Derrière les apparences
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Derrière les apparences , livre ebook

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Description

Il avait en tête de la briser, aujourd’hui, elle accapare en permanence ses pensées. Elle se pensait assez forte pour l’affronter, à présent, elle sombre dans sa noirceur sans envie d’y échapper.


Zane a abandonné Syntia en la découvrant presque inconsciente chez elle. Comment peut-elle encore croire en leur histoire si celui qu’elle aime plus que de raison fuit au premier coup dur. Leur relation est à l’image de leur rencontre : perturbante, cinglante, explosive. Il n'aurait jamais pu prévoir les ravages que ferait ce doux petit ange dans sa vie, pas sûr qu’il ait conscience de ce qu’il l’attend...


Plus rien ne les retient l’un à l’autre et pourtant, tout les lie depuis que leur cœur bat à l'unisson.


Vous pensiez les avoir cernés ? Accrochez-vous, vous n'êtes pas au bout de vos surprises !



Elle est l’espoir qui donne un but à l'humanité. Il est la menace qui démontre que la vie est loin d’être parfaite.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 août 2023
Nombre de lectures 8
EAN13 9782958347048
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0034€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Doit-on tout accepter par principe ? Doit-on être tributaire des décisions des autres ? Je ne suis pas de celles qui ne voient pas plus loin que ce qu’on me laisse entrevoir. Je n’ai pas peur de mes sentiments, de me tromper, de me confronter. Je préfère avoir des regrets que des remords. Être en accord avec soi-même n’est possible que si l’on ne se voile pas la face, si on a le courage d’être honnête avec les autres. Ce n’est pas une tâche facile, elle peut même s’avérer effrayante, mais au final, tellement plus juste pour notre coeur et notre esprit. Je me suis endormie dans ses bras, en cocon. J’ai marché dans son quotidien, en chenille. Je me suis réveillée dans sa vie, en papillon. Il pense me briser, jeveux lui montrer qu’il m’a permis d’éclore. Si la noirceur d’une âme peut être perturbante, elle peut aussi nous montrer que rien n’est impossible, rien n’est irréversible dans nos prises de décisions. Surtout si elles sont prises sans avoir tous les tenants et aboutissants. Je refuse d’être fataliste, mais je ne serais pas pour autant esclave de mes sentiments. Il y a un juste milieu dans l’amour et je compte bien trouver le mien.Zane, tu m’as abandonné sur ce lit qui me gardeprisonnière, tourné le dos en comprenant ce que je suis. Par amour ou par lâcheté ? Ton geste m'a douloureusement touchée. Aujourd’hui, je te déteste autant que je t’aime. Lequel de ces deux sentiments parcourra le plus vite le chemin de mon cœur ?
I
Vide. Tout est vide. Mon avenir, ma motivation, ma colère, moi… surtout moi. Quarante-huit heures, ça fait quarante-huit putain d’heures que je suis reclus dans mon appartement comme un ermite sans but ni perspective. Seul mon esprit fait de la résistanceen m’imposant en boucle l’image de Syntia étendue sur son lit, faible, sans défense et encore, les mots ne sont même pas assez forts pour décrire son état et ce que j’ai ressenti en la voyant comme ça. J’ai beau tenter d’effacer ce souvenir d’elle à renfort d’alcool, ça ne change que dalle. J’emploie alors un moyen plus radical pour reléguer ma culpabilité au second plan, en la pulvérisant à grands coups de poing contre le mur, mais cette saloperie s’accroche à mon âme comme une sangsue. En dernier recours,j’abuse de somnifères qui n’ont finalement réussi qu’à me mettre la tête dans le brouillard. Je suis donc condamné à assumer ma pénitence en endurant les conséquences de mes actes, sauf que je n’ai pas les armes pour les affronter.
