Penser le roman francophone contemporain
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Description

Cet ouvrage au titre ambitieux constitue moins un état des lieux qu'une interrogation sur un genre protéiforme dont l'expansion semble illimitée et qui occupe de plus en plus la scène littéraire. La première question concerne la notion de francophonie elle-même, ensemble hétérogène et extrêmement complexe. En effet, comment désigner les diverses littératures francophones sans les marginaliser ou les exclure, tout en prenant acte de leur statut singulier? L'écrivain francophone doit composer avec la proximité d'autres langues, avec une première deterritorialisation constituée par le passage de l'oral à l'écrit et avec cette autre créée par des publics immédiats ou éloignés. Condamné à penser la langue, il doit aussi penser les formes par lesquelles le monde se donne à voir ; son oeuvre, en jouant sur les codes des différents horizons culturels, devient une reconfiguration de la littérature.
Qu'apporte le roman francophone à la forme roman? Quels en sont les modèles et de quelles manières s'y inscrit le palimseste? Quels types de rapports se sont créés entre ce genre d'origine européenne et les nouvelles littératures de langue française? Quelles redéfinitions ont été proposées et comment s'y décline le contemporain? Quel(s) savoir(s) véhicule-t-il? Dernière question, mais non la moindre : le roman, en tant que genre, n'est-il pas par définition suspect? Au lecteur d'en décider.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 20 février 2020
Nombre de lectures 17
EAN13 9782760641617
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0005€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

PENSER LE ROMAN FRANCOPHONE CONTEMPORAIN
Sous la direction de Lise Gauvin Romuald Fonkoua Florian Alix
Les Presses de l’Université de Montréal


La publication de cet ouvrage a été rendue possible grâce au soutien du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), du Centre de recherche en littérature et culture québécoises de l’Université de Montréal (CRILQ) ainsi que du décanat de la Faculté des Arts et Sciences de l’Université de Montréal. Merci aussi à Alexis Lacasse-Dutertre pour le soutien apporté à la préparation du manuscrit. Mise en pages: Yolande Martel Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Titre: Penser le roman francophone / [sous la direction de] Lise Gauvin, Romuald Fonkoua, Florian Alix. Noms: Gauvin, Lise, éditeur intellectuel. | Fonkoua, Romuald, éditeur intellectuel. | Alix, Florian, éditeur intellectuel. Collections: Collection Espace littéraire. Description: Mention de collection: Espace littéraire | Textes présentés lors d’un colloque tenu à l’Université de Paris 4-Sorbonne en novembre 2017. | Comprend des références ­bibliographiques. Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20190035595 | Canadiana (livre numérique) 20190035609 | ISBN 9782760641594 | ISBN 9782760641600 (PDF) | ISBN 9782760641617 (EPUB) Vedettes-matière: RVM: Roman francophone—Histoire et critique. Classification: LCC PQ3809.P46 2020 | CDD 843.009/917541—dc23 Dépôt légal: 1 er trimestre 2020 Bibliothèque et Archives nationales du Québec Tous droits réservés © Les Presses de l’Université de Montréal, 2020 www.pum.umontreal.ca Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).




