Le Secret de Saint Eugène
320 pages
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Le Secret de Saint Eugène , livre ebook

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Description

Ce récit romanesque aux contours historiques se présente tel un « road movie ».
Mal assis à l’arrière d’un taxi pris dans la nasse des embouteillages provoqués par les manifestations contre Juppé, Arnaud se remémore son existence, ses réussites, son exode et ses doutes. Cette aventure nous mène d’Alger à Paris en passant par Marseille. Rien n’est omis des grands moments de cette période riche et souvent chaotique.
Il va vers un rendez-vous qui pourrait apporter des réponses au mystère qui habite sa vie depuis toujours et pourrait dévoiler les arcanes qui l’ont jalonnée.
Sa recherche toujours active devient au fil du temps exaltée, cathartique et les découvertes qu’il va faire seront faites de surprises inattendues avec un point d’orgue bouleversant.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 septembre 2017
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414050796
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0082€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-05077-2

© Edilivre, 2017
1
Blotti à l’arrière du véhicule, transi, j’observe par la vitre embuée la masse des gens qui courent en tous sens dans les rues glaciales de Levallois. Ces femmes et ces hommes semblent tous se hâter vers un destin personnel sans égal. Sinon, pourquoi iraient-ils à cette allure, de ce pas si précipité, si peu tranquille mais si résolu, le regard impénétrable, un peu en dehors de leur présent ou inversement si inséré dans celui-ci ?
Mes pensées sont obscures, mes mains sont glacées, serrées et enfouies au fond des poches de mon manteau. Une fois de plus, la ronde de la vie me parait absurde Je n’y vois qu’une espèce de construction artificielle où rien n’est authentique et où rien n’a de réelle pertinence hors son lien avec tout le reste.
Il y a bien des années, sortant à peine de l’adolescence, les perceptions capricieuses, que j’avais du monde, troublaient perpétuellement mon esprit. Elles me privaient des certitudes que je cherchais en vain. Passant un jour devant un immeuble à la façade anonyme, j’observai une petite plaque où je lus un nom étrange, Mahasi Goenka, « Professeur de Yoga ». Je sonnai à sa porte poussé par une sorte de curiosité inexplicable. Il me reçut et, sans que je n’aie rien à solliciter, il me proposa de m’enseigner les rudiments de son art. J’acceptai sans me poser de question et je devins son élève. C’était un petit homme au crâne rasé qui portait inlassablement une chasuble rouge et des mules en cordes. Son visage, qui paraissait un peu inexpressif au premier abord, était en fait modelé par une sérénité que sa sagesse intérieure dominait sans faille. Parfois, la satisfaction d’avoir aperçu un petit progrès dans mon « apprentissage », habillait ses yeux et ses lèvres d’un presque sourire.
Je décidai un jour d’arrêter aussi brusquement que j’avais commencé. Il ne me posa aucune question.
Quand je le rencontrai pour la dernière fois, nous eûmes un entretien un peu plus long que d’habitude :
– Merci Maître lui dis-je à l’instant de prendre définitivement congé, merci pour votre enseignement.
– Tu as beaucoup à acquérir encore. Le chemin demeure long, ne renonce jamais…
– Je me sens plus fort qu’au début, grâce à vous Maître. Le monde m’apparaît plus authentique…
– Non, détrompe-toi, il ne l’est nullement. Il est simplement cohérent, c’est ce qui lui permet d’avoir une apparence et de fonctionner selon une logique établie, mais il y a bien des pièges.
– Pourtant Maître, j’ai cru comprendre que votre enseignement était de nature à guider vers la vérité.
– Il n’y a de vérité que celle qui existe en toi. Il n’y a pas d’absolu. Seule la force de ton intériorité peut te conduire à appréhender ce qui t’entoure dans une globalité qui ne ressemblera jamais tout à fait à celle d’un autre.
– Dois-je comprendre que la vie est un miroir simulateur où chacun trouve sa propre réalité.
– C’est un peu cela. Ce que tu crois posséder ne t’appartient pas toujours de manière avérée. Inversement ce qui est réellement fondé peut ne pas habiter ton esprit.
Il ajouta : « Quelles que soient les révélations qui te seront faites, parfois de façon brutale ou inattendue, n’oublie jamais que l’illusion est l’exacte réalité de ce monde. Tu devras composer avec elle, toujours. N’oublie jamais que ce qui comptera viendra de toi et de ton aptitude à l’humilité ».
Je le quittai presque aussi ignorant qu’au premier jour, croyais-je, emportant seulement avec moi la certitude que rien n’est jamais aussi définitif qu’on pourrait l’espérer et que le doute est la seule règle qui convienne en tout. Le souvenir de cette relation et celui de cet ultime entretien m’occupent l’esprit alors que je m’apprête, dans quelques instants, à renouer un lien que je croyais à jamais rompu.
Voir n’est pas savoir, entendre n’est pas comprendre et toucher ne dévoile rien du sens réel des choses.