Assis sur le canapé, le regard scrutant le néant, je laisse pour la millième fois mon portable sonner sans chercher à savoir qui m’appelle. C’est ainsi depuis que j’ai fui la réalité de la vie de Syntia. Je fais le mort. J’ignore tous ceux qui s’évertuent à me joindre, que ce soit par message, sur les réseaux, au téléphone ou en tambourinant à ma porte. Je ne suis d’humeur pour personne. Je me contente de la compagnie de mes clopes et de ma bouteille de vodka, même s’ils ne me prodiguent pas le semblant de réconfort que je convoite.
***
Encore un réveil la bouche pâteuse, le crâne en bouillie, avec le besoin presque irrépressible de retourner dans l’enfer des bras de Morphée. J’ai dû m’endormir sans même m’en apercevoir. À force, j’ai perdu la notion du temps. Tous mes volets sontclos, mon appartement est plongé dans un silence morbide qui me ronge, où une brume de fumée de cigarette lui donne un aspect lugubre. En réalité, il n'est que le reflet de moi-même.
Rapidement, mon ventre vide me tiraille, contrastant avec ma vessie pleine. Si je n’étais pas un humain pourvu d’un minimum de dignité, je me serais soulagé sur place. Néanmoins, j’ai encore un peu de fierté. Sans grande envie, je déploie ma carcasse ankylosée à force de végéter à la même place et parcours la distance qui me sépare des chiottes en traînant des pieds.
—Je vous jure qu’il va m’entendre ce connard !
La porte de WC ouverte, je m'efforce de viser le trône, quand un bruit semblant provenir du salon me déconcentre. Pourtant, c’est impossible, j’ai pris soin de verrouiller mon appart. Il s'agit donc sûrement de l’alcool irriguant mon corps qui me joue des tours.
—Reed ! T’es où, espèce de trou du cul ? entends-je gueuler.
Putain, je n’ai pas rêvé ! Comment ont-ils fait pour entrer ? Je souffle et secoue la tête, dépité. J’aurais largement préféré entendre des voix à cause des effets de l’alcool. À défaut, ils rendent mes gestes lents, à tel point que je mets une plombe à me rhabiller.
C’est un vrai comité d’accueil auquel je fais face quand je retourne dans le séjour. Ils sont tous là, même Livy est de la partie. La seule chose que je ressens en voyant leurs tronches, c’est de l’exaspération. Leur présence me casse les couilles !
—Qu’est-ce que vous foutez là ? m'insurgé-je contre eux sans m'y attarder non plus , marchant déjà en direction de mon canap’.
—On… commence Tao avant que je ne le coupe.
En fait, la question serait plutôt, comment êtes-vous entré ? aboyé-je en me laissant tomber à ma place, là où est gravée la forme de mon cul.
Poussé à cran par leur présence, Je me sers un verre afin de m’aider à supporter leur visite inopinée.
—Sérieux, mec… C’est tout ce que tu as à dire ? s’emporte Reggie à présent face à moi, tandis que l’un des autres ouvre fenêtres et volets.
Barrez-vous de chez moi, merde ! leur imposé-je, furieux.
Voulant rester seul avec ma déprime, j'explose le verre que j’avais en main contre le mur, complètement à bout.
—T’es malade ! m’engueule Tao en posant son cul à mes côtés.
Moi, non ! Mais elle, oui ! répliqué-je avec dégoût.
Ils semblent perdus, cherchant à comprendre ce que j’insinue. Malheureusement pour moi, leur silence face à mon pétage de plomb ne dure pas assez longtemps. Je peux me vanter d’avoir de vrais potes, sauf que pour une fois, j’aurais aimé qu’il le ne soit pas.
—Qu’est-ce qu’il raconte ? s'interroge Livy d’un ton agacé.
Je ne sais pas combien de litres il a ingurgité, mais ça ne fait pas bon ménage avec son caractère de merde, ajoute Reggie qui me scrute comme une bête sauvage.
