Relire Voyage au bout de la nuit
253 pages
Français

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Description

Relire Voyage au bout de la nuit en 2022 demeure une entreprise périlleuse, mais exaltante. Afin d’éviter de tomber dans le piège de la condamnation ou de la réhabilitation de l’auteur, les treize analyses qui composent cet ouvrage adoptent un parti pris littéraire et se demandent ce que le premier roman de Céline continue d’avoir d’actualité et de portée critique. Les études génétiques, qui ont joué un rôle capital dans la réévaluation de l’oeuvre à partir des années 1970, restent ici essentielles compte tenu de la réapparition récente d’un ensemble considérable de manuscrits céliniens. Les deux autres parties de l’ouvrage approfondissent l’étude de thèmes et de figures, ou bien contextualisent des aspects du roman en mettant à contribution des savoirs historiques, médicaux ou économiques liés à son époque. Une dernière partie comprend quelques textes rédigés par des écrivains. Ils esquissent, sur un ton plus personnel, une étude des filiations littéraires de Céline, et plus particulièrement des résonances de Voyage au bout de la nuitchez les écrivains québécois.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 08 août 2022
Nombre de lectures 1
EAN13 9782760646407
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1400€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

RELIRE VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT
Sous la direction de
Johanne Bénard, François-Emmanuël Boucher, Régis Tettamanzi et Bernabé Wesley
Les Presses de l’Université de Montréal



Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Titre: Relire Voyage au bout de la nuit / sous la direction de Johanne Bénard, François-Emmanuël Boucher, Régis Tettamanzi et Bernabé Wesley. Noms: Bénard, Johanne, 1957- éditrice intellectuelle. | Boucher, François-Emmanuël, 1972- éditeur intellectuel. | Tettamanzi, Régis, 1962- éditeur intellectuel. | Wesley, Bernabé, 1981- éditeur intellectuel. Collection: Espace littéraire. Description: Mention de collection: Espace littéraire | Comprend des références bibliographiques. Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20220005923 | Canadiana (livre numérique) 20220005931 | ISBN 9782760646384 | ISBN 9782760646391 (PDF) | ISBN 9782760646407 (EPUB) Vedettes-matière: RVM: Céline, Louis-Ferdinand, 1894-1961. Voyage au bout de la nuit. | RVM: Céline, Louis-Ferdinand, 1894-1961—Critique et interprétation. | RVM: Roman français—20 e siècle—Histoire et critique. Classification: LCC PQ2607.E834 Z823 2022 | CDD 843/.912—dc23 Mise en pages: Folio infographie Dépôt légal: 2 e trimestre 2022 Bibliothèque et Archives nationales du Québec © Les Presses de l’Université de Montréal, 2022 www.pum.umontreal.ca Cet ouvrage a été publié grâce à une subvention de la Fédération des sciences humaines de concert avec le Prix d’auteurs pour l’édition savante, dont les fonds proviennent du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les Presses de l’Université de Montréal remercient de son soutien financier la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).





Les références à Voyage au bout de la nuit dans l’ensemble du volume sont celles de l’édition suivante: Romans , t. I, édition et préface d’Henri Godard , Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 1981. Elles se présentent sous la forme abrégée «V» , suivie du numéro de page .


