L hésitant
101 pages
Français

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Description

L'Hésitant
Guy Bergère
Roman de 370 000 caractères, 63 000 mots, 308 pages en équivalent papier.
Bien qu’éveillé et brillant dans ses études, Lucien est un garçon si timide qu’il est resté socialement isolé.
Une rencontre fortuite et sans lendemain va cependant lui révéler les plaisirs les plus sublimes de la vie, en lui faisant toutefois comprendre que la nature de ses désirs correspond à ce que la plupart des gens dénigrent.
De fantasmes en hésitations, les années passent. Son secret l’étouffe, mais sa marraine l’a deviné et il peut compter sur son soutien. En dépit de son caractère timoré, il sait ce qu’il veut et il reste déterminé.
Parviendra-t-il à s’épanouir, à vivre une vie d’homme conforme à ses aspirations ?
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Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 avril 2021
Nombre de lectures 2
EAN13 9791029404504
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

L'hésitant
 
 
 
Guy Bergère
 
 
 
 
 
Roman
 
 
 
 
1. Un garçon renfermé
 
 
Lucien s’est montré timide dès son premier contact avec l’école. À la maison, au contraire, il avait su parler très précocement et s’était révélé très curieux et avide d’apprendre sur toutes sortes de sujets, posant mille questions à Henri et Martine, ses parents, qui y répondaient volontiers. Sauf sur un sujet : il n’avait qu’un an quand sa sœur Céline était née, mais il en avait trois au moment de la naissance de Florence et, déjà fort éveillé, il s’était enquis de savoir comment elle était apparue. Alors que son père semblait embarrassé de lui fournir une réponse appropriée, sa mère l’avait arrêté sèchement :
— Il y a des choses que les gosses n’ont pas besoin de savoir !
En fait, ses deux parents étaient eux aussi fort timides. Au sein de la cellule familiale, ce n’était guère sensible, mais ce caractère réapparaissait dès qu’il s’agissait de rencontrer les autres. Déjà, dans l’appartement, si les enfants avaient bien évidemment le droit de jouer, leurs parents veillaient à ce que leurs exclamations et leurs rires restent modérés :
— Chut ! Ne vous faites pas remarquer par les voisins !
Dehors aussi, il n’était pas question de se faire remarquer, il n’était possible de courir et de crier que là où il n’y avait personne. Et bien entendu, il était impératif de toujours se montrer poli.
Bien que loin d’être turbulent, avant sa première journée à l’école, Lucien avait été chapitré : qu’il reste tranquille, qu’il soit sage et bien poli avec les enseignants. Le petit garçon avait parfaitement compris : en classe, il n’était pas chez lui. Il resta sur sa réserve, n’osant pas s’exprimer alors que d’autres se montraient nettement plus délurés.
Cependant, cette attitude lui servit, car lui savait se taire et ouvrir ses oreilles, alors que son cerveau était comme une éponge. Le conseil de bien écouter les enseignants n’avait pas été dispensé en vain, et il possédait en lui une soif de savoir inextinguible, d’autant qu’il avait attendu beaucoup de l’école et qu’il lui semblait... qu’elle ne répondait pas suffisamment à ses attentes, qu’il y avait trop de redites pour des élèves qu’il jugeait inattentifs puisqu’ils n’avaient pas tout saisi du premier coup.
En fait, lui-même bénéficiait déjà d’un acquis : les livres d’images et les conseils de ses parents lui avaient fait connaître son alphabet, la lecture de certains sons, les chiffres, quelques additions élémentaires, ainsi que la façon de décompter les heures avant même qu’il ait abordé la maternelle. Et cette avance s’amplifia : en arrivant au CP, il savait déjà lire presque couramment, écrire sans trop de fautes et effectuer des opérations simples. Il avait aussi acquis un double vocabulaire : celui de la maison et des adultes, très correct, et celui des écoliers, beaucoup plus cru, ignorant toutefois la signification profonde de la plupart des grossièretés. Il prenait bien garde, évidemment, de ne pas mélanger ces deux langages, le second n’étant destiné qu’à s’adapter à ce qui avait cours à l’heure de la récréation.
Il aurait bien aimé se faire des copains. Mais il ne pouvait se résoudre à se colleter avec les autres comme il en voyait certains le faire : lui ne savait pas répondre à la provocation, il n’avait pas la hargne qu’il constatait chez plusieurs ni le désir d’en découdre. D’autre part, ses succès scolaires le marginalisaient : on lui gardait rancune de sa réussite insolente en classe. Très peu daignaient seulement lui parler. Quant à jouer avec lui, il pouvait compter sur les doigts de la main le nombre de fois que l’un ou l’autre y avait consenti.
Quant aux filles... il lui arrivait de temps en temps d’échanger quelques mots avec Rose, que l’institutrice avait placée à côté de lui, car elle aussi obtenait des notes brillantes. Mais leurs conversations restaient brèves, sur des sujets purement scolaires : il ne se sentait aucun atome crochu avec elle, ni avec aucune autre. Sans qu’il sache pourquoi, il restait assez distant avec les filles, il ne comprenait pas vraiment à quoi elles s’intéressaient ni pourquoi leur comportement paraissait si différent de celui des garçons : la féminité lui apparaissait comme une étrangeté incompréhensible.
Il faut dire qu’à la maison, la présence et le caractère volcanique de ses deux sœurs l’étouffaient. Contrairement à leur frère, ni l’une ni l’autre n’était timide. Et comme il osait d’autant moins les contrer qu’elles étaient plus jeunes que lui et qu’il les aimait bien, elles prenaient la place qu’il ne se permettait pas d’occuper. Ainsi d’ailleurs en avaient décidé ses parents, à propos des conditions de couchage.
En effet, l’appartement ne comprenait que deux chambres. Or dès que Florence, la plus jeune, ne fut plus un bébé, Henri et Martine décrétèrent que les filles occuperaient une chambre, les parents une autre... et que Lucien, qui était un garçon et l’aîné, devrait se contenter de dormir dans le séjour. On lui présenta l’affaire en lui disant qu’il était grand, que c’était à lui de montrer l’exemple, et qu’on allait lui offrir un beau lit : un bahut qui se replierait pendant la journée et dont l’aspect, une fois refermé, ne déparerait pas l’esthétique de la pièce.
Quand le lit fut livré... il était beau, en effet. Mais il ne pouvait pas empêcher Lucien de se sentir marginalisé : ses sœurs avaient leur chambre, leur coin tranquille pour jouer et pour dormir, lui pas. Son coffre à jouets avait été relégué dans la chambre des filles, il devait attendre qu’elles soient levées avant de pouvoir y accéder. En outre, le soir, à l’heure où il se couchait, le téléviseur était encore allumé. Son père avait beau le mettre en sourdine et éteindre le plafonnier en ne conservant que la lumière du lampadaire, Lucien ne parvenait que très rarement à s’endormir avant que le poste soit éteint.
Au fil des années, les différences de caractère entre l’aîné de la fratrie et ses deux sœurs s’affirmèrent. Elles deux devinrent de vraies pipelettes, elles monopolisèrent la parole... sauf quand un sujet un peu technique était abordé, c’était alors Lucien qui en était friand et qui posait des questions, auxquelles son père répondait volontiers. Il n’y avait pourtant aucune animosité au sein de la fratrie, les trois enfants jouaient volontiers ensemble. Mais lorsque Céline et Florence amenaient leurs copines à la maison, Lucien restait dans son coin : il lisait beaucoup, il avait pratiquement épuisé la bibliothèque de l’école.
 
