Le clown qui ne riait jamais
158 pages
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Le clown qui ne riait jamais , livre ebook

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Description

Geronimo, Le clown__ hilarant__ qui ne riait jamais... Raoul Ramirez, surnommé « El Loco », en hommage à sa témérité, pour d’aucuns suicidaire... Diego, le jongleur, qui avait fait La promesse de devenir le plus grand sur la tombe de son grand-père... Diana, la lionne, amoureuse de Gunter, son dompteur... Mezzo, le nain auguste de soirée, au caractère épouvantable... Le « Cirque des Merveilles » que seul un Miracle pourrait sauver de la faillite... L’impensable Come-Back d’André « Dédé » Florian, trapéziste à la retraite depuis dix ans... Virginia, l’exquise écuyère, si belle qu’aucun garçon n’ose l’approcher, et qui néanmoins tombe enceinte... Tommy, le petit chien bâtard, dans son dernier tour de piste héroïque... Flamingo, gay flamboyant, acrobate au tissu aérien... Gilbert Romano, des Gilson Brothers, cascadeur à la retraite, qui survit de ses souvenirs... Amadeus, le Monsieur Loyal de la décade, dont le rêve est brisé par une déclaration malheureuse... et bienvenue dans l'univers du cirque !

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 15 janvier 2021
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414496075
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
194, avenue du Président Wilson – 93210 La Plaine Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-49606-8

