La porte de l’éternité
100 pages
Français

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La porte de l’éternité , livre ebook

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Description

Avec une sensibilité rare, le roman de Gérard Levacher donne la voix à un homme en deuil. Après cinquante années de vie commune passionnée, Gil doit faire face à la disparition de Corinne, décédée des suites d’une longue maladie. Il assiste impuissant à la dégradation progressive de son état de santé, tente de la divertir pour lui faire oublier le mal qui la ronge, puis doit se résigner devant l’inéluctable triomphe de la mort. Son soutien sans faille ne peut répondre aux appels au secours. La marche inexorable vers la porte de l’éternité devient un chant d’amour et d’espoir et, paradoxalement, un hymne à la vie.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 mai 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414054572
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-05455-8

© Edilivre, 2017
Du même auteur
Du même auteur :
Histoires étonnantes et merveilleuses du pays de Parence
Histoires étonnantes et merveilleuses du pays des trois rivières
La reine oubliée
La fille du Harki
Le chemin de l’Allière
La dame du Mans
Parence
Jeanne, reine des Siciles
Si j’avais su…
Via Tivoli
En collaboration avec Laure LEVACHER-RENOULT
Exergue
Les gardiennes du feu

Je me souviens des jours anciens et je pleure.
Paul Verlaine
Chapitre premier
Le fourgon avance doucement, au pas des hommes et femmes qui le suivent. Aux premiers rangs, les visages sont tristes et silencieux, mais lorsqu’on recule dans le cortège on découvre des visages rieurs, des couples qui discutent de la pluie et du beau temps, des paysans qui ont osé remettre leur casquette dont ils étaient embarrassés pour échanger leur avis sur les prochaines récoltes, comparant les quintaux espérés. C’est leur façon d’oublier.
Oublier qu’il y a devant eux un être vivant qui ne l’est plus et qu’un jour ce sera leur tour d’être le passager du funeste véhicule qui les emmène tous vers la même destination, la dernière demeure comme on dit. Pas grande et mal chauffée. Aucun confort dans ce cube de béton préfabriqué. Ça ne donne pas envie d’y aller tout de suite. On n’est pas pressé. De toutes façons, ce n’est pas le moment, avec la récolte qui s’annonce et ensuite les labours pour les semailles d’automne. Après on verra, mais il restera bien du travail à faire avant. On ne sait pas si on trouvera bien le temps un jour. On ne va tout de même pas partir sans que la besogne soit achevée. Ça ne se fait pas…
Le Père Jean-Baptiste a revêtu sa chape violette richement brodée par sa mère. Il ralentit pour éviter les gaz d’échappement du véhicule et s’écarte pour me laisser une place à ses côtés. Il me connaît bien et il sent qu’il est nécessaire de rompre cette solitude qui tombe sur mes épaules.
– Ça va Gilles ?
– Il faut bien.
– Tes enfants vont rester avec toi ?
– Non, ils ont leur travail. Chacun va repartir dès ce soir.
– Tu vas te trouver seul…
– Oui, mais tu sais, il y déjà longtemps que je suis seul. Depuis que Corinne a fait son premier accident vasculaire cérébral, nos conversations étaient réduites.
– Oui, mais elle était là…
– C’est vrai. Elle occupait tout mon temps, mon énergie.
– Je sais, tu as été aux petits soins pour elle. Dis-toi bien que c’est une délivrance. De toutes les façons tu allais t’épuiser à la tâche et tu risquais de partir avant elle. J’en ai connu des aidant qui se sont liquéfiés pour terminer usés, vidés, ayant donné tout leur amour, leur énergie.
– C’est normal. Après plus de cinquante années de mariage un couple n’est plus qu’une entité, un binôme qui ne fonctionne qu’à deux, le plus faible s’appuyant sur le plus fort.
– Il va pourtant te falloir apprendre à vivre sans elle.
– C’est impossible. Elle est mon oxygène, ma raison de vivre. Sans elle, je ne suis plus rien, qu’un vieux bonhomme sans avenir, sans lendemain. Un veuf ! Voilà un terme que j’exècre. Jamais je n’aurais imaginé qu’il puisse s’accorder avec moi. Ce n’est pas possible. Je ne peux pas être veuf, je ne le veux pas !
– Qu’importent les mots, Gilles, ils sont dérisoires. Corinne sera là, près de toi, beaucoup plus souvent que tu ne peux l’imaginer. C’est ça notre force, notre foi. Après la mort, qui n’est qu’une étape inéluctable dans notre existence, il y a la vie, la présence permanente de l’être aimé. Tu lui parleras et je suis certain qu’elle te répondra même si les mots sont inaudibles, tu seras le seul à les entendre.
– Puisses-tu dire vrai…
– Nous en reparlerons. Fais-moi confiance. Tous les évènements que vous avez vécus ensemble reviendront, surtout les bons. Ils seront bonifiés, enjolivés, auréolés de béatitudes. Je connais la puissance de votre amour, je sais que Corinne n’aurait jamais pu vivre sans toi. Heureusement, elle est partie la première. Au fil des temps, elle était devenue complètement dépendante de toi. Ça se voyait à son regard qui te cherchait sans cesse. Je me disais même parfois qu’elle aimait mieux son Gilles que le bon Dieu.
– Parce que j’étais plus près, plus palpable. Ce n’est pas facile d’aimer un être qui n’est pas visible. Existe-t-il d’ailleurs ?