Regardez-le, on dirait un mort-vivant, lance à son tour Mason, pensant certainement placer un trait d'humour dans cette ambiance cafardeuse.
La troupe s'agglutine autour de moi puis m’étudie comme si j’étais un homme de foire en pensant que je ne les entends pas. Mécaniquement, tel un zombie sans émotion, j’avise ceux qui me servent de potes.
Je ne suis pas sourd, bande de connards ! les rembarré-je, cinglant.
J’ai juste besoin qu’ils me foutent la paix. C’est pas dur à comprendre, merde !
Peut-être pas, mais ce qui est sûr, c’est que tu n’es plus que l’ombre de toi-même, objecte Tao tel un reproche.
Que répondre à ça ? Il a entièrement raison, j’en suis conscient. Néanmoins, comme les autres, il n’en connaît pas la cause. N’ayant pas envie de ressasser ce sujet sensible, je réitère ma question de tout à l’heure en pestant contre personne et tout le monde à la fois :
Comment avez-vous fait pour entrer chez moi ?
Ma demande a au moins le mérite de faire retomber le silence qui me tenait compagnie avant qu’ils débarquent. Rapidement, leurs regards se cherchent, se captent, puis fuient, alors qu’aucun d’eux ne daigne prendre la parole. Leurs comportements d’ados puérils devraient mettre mes nerfs à rude épreuve. Seulement, je manque d’énergie et apprécie de pouvoir m’enfermer de nouveau dans le carcan de ma culpabilité.
—C’est bon, je me dévoue, commence Reggie à mon plus grand désespoir. Il se pourrait que j’aie légèrement soudoyé le gardien pour obtenir le pass.
Pas vraiment surpris de ce subterfuge, je plante quand même mes yeux abyssaux cernés de noir dans les siens. Reggie ne recule devant rien. Sauf que là, il est question de mon antre, de ma vie et de mon intimité. Je paie ce putain de gardien assez cher pour qu’il soit un minimum professionnel, bordel !
—Tu ne vas pas en faire toute une histoire. C’était un cas de force majeur, mec. Et quand on voit ta sale tête, beh… balance-t-il d’un ton léger en jouant leclown de service comme à son habitude.
Ferme ta gueule ! éructé-je, épuisé.
S’il cesse son laïus dans la foulée, Livy, elle, en profite pour prendre le relais.
Franchement Zane, on était vraiment inquiets pour toi.
Elle tente d’apaiser lestensions en s'asseyant trop proche de moi sur l'accoudoir.
—Du coup, vous vous êtes dit que violer mon intimité serait l’idée du siècle ? surenchéris-je ironiquement, sans lui jeter un coup d’œil.
Même si je passe mon temps à les insulter, ils sont loin d’être débiles et ont bien remarqué que j’allais mal. Pendant un court instant, plus personne ne parle. J’imagine alors leurs cerveaux fuser dans tous les sens jusqu’à ce que Mason pose sur la table-basse un plateau avec cinq tasses remplies de liquides sombres. L’odeur du café qui martyrise mes narines me file la nausée. À priori, avoir le ventre vide n'est pas compatible avec ce nectar dont je raffole normalement. M'efforçant de respirer calmement pour ne pas rendre ce que mon estomac ne contient même pas, je prends la pleine mesure de la situation pathétique dans laquelle j’ai mis mes potes sans le vouloir. Nous sommes installés en une espèce de cercle où le point d’intérêt général n’est autre que ma personne. Si nous n’étions pas au milieu de mon salon, on pourrait croire qu’on s’apprête à débuter une thérapie de groupe où le but est de se libérer de ses démons. Sauf qu’en l’occurrence, le démon ici, c’est moi.
—T’es dans l’abus là, mec ! tente de me raisonnerpapa Tao.
—Je… commencé-je avant que le plus mature de la bande ne me coupe la parole.
