Deux Italiens et Saint-Pétersbourg
230 pages
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Deux Italiens et Saint-Pétersbourg , livre ebook

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Description

Avril 1901, Marco Pantani, jeune architecte milanais, débarque à Saint-Pétersbourg, la capitale des tsars, bien décidé à conquérir la ville, la gloire et les femmes russes. Juin 1997, Oksana Ivanovna travaille à Saint-Pétersbourg pour une entreprise pharmaceutique. Elle s'apprête à recevoir Luigi Rossini, un industriel italien qui désire vendre ses médicaments sur le marché russe. Au fil de ces destins croisés, ce roman nous entraîne à travers le siècle, nous fait visiter la ville de Pierre le Grand et ses canaux, nous invite aux bals de la cour dans une Russie dont l'histoire bascule... Mais qu'ont donc en commun ces deux Italiens ? Est-ce le hasard qui les amène tous deux à Saint-Pétersbourg ? Avec Deux Italiens et Saint-Pétersbourg, Enzo Taroni signe le premier volet d'une saga contant les histoires d'une famille italienne au fil du XXe siècle.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 10 décembre 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782342046380
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Deux Italiens et Saint-Pétersbourg
Enzo Taroni
Mon Petit Editeur

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Mon Petit Editeur
14, rue des Volontaires
75015 PARIS – France
Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
Deux Italiens et Saint-Pétersbourg
 
 
 
Pour Marion, merci…
 
 
 
Chapitre 1. Avril 1901, Gare Maritime de Saint-Pétersbourg, Russie
 
 
 
Un vent plus que frais soufflait du large et balayait le golfe de Finlande. Les mouettes volaient au ras de l’eau. Une pluie fine clapotait dans l’eau grise.
Le paquebot avait laissé sur la droite l’île de Kronstadt depuis une dizaine de minutes. La houle faisait tanguer le navire.
À la proue, debout, tête nue, j’observais attentivement la côte russe qui se rapprochait.
Je commençais à distinguer des bâtiments à l’horizon.
Saint-Pétersbourg, la capitale des tsars ; mon voyage touchait à son terme.
Parti de Milan le cinq avril, j’avais, d’abord en train, traversé la Suisse et l’Allemagne pour rejoindre Lübeck. Dans le grand port hanséatique, j’avais embarqué sur le paquebot le Ville de Königsberg , qui faisait la liaison Lübeck – Saint-Pétersbourg en trois jours, via Königsberg justement.
C’était la toute première fois que je quittais l’Italie. À vrai dire, hormis quelques séjours à Florence, à Turin et à Venise, je ne m’étais guère éloigné de Milan, ma ville natale.
Jusqu’au mois de janvier, je n’avais jamais même imaginé qu’il me soit possible un jour de voyager aussi loin. Aller travailler en France, ou en Allemagne, pourquoi pas. Les architectes qui traversaient les Alpes n’étaient pas rares. Mais la Russie…
En fait, je le savais, beaucoup d’architectes Italiens, et des fameux comme Domenico Trezzini, Francesco Rastrelli, Giacomo Quarenghi… ont plus que participé à la construction de la capitale Russe depuis deux cents ans. Le tsar Pierre le Grand qui avait fondé Saint-Pétersbourg avait le premier fait appel à des architectes étrangers, et en particulier à des Italiens, pour édifier la nouvelle capitale de l’empire. Les souverains russes qui lui avaient succédé sur le trône avaient fait de même. Et cette tradition se perpétue encore. Mais de là à imaginer que je pourrais, moi, un jour mettre les pieds dans les pas de mes glorieux prédécesseurs, j’étais loin d’y songer.
Et puis, en janvier donc, j’avais reçu cette lettre de Pierluigi Grappesino. Grappesino était mon ancien maître, celui qui avait assuré ma formation comme architecte, il y a une petite quinzaine d’années, alors que j’étais encore un jeune compagnon. Je l’avais ensuite perdu de vue pendant une bonne dizaine d’années. Voilà qu’il m’invitait à le seconder sur un chantier qu’il venait juste de commencer à Saint-Pétersbourg : le palais Menchikov. Grappesino se souvenait de mes capacités "d’un bon niveau déjà pour un compagnon-architecte" et me faisait une proposition des plus intéressantes que je ne pouvais pas refuser. Outre la perspective de travailler à un chantier exceptionnel, outre la rémunération nettement supérieure à ce que j’avais pu gagner jusque maintenant, outre les conditions matérielles (transport jusqu’à la Russie et frais d’hébergement à la charge du commanditaire), il y avait l’attrait de la nouveauté.
Un tel voyage, une telle expérience, cela ne se refusait pas alors que j’allais avoir vingt-cinq ans dans quelques mois. J’en avais parlé à ma mère. Son avis comptait beaucoup pour moi. J’avais hésité un jour, et dès le lendemain, dans l’enthousiasme de ma jeunesse, j’avais envoyé un bref télégramme d’assentiment à Grappesino :
 
D’accord – Marco Pantani
Grappesino m’avait ensuite envoyé une seconde lettre, assez longue, avec des consignes et des conseils précis sur mon voyage et sur mon installation future à Saint-Pétersbourg. Il m’indiquait l’adresse de son cabinet d’architecte où je devrais me présenter. Il indiquait même son numéro de téléphone : 2465.
Son numéro de téléphone ; cela m’avait fait sourire… Comme si, en cours de voyage, à Hambourg par exemple, j’allais m’arrêter pour lui téléphoner.
Pour lui dire quoi ?
Je suis à Hambourg, j’arrive dans cinq jours. C’était complètement ridicule. Cela ne viendrait à l’idée de personne de téléphoner pour annoncer qu’on est sur le chemin et qu’on va arriver.
J’avais envoyé un second télégramme, tout simplement.
Arrive mi-avril – Marco Pantani
 