*
* *
 
À l’âge de dix ans, ses parents profitèrent que ses sœurs étaient sorties pour lui expliquer qu’il allait devoir se soumettre à une petite intervention chirurgicale. Quelques années plus tôt, en effet, alors qu’il n’avait pas encore l’âge de se laver tout seul, sa mère avait constaté qu’elle ne parvenait pas à lui faire une toilette intime complète : quand elle tentait de retrousser le prépuce pour laver dessous, celui-ci résistait et le garçon avait mal. Consulté, son père avait déclaré qu’il avait entendu dire que d’autres, dans sa famille, avait eu la même mésaventure. Henri et Martine n’avaient pas osé jusqu’à présent consulter le corps médical sur un sujet aussi... délicat. Mais leur fils grandissait, il était plus que temps de chercher à régler le problème.
L’intéressé tombait des nues ! Il se fichait complètement de pouvoir laver ou nom le bouton de rose qu’il apercevait sous ce bout de peau fripé qui faisait mal quand on tirait dessus. Il n’osa cependant pas protester : il n’avait de toute façon aucune notion de ce que « chirurgie » voulait dire.
En consultation, il apprit que son affection s’appelait « phimosis » : il retint ce mot barbare.
Quelques jours plus tard, l’intervention fut rapide. Mais quand la sensibilité revint, il avait mal, au point de se demander pourquoi on lui avait fait ce truc, alors que tout allait bien auparavant. Pire : en allant uriner, ça le brûlait ! Il observa son petit bout : bien qu’il soit tout rabougri, il y vit une sorte de fente rouge, qui avait saigné. Il n’y comprenait rien, il ressentait cette affaire comme une agression... mais n’en voulait pas pour autant à ses parents : puisqu’ils disaient qu’il fallait le faire, sans doute était-ce nécessaire.
Contrairement aux circoncisions religieuses qui en enlèvent le plus possible, le chirurgien n’avait pratiqué qu’une incision suffisante pour autoriser le décalottage. Henri lui signifia qu’en soin complémentaire, il faudrait passer une pommade cicatrisante pendant un mois. Pour ce faire, il fallait retrousser ce qui restait du prépuce, ce qu’il pratiqua aussitôt sur son fils qui serra les dents, mais ressentit très mal cette action. Martine regardait pour se rassurer.
Mais les deux parents de Lucien se sentaient très gênés de devoir ainsi toucher et observer l’intimité secrète de leur garçon. Aussi s’en déchargèrent-ils aussitôt :
— Bon, tu es grand, affirma Henri. On t’a montré comment faire, mais les autres jours, c’est toi qui te mettras la pommade. Tu n’oublieras pas, hein ?
Lucien acquiesça. Il prit le tube et le rangea dans un modeste coffre de rangement à deux tiroirs, de taille suffisamment réduite pour pouvoir être posé à côté du lit bahut, et qu’on lui avait offert récemment quand ses parents s’étaient rendus compte qu’il n’avait rien pour ranger ses petites affaires.
En réalité, il ne retoucha jamais à cette pommade... ce qui n’empêcha pas la cicatrisation. Mais Lucien conserva une certaine gêne, une sorte de tiraillement qu’il ressentait là où on l’avait coupé chaque fois qu’il touchait à son petit bout... ce qu’il ne faisait d’ailleurs que pour les strictes nécessités urinaires.
 
 
 
2. Questionnements
 
 
Durant toute sa scolarité primaire, Lucien n’obtient que des résultats brillants. Et pourtant, il lui arrive de s’ennuyer un peu en classe, au point de laisser son regard s’égarer par la fenêtre lorsque son institutrice s’évertue à répéter et répéter encore des notions qu’il

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