—Cette fois, c’est toi qui vas la fermer et m’écouter ! Depuis que t’es allé la voir, on n’a eu aucune nouvelle de toi. Tu n’as donné aucun signe de vie à personne. Sincèrement, ces derniers temps, tu n’es plus du tout toi-même, finit-il en me mettant face à la vérité.
D’un coup, j’ai l’impression de devenir claustro, leur attention fixée sur moi m’étouffe, leur inquiétude m’angoisse, l’air vient à manquer et un étau se referme sur ma carcasse vide. Cherchant une échappatoire à cette sensation détestable, j’avise sur la table la bouteille remplie d’un liquide aussi limpide que de l’eau, mais qui brûle la gorge comme de la lave. Soit je lobotomise les quelques neurones lucides qu’ils me restent à l’aide de cet alcool qui me fait de l’œil, soit je porte mes couilles et leur explique tout.
La décision à prendre, que je repousse le plus longtemps possible, ne me vient pas comme une évidence. J’hésite, je ressasse les images de mon ange déchu allongé sur son lit, tout en tirant sur ma tignasse pour pousser ces souvenirs à sortir de mon crâne. Au bord de l’hypoxie, je dois ma survie au bras de Tao qui se dépose sur mes épaules. Lorsque je me reconnecte à la réalité, je prends en pleine face la sollicitude de mes amis.
Elle est gravement malade, balancé-je, une douleur obstruant ma trachée.
Cette enclume aussitôt délestée, c’est l’incompréhension que je déchiffre sur leurs visages. Même si mon aveu a été difficile à prononcer, je réalise qu’il leur faut plus d’explications. Jetends alors ma main à la hâte en direction de la bouteille de vodka que je saisis, m’y accrochant comme à une bouée de sauvetage, avant d’avaler son contenu en une seule rasade. La brûlure qui suit, apaise un court instant celle de mon cœur, me donnant lecourage d’être plus explicite.
—Syntia. Elle est atteinte d’une grave maladie… leur révélé-je, détaillant les nervures du parquet.
À la seconde où je prononce cette terrible nouvelle, une salve d'exclamations pleines d'incompréhension s'élève.
—C’est quoi cette connerie encore ? Franchement, on a passé pas mal de temps avec elle et Syntia n’a jamais semblé avoir un quelconque problème, médit Livy.
Dans mon esprit, un combat se livre entre l’envie de buter ma meilleure amie et celui de l'ignorer. Vu mon état, il est évident que je penche vers la plus sombre des deux options. Heureusement, Mason intervient avant que mon corps ne réagisse pour se jeter sur elle.
Bordel, pour une fois dans ta vie, garde ton animosité pour toi, Livy !
—C’est bon… insiste-t-elle.
Stop ! hurlé-je en bondissant du canapé.
Je sais que si je me laisse enivrer par la colère, je vais le regretter. Pourtant, c’est plus fort que moi. Je confronte Livy en m’abaissant pour être à sa hauteur et positionne ma tête à tout juste quelques millimètres de la sienne. Les mains posées de chaque côté d’elle, je martyrise de mes doigts l’accoudoir sur lequel elle est assise pour éviter de broyer son cou.
Que ça te plaise ou non, je suis dingue de cette nana. Crois-moi, j’aurais préféréne jamais l’avoir vu livide sur son lit, branchée à des machines avec imprimé sur son doux visage la douleur qui la torture. Donc, un conseil, Liv. Ravale ta jalousie, parce que si tu me forces à faire un choix, ce sera elle ! explosé-je, déterminé à la réduire à néant.
Son regard fier se remplit de larmes, pourtant, ça ne me touche pas le moins du monde. Au contraire, ça me donne encore plus envie de lui faire regretter ses paroles. Tous mes démons concentrés dans mes veines, je suis interrompu à temps par une main qui saisit fermement mon épaule
—Arrête ! m’ordonne Tao, m'éloignant de Livy qui déglutit difficilement.
