Les clandestins de ma grand-mère

Djemâa Chraïti

Description

Ils sont 12000 à vivre à Genève, à alimenter une économie parallèle, hypocritement tolérés par l’ensemble de la communauté. Mais qui sont les immigrés clandestins? La viejita, elle, en a connu plus d’un. Luisito, Rosalita, Ricardo, ou encore Javier. Tous originaires de la même province du Quindío, en Colombie, tous émigrés de la petite ville d’Armenia. Tous rescapés du terrible séisme de janvier 1999… C’est une vraie bouffée d’humanité que nous offre Djemâa Chraïti. A partir du drame qui a secoué la Colombie à l’aube des années 2000, elle livre une chronique sociale réaliste et révélatrice, autour d’une galerie de personnages authentiques et attachants. Un puzzle de destins qui vaut le coup d’œil.

Informations

• Publié par: publibook
• Nombre de lectures: 8
• EAN13: 9782748349887
• Langue: Français

Extrait

Djemâa Chraïti Les clandestins de ma grand-mère

Djemâa Chraïti Les clandestins de ma grand-mère

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Chapitre I : un héritage bien singulier

Les héritages de grands-mères sont classiques : tapis, vaisselle en argent, tableaux, bijoux avec leurs pierres de grenat, quelques bibelots incassables. Imaginez, ces petites choses disséminées dans les familles qui, plutôt que de réjouir, encombrent. Témoins silencieux et fidèles compa- gnons d’une vie vécue sur près de cent années. Sur son lit de mort, ma grand-mère me soufflait encore à l’oreille, alors que j’attendais l’ultime secret, ces choses qu’on lâche dans un dernier soupir. À ma grande surprise, de sa petite voix chevrotante, elle insista : « N’oublie pas mon “petit Luisito” ! Prends soin de lui, comme il a pris soin de moi ! » Eh bien voilà ! On s’en est occupé du petit Luisito, ex- clandestin de son état et dont la calvitie naissante annonce la joyeuse quarantaine. Héritier, en pseudo-sous-location, du bail de l’appartement de la défunte dans un quartier huppé de la Genève calviniste, il a trouvé excellente l’initiative d’y créer une fabrique de fromage colombien artisanal et, ma foi ! la petite affaire marchant si bien, ce sont des centaines de fromages qui quittent ce sixième étage chic pour se déverser dans les sandwicheries de la ville. Les voisins, à regarder ce blanc ballet, ont fini par trouver la chorégraphie de mauvais goût et ont dénoncé le fameux protégé de feue ma grand-mère.

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Pour tenir notre promesse de s’occuper du « petit », à l’heure où je vous écris, un avocat gribouille des pages et des pages pour intercéder auprès du propriétaire en faveur de Luisito – originaire de Calarca en Colombie, fromager et poète à ses heures. Mais avant lui, il y en avait bien eu quelques autres : les Rosalita, Ricardo, Javier, tous originaires de la même pro- vince du Quindío où ils ont grandi et étudié dans une petite ville provinciale perchée au milieu des bananiers, des caféiers et des champs de manioc qui s’étendent à perte de vue ; de là, ils ont émigré à Armenia, la grande ville proche, espérant y trouver du travail.

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