Qu’arriverait-il, si je cessais de travailler, si la majorité des gens en faisaient de même ? Qu’arriverait-il si disparaissaient du jour au lendemain les banques, les supermarchés, les aéroports et tout ce qui constituent la charpente du monde économique dans lequel nous vivons ? Sans doute connaîtrions-nous un chaos énorme que l’arrêt brutal de la machine provoquerait. Un retour à un âge primaire s’imposerait où la force et la ruse seraient les clefs de la survie. Alors, pour les survivants, tout recommencerait pour en revenir lentement un jour à l’état que nous connaissons ou bien à une autre réalité très semblable. Pour autant, est-il impensable d’imaginer le monde autrement ? Personne, à ce jour, n’ayant jamais dessiné un agencement très différent et crédible, j’en conclus désolé, que nous ne pouvons échapper à cette condition contingente qui semble immuable. Il apparaît qu’il n’y a peut-être pas d’autre choix envisageable que d’accepter de vivre et d’essayer de le faire du moins mal possible. Jouer le jeu. Voire se refugier dans la plus aveugle des insouciances. Cela pourrait être l’ultime option contre le désespoir.
Partant de cet éventuel postulat, je trouve que beaucoup s’accommodent plutôt bien de cette effrayante et néanmoins supposée évidence. Le système chuchote à l’oreille de certains, à celle de beaucoup, qu’ils sont mieux armés que tous les autres pour investir l’organisation telle qu’elle est, pour en user du mieux possible à leur propre profit. Il oublie de leur rappeler l’aspect parfaitement vain de toute cette extravagante histoire.
L’idée est que chacun soit, non seulement différent, mais parfaitement singulier et maître de ses choix. Or, dans ce jeu à enjeu artificiel la relativité occupe toute la place laissée vacante par l’absence d’absolu, les apparences comptent plus que la recherche de vérité. L’argent, la gloire, le pouvoir, toute cette kyrielle d’attributs disputés n’a de sens que dans le laps de temps fugace qui est accordé à chacun pour croire qu’ils peuvent lui offrir la béatitude éternelle.
2
Aujourd’hui, il paraît commun de s’en remettre au phénomène de la mode ou de l’exotisme pour nommer sa fille Allison ou Maeva et son fils Kevin ou Yann. De ce point de vue, n’est-il pas étonnant d’observer qu’avec cette tendance, les gens croyant se singulariser, se conforment au contraire à un curieux phénomène de standardisation donc de banalisation.
Il apparaît que si l’individualisme est le moteur, l’identification est le mouvement qui domine aboutissant absurdement à un phénomène d’adhésion presque malgré soi. Les solidarités, les collaborations, les concordes font place aux ambitions, aux compétitions, aux machinations, aux affrontements. Il s’agit d’un fait manifeste mais que peu reconnaissent.
Pourtant, si l’égotisme a supplanté toute notion d’intérêt général, il n’en fut pas toujours ainsi. Un temps exista où la mesure habitait le sens profond des consciences.
A l’époque où je suis né, la coutume voulait que l’on donnât à son enfant le prénom d’un grand père ou d’une grand-mère, celui d’une marraine ou carrément le sien ou celui de son conjoint. Cela relevait d’une tradition qui, comme beaucoup d’autres, est tombée en désuétude avec la déliquescence des liens sociaux et familiaux, au profit de ce vain narcissisme dont la plupart semble aujourd’hui affublé.
Dernier maillon de la branche des Collard dont je suis issu, je fus baptisé Arnaud, parce que ma mère aimait ce prénom qui était celui de son meilleur ami, étudiant entré en résistance et mort fusillé par les nazis, en 1941, après avoir été raflé à la sortie d’un cinéma Parisien. Mon père avait choisi, en deuxième nomination, Clément, en mémoire d’un de ses professeurs de lettres qu’il avait admiré avec une espèce de fascination presque mystique. Enfin, Armand me fut attribué par considération pour un homme au rayonnement familial exceptionnel, auquel tous les membres de la tribu reconnaissaient les vertus d’une immense humanité. Cet homme était mon grand père maternel. Je le crus longtemps exceptionnel, pour son sens de l’altérité, sa disponibilité et sa capacité d’abnégation, il ne fut qu’un homme de bien, généreux attentif et intelligent dont le charisme faisait l’admiration de tout le clan. Ce dernier choix aurait pu être une concession à l’usage, mais il n’en fut rien. Cette résolution fut uniquement dictée par la qualité de cet homme qui méritait d’être célébré de son vivant.
Il y a deux ans, j’ai dépassé, sans m’en soucier, le cap du demi-siècle de présence dans le monde des vivants et de leurs chimères. Si tout va bien, d’ici là, j’aurais précisément 52 ans dans trois jours, jeudi prochain. Toute immodestie mise à part, mon allure générale me permet d’en paraître dix de moins. D’aussi loin qu’il m’en souvienne, il en a d’ailleurs toujours été ainsi. J’ai toujours semblé plus jeune que je ne l’étais réellement. En classe de sixième déjà, je paraissais à peine, l’âge d’un moufflet qui va entrer à la communale. Pour quiconque le décalage eut semblé fort pesant. Cette apparence confondante me procura, comme on peut s’en douter, quelques mauvaises expériences parfois humiliantes, face à d’hypocrites camarades de récréations. Comme ceux-ci manquaient généralement d’humour et de finesse, ce n’est jamais sur le terrain de l’esprit que se jouèrent ces différends. Dès lors, il me fut souvent difficile de laver l’affront provoqué par ces brimades. Lorsque cela fut possible, c’est-à-dire lorsqu’il m’arrivât d’obtenir réparation c’est à l’intervention d’un plus grand, d’un plus fort, d’un plus âgé que je dus cette justice. Rarement la solution vint de moi seul. Elle ne fut d’ailleurs jamais définitive, car la cause du déboire demeurant les conséquences continua

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