Dernier Voyage
140 pages
Français

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Dernier Voyage , livre ebook

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Description

Après la mort subite de son père, Eva supporte difficilement le quotidien dans la Suède des années 50-70. Mais un départ en vacances semble lui redonner espoir.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 mai 2015
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332878601
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-87858-8

© Edilivre, 2015
Citation


My deep prayer a curse.
My deep prayer the promise that this won’t be.
Milton Acorn
I
Elle flânait avec beaucoup de difficultés au bord de la mer, doucement, juste là où le sable était peu mouillé. Elle se déplaçait lourdement à cette époque-là ; elle avait pris du poids, huit kilos en quelques années. Normalement, elle avait peur de tomber, toujours faisant attention à ses pas. Il y avait peu de monde sur la plage. Elle trouva facilement une place dans les dunes. Des garçonnets jouaient au football, dans un jeu violent. Leur balle vola près d’elle dans le sable fumant. Victime de son incertitude habituelle et du vertige, elle tomba dans l’eau, et pas capable de retenir sa colère, elle jura quelques mots irréfléchis dans son anglais insuffisant et fautif. Tous, sur la plage, la regardaient en souriant. Elle se sentait imbécile ; le premier jour même de sa visite chypriote, elle fut ridiculisée. Elle se leva lentement, nettoya son short trop petit. Un loueur d’ombrelles l’assista, en la convaincant de louer une ombrelle multicolore. Péniblement, elle monta aux dunes, où elle s’assit sous l’ombrelle, complètement épuisée.
Elle n’avait jamais vu la Méditerranée d’un bleu si intense, comme à Famagouste. La blancheur des ruines médiévales au loin, l’éblouissait. Elle n’avait jamais vu de plage plus belle. Elle voulait vraiment se réjouir de tout autour d’elle, mais la chute dans l’eau, ses douleurs dans le dos et aux jambes, et son poids anéantirent toute joie. L’énervement, son ami fidèle, augmenta. Elle sortit un livre de son sac, fit l’effort de lire pour reprendre son sang-froid. De temps en temps, elle se baignait. L’eau chaude caressait son corps lourd. Elle resta sur le rivage où la mer n’était pas profonde, loin des enfants qui jouaient. Elle s’efforça de profiter de la belle journée.
Le Grecian Bay Hotel , un hôtel de luxe, était situé sur la plage même. Là, elle loua une chambre simple, pour deux semaines. De sa dune, elle trouva l’hôtel trop grand, il semblait un bunker indigne des humains. Pourtant, là, elle se sentait en sécurité. Sa chambre, donnant sur la cour intérieure de l’hôtel, se trouvait sur la mezzanine, juste à côté de la coiffeuse, du restaurant et des boutiques. Sans doute, elle préférait un hôtel de luxe pour son séjour. Les repas, en particulier, avaient une grande importance pour elle. Elle éprouvait du plaisir aux compositions des menus et des repas, et ce plaisir était son seul grand intérêt. C’était un passe-temps, presque intellectuel, de goûter lentement un dîner bien composé, de réfléchir sur les épices différentes et les ingrédients des sauces. À l’étranger aussi, elle était capable de résoudre l’énigme d’une recette. Le Grecian Bay Hotel offrait des menus exquis. Assise, tous les soirs à sa table de coin, elle attendait impatiemment les repas divers. Elle laissait fondre dans sa bouche tous les morceaux, pour pouvoir savourer chaque nuance de goût. C’était avec chagrin qu’elle notait la fin des repas.
Un soir, au crépuscule, elle se dirigea vers Delphi Street. La ruelle, longeant la mer, vibrait de mouvement et de vie. Leurs taxis garés près d’un mur, les chauffeurs discutaient vivement avec des amis, dans les cafés, ou bien, ils jouaient aux balles sur le parvis du couvent. Les vélos des touristes étaient garés un peu partout contre les murs et les arbres. Le soir, les habitants de Famagouste et les touristes se rassemblaient sur Delphi Street. Elle s’assit à une table de coin à la Paradise Taverna . Là, elle pourrait voir tout ce qui se passait dans la rue. Longtemps, avec attention et curiosité, elle étudia le menu, et elle se décida finalement pour l’agneau kleftiko, et du vin blanc Othello de 1959. En fermant les yeux, elle s’inclina, donnant cours à la fatigue et à la dépression, jusqu’au moment où le faible arôme de l’agneau envahit ses narines.
Peu à peu, le noir du soir tombait sur Delphi Street et les gens disparaissaient dans la nuit, tandis que quelques lanternes vénitiennes clignotaient dans le restaurant. Elle avala le dernier doigt de vin, et ensuite, elle se leva rapidement pour quitter la taverne, prenant Grecian Bay Hotel Street. Sa veste brillait comme un feu follet solitaire dans la nuit.
Son nom était Eva. Elle avait trente et un ans.
II
