Le Clochard
78 pages
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Le Clochard , livre ebook

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Description

Le Clochard, composé de trois parties, est une compilation de deux nouvelles, le Clochard et Trangouma, suivies d’un poème intitulé « Ancien enfant de troupe ».
Le Clochard évoque la situation des jeunes congolais obnubilés par des désirs d’émigration ou d’expatriation, en vue d’expérimenter le mirage européen. Etudiants boursiers, fonctionnaires en mission et aventuriers divers, chacun veut obstinément immortaliser son passage en France. Cependant, ces « parisiens » congolais, arrivent dans l’Hexagone avec des « congolismes » particuliers qui, parfois, leur jouent des tours cocasses aux conséquences imprévisibles.
Par ailleurs, Trangouma est une des manifestations de l’esprit AET, caractéristique des anciens enfants de troupe. Il traduit l’évocation d’une des façades de la vie des enfants de troupes de l’Ecole militaire préparatoire Général Leclerc de Brazzaville. En effet, confrontés à diverses contingences, les enfants de troupes, du fait de leur jeunesse, doivent parfois faire face à certains défis, vraies gageures, qu’impose leur particularité juvénile et de gosses reclus.
« Ancien enfant de troupe », enfin, est un poème de réminiscence.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 19 mai 2014
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332595201
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0037€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-59518-8

© Edilivre, 2014
Du même auteur


1) Le Clochard
(Nouvelle)
2) Trangouma
(Nouvelle)
Suivis de
Ancien enfant de troupe
(Poésie)
Dédicace


A
Jean Claude MOPITA
Auguste MIABETO-LADI
Et à tous les anciens enfants de troupe
Le Clochard
 