© Edilivre, 2021
Le clown qui ne riait jamais
On savait peu de choses de lui, car s’il ne riait jamais, il ne parlait pas beaucoup non plus. Ce qu’on savait de Geronimo, c’est qu’il n’était pas un enfant de la balle. C’était en somme un amateur. On disait qu’il était de sang bleu. Que c’était par dépit, de Dieu sait quoi, ou alors par dégoût du monde où il avait grandi, qu’il était devenu clown. Par dérision, en somme. Comme il parlait peu, il ne se donnait pas la peine de démentir, de rectifier, encore moins d’expliquer quoi que ce soit. Il n’était toutefois pas asocial. Lorsqu’une fête était organisée, dans la piste du cirque peut-être, il n’y manquait jamais. Lorsqu’on le sollicitait, pour un avis, un conseil, il ne se défilait pas. Comme il était de peu de mots, de très peu de mots, ses réponses prenaient tout leur poids. Mais il n’en tirait manifestement aucune vanité. Geronimo, le clown vedette, était en fait l’être le plus modeste sur cette Terre de fatuité, ce qui le rendait populaire, en dépit du fait que s’il ne riait jamais, personne ne l’avait seulement vu esquisser un sourire non plus. Ni dans l’arène ni en dehors de celle-ci. Par rapport à la sienne, Buster Keaton aurait paru afficher une bouille réjouie en permanence.
Décrire Geronimo, ou seulement tenter de définir la « vis comica » de ce clown de génie tenait de la gageure. Car pour ce faire, il aurait fallu qu’il existât un mètre de comparaison, or Geronimo et son art étaient uniques.
Lorsqu’on lui demandait pourquoi il avait choisi ce nom de chef indien, si c’était en somme car sur les images Geronimo avait cet air grave, digne, sérieux, il haussait vaguement les épaules, comme s’il s’excusait de ne pouvoir fournir de réponse. Alors, confus, on lui en proposait peut-être une : certains clowns fameux avaient bien choisi de s’appeler Nabuchodonosor ou encore Chorizo !
Bien entendu, Geronimo — qui avait certes un nom civil, mais que personne ne semblait connaître ou alors qu’il ne serait venu à l’esprit de personne de l’appeler par celui-ci — n’était pas marié. Personne même jamais ne l’avait vu en compagnie d’une femme. D’aucuns, sans aucune malveillance, car Geronimo n’en suscitait aucune, avançaient qu’il était peut-être gay. Mais personne non plus jamais ne l’avait vu en compagnie d’un homme, qui aurait pu être son amant. Ces supputations résultant sans doute du fait qu’il était difficile d’imaginer un être humain sans aucun désir charnel.
Geronimo, s’il apparaissait solitaire, ne fuyait nullement la compagnie et était absolument à l’écoute de tout le monde, du plus humble garçon de piste aux patrons des cirques où il se produisait et qui, parfois, en proie à des soucis tenaces, venaient en quelque sorte se soulager auprès de lui, ce qui leur était d’autant plus facile que, donc, Geronimo desserrait à peine les lèvres.
Geronimo, par ailleurs, en dépit du fait qu’il ne souriait jamais, n’était pas un clown « triste » ou « mélancolique ». Certes, ces collègues-là, peut-être coiffés d’une aura poétique, séduisaient un certain public, mais ne faisaient guère rire.
Geronimo n’avait pas besoin de faire grand-chose pour déchaîner l’hilarité. Sans doute même que s’il s’était évertué à faire quelque chose de bien défini, il en aurait déjà fait trop. On disait pourtant (mais sur quoi ce « on » se basait-il pour s’avancer ainsi ?) que Geronimo était un excellent cascadeur, alors qu’il ne réalisait jamais aucune cascade, qu’il était très bon musicien, alors que si parfois il tenait en mains un instrument, il n’en jouait jamais, qu’il était digne en somme des meilleurs augustes de soirée d’une époque révolue, maîtrisant à peu près toutes les disciplines du cirque !
Pour se faire une idée, Geronimo se présentait en piste en tenant, contre lui, des deux mains, une chaise. Il enjambait l’anneau de bois délimitant celle-ci, gravissait les gradins et, impassible, les parcourait ainsi, parmi le public, toujours la chaise collée contre sa poitrine ! Et cela suffisait pour mettre les spectateurs en liesse ! Il revenait dans l’arène, déposait la chaise au centre de celle-ci, et s’en désintéressait jusqu’à la fin de son numéro ! Numéro qu’il concluait comme il l’avait commencé, parcourant les gradins la chaise collée à sa poitrine et quittant le chapiteau par l’entrée du public !
Inévitablement, son cas avait fait l’objet d’analyses. Des intellectuels, des philosophes et même des sociologues et psys de tous bords s’étaient penchés sur le phénomène. Au bout du compte, un seul constat s’imposait. Geronimo était naturellement, génétiquement drôle. Certains naissent beaux, d’autres exceptionnellement doués pour les mathématiques… Lui, Geronimo, avait l’incroyable don de déclencher le fou-rire chez les spectateurs à peine posait-il un pied — même point garni d’une chaussure démesurée, qui à chaque pas résonnerait sur le plancher ou le tapis plastifié des pistes comme une claque monumentale — dans l’arène. Du reste, à l’issue de ses prestations, les yeux encore pleins de larmes de rire, on aurait été bien en peine de décrire celles-ci !
En fait, Geronimo était doté, à l’instar de quelques élus de l’oreille absolue, du don absolu de faire rire. Il n’y avait pas d’autre explication possible au phénomène. Or, donc, Geronimo ne riait ni seulement ne souriait jamais lui-même. Ainsi, lorsqu’un collègue balançait une vanne, qui faisait s’esclaffer tout le monde, lui, le visage de marbre, applaudissait. Exprimant sans doute de la sorte son amusement. Ou alors manifestait-il ainsi un esprit solidaire. Car Geronimo n’était jamais avare en compliments, assurément sincères, dans la mesure où il était sans nul doute un homme généreux. Certes, ses appréciations consistaient en un hochement de tête, voire un mot ou deux, jamais assortis du moindre sourire. Geronimo aurait souri qu’on se serait inquiété pour lui, comme confronté à un symptôme lié à une maladie.
Et puis, un jour, Geronimo tomba effectivement malade. En fait, il était peut-être malade depuis un certain temps déjà, mais comment savoir ? Il continuait pareillement à se présenter en piste, à faire trembler les gradins malmenés par les explosions de rire… Forcément, ses traits, immuablement impassibles, ne trahissaient pas son mal, qui le rongeait depuis un certain temps ou alors depuis peu. A son insu ou non.
Ainsi, lors d’une soirée, au plus fort de son numéro, ce qui était beaucoup dire, vu qu’il ne semblait jamais s’y passer grand-chose qu’on puisse décrire justifiant l’hilarité irrépressible du public, plié en deux comme d’habitude, Geronimo, le clown génial, s’effondra, les bras en croix. Il resta ainsi bien deux minutes — une éternité ! — son corps inerte submergé des rires redoublant du public comme une bière dans la tombe, recouverte de fleurs… Ses collègues ne s’inquiétèrent nullement non plus. Ils étaient stupéfaits. C’était bien la première fois que Geronimo exécutait une cascade ! Par ailleurs digne du brillant cascadeur tel qu’il était décrit par les plus avisés d’entre eux !
Revenu dans les coulisses, Geronimo perdit de nouveau connaissance. On appela une ambulance.
*
Le diagnostic fut impitoyable. Cancer généralisé. Le spécialiste lui proposa bien une chimio, sans conviction, même s’il s’appliqua à lui expliquer qu’il subsistait toujours une chance. On avait connu des cas où le miracle s’était produit. On ne savait pas si Geronimo croyait en Dieu ou en quelque pouvoir occulte. Il remercia, s’en retourna au cirque où il reprit sa place dans le programme.
On se garda de lui poser des questions sur son état de santé. Et on avait beau le scruter. Geronimo ne pouvait être trahi par sa mine, et pour cause.
L’oncologue avait parlé de semaines. Il s’était repris, comme s’il avait mauvaise conscience ou comme s’il ne fallait pas le prendre trop au sérieux… Quelques mois, donc. Mais on avait connu des cas où… Le masque de son patient lui confondait sans doute quelque peu les idées et son laïus charitable manquait dès lors d’aplomb et de cohérence…
Heureusement sans doute, Geronimo n’était drôle, irrésistiblement drôle, qu’en piste… C’était la première fois que le praticien avait pour patient un clown, le plus hilarant des clowns, qui affichait pourtant un faciès triste comme un jour sans pain… Cette pensée dut lui traverser l’esprit, car un instant il apparut sur le point d’éclater de rire…
Geronimo ne souffrit plus d’évanouissements en piste. On en vint ainsi à ne plus s’inquiéter de la santé de l’artiste. Et comme celui-ci ne se soumettait à aucun traitement, son aspect n’apparaissait pas particulièrement alarmant. Un maigre a l’avantage de ne pouvoir perdre trop de poids. Par ailleurs, comme Geronimo ne faisait pas grand-chose dans son numéro, les forces ne risquaient guère de lui manquer, et il y avait peu de chances qu’on s’aperçût de son affaiblissement. On cessa dès lors complètement de s’angoisser pour lui.
La saison touchait à sa fin. On pouvait parler de tournée triomphale. Lorsque Geronimo était en piste, les explosions de rire portaient loin au-delà de l’enceinte du cirque, et c’était là la meilleure publicité possible pour le spectacle.
Un froid matin de la seconde moitié d’octobre, les rideaux des fenêtres de la modeste caravane de Geronimo demeurèrent tirés. Comme l’heure de la matinée approchait, on commença à se faire du souci. On frappa à la porte de son logement, en vain. Les artistes savaient que leur collègue ne donnait jamais un tour de clé, comme si sa porte était toujours ouverte à tous. Mais on ne se décidait pas à la pousser. Ce fut finalement le pompier de service qui se chargea de

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