Ceci est mon corps
106 pages
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Description

Par l'auteur de La Fabrication de l'aube - Prix des libraires 2006
Qui était l'homme derrière Jésus de Nazareth et qu'est-il advenu de lui? Étonnamment, c'est dans les bras d'une femme que nous le retrouvons ici, fragile devant la mort, mais nullement brisé. Au contraire…
Ceci est mon corps n'est ni plus ni moins que « l'aveu d'un homme que rien n'exauça mieux que l'amour », qu'une troublante confession que Jean-François Beauchemin nous convie à écouter au fil de ces pages bruissantes des murmures de la terre, et dans lesquelles est célébrée presque à chaque phrase la beauté tragique du monde.
Finaliste au Prix littéraire du Gouverneur général 2008 - Catégorie Romans et nouvelles
Titulaire d'une mention d'excellence au Prix du Roman 2008 des Écrivains francophones d'Amérique
Dans la nuit tiède de l'Orient, un vieil homme murmure à sa femme mourante, plongée dans l'inconscience, des paroles sur le temps qui passe, le doute, l'amitié, la douleur, les enfants, le hasard, l'amour. Un singulier dialogue à une voix s'établit là, dans le halo d'une lampe, où se traduisent tout à la fois un extraordinaire sentiment de vivre et l'infinie tristesse des destins qui s'achèvent.
Cet homme, on le déduira bientôt, s'appelle Jésus de Nazareth. Survivant à la croix romaine, il a vécu pendant plus de cinquante années auprès de Marthe, la sœur de son meilleur ami, Lazare de Béthanie. Jusqu'à cette nuit ultime, il n'avait guère parlé de lui-même, des événements l'ayant conduit au supplice, de la pensée foudroyante qui l'avait fait, à trente-trois ans, se détourner de Dieu. Mais l'heure n'est plus au silence ou, plutôt, l'heure est venue d'opposer au silence de la mort une parole serrant de près cette vie qui s'enfuit.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 septembre 2012
Nombre de lectures 2
EAN13 9782764417089
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L i t t é r a t u r e d’ A m é r i q u e
Collection dirigée par Normand de Bellefeuille et Isabelle Longpré
Ceci est mon corps
Du même auteur

Du même auteur

Comme enfant je suis cuit, roman, Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, Montréal, 1998.
Garage Molinari, roman, Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, Montréal, 1999.
Le Chien qui voulait apprendre le twist et la rumba, texte paru dans Récits de la fête, collectif d’auteurs, Québec Amérique, coll. Mains libres, Montréal, 2000.
Mon père est une chaise, roman jeunesse, Québec Amérique, coll. Titan+, Montréal, 2001.
L es Choses terrestres, roman, Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, Montréal, 2001.
Le Petit Pont de la Louve, roman, Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, Montréal, 2002.
Ici Radio-Canada : 50 ans de télévision française, en collaboration avec Gil Cimon, Les Éditions de L’Homme, Montréal, 2002.
Petits mais futés, guide de sécurité pour les enfants, en collaboration avec Marcelle Lamarche, Les Éditions de L’Homme, Montréal, 2003.
Turkana Boy, roman, Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, Montréal, 2004.
Le Jour des corneilles, roman, Les Allusifs, Montréal, 2004.
P RIX F RANCE- Q UÉBEC/ J EAN H AMELIN 2005
P RIX DU LIVRE FRANCOPHONE DE L'ANNÉE 2005, I SSY- L ES- M OULINEAUX, F RANCE
Voici nos pas sur la terre, poésie, Le Noroît, Montréal, 2006.
La Fabrication de l’aube, récit, Québec Amérique, coll. Littérature d’Amérique, Montréal, 2006.
P RIX DES LIBRAIRES DU Q UÉBEC 2007
Quand les pierres se mirent à rêver, essai, Le Noroît, Montréal, 2007.
Jean-François Beauchemin
Ceci est mon corps
roman
Crédits
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Beauchemin, Jean-François
Ceci est mon corps

