictoires, d’être débordée à l’intérieur même de l’écriture. Le lyrisme et le roman d’amour ? Investis massivement et mis à distance ironiquement. Le romanesque et l’aventure ? Incandescents et sans cesse dégonflés par l’humour. Le comique ? Outré mais toujours borné par le retour du lyrisme ou du romanesque. Ces logiques circulaires, volontiers paradoxales, on est saisi de voir à quel point elles s’adossent à la profonde unité de l’œuvre. Car c’est à un mariage surprenant des traditions les plus hétéroclites, voire les plus antagonistes, que Cohen procède : humour juif, conte oriental façon Mille et une nuits , souffle biblique, roman psychologique, sentimental, social, héroï-comique, burlesque, grotesque, prose poétique. À quoi s’ajoute un feu d’artifice de techniques narratives : focalisations, monologues intérieurs, intrications de discours, dialogue théâtral, versets, digressions, métalepses…
Ceci dit, jamais la présence « massive » de la littérature, de son panthéon, de ses techniques et de ses procédés, ne conduit l’œuvre à se refermer sur elle-même ou à se déréaliser. Cela tient d’abord au fait que cette présence, aussi importante et signifiante qu’elle soit, ne l’emporte jamais sur le récit et les personnages eux-mêmes, qu’elle ne les remplace pas mais se mêle à eux – comme une « couche » supplémentaire que le lecteur peut choisir de voir ou de ne pas voir. Mais surtout, cela tient à l’idée même de littérature défendue par Cohen, qui insi

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