Le souvenir de la maison d’été, grande et jaune comme le soleil, ne pouvait pas mourir. Ce souvenir continuait à vivre toujours en Eva. Par une coïncidence presque logique, la maison était située dans la Baie de Soleil, un tout petit village paisible proche de la mer. Toute la famille s’y rendait à vélo chaque année pendant la saison estivale. C’était un sentiment tout à fait particulier de sauter sur un vélo pour pédaler dans les ruelles de l’Île, jusqu’au quai des ferries. Là, ils devaient attendre l’arrivée du ferry de l’autre côté de la rivière. Des buissons de lilas jetaient leurs cascades de parfum sur la grande rivière sale et puante, et sur les latrines entourant les logements ouvriers, près du quai. L’attente sur le quai était un fait d’été, comme regarder la verdure tendre grossir jusqu’à atteindre sa maturité lourde, ou être enfermés dans le fracas tourbillonnant de la rivière, à l’écoute du bruit provenant d’en face. Arrivés de l’autre côté de la rivière, ils pédalaient devant la chapelle de sainte Brigitte, traversant des quartiers ouvriers avec leurs maisons en pierre, leurs belles cours de sable, montant des collines jusqu’au quartier de Draget, ses champs et ses quartiers de villas. Quand ils s’apercevaient les premières fermes, ils ne montaient plus, ils descendaient plutôt. Graduellement, ils entrevoyaient la Baie de Soleil, une toute petite flaque d’eau bleue au loin. Le reste de la route, Eva rivalisait avec Monica et Stina, ses sœurs aînées. Comme des flèches, elles traversaient le paysage. Elles n’avaient plus le temps de regarder les champs ; pour chacune d’elles, il s’agissait d’arriver la première à la Baie de Soleil. Heureuses, elles arrivaient à la maison d’été, grande et jaune, nichée entre deux collines, avec une grange spacieuse en angle autour. Chaque été, la famille louait la ferme d’Albert, un parent éloigné. Alcoolique, il avait fait des efforts pour travailler comme agriculteur, sans succès. Donc, il louait la maison jaune, le bâtiment principal, des sections de la grange, pour pouvoir boire les revenus. Ils ne le voyaient que rarement : il était assis derrière un rocher pour boire avec ses copains ou il dormait dans la grange pour se dégriser. Les enfants n’avaient pas peur de lui. Ils sentaient, qu’au fond, il était un homme imprégné de douceur et de gentillesse.
Juste à côté de la maison jaune, un grand jardin broussailleux offrait un espace libre, aux jeux des enfants. Derrière une des collines, le bus de la ville s’arrêtait auprès d’un kiosque en bois, qui vendait exclusivement des bonbons et des journaux. Derrière l’autre colline, une ferme importante se cachait, où tous les jours, Eva était obligée d’aller acheter du lait, dans un pot en tôle blanc au rebord bleu. Du haut de la colline, elle voyait le port de pêche et aussi la mer – une vue partiellement cachée par une piste de danse, où les estivants avaient l’habitude de se rencontrer les samedis soir, pour danser, jouer aux balles et aux fléchettes, et lutter corps à corps. Il était interdit aux enfants d’entrer dans la zone de la piste, mais une fois, le cousin Thomas avait réussi à y entrer pour offrir son dos comme table de poker aux joueurs ivres, qui, de temps en temps, interrompaient leur jeu pour faire des tours de danse avec de belles femmes, appelées « puddings ». Eva préférait être assise sur les rochers de la colline, en dehors de la piste, pour regarder la foule. Elle ne voulait jamais y entrer.
La famille d’Eva passait tous les étés à la Baie de Soleil. Déjà à la mi-avril, ils s’y rendaient pour nettoyer la maison jaune après l’hiver. Le père, Erik, détestait rester en ville l’été, aspirant toujours à ce que tout soit en ordre en mai, pour pouvoir profiter de la première chaleur après l’hiver. C’était un homme d’affaires ambitieux. Il avait vécu beaucoup d’années difficiles pour établir une maison de confection. Il ne redoutait pas le travail dur et il ne trouvait pas humiliant, d’être utile dans la vie quotidienne de sa maison. Donc, c’était toujours lui qui prenait l’initiative pour le premier tour de vélo à la Baie de Soleil, au printemps. Irène, la mère des enfants les accompagnait à contrecœur. Pour elle, la maison d’été était un mal nécessaire, un devoir de mariage, une tâche parmi tant d’autres, dans son existence. La vie d’été, avec son charme primitif, les latrines, les routines quotidiennes pour aller chercher de l’eau et du lait, ne correspondait pas à son goût pour le raffinement. Elle était une femme robuste, très belle, aux cheveux presque noirs, aux yeux marron, qu’elle fardait avec du mascara et de l’ombre à paupières. Elle donnait l’impression d’une femme de l’Europe du Sud, avec ses gestes rapides, son visage vif et ses manières spontanées. Ensemble, toute la famille travaillait dans la poussière et dans les odeurs d’hiver, et après quelques jours, la ferme était prête à recevoir ses estivants. À deux étages et avec sous-sol, divisée en trois parties, la maison jaune abritait les familles de Léo et d'Irène, celle de leur frère Bruno, et leurs parents Hugo et Svea. Ces derniers habitaient à l’étage supérieur, les deux frères avec leur famille au rez-de-chaussée, et le sous-sol abritait Alicia, la mère très âgée et sénile d’Albert. Début juin, tous étaient arrivés à la Baie de Soleil,

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