Le Fatras
192 pages
Français

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Le Fatras , livre ebook

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Description

Comment comprendre le projet et les choix de Philippe, enseignant, sans avoir pris connaissance, au préalable, des trajectoires de Boris, de Christine, de Caroline, de Manon, de Marina, de Luc et de celles de tous les autres ?

Dans Le Fatras, ou Chroniques d’un naufrage collectif, défilent quelques petits et grands errements de nos sociétés dites modernes. C’est à la fois une réflexion en rapport avec la loi universelle des causes et des conséquences, et un appel à la responsabilité individuelle de chacun.

« Quelques mots-clés : école, animal, violences, compétences, professionnalisme, sociabilité.»

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 23 juin 2015
Nombre de lectures 1
EAN13 9782332942258
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-94223-4

© Edilivre, 2015
Dédicace


À Plume
Photo de couverture : Paris, 24 décembre 2010
(tous droits réservés)
Citation


Ce n’est pas une preuve de bonne santé que d’être parfaitement intégré dans une société profondément malade.
Anonyme
(souvent attribuée sans référence à Krishnamurti)
I Noël 2010
« Seigneur, réalise totalement ta promesse : brise les bâtons des tortionnaires, brûle les chaussures bruyantes des soldats, fais que finisse le temps des manteaux couverts de sang »
Des paroles chargées de sens arrivées jusqu’aux oreilles de Boris en ce jour spécial pour beaucoup, ordinaire pour lui. Il en avait assez d’arpenter les rues par ce temps glacial. Il s’est offert une longue pause-café et en profite pour suivre plus ou moins attentivement les informations sur l’écran plat de cette brasserie parisienne. Question religion, comme dans la vie en général, Boris n’est pas très fixé, mais les paroles du pape l’ont touché. Un ressenti personnel, peut-être parce qu’il se sent du côté des faibles et des victimes de la brutalité, que ce soit celle d’un être malveillant, d’une armée ou d’une société qui jette facilement à la rue les plus fragiles.
En attendant l’heure de réouverture du foyer et le droit de regagner la chambre qu’il partage avec un autre égaré, Boris laisse s’écouler le temps. À 35 ans, il ne s’est pas remis de la mort de Maria, son grand amour. Déjà quatre années de séparation. Tout s’est enchaîné avec logique après son décès : dépression, arrêts maladie, démission, galères financières, précarité, perte du logement, rue, foyers occasionnels. Il paye l’absence d’une famille ou d’amitiés fortes, et surtout son incapacité à tourner définitivement la page d’une relation qu’il pensait à tort éternelle dans un monde impermanent. Victime de ses propres croyances, son amour s’est transformé en fantôme, sa survie en trahison, et il évolue dans l’impasse de ce drame personnel.
Physiquement réchauffé après un long moment à l’abri dans ce refuge provisoire, ne souhaitant pas trop prolonger son séjour par peur de remarques déplacées, il se décide à affronter la réalité extérieure et à regagner sa bouche d’aération préférée, près de la station de métro Invalides. Un point de repère qu’il rejoint d’un pas rapide. Il n’est pas le seul à connaître l’endroit. De nombreux pigeons souffrant du froid y trouvent également une chaleur réconfortante.
Lorsque Boris arrive, les oiseaux le laissent prendre place en s’écartant un peu, sans manifester de crainte insurmontable qui se traduirait par une fuite éperdue. Boris sort la couverture de son sac à dos, s’installe confortablement et les pigeons viennent se blottir contre lui. Une source de chaleur supplémentaire, humaine celle-là. Boris ne manifeste aucune animosité à leur encontre, ni mentale, ni physique. Au contraire, il aime la présence de ces compagnons d’infortune méprisés par bon nombre de citadins qui les considèrent comme de vulgaires parasites vecteurs de maladies.
En ce jour de célébration de la naissance du Christ, c’est bien entouré que Boris attend l’heure d’ouverture du foyer pour se remettre en marche, offrant aux rares passants attentifs une image saisissante de solidarité entre homme et animal.
* * *
« Le jour de Noël est un peu particulier. Tous pensent à leurs enfants, à leurs conjoints, à leurs parents (…) Je veux simplement leur dire que l’on a confiance en eux. Le rôle du ministre est d’être attentif aux conditions dans lesquelles ils assurent leur mission »
– Ils sont bien courageux nos soldats, il faut le reconnaître, lance Philippe qui vient d’entendre ces paroles diffusées par la télévision.
Le repas est bien entamé et la famille au grand complet profite de ce moment exceptionnel. Plusieurs générations sont réunies. Philippe et Myriam, un couple stable aux grandes responsabilités professionnelles et aux multiples projets. Leurs deux enfants de 8 et 11 ans. Les parents de l’épouse.
Tous les adultes présents sont d’accord avec les propos du père de famille.
– S’ils risquent leur vie si loin de la France, c’est pour nous protéger de tous ces fanatiques, se permet d’ajouter Robert.
– C’est quoi un fanatique ? interroge Louis.
– Quelqu’un de violent, qui tue, qui veut faire du mal aux autres. Il y a plein de méchants en ce moment en Afghanistan. Mais, heureusement, notre armée les combat. Tu n’aimes pas le foie gras ?
