Empreintes de sable
80 pages
Français

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Empreintes de sable , livre ebook

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Description

Ce recueil de nouvelles est présenté dans un style original, très vivant. Les différents personnages évoluent dans des cadres de vie divers. Ils se retrouvent confrontés à des situations tantôt légères, tantôt dramatiques.

L'intrigue de ces récits et leur chute leur donnent un attrait particulier.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 décembre 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414399345
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194 avenue du Président Wilson – 93210 La Plaine Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-40116-1

© Edilivre, 2020
Le Pique-Assiette
Remplissez votre sac de voyage, avec juste ce qu’il faut (pyjama – trousse de toilette) et surtout ce qui méritera d’être vu, une fois franchi le seuil de la maison où vous n’avez pas vraiment été invité.
N’oubliez pas d’y ajouter cette boîte de pâtes de fruits, cadeau d’entreprise, sans doute un peu rances à présent, mais avec un joli papier d’emballage ils n’en paraîtront que meilleurs, voire carrément luxueux.
En vous voyant, vous et votre veste d’été (rien ne vaut l’alpaga), empruntée pour la saison à votre cousin Éric, qui travaille dans le Prêt-à-porter, la Maîtresse de Maison, Edwige Le Poirier, le souffle coupé par votre élégance et la porte de sa demeure maintenue fermement par votre pied chaussé d’un mocassin de cuir vieilli, comme il convient, s’effacera pour vous laisser entrer.
Toute la maisonnée vous considérera alors d’un air surpris et peu bienveillant – car ils seront tous réunis, attendant de s’installer pour le déjeuner toujours servi à treize heures.
Dans le silence que de plus susceptibles que vous qualifieraient de désapprobateur, voire hostile, vous percevrez la voix du Maître des Lieux, marmonnant un « qu’est-ce qu’il vient foutre » fort peu convivial.
Tandis que de la cuisine proche, la voix claire et articulant bien chaque mot de quelque étudiante au pair recrutée pour l’Eté demandera, faussement naïve :
« Quoi ça veut dire, Pique-Assiette ? »
La Maîtresse de Maison, rassérénée, proposera de prendre un apéritif de bienvenue, en l’honneur de notre ami Antoine, venu nous faire une « petite visite surprise » Comment cela, une petite visite ? Cette dame connaît-elle bien le sens des mots, et l’impact qu’ils peuvent avoir sur une assemblée pas vraiment gagnée à votre cause ? Pourquoi n’emploie-t-elle pas le terme « séjour d’Eté », autrement plus prometteur !
En attendant, vous voilà tous installés devant une vaste table basse.
Pour vous remettre de vos émotions basiques (pique assiette, c’est un métier usant, quelque part) vous avez réclamé quelque chose de fort, genre whisky. Ou vodka orange, s’il n’y a pas mieux.
Mais Yves Le Poirier en personne vous a rétorqué de sa belle voix de baryton que dans cette maison, comme dans beaucoup d’autres alentour, on ne buvait pas « ce genre de truc »
– Un vin cuit, peut-être ?
Va pour le vin cuit. Vous adorez ces deux mots accolés ensemble, qui vous évoquent des maisons à l’atmosphère paisible, où les portes ne claquent jamais, où l’on parle de choses et d’autres sans réellement se passionner, et où les repas, équilibrés, sont servis à l’heure.
N’empêche, vous soupçonnez votre hôte, sous un aspect faussement bonasse, d’être un vieux retors, qui doit planquer son whisky de douze ans d’âge dans le garage, sous un tas de vieux pneus.
L’un des jeunes a allumé la télé, pour mettre l’ambiance, comme il dit, tellement ta conversation est jugée digne d’intérêt.
Les infos commencent à débouler en vrac sur l’écran, la famille s’installe.
(En d’autres termes, M et Mme Le Poirier et leurs deux affreux jumeaux de 17 ans aux cheveux coupés en brosse dans le sens du vent des Landes, ça leur donne avant l’heure une allure de chef scout sur le retour) ainsi qu’un couple d’amis, entre deux âges, qui ont de toute façon sur toi la supériorité et d’avoir déjà le teint hâlé et d’avoir été vraiment invités, eux.
Personne ne dit mot. Les hors d’œuvre (sardines et tomates pleines de pépins gluants, on se croirait dans une cantine de collège des années soixante) sont dégustés dans un silence recueilli, comme s’il s’agissait d’une salade de truffes.
Mais en bonne hôtesse qui a toujours un sujet de conversation sous le coude, en cas de nécessité, Edwige Le Poirier déclare, passant du coq à l’âne (au fait, le steak est dur comme de l’âne, il faut se méfier de ces maisons de bourges où l’on fait des économies même sur la viande) :
– Le cinéma de la station passe de très bons films, cette saison.
Aimez-vous le cinéma, Antoine ? Avez-vous vu des films intéressants, récemment ?
Belle occasion, et tu ne la rates pas, d’évoquer la profession si prenante que tu viens de t’inventer (responsable des Achats dans le Marketing) et qui t’empêche d’aller au cinéma autant que tu le voudrais.