Incertain de mes propres réactions, je me dégage ardemment de sa poigne. Les minutes qui suivent, j’arpente mon salon, sans but. Incapable derefreiner mon cerveau, je suis enseveli sous toutes les questions délicates de mes potes qui, au fur et à mesure, prennent la pleine mesure de la situation.
—Et… Tu vas faire quoi maintenant pour Syntia ? m’interroge Tao avec préoccupation.
À l’évocation de son prénom, je m’arrête net et sans la moindre hésitation, je lui avoue :
Rien.
—Quoi ? s’élèvent plusieurs voix sans que je ne discerne leurs propriétaires.
Devant un auditoire suspendu à mes lèvres, je leur révèle le fond de ma pensée sans une once d'émotion tant je suis vide.
—Je refuse de la faire souffrir davantage. C’est pourquoi elle n’entendra plus jamais parler de moi ou de vous.
Ma décision est prise, je suis convaincu que c’est la meilleure solution. Vu leurs tronches, j’imagine qu’ils ne sont pas d’accord avec ça, alors je me fais plus intransigeant.
—Ce n’est pas une requête, mais une affirmation ! Je ne vous demande pas votre avis, conclus-je fermement.
II
Sienna! Si tu ne te dépêches pas, tu n’auras pas le temps de prendre ton petit déjeuner, l’avertit ma mère avec bienveillance depuis le bas des escaliers.
Bonjour, maman, la salué-je tandis qu’elle se dirige vers la cuisine.
La main sur le cœur, le visage blême, elle sursaute et se retourne dans ma direction alors que je finis de descendre les marches.
Ma chérie, qu’est-ce que tu fais debout ? s’alarme-t-elle.
Bercée dans une bulle de coton depuis que j’ai été diagnostiqué, mesparents sont excessivement protecteurs me concernant. Même si je suis consciente de leur anxiété, à présent, j’estime être capable de gérer ma vie.
elle.
J’ai cours dans moins d’une heure.
Je tente d'esquiver l'inquiétude qu’elle tente de faire peser sur moi, mais c’est difficile avec
Syntia, voyons, il en est hors de question ! s’offusquemaman bisounours, comme la nomme Ava. Ça fait tout juste quatre jours depuis ta dernière grosse crise. Tu es encore trop faible pour affronter une journée entière à la fac. De plus, Bastien n’est pas là aujourd’hui, il ne pourra donc pas t’aider s’il se passe quoi que ce soit.
Ce qu’elle ignore, c’est que, justement, ça m’arrange que mon frère ne soit pas présent.
Déjà installée autour de la table, je ne me contente que d’un yaourt. L’estomac toujours sensible après ces quelques jours à ne presque rien avaler, à être tordue en deux par les nombreuses brûlures et crampes que celui-ci m'a infligé, je m’efforce d’écouter la plaidoirie de ma mère.
Ne t’inquiète pas, il ne va rien m'arriver, répliqué-je pour la rassurer.
Ne l’entendant pas ainsi, elle se renfrogne, puis se tourne vers mon père.
Jacob, dis-lui quelque chose ! Elle ne réalise pas à quel point c'est important pour sa santé.
Elle exagère, comme toujours, en prenant son mari à partie. J’ai la sensation que le repas matinal se transforme peu à peu en guet-apens. Si je dois être honnête avec moi-même, une, voire deux journées de plus pour récupérer n’aurait pas été de trop. Seulement, j’ai des comptes à régler avec un certain garçon qui pense pouvoir effectuer des choix à ma place.
Quand j’ai aperçu Zane dans l’encadrement de la porte de ma chambre, j’ai d’abord cru à un mirage. Sous oxygène, droguée par les opiacés et anxiolytiques le tout sur fond d’électrodes pour tromper mon cerveau, cela aurait pu être possible. Cependant, sa voix s’est mêlée à ma vision, puis son parfum a captivé mes sens avant que mon cœur ne tombe en chute libre lorsque j’ai discerné sur son magnifique visage glacial l’horreur dans ses rétines, ainsi que la pitié que je lui inspirais. Sans me laisser la moindre chance, il a décidé que nous deux, c’était fini. Par peur ou par lâcheté ? Je n’en sais rien, mais je compte bien le découvrir.