Et c’est ainsi que trois mois plus tard, à la proue du Ville de Königsberg , j’étais en vue de la capitale des tsars. Une pluie fine et froide tombait sans relâche depuis la veille.
La ville, vue de la mer, me semblait grise et terne. Les bâtiments s’étalaient le long des quais sur plusieurs lieues vers la gauche et vers la droite. La ville semblait immense. Immense et plate.
Quelques clochers d’églises, des flèches dorées et autres cheminées d’usines en briques rouges commençaient à surgir de la brume et de la platitude. Hormis cela, pas une colline, pas une montagne ne venaient se mêler au ciel.
Comme le paquebot s’approchait du quai, les cris des mouettes se raréfièrent.
Je commençais à distinguer les bruits du port qui prenaient le dessus sur la vie maritime : sirènes de bateaux, moteurs des steamers, hennissements de chevaux, voix de marins qui s’interpellaient dans cette langue russe que je ne comprenais pas du tout…
Il fallut attendre qu’un navire sorte de la darse et libère une place pour que le paquebot puisse enfin aller accoster au quai.
Un marin du Ville de Königsberg  m’interpella en allemand alors que j’étais toujours accoudé au bastingage et m’invita à rejoindre la salle de débarquement.
Une petite foule s’y pressait déjà. Voyageurs de commerce en costume trois pièces et aristocrates désœuvrés de retour d’un voyage en Europe constituaient l’essentiel de la classe « Luxe ».
Sur le pont inférieur, les deuxième et troisième classes étaient nettement plus fournies, notamment en immigrés venus tenter leur chance dans une Russie en pleine croissance économique. Ils y venaient pour travailler comme ouvriers du bâtiment ou des chemins de fer, comme domestiques, comme gouvernantes et autres précepteurs pour les rejetons de la bonne société pétersbourgeoise.
Tout ce petit monde se retrouva sur le quai.
La pluie s’était enfin calmée.
J’avais finalement trouvé un porteur pour prendre en charge mes bagages jusqu’à la douane.
Heureusement, les possesseurs d’un billet de la classe supérieure bénéficiaient d’un régime de faveur pour effectuer les formalités douanières. Nous étions entre nous, entre gens du même monde, alors que le reste des voyageurs s’entassait dans la promiscuité, pour Dieu sait combien de temps, dans une vaste pièce qui semblait venteuse et froide.
Il fallut quand même une bonne vingtaine de minutes pour que mon tour vînt.
J’expliquai aux deux employés du service des douanes, ou de l’immigration, qui j’étais et ce que je venais faire à Saint-Pétersbourg.
Ils parlaient parfaitement allemand. Moi aussi.
— Ainsi vous venez d’Italie ? me demanda le plus grand des deux.
— De Lombardie. De Milan exactement.
— Et vous avez transité par la Suisse ?
— Oui c’est cela.
— Pourquoi n’êtes-vous pas venu directement par l’Autriche-Hongrie ?
— Parce que cela me semblait plus intéressant de découvrir l’Allemagne.
— C’est tout ?
— Oui, c’est tout.
— Et en Suisse, vous avez rencontré des gens ?
— Non, pas particulièrement, je n’ai fait que traverser le pays.
— Et vous avez quoi dans vos bagages ?
— Mes affaires : des habits, des livres…
— Des livres ? Quelles sortes de livres ?
J’appris plus tard que, suite à l’assassinat en février du ministre de l’Instruction Publique par l’étudiant Bogolepov, un étudiant dans la mouvance révolutionnaire marxiste, les services d’immigration surveillaient tout particulièrement les personnes arrivant de l’étranger et spécialement ceux qui avaient transité par la Suisse. La Suisse qui hébergeait toutes sortes de terroristes comme Plekhanov, Axelrod, Zassoulitch et Oulianov entre autres.
Trois autres fonctionnaires vinrent en renfort. Mes bagages furent fouillés. Mes livres, des manuels d’architecture, intéressèrent tout particulièrement les services de l’immigration. J’eus la plus grande peine à leur expliquer que les pages de calculs me servaient à calculer des portées et me permettraient de bâtir des édifices, des ponts et que ce n’était pas pour calculer la charge explosive nécessaire à leur destruction.
L’interrogatoire durait depuis un certain temps ; ils cherchaient, en vain, mes relations éventuelles avec un groupe de dangereux terroristes et je m’épuisais de leurs questions répétitives et suspicieuses, voire injurieuses, à mon égard lorsque je décidai de faire appel à Pierluigi Grappesino.
Par chance, le bureau de douane venait tout juste d’être équipé d’un téléphone.
Mais, le chef de la petite équipe qui m’interrogeait refusa tout d’abord de me laisser utiliser son appareil.
Quand je compris que personne encore ne lui avait expliqué le fonctionnement de l’appareil et qu’il ne voulait pas se ridiculiser, je lui proposai de lui expliquer.
Pour dissimuler son incompétence, le douanier en chef fit sortir ses subordonnés.
En fait, je n’avais eu que de rares occasions de me servir d’un téléphone à Milan, mais avec un peu de chance, les téléphones russes étaient sur le même modèle et je pourrais m’en débrouiller.
Heureusement, c’était également un téléphone de la société Marconi, comme à Milan. Son fonctionnement ne m’était donc pas inconnu.
Je lui montrai comment décrocher l’appareil, comment tourner la manivelle, puis attendre que l’opératrice se manifeste et demander le numéro qu’on voula

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