Car, oui, tu aimes le cinéma, et les bons films, Affirmes-tu, te tournant vers ton avenante voisine.
Mais celle-ci, la conversation revenue et le dessert posé sur la table par la fille au pair n’en à rien à secouer que tu aimes ou pas le 7 ème art. Elle ne va jamais au cinéma. Après le dessert – une pomme et un yaourt au caramel dans son pot de carton – la fatigue te gagne. Bon, où est ta chambre ? Ils ne vont pas te faire passer la nuit, toutes les nuits à venir de ce bel Eté, sur le canapé ?
– Je me souviens que votre villa dispose de plusieurs chambres, Risques-tu, d’un ton un peu flagorneur. Certaines avec vue sur la forêt de pins.
– Tout à fait comme dans un Hôtel trois étoiles, Rétorque Mme Le Poirier, un rien sarcastique.
– Ingrid, Lance-t-elle alors, d’un ton de gouvernante d’étage à la fille au pair, montrez donc sa chambre à… notre hôte. (Légère hésitation avant le qualificatif qui te désigne, car elle ne sait trop dans quelle catégorie te ranger).
Tout heureux, presque triomphant, tu te lèves, notre hôte.
Mais c’est l’escalier de pierre grise et froide qui mène au garage que tu descends à présent, au lieu des marches craquantes qui conduisent aux chambres, en une belle envolée encaustiquée de frais.
– Je suis désolée, mais la maison est pleine. Nous attendons un autre couple d’amis.
« Couple d’amis », tu parles : il vient sans doute d’être créé pour la circonstance. « On » pense que tu es du genre à tout gober, la preuve.
Le garage, au sol cimenté, sent la voiture neuve, les fruits entreposés (pommes essentiellement, celles de tant de desserts à venir) et Ingrid vient de pousser la porte à la peinture écaillée d’une petite chambre attenante, blanchie à la chaux, fleurant l’essence et moche comme tout.
– Je serai très bien ici ! Assures-tu à la fille au pair qui, elle, dort dans une vraie chambre, à l’étage : son contrat l’exige, Edwige.
Mais les pique assiette n’ont pas de contrat, pas de statut et parfois même plus une once de dignité.
Tu poses ton sac de voyage, et tu sors tes affaires pour la nuit à venir, une seule : demain, après une petite promenade désenchantée le long de l’Océan, tu reprendras le train, c’est décidé.
Et pour te consoler, te venger, juste avant de partir tu chiperas ce que tu viens de trouver en fourrageant sous le tas de vieux pneus dans le garage, tout au fond, près d’un placard bancal : la fameuse et tant convoitée bouteille de whisky de douze ans d’âge. (Il y en a même deux, dont une entamée ! Devinez par qui…)
Ils se sont bien moqués de toi ?
Qu’importe. Dès demain, ayant retrouvé ton lit, autrement plus confortable que celui-ci, tu dégusteras pieusement, soir après soir, un bon verre de cette boisson ambrée.
Parce que tu le vaux bien.
– Un intrus dans la chambre –
Je vis dans une maison presque neuve, de deux étages, à la façade couleur crème, située non loin de la Seine. J’en respire, selon les heures du jour ou de la nuit, les miasmes, mais parfois aussi un parfum de pommes que des charrettes viennent décharger se dilue dans l’air et me fait songer à la campagne.
Celui qui m’a proposé un travail et ne m’a pas mis à la rue quand j’ai annoncé être quasiment illettré m’a aussi trouvé cette chambre. Un lit, une table, une chaise de paille. Quelques ustensiles pour faire un brin de cuisine et me laver, nettoyer mes fringues.
Drôle de petit logement, avec une pièce attenante, presque un réduit. Je plaisante pour moi-même, je dis que c’est la chambre d’amis.
Le soir, je me penche à la fenêtre, et je réalise que ma vie a bien changé, en près de deux ans… Aussi, dès que l’occasion s’en présentera, je rendrai à mon tour service à un inconnu, je ne le mettrai pas à la porte.
Ma famille et moi habitions il n’y a pas si longtemps encore dans un faubourg, dans une autre ville dont je ne me rappelle même plus le nom, quelle importance ? Mon père était maçon, mais depuis un accident survenu sur un chantier il ne trouvait plus de travail. L’Hiver était venu, particulièrement rude.
Les étals des marchés restaient vides ou presque, les étangs gelaient dans la campagne proche.
Un soir, le propriétaire est venu réclamer le paiement de ses loyers. Comme personne ne lui répondait, il a ouvert la porte d’un maître coup de pied. C’est dans ces circonstances que mon père a été découvert, pendu à une poutre. Il avait préféré en finir, plutôt que de ne pouvoir nous faire vivre.
Ma mère, mes trois frères et sœurs, prostrés par la faim et le froid, étaient inertes dans le petit logement, comme indifférents au monde extérieur. Moi je me trouvais dehors à cette heure, cherchant sans doute un improbable travail, ou quémandant un restant de ragoût dans une échoppe.
Comme cette journée sinistre paraît loin, j’essaye, pas toujours avec succès, d’en chasser les images de mon esprit. Je sais que je suis vraiment seul pour m’en sortir, me débrouiller. Et que, dans les rues, d’autres également, nombreux, s’efforcent de survivre.
Et puis, j’ai eu de la chance, de trouver ce travail dans une imprimerie ...

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