INTRODUCTION
Nous, lectrices et lecteurs de Céline, sommes d’étranges créatures. La lecture de Voyage au bout de la nuit (1932) nous a habitués à ce que la littérature soit toujours l’expérience du «danger suprême» qu’évoque Walter Benjamin au sujet d’Hölderlin. À l’image du personnage et narrateur de Continuidad de los parques (1956), cette nouvelle de Julio Cortázar où le lecteur d’un roman, confortablement installé dans son salon, découvre peu à peu qu’il est lui-même la victime du meurtre dont il savoure le récit, nous attendons de chaque premier roman une décharge électrique à savourer tranquillement dans un fauteuil.
Depuis Voyage , nous espérons de la littérature qu’elle dise haut et fort sur la place publique les vérités que nous n’osons murmurer. Il faut, nous ne saurions transiger là-dessus, que la puissance figurale d’une œuvre nous transporte de l’autre côté de la rive, là où le chaos est une fête, où seul l’enfer abrite des âmes d’élite et où la nuit se peuple de fantômes. Qu’elle le fasse dans une langue de convention, et nous bâillons. Dès les premières lignes, l’écriture doit être reconnaissable entre mille, et l’inventivité, la verdeur de la langue nous souffler à l’oreille tout ce qui, de nous-mêmes, de notre vie sociale et de notre histoire collective, est ambivalent, hétérogène et contradictoire. Au royaume des mots et de l’imagination, rien de moins impossible n’est toléré, et nous voulons être scandalisés, éclairés, hilares et séduits tout à la fois. Voilà à quoi nous a accoutumés la beauté insensée de ce roman.
Dans les études littéraires, il est encore des étudiants et des chercheurs qui, loin de reculer devant les questions idéologiques, historiques et éthiques que soulève l’œuvre de Céline, s’y intéressent suffisamment pour lui consacrer un mémoire, une thèse ou un essai. La postérité de l’auteur est aussi importante du côté des écrivains, au point que le dialogue de spectres que des romanciers contemporains engagent avec le romancier fait de lui une ombre qui hante la modernité. La figure de Céline est omniprésente dans le Paris littéraire et artistique que Julián Ríos explore dans Pont de l’Alma (2009) comme dans le roman de Kenzaburö Ôé, Une existence tranquille (1990), dont la figure centrale est Eoyore, personnage de déficient mental, fragile, imprévisible, et cependant compositeur de musique. La place de l’Étoile (1968) de Patrick Modiano et Les bienveillantes (2006) de Jonathan Littell revisitent différemment l’histoire de la Seconde Guerre mondiale par un dialogue conflictuel et trouble avec l’auteur des pamphlets. Dans les littératures francophones, Alain Mabanckou s’inspire du romancier pour écrire Verre cassé (2005) et Patrice Nganang dédie un épisode à «sieur Destouches» dans La joie de vivre (2003) 1 . L’écriture d’Ahmadou Kourouma, en particulier, présente les caractéristiques d’une oralité partagée entre le français et le malinké, dont les néologismes et les bouleversements syntaxiques composent un «mal-écrire» qui tisse une filiation riche et profonde avec une tradition prestigieuse d’agrammaticalité «lettrée» à laquelle appartient l’œuvre de Céline, référence assumée pour l’auteur ivoirien. La grandeur de ce premier roman de Céline n’a pas intimidé les écrivains et les polémiques suscitées par Céline au cours des vingt dernières années n’ont pas atteint la communauté de lecteurs auxquels s’adresse ce livre.
Relire Voyage au bout de la nuit en 2022 demeure une entreprise périlleuse. Afin d’éviter de tomber dans le piège de la condamnation ou de la réhabilitation de l’auteur, ce volume examine le premier roman de celui-ci en fonction d’un parti pris littéraire et en se demandant comment se pose la question, quelque peu oubliée aujourd’hui, du premier «scandale Céline». Le XXI e siècle n’a pas affaibli la force de ce texte, dont la parution, en 1932, avait frappé les esprits par l’innovation de sa langue tout autant que par les remous qu’il avait créés dans la société française. Au sein de la droite comme de la gauche, l’ intelligentsia avait considéré Voyage comme le grand roman sur la misère qu’attendaient les intellectuels. Aujourd’hui encore, il semble bien que les combats pour la justice sociale démultiplient le pouvoir d’évocation du premier roman de Louis-Ferdinand Céline.
Tout en reconnaissant la pluralité des questions que soulève cette œuvre incontournable, notre ouvrage n’a pas la prétention de les aborder toutes. La bibliographie exhaustive, qui recense l’ensemble des articles et ouvrages critiques publiés depuis 1932, vise en quelque sorte à combler ces lacunes. Elle constituera un outil précieux pour les futurs chercheurs curieux d’explorer un roman qui, c’est notre souhait, ne se bornera pas à alimenter les controverses, mais suscitera également les analyses et réflexions qu’il mérite.
L’idée de notre collectif est venue à la suite de la publication récente, par une édition québécoise, du volumineux manuscrit inédit de Voyage au bout de la nuit . Répondant à notre appel, plusieurs chercheurs ont proposé des études fondées sur cette découverte génétique, alors que d’autres y ont vu une occasion d’explorer à nouveau la richesse thématique du roman ou de montrer combien il constitue toujours une remarquable machine à reformuler les discours de son temps. Les contributions qui composent cet ouvrage révèlent ainsi ce que le roman de Céline continue d’avoir de présence au monde, de portée critique et d’inventivité à l’égard du social. De même, l’unité que produit le travail des treize chercheurs participants sur le texte célinien permet une relecture entendue comme exploration de sens nouveaux. Méthodologiquement, cette cohérence est d’ailleurs visible dans l’exercice de microlectures qui, sans concertation préalable, fonde l’analyse d’un grand nombre de chapitres.
Dans un souci de cerner l’influence du roman sur le champ littéraire de notre époque, nous avons aussi sollicité des textes créatifs chez des lecteurs de Céline ayant une pratique d’écriture. Des quatre textes composant la dernière partie de ce collectif, trois proviennent d’écrivains qui sont aussi chercheurs et qui ont accepté d’apporter cette contribution plus personnelle à un ouvrage universitaire. En revenant sur l’événement que constitue pour eux la lecture de cette œuvre ou en examinant parfois les réticences qu’elle peut soulever, ces lecteurs-écrivains proposent d’autres pistes de relecture. On pourrait y voir l’esquisse d’une étude de la filiation de Céline, ou plus particulièrement de l’héritage de Voyage au bout de la nuit chez les écrivains québécois, qui ferait le pendant d’autres études explorant la postérité de Céline chez des écrivains vivants 2 .
***
Dans la partie «Genèse» de cet ouvrage, nous voudrions rappeler à quel point les études génétiques ont été capitales, historiquement, dans la réévaluation de l’œuvre de Céline, à partir des années 1970. Combinées avec la publication progressive des romans dans la collection de la «Bibliothèque de la Pléiade», les premières études prenant en compte les différentes étapes du travail romanesque ont définitivement fait pièce à la légende selon laquelle les textes de Céline auraient été écrits au fil de la plume, «comme on parle».
La mise en vente du manuscrit de Voyage au bout de la nuit en 2001, puis son entrée dans les collections de la Bibliothèque nationale de France, auraient pu inspirer de nouvelles réflexions sur la génétique célinienne. Mais force est de constater que cela n’a pas été le cas. Les études génétiques sur l’œuvre de Céline ont en effet tendance à stagner depuis plusieurs années. Certes, il y a eu un certain nombre de publications de textes manuscrits; la revue annuelle L’Année Céline y a beaucoup contribué. On peut aussi mentionner le fac-sim

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