Demeures perdues
110 pages
Français

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Demeures perdues , livre ebook

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Description

Rapidement, le décor est planté: un square, un homme, un banc. Dépouillement, dénudation presque totale du contexte. Car ici, tout se passe à l’intérieur, dans le regard, dans la mémoire, dans la projection, dans le ressac des images et des souvenirs, à fleur d’âme et de conscience… là où se dévoilent la sensibilité d’un homme, sa pudeur, sa sagesse cachée. En ces lieux où même les démunis sont riches et conservent leurs trésors personnels. Roman exigeant, "Demeures perdues" décline toute tentation voyeuriste – c’est-à-dire complaisamment extérieure – pour cerner le caractère des déshérités. Investissant au contraire l’intimité d’un être que l’on comprend rapidement en errance – plus mémorielle que physique –, C. Hartweg compose un flux de conscience où l’absence – de l’autre, à soi-même, aux autres – étreint l’âme.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 8
EAN13 9782748353839
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0049€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Demeures perdues
Christiane Hartweg Demeures perdues
Publibook
Retrouvez notre catalogue sur le site des Éditions Publibook : http://www.publibook.com Ce texte publié par les Éditions Publibook est protégé par les lois et traités internationaux relatifs aux droits d’auteur. Son impression sur papier est strictement réservée à l’acquéreur et limitée à son usage personnel. Toute autre reproduction ou copie, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon et serait passible des sanctions prévues par les textes susvisés et notamment le Code français de la propriété intellectuelle et les conventions internationales en vigueur sur la protection des droits d’auteur. Éditions Publibook 14, rue des Volontaires 75015 PARIS – France Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55 IDDN.FR.010.0114777.000.R.P.2010.030.40000 Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions Publibook en 2010
Assis sur le banc public, jai le regard coincé par les murs bétonnés ; devant, sur le côté, aucune échappée. Quelques arbres, gris, ne sont là que pour témoigner dautrefois. Le square figure un triangle. On ne savait quoi faire dune place de cette forme, alors on a mis des arbres et des bancs qu’on a baptisés "square". Les chiens sont interdits, les enfants ne viennent pas. J’y passe des heures vides, à me souvenir. Je n’arrive pas à faire venir les images dans l’ordre, j’ai beau m’efforcer, je ne parviens qu’à secouer la poussière qui retombe mais avant qu’elle ne recouvre à nouveau l’étoffe morne de ma vie, j’écoute et cela revient par bribes, les mots me rendent à moi-même tel que je ne serai plus. Les premiers à surgir peignent la nuit d’où ils sortent : "C’est un soir tout en douceur : roses, rouges, bleu nuit, invitant au repos, à l’absence de songes et voilà que je m’obstine à regarder en face au-dessus du petit jardin brûlé par l’été,voilà que je pousse le vice à observer ce qui nest plus, depuis plusieurs années déjà, qu’une image de moins en moins précise, inscrite dans ma tête, et disparue du cadastre. Posée sur l’herbe verte, sous le cerisier à fruits blancs, légèrement ivoirins, une maison grise, toute en hauteur, avec, au premier étage, deux fenêtres trop larges pour la façade étroite et qui semblent vous épier mais maladroitement, comme les yeux d’un gros poisson derrière le verre de laquarium. Le jardin reste clos, replié sur ses secrets, mais moi, accoudé comme ce soir à la balustrade de cette chambre, je l’ouvre de force. Là-bas, sur le sol encore tiède de la chaleur du jour, une chatte noire-la mienne-qui ne se plaît
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qu’ailleurs, provocatrice ; je crois discerner l’éclat de ses prunelles qui me narguent. Un vent chaud fait bouger les branches ainsi que les dernières lueurs du soir, dernier éclat, dernière braise avant la nuit.Autour de la maison silencieuse, sans piétinements ni babils, des bosquets de buis, mal taillés, des iris en touffes, quelques rosiers puis des herbes sauvages, ocre et vert pâle, aux longues graminées qui s’entrelacent mollement. C’est une maison faite de silence, pour dire la douceur et l’ennui poli, une bâtisse un peu vieillotte qui ne convient pas au chic du quartier, qui n’a ni grilles ornées ni plantes exotiques ni balançoires de jardin. Las de réinventer ce qui n’est plus, je ferme les yeux puis les ouvre à nouveau et je vois le vide : plus de bosquets, plus d’iris mais de l’herbe, des graminées, plus de chatte (elle est morte enfermée dans la cave de la maison disparue) plus de brouette ni de fourche piquée dans un tas d’herbes sèches et de terre mêlées. Seul reste le cerisier blanc, comme dans la chanson. Les bulldozers ont dû passer par là, sûrement, mais dans quel but puisque le jardin est toujours enclos, n’est pas envahi par la route et n’est pas à vendre. Les propriétaires de la maison – doux vieillards aimables, un peu sauvages, comme leur jardin, ont-ils été enlevés avec les pierres, le buis et les fleurs ? Question sans réponse puisque je ne me la pose et ne me la suis posée qu’à moi-même et encore, par intermittences, comme l’est ma présence dans cette chambre. L’air du soir m’apporte le parfum d’un lilas fané depuis longtemps et que j’avais oublié ; la nuit m’empêche de le situer mais qu’à cela ne tienne, je reconstitue le tableau dans ma tête et d’après le vent, il doit être planté près de la vieille grille rouillée qui borde la route montant vers le petit pont. À moins qu’il ne s’agisse dune repousse car l’arbre était grand, bien visible et le bull a dû le raser avec le reste.
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