– Si, si… répond sans enthousiasme le garçon qui hésite à manger son morceau choisi de canard. C’est où l’Afghanistan ?
– Je te montrerai sur ton globe terrestre quand le repas sera terminé.
La dinde arrive sur la table, fièrement apportée par Myriam.
– Aaah ! se permet Robert, émerveillé par l’oiseau joliment présenté sur un plat en inox.
« C’est un symbole de ce que nous faisons ici, bien sûr, des actions militaires mais aussi des actions de développement au service des Afghans »
– Il a vraiment bien fait d’y aller notre ministre, c’est tout à son honneur. Cette journée doit être douloureuse pour nos soldats…
– J’imagine être seul, séparé de vous tous le jour de Noël, appelé par le devoir militaire ou autre chose, ce serait terrible.
Les autres informations se succèdent, sans susciter de nouveau commentaire. Le repas, copieux et raffiné, pour lequel les oiseaux et d’autres animaux ont payé un lourd tribut, se poursuit dans une ambiance festive et conviviale.
II
Pour ce long week-end du 15 août, Julien a décidé de passer quelques jours « à l’océan » comme il aime le dire. Il a choisi une destination qu’il connaît déjà, une destination sans risque, mais qu’il apprécie : Quiberon. La richesse des paysages de cette presqu’île et toutes les commodités offertes aux touristes ne l’ont pas fait hésiter longtemps au moment de sa prise de décision.
Célibataire « endurci », la quarantaine, vrai parisien travaillant dans une boutique de prêt à porter, le voilà débarquant en gare d’Auray après quelques heures de train à grande vitesse. Il lui reste à s’installer dans le TER judicieusement appelé « Tire-bouchon ». La circulation automobile est ici un vrai problème saisonnier pour les amoureux de la voiture. En trois quarts d’heure, le train le déposera à quelques minutes du centre ville.
Mais aujourd’hui, vers douze heures, c’est également l’affluence des grands jours dans les quatre wagons et Julien a du mal à se trouver une petite place assise. C’est seulement en tête de train, après avoir visité tous les autres wagons, qu’il aperçoit enfin son bonheur. Il se retrouve assis et soulage ainsi ses jambes des cinq minutes de marche depuis sa sortie du TGV. À sa gauche, en face de lui mais de l’autre côté de l’étroit couloir, deux jeunes femmes d’une vingtaine d’années parlent à haute voix sans se soucier le moins du monde des autres passagers.
« Moi je le trouve super mignon !
– Je ne le sens pas…
– C’est dommage. Je vais tout faire pour que ça se termine au lit entre nous.
– Tiens, tu me fais penser à ma pauvre mère… Tu sais pas ce qu’elle m’a sorti l’autre jour ? « Pas besoin de changer tes draps, tu ne fais que dormir… » Si tu savais, maman, ce que nous avons fait avec Alban et dans quel état était le lit… Alors lui, il ne m’a pas ratée et je lui en ai fait voir de toutes les couleurs ! Il a dû se la mettre au repos pendant plusieurs jours…
– Tu parles. Je le connais Alban. Il est increvable ! »
Un SMS interrompt Mélanie. Elle consulte rapidement son smartphone et s’exclame :
« Oh non, pas lui !
– C’est qui ?
– Vincent…
– Quel culot tout de même ! Après t’avoir plantée comme ça l’autre soir…
– Moi je lui en veux surtout pour son absence à l’incinération de Guillaume. Il savait combien nous avions été proches.
– Heureusement que tu avais rompu plusieurs mois auparavant. À ta place, j’aurais hyper culpabilisé.
– Guillaume était en souffrance et je pense que ça devait arriver. Avec ou sans moi. Et puis après tout…
– Quoi donc ?
– Rien, rien,… C’est son choix, j’ai fini par le respecter.
– Dès le début, j’ai senti un malaise.
– Oui, mais il baisait bien. Et c’était vraiment excitant de faire ça pendant que les mômes de la colo dormaient.
– Qu’est-ce qu’ils étaient mignons certains…
– Oh oui ! Tu te rappelles de Nathan et de Léo ?
– Ils étaient inséparables ces deux-là. Ils vont en faire des heureuses dans quelques années.
– Ou des heureux !
– Dix ans de plus et ils étaient bons pour moi.
– Pourquoi dix ans ? À quinze ou seize ans, ils savent tout faire…
– C’est vrai. Et on peut leur en apprendre ! se met à crier Karine.
– Tu as l’intention de faire combien de soirées ?
– Un soir sur deux. Histoire qu’on ait le temps de reprendre des forces. Il faut absolument que je fasse rapidement des achats pour l’alcool. Mes parents ne stockent presque rien dans leur maison.
– Il faudra prévenir les invités pour qu’ils apportent quelques bonnes bouteilles. Sinon, ça va vite être la ruine.
– Louis ne vient jamais les mains vides…
– Je suis déjà super excitée !
– T’as de quoi. On va bien s’amuser ! Y’aura plus de garçons que de filles. Ils vont vraiment pouvoir s’occuper de nos fesses…
Les remarques et les détails croustillants sur leur vie sexuelle ou affective s’accumulent jusqu’au terminus. Dans le wagon, aucune réaction. Les passagers jouent la carte de la surdité ou de l’indifférence, vaquant à leurs occupations d’êtres civilisés ou profitant des paysages qui défilent. Julien, lui, n’en peut plus.
On arrive. Les deux copines ne se sont pas encore mises en mouvement. Julien se lève, prend ses bagages et leur lance :
« Ouais, ben avec tout ça, vous avez fini par m’exciter… Va falloir que je m’en mette un bon coup ! » termine-

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