I
C inq mois après son arrivée mémorable en France, Balossa, récemment inscrit à l’École supérieure de journalisme, entreprit d’aller faire ses emplettes, à Paris. Il résidait dans un foyer pour étudiants en province, à Lille, chef-lieu de la région Nord-Pas-de-Calais. Installée sur la Deûle, la ville flamande se situait dans le prolongement de la ligne de démarcation entre les provinces belges de la Wallonie et de la Flandre.
C’était la seconde fois, au cours de ce mois estival de juillet, qu’il prenait le train, sous une chaleur torride lui rappelant le climat tropical aux températures extrêmes de son pays natal. Malgré la canicule qui distillait une chaleur suffocante, l’étudiant africain s’était enveloppé dans un costume trois-pièces à rayures, contrastant avec la tendance saisonnière. Il suait à grosses gouttes qui suintaient sur son visage moite. Sous les épaisseurs, la chemise à manchettes acquise, à prix d’or, aux friperies du marché de Ba Macros à Texaco-la-Tsiémé, à Brazzaville, n’était plus qu’une éponge gorgée d’eau. La sueur dégoulinait de partout, comme s’écoulant de robinets invisibles. De temps à autre, il s’épongeait le visage et le cou avec un mouchoir en coton qu’il essorait discrètement par intermittence. Heureusement, le train qu’il allait prendre était équipé d’une climatisation très efficace qui lui rappelait plutôt, au pays, la fraîcheur du Chaillu forestier, pendant la grande saison sèche, au mois de juillet.
Ce train, c’était un authentique trésor technologique qu’il osait à peine comparer avec les guimbardes poussives qui faisaient grincer les rails accablés par le poids de l’âge et de la surexploitation, du chemin de fer Congo-Océan. Jamais auparavant, il n’avait vu une merveille pareille. Ce qu’il avait pu voir dans les magazines ou les journaux, était loin de la réalité de ce train à grande vitesse, ce T.G.V., comme on l’appelait, qui, comme accomplissant un rituel tout au long de son parcours, le déposait à Paname.
Depuis son insigne débarquement dans l’Hexagone, il avait déjà visité Paris, la Ville Lumière, trois fois de suite, sans jamais étancher ses envies ni son appétence. D’ailleurs, qu’aurait-il pu voir en si peu de temps ? Certainement la place du Trocadéro, sur laquelle trônait la tour Eiffel, que tous ses compatriotes adulaient sans mesure. Lui, il fantasmait plutôt sur la tour Montparnasse, le toit immobilier parisien. Peut-être, aurait-il pu aussi visiter la tombe du soldat inconnu et l’arc de triomphe, ou encore les Champs-Élysées sur les pas de son Poilu de grand-père, venu, suite à l’appel du Général de Gaulle, à la rescousse de la mère patrie en pleine détresse ? Certainement se serait-il satisfait du Moulin rouge ou des senteurs féeriques des Folies Bergère dans le sillage de Joséphine Baker. Cependant, le quartier de la Chaussée-d’Antin, et l’hôtel des Invalides lui étaient demeurés en mémoire, à cause des documents scolaires et livres didactiques qu’il se procurait au centre culturel français de Brazzaville ; il y était abonné à la bibliothèque, l’une des mieux nanties de la place. Par ailleurs, c’était une réelle délectation que de visiter le Quartier du sentier avec ses innombrables ateliers et les échoppes des artistes du dé et de l’aiguille, dans les allées desquelles on pouvait croiser parfois, par bonheur, le chemin d’un couturier de renom.
Autant d’audacieuses raisons qui motivaient son ardent désir de vouloir dévorer Paris d’un seul trait, comme d’une ultime gorgée, avant qu’il ne fût trop tard. Voir Paris et mourir, était sa première obsession, une autre manière d’appréhender cette maxime en vogue au Congo, durant les années quatre-vingts, dans les milieux juvéniles contraints à l’extraversion pour pallier l’absence de la moindre perspective viable. À cette époque, le mythe de la France était tel que dans la psychologie collective, les richesses pouvaient y être ramassées à la pelle. « En Europe, tout réussit à tout le monde. », disait-on. Cette aberration abondamment véhiculée par une certaine obédience culturelle assez ignare, justifiait, à n’en point douter, cette frénésie irrésistible des jeunes désœuvrés, et souvent déscolarisés, vers l’inéluctable expatriation, souvent encouragée par les parents. D’ailleurs, quelle famille ne se sentait pas requinquée d’avoir sa progéniture en France ?
Pour Balossa, tout de Paris était mirifique et magique. Paris n’avait rien de banal. Tout le séduisait, même le moindre rien. Il voulait tout toucher du doigt, pour s’assurer qu’il était bel et bien à Paris, en France. Il n’était guère cloîtré dans un conte de fées ou dans une de ces illusions qui, à Brazzaville, hantaient constamment ses nuits insomnieuses. Des séries d’images des différents endroits, des places et des monuments que lui décrivaient ses devanciers défilaient dans sa mémoire, comme s’il pouvait tout voir, d’un seul coup, à l’instant même.
Il n’avait certes pas encore brisé le mythe de la Française, mais il ne s’en souciait pas outre mesure. Les blondes, les rousses, les châtaines, aucune d’entre elles ne constituait encore une préoccupation majeure. Le mythe n’était guère une gageure. « Chaque chose en son temps. », se disait-il dans son for intérieur, en pensant pudiquement à sa dulcinée, Véronique, qu’il avait laissée en jachère au pays. Il pensait déjà, pour vaincre la solitude, mettre ses documents de séjour en règle, afin certainement, d’expatrier sa concubine qui serait bien heureuse de s’envoler pour le Nord. «  Paris est une ville réellement séduisante.  » Il ne cessait de marteler ces mots, chaque fois qu’il venait à la rencontre de la capitale de la France.
Tous ses congénères, lorsqu’ils arrivaient à Paris, prenaient d’assaut la tour Eiffel et s’y faisaient photographier, en veillant soigneusement, pour immortaliser cet instant magique, à avoir en arrière-plan le monstre d’acier et de fer. D’aucuns, plus fétichistes, ne se privaient nullement du plaisir de refaire les clichés, lorsque l’âme métallique de Paris n’avait pas été correctement prise sous un angle ostensible, qui ne laisserait aucun doute aux détracteurs. Qu’importe donc, s’il fallait dilapider ses menus moyens ou ses moindres économies, fruits de tant de privations et parfois d’humiliations ineffables, pour arriver à cette fin ; comme quoi la fin justifie les moyens. La tentation était si envahissante et si irrésistible qu’on osait se priver de tant de bonnes choses vantées par les « Parisiens » de Bacongo. Plusieurs volumes d’albums photos seraient nécessaires pour immortaliser toutes ces images.
Ces clichés, une fois dupliqués en une myriade d’exemplaires – car chacun devait avoir sa part de photos – étaient expédiés, dès le premier vol d’UTA ou d’ Air France à destination de Brazzaville, aux parents, amis et connaissances pour confirmer qu’on était réellement à Paname. La capitale française qui faisait tant fantasmer et rêver plusieurs générations de Congolais, gardait toujours son côté mythique, malgré sa démystification par une forte colonie d’étrangers naturalisés Français.
Pour Balossa, le Paris de ses fantasmes et de ses rêves était à ses pieds, ou plutôt sous ses pas. Il martelait ses pavés antiques comme un extraterrestre sonderait des objets barbares, inconnus. Il pilonnait le sol parisien avec ses souliers de cuir rapportés du pays. Il les avait judicieusement rachetés à prix d’or à Brazzaville, en seconde main auprès des « Parisiens », lors de leurs multiples et émouvants séjours estivaux au bercail. Comme quoi, il fallait déjà posséder quelque chose de Paris pour susciter une prémonition positive, avoir vocation pour se rendre en France, la destination ultime.
Par ses manies empruntées, ses extravagances et ses agissements loufoques, Balossa ne pouvait guère s’empêcher d’attirer l’attention des Parisiens sur lui. Il faisait marrer certains autochtones qui le tournaient en dérision. Il n’en avait cure, lui Balossa. Qui, ou quoi, pouvait le gêner ? Il était un étranger à l’étranger, et personne ne le connaissait. Il pouvait donc se pavaner avec une...

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