(Littérature d’Amérique)
ISBN 978-2-7644-0594-9
ISBN 978-2-7644-1346-3 (PDF)
ISBN 978-2-7644-1708-9 (EPUB)
I. Titre. II. Collection : Collection Littérature d’Amérique.
PS8553.E171C42 2008 C843’.54 C2007-942254-3
PS9553.E171C42 2008


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Dépôt légal : 1 er trimestre 2008
Bibliothèque nationale du Québec
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Mise en pages : Andréa Joseph [PageXpress]
Révision linguistique : Diane Martin
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Adaptation de la grille graphique : Louis Beaudoin
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©2010 Éditions Québec Amérique inc.
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Soudain, le centurion ordonna
S oudain, le centurion ordonna qu’on se saisisse de moi et qu’on me couche sur le bois. Ce fut un moment de terreur extrême, bien pire que la mort elle-même, qui marque la fin des douleurs. Du sang gicla, mes mains se convulsèrent, arrêtées dans le mouvement naturel du bras qui veut se plier lorsque le corps est blessé. Je ne me rappelle pas mon cri. Je n’en garde aujourd’hui que la sensation d’un monde s’échappant de moi. Je conserve en revanche le souvenir bouleversant de tes pleurs, de l’affolement sur ton visage que je ne cessais de guetter dans la torture. J’entendais qu’il eût fallu me crever les yeux. C’eût été me tuer avant la mort, parce qu’une nuit atroce, plus douloureuse encore que la chair traversée par le métal, serait tombée sur ce visage tant aimé.
D’autres clous me fixèrent à la croix. Un furtif, un incompréhensible moment de lucidité me fit revoir mon père, penché sur l’établi, dans la maison de Nazareth. J’avais vu mille fois le bras se fondre dans le geste que dicte le marteau et que m’a enseigné le vieux charpentier qui m’aimait. La poutre équarrie, soutenant si durablement notre maison, était l’œuvre de cet homme dont l’existence, elle, s’était pourtant achevée. Je m’étais émerveillé de cette forme de continuité transmise à la matière par les hommes, faisant d’eux, pour le petit enfant que j’étais encore, des demi-dieux capables de simuler l’éternité dont ils se découvraient si affamés.
On leva l’horrible structure. La suffocation, le déchirement effrayant de la chair, la douleur comme un délire du corps commencèrent. Le promontoire du Golgotha offrait le spectacle insupportable de Jérusalem se préparant au sabbat, consacré comme toujours au culte du dieu dont j’avais cru qu’il aimait ses enfants…
Tout fut magnifique
T out fut magnifique, et effrayant. Je ne me serai habitué à rien, et l’enfant questionneur s’est réfugié dans l’homme étonné, découvrant un monde plein de dangers et de splendeurs. La mort, que je comprenais peu et ne craignais jamais, m’intéressa toujours. On s’inquiétait autour de moi de cet intérêt. Peut-être s’en méfiait-on. Je n’ai pas assez dit que cette inquiétude et cette méfiance furent vaines, puisque ma curiosité n’était pas le signe d’un désespoir mais d’une exigence. J’ai questionné, sans doute trop, cette existence qui me fut donnée. J’obtins beaucoup de réponses, mais les plus difficiles parmi mes questions restaient sans écho. J’allais sonder la mort, je veux dire que je réfléchissais beaucoup à elle, et l’espèce de réfraction qui en résultait m’instruisait enfin de ce que les choses ne me révélaient pas. Si je m’intéressai tant à la mort, c’est que j’y voyais un reflet plus exact que celui que nous apercevons dans nos songes, nos desseins et même nos actions. La vie, une certaine vie, obsédante et tragique, y luisait. J’aurai, dans l’ensemble, assez mal vécu. Au moins aurai-je vécu en ayant, presque toujours, la conscience de ma fin, c’est-à-dire en sachant que