Avant-propos
Lise Gauvin et Florian Alix
Cet ouvrage au titre ambitieux, Penser le roman francophone contemporain 1 , constitue moins un état présent qu’une mise en évidence d’un certain nombre de questions sur un genre protéiforme dont l’expansion semble illimitée et qui accapare de plus en plus la scène littéraire.
La première de ces questions concerne la notion de francophonie elle-même, notion qui recouvre un vaste ensemble hétérogène résistant à toute grille simplificatrice, mais dont les signes n’en attirent que davantage l’attention par leur singularité même. Comment désigner les diverses littératures francophones sans les marginaliser, et, d’une certaine façon, les exclure? Comment, par contre, ne pas constater le statut particulier de ces littératures qu’on a du mal à nommer. Quoi qu’il en soit, dès que l’on tente de préciser le mot, il y a toujours un reste, c’est-à-dire des exceptions, des éléments qui ne cadrent pas avec la définition. On ne s’en sort pas aisément. Littératures mineures (au sens de Deleuze et Guattari, d’après une interprétation libre de Kafka: une littérature qu’une minorité fait dans une langue majeure), minoritaires, petites littératures (au sens de Kundera: celles dont l’existence même est question), littératures de l’exiguïté 2 ? Tour à tour, on a choisi ces désignations pour décrire des systèmes littéraires à la fois autonomes et interdépendants. Quant à la notion de «littérature-monde en français», mise de l’avant par le manifeste du journal Le Monde en 2007, si elle recouvre toutes les littératures de langue française et en appelle à des relations transversales entre ces littératures, elle ne saurait faire l’économie des espaces littéraires spécifiques aux littératures dites francophones par rapport à la littérature hexagonale.
Ces écrivains ont en commun de se situer «à la croisée des langues», dans un contexte de relations conflictuelles – ou tout au moins concurrentielles – entre le français et d’autres langues de proximité. Ce qui engendre chez eux une sensibilité plus grande à la problématique des langues, soit une surconscience linguistique qui fait de la langue un lieu de réflexion privilégié, un espace de fiction, voire de friction. La notion de surconscience renvoie à ce que cette situation dans la langue peut avoir à la fois d’exacerbé et de fécond. L’écrivain francophone doit en effet composer avec la proximité d’autres langues, une situation de diglossie dans laquelle il se trouve souvent immergé, ou encore une première déterritorialisation constituée par le passage de l’oral à l’écrit, et une autre, plus insidieuse, créée par des publics immédiats ou éloignés: autant de faits qui l’obligent à mettre au point ce que Glissant nomme des «stratégies de détour». Ces stratégies peuvent prendre les formes les plus variées, qui vont d’un procès de traduction au commentaire explicatif ou à la mise en place de procédés astucieux destinés à l’intégration des langues ou des niveaux de langue. Chez Chamoiseau par exemple, on assiste au passage de la contrainte – la nécessité explicative – à l’invention. Ainsi la note intervient-elle de façon de plus en plus manifeste dans le déroulement du récit en affichant la trace d’un auteur, d’un maître d’œuvre in fabula qui entre en relation avec un lecteur présent lui aussi in fabula . On est fort loin de l’aspect décoratif que prend le langage populaire et des effets de réel du roman de type réaliste. De façon analogue, Réjean Ducharme, dans L’Hiver de force , produit un certain nombre de notes et de contre-notes qui déjouent le système explicatif et créent une nouvelle complicité avec le lecteur.
Les écrivains francophones ont aussi en commun le fait de s’adresser à divers publics, séparés par des acquis culturels différents, ce qui les oblige à trouver les stratégies aptes à rendre compte de leur communauté d’origine tout en leur permettant d’atteindre un plus vaste lectorat. Comment en arriver à pratiquer cette véritable «esthétique du divers» appelée par Segalen et, à sa suite, par Glissant et les signataires du manifeste Éloge de la créolité sans tomber dans le marquage régionaliste ou exotisant? Comment se situer, lorsque, à titre de romancier, on fait partie d’une littérature de langue française hors de France, entre les deux extrêmes que sont l’intégration pure et simple au corpus français et la valorisation excessive de l’exotisme? Comment intégrer aux codes de l’œuvre et de l’écrit le référentiel qui renvoie à différents systèmes de représentation culturels? Écrire, donc, mais pour qui?
À l’expression «littératures mineures», au sens que lui donnent Deleuze et Guattari, souvent utilisée en contexte francophone, se substitue alors celle de littératures de l’intranquillité , mot aux résonances multiples emprunté à Pessoa et à sa traductrice française 3 . Bien que la notion d’intranquillité puisse désigner toute forme d’écriture, de littérature, nous croyons qu’elle s’applique tout particulièrement à la pratique langagière de l’écrivain francophone, qui est fondamentalement une pratique du soupçon.
Dans quelle mesure l’hybridité avec laquelle doivent composer les écrivains francophones donne-t-elle lieu à des «poétiques forcées 4 », selon l’expression de Glissant, ou à l’invention de nouvelles formes du dire littéraire? Quelles esthétiques sont ainsi mises en jeu? Dans quelle mesure l’inscription dans les textes d’un questionnement linguistique et littéraire et la pratique de la xénologie – ou l’intégration de vocables étrangers – traduisent-elles un acquiescement à une norme exogène ou au contraire la mise en œuvre de l’«opacité 5 » indispensable à tout dialogue interculturel? Dans quel(s) sens s’oriente alors la dialectique du centre et de la périphérie? Toutes questions qui interpellent les auteurs aussi bien que les lecteurs contemporains. Condamné à penser la langue , le romancier francophone est aussi appelé à penser le roman . Si sa surconscience linguistique se traduit dans plusieurs récits par une interrogation sur la fonction du langage, une autre forme d’autoréflexivité traverse également l’ensemble de la production romanesque. Il s’agit alors de représenter le «pourquoi écrire» et d’inscrire dans la texture même du récit la problématique de l’écriture. Ces «romanciers fictifs 6 », délégués à la parole et doubles plus ou moins avoués de leurs auteurs, jalonnent les récits à la manière de figures récurrentes dont les modalités renvoient à autant de variations autour du personnage de l’écrivain et de l’image publique qui lui est attachée. Quels sont leurs attributs et quelles fonctions leur sont dévolues? Quelles représentations de l’écriture sont ainsi projetées?
Dans les romans de Chamoiseau, notamment, la prise en charge du récit par un personnage en situation d’écriture se dédouble à son tour en plusieurs figures d’écrivains qui sont autant d’instances concurrentielles, celles-ci servant de relais à une plus vaste problématique de l’écriture: chaque figure auctoriale devient ainsi un maillon d’une chaîne ininterrompue, comme les variantes inépuisables d’une Histoire/histoire à la fois collective, au sens de récit commun, et singulière, au sens des histoires fictives et des destins individuels racontés par les narrateurs successifs. Cette interrogation à plusieurs niveaux fait l’originalité de ces romans, le métadiscours sur l’écriture – et la littérature – appartenant aussi bien au narrateur-­scripteur qu’à ses doubles.
Un autre exemple de ce métadiscours se retrouve chez Dany Laferrière. Dans Je suis un écrivain japonais, le roman se construit comme un art poétique dans lequel le narrateur-écrivain donne sa conception de l’écriture telle une activité hors frontière, à l’écart des nationalismes culturels. Mais le roman est surtout un éloge de la lecture qui fait du lecteur un personnage intimement lié à l’aventure d’un livre et, jusqu’à un certain point, responsable de son achèvement. Ce lecteur a tous les droits, même celui d’annexer à son village les plus grands auteurs de la littérature. Il

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