– Bien sûr que oui ! Tu ne sens pas qu’il est là avec nous, tout proche, et que c’est lui qui va prendre soin de Corinne désormais. Il va l’asseoir auprès de Lui afin qu’elle ait la meilleure place pour te regarder continuer à vivre.
– Vivre ! Pour quoi ? Pour qui ?
– Pour tes enfants, tes petits-enfants qui ont suffisamment de chagrin aujourd’hui sans en rajouter une deuxième couche. Ta mission n’est pas terminée. Je sais que tu as déjà largement fait ta part. Tout ceux qui nous suivent savent combien tu as donné de ton temps pour eux. Tu n’as pas le droit de les abandonner. Au contraire, ce que tu as distrait pour aider Corinne à franchir sa terrible épreuve tu vas maintenant en être déchargé. Il ne faut pas laisser le chiendent s’installer dans une jachère inutile.
– Je n’ai plus la force.
– C’est normal aujourd’hui, mais demain nous en reparlerons. C’est promis ?
Le convoi est arrivé à l’entrée du cimetière. Les pneus crissent sur le gravier blanc Le véhicule fend une foule de morts allongés, indifférents, blasés, écrasés par des amoncellements de fleurs artificielles et de plaques commémoratives.
Le moment le plus difficile approche. Celui que je redoute tant. La découverte de ce trou béant qui va recevoir pour toujours la moitié de moi-même. Je n’ai pas choisi l’emplacement. J’ai dû me plier au règlement local qui supprime tout passe-droit. Inutile de souhaiter un bord d’allée ou une vue sur la campagne. On prend son tour comme à confesse. Qu’importe le voisinage, celui ou celle qui va se trouver tête-bêche dans l’autre allée ou sa voisine de droite fraîchement arrivée encore couverte de fleurs naturelles qui n’ont pas eu le temps de faner. Qui sera à gauche ? À qui le tour dans cette grande loterie de la mort ?
Je me sens seul malgré la présence d’une foule d’amis qui ont fait l’effort de nous accompagner malgré la chaleur de cette fin de mois d’août. Pas un nuage dans le ciel, la journée s’annonce très belle. À quoi bon ? J’aurais préféré une matinée d’automne sous un ciel bas menaçant de tristesse. Pourquoi cette féerie naturelle, ces chants d’oiseaux déplacés, cette communion des éléments comme pour fêter la paix tant souhaitée par les hommes. Ce n’est pas un jour de réjouissance. Ce matin, on porte en terre une fée, une fleur fauchée en pleine maturité, un être vivant encore il y a quelques jours, qui souriait, qui s’excusait de causer de l’embarras et dont le regard me demandait aide et assistance. Cette aide que je n’ai pas été capable de lui donner, impuissant en face de ce destin qui allait se rompre. Je continuais à lui mentir, à lui promettre un avenir, lui racontant des sornettes pour faire diversion, mon imagination sclérosée par la détresse.
Son appel au secours était pathétique. Elle savait que j’étais le seul à pouvoir la sauver d’une fin épouvantable. Je n’avais pas le courage de lui rendre ce dernier service. Elle boirait son calice jusqu’à la lie pendant que je débitais des incongruités pour cacher ma peine. Je lui demandais de s’accrocher alors qu’elle coulait et je n’avais même pas les moyens de lui tendre la perche salvatrice. Avec sa douceur angélique, ses lèvres desséchées et tétanisées, elle ne savait plus que murmurer :
– Gigi, mon Gigi !
Ce diminutif qu’elle avait si souvent prononcé ! Elle le formulait comme on respire, pour se donner une bouffée d’air pur, pour continuer à avancer l’un près de l’autre, couple devenu un, siamois, aggloméré. C’était son hymne, son refuge, son gilet de sauvetage, son graal. Un appel au secours que je n’avais pas toujours décelé, oubliant sa fragilité masquée par sa beauté, son rayonnement.
J’entendrai son appel jusqu’à la fin de mes jours. « Gigi, mon Gigi ! » Cela voulait dire je t’aime, aide-moi, ne me laisse pas, reste avec moi, ne t’éloigne pas, j’ai besoin de toi. Et, je suis resté là, impuissant, à son chevet, incapable d’atténuer sa douleur, d’y mettre un terme ou de la guérir. Elle avait une confiance démesurée dans mes capacités, alors que j’étais ridiculement un incapable.
Combien de fois ai-je imposé mes mains sur son corps de souffrance, m’imaginant dépositaire de pouvoirs que je n’avais pas. Mes caresses, mon souffle, mes incantations ont été stériles. Le mal était plus fort et me narguait :
– Vas-y ! Sauves-la, toi qui te prends pour ce que tu n’es pas. Ton orgueil en prend un coup mon vieux, je suis plus fort que toi. Je vais prendre ce que tu as de plus cher.
– Pourquoi s’acharner sur elle ? Un être aussi pur qui n’a jamais fait de mal à une mouche. Laisses-la moi, elle m’appartient depuis toujours. Écartes-toi Satan, retourne au feu éternel. Mon fluide va redonner tout son éclat à cette perle que tu n’aurais jamais dû approcher. Elle est mienne depuis la nuit des temps. Moi seul détient le pouvoir de lui redonner la vie.
Pauvre imbécile inefficace, infécond, incapable de tenir une promesse, de défendre celle que tu as juré un jour de rendre heureuse. Vois dans quel état elle se trouve et tu es là, les bras ballants, aride, impuissant.
Chapitre 2
Les neuf dixièmes, au moins, de notre bonheur reposent exclusivement sur la santé disait Arthur Schopenhauer, le philosophe allemand du 19 e  siècle. Je m’en suis rendu compte dès les premiers symptômes. Notre vraie vie s’est arrêtée à ce moment, fauchant net nos projets, nos ambitions. À partir de cet instant tout a été boule

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