cette aventure saisissante à laquelle je fus convié en naissant exigeait de moi, parce qu’elle est si courte, le maximum de profondeur et d’attention. Je sentais que j’avais raison de suivre ce mouvement d’un instinct qui ne m’a pas souvent trompé. Mais j’ai ignoré pour l’essentiel en quoi une telle attention profonde était à ce point nécessaire. Penché sur toi, je comprends enfin cette nuit son utilité, qui est d’éprouver combien est vivant même le tressaillement qui nous fait quitter ce monde. De la Mauritanie au sud jusqu’aux camps légionnaires de la Germanie au nord, des côtes de l’Espagne à l’ouest jusqu’à la pointe orientale de la Syrie s’étend avec orgueil l’empire de Rome. C’est à l’intérieur de ces limites géographiques que j’aurai été un homme, traversant avec vigilance son siècle. Mais c’est au sein d’un autre empire, qui est le corps, et le long d’une frontière plus définitive, la vieillesse, que cet homme aura le mieux appris à vivre.
Le grand âge nous paraît bien lointain lorsque la jeunesse, et même la maturité, nous occupe tout entier. Le temps ne nous atteint pas de sa flèche de la même manière selon l’endroit où l’on se place dans l’existence. Cette flèche néanmoins nous blesse, toujours, et sa pointe, que nous retirions autrefois aisément de la chair, finit par nous traverser. J’ai vu sur certains esprits les effets d’une sénilité précoce, cet abandon d’un cerveau à sa constante tentation de démence. Ce fut en ces seules occasions que, même totalement pénétré d’un athéisme qui ne me quittait plus, j’ai prié, afin que me soit épargné un malheur aussi grand. Mais c’est le corps qui, le plus souvent, commence de trahir l’ambition qui le gardait. On se lève un jour et on sait qu’on a vieilli, par la peur obscure qu’a fait naître cette nuit-là l’articulation douloureuse et moins mobile, le battement momentanément affolé d’un cœur. J’étudiais sur moi cette crainte étrangement partagée : je sentais que mon corps lui-même me redoutait, qu’il s’écartait de ma volonté et qu’entre nous s’installait une tristesse, comme dans les amitiés qui finissent. La fatigue, désormais, ne serait plus simplement cette lampe qui s’éteint sur la nuit de la chair. Le repos ordinaire rallume ce jour que des ténèbres passagères avaient ôté. Mais le repos des vieillards est la prémonition de celui qui les attend dans l’éternité, et j’ai accueilli dans mon corps l’homme vieux que je n’avais jamais observé, jusque-là, que de très loin. Je n’allais presque jamais sur la plage sans songer aux conquérants tyriens qui partirent d’ici vers l’Espagne et l’Afrique, et fondèrent les villes de Gadès, d’Utique et surtout de Carthage, laquelle eut un temps les mêmes ambitions que Rome, mais ne fut jamais son égale en puissance et en gloire. J’ai dû accepter de consacrer mes rêveries à des choses plus pressantes, et le médecin qui te soigne m’a recommandé, pour ménager mes yeux, de lire moins. Je contemple possiblement pour les dernières fois ces astres qui poursuivront sans moi leur marche dans un monde de flammes et de glace. Combien de temps encore me sera-t-il permis d’assister à ce spectacle qui fut l’un des sommets de ma vie ? Six mois, un an ? On ignore tout des décisions de la vieillesse. Mais ma vue baisse : le ciel par moments devient flou, et j’ai confondu il y a trois jours encore sur l’établi le marteau et le maillet.
L’autre jour, non loin d’ici, un enfant de quatre ans est mort des suites d’une fièvre. J’ai assisté à son agonie, que j’ai peut-être adoucie par mes soins et mes paroles. Tu meurs de vieillesse, et cependant je crois que tu n’étais pas plus préparée que cet enfant à fermer les yeux pour toujours. Les années passe

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