Ta mère a raison, Syntia. Tu restes à la maison aujourd’hui. On va téléphoner au médecin pour lui demander son avis, tranche mon père, s’imaginant que j’ai toujours dix ans.
 Je ne suis pas du genre à me rebeller contre mes parents, à ne pas prendre en compte leurs conseils. Or, je ne supporte plus leur surprotection. Être traitée en permanence comme la personne malade, fragile, faible, à qui l'on dicte continuellement les faits et gestes, commence à peser lourd sur mon moral. Je n’enpeuxplus, ça me rend dingue ! J’ai besoin de me sentir libre et maître de moi-même.
Maman, papa, je vous aime. N’en doutez jamais, mais je ne vous demande pas votre autorisation. Je retourne en cours, Ava vient me chercher.
Je leur impose ma décision tout en affrontant leurs craintes. Je crois qu’ils sont aussi surpris que moi par cette rébellion que je n’ai jamais osée jusqu'alors. Le silence s’invite à notre table. À voir leurs regards déçus, il ne fait aucun doute qu’ils ont du mal à digérer ma prise de position.
Ça y est, le nombril du monde a repris vie, balance ma sœur “d’amour”.
Elle pose au même moment ses fesses sur la chaise en face de la mienne, sans se douter de ce qu'il se passe.
Je n’avais pas assezde deux Baker sur le dos, il faut que la pire d’entre nous s’y ajoute.
Tu sais ce qu’il te dit le nombril ? m’emporté-je, n’en pouvant plus d’être le souffre-douleur de cette peste.
Un grand sourire aux lèvres, Sienna me défit en prenant plaisir à appuyer là où ça fait mal :
C’est qu’elle a pris de l’assurance depuis qu’elle s’est tapé le mec qui l’a prise pour une conne, m’attaque-t-elle, se marrant en me fixant d’un regard haineux.
Sans réfléchir, je me lève brusquement, les pieds de la chaise crissent sur le carrelage et les nerfs en ébullition, je bondis vers ma sœur, mon corps me rappelle néanmoins qu’il est toujours courbaturé après avoir tant souffert ces derniers jours.
 Les filles, ça suffit ! intervient notre père, tandis que notre mère assiste à la scène, horrifiée.
Toutefois, c’est trop tard, je ne m’arrête pas. Je me plante devant Sienna, me penche pour être au plus près de ses iris de vipère et, malgré les vertiges, je lui demande :
C’estquoi ton problème ?
Toi ! déclare-t-elle, haineuse, sans aucune hésitation.
Sa réponse me blesse. Ce n’est pas une inconnue qui me voit comme son ennemie, mais bel et bien ma petite sœur. Abasourdie, je la scrute jusqu’à ce que mon portableannonce l’arrivée d’un message et que notre père s’interpose entre nous.
Ça suffit les filles, nous intime-t-il en s’adressant principalement à Sienna.
 Pas du tout impressionnée, celle-ci continue de me toiser, attendant le moment où je vais craquerpour m’attaquer de nouveau. Tiraillée entre l’envie de la confronter et de consulter mon téléphone, je finis par m'éloigner. J’entends immédiatement mes parents la réprimander. Sans grande surprise, Ava m’indique qu’elle m’attend devant chez moi. Profitantde cette échappatoire, je sors de la cuisine, récupère mon sac abandonné en bas des escaliers, puis annonce lâchement tout en refermant la porte derrière moi :
J’y vais.
***
Pour une fois, je suis du même avis que tes parents, mabichette. Tu n’as pas l’air d’être complètement requinquée, s’inquiète ma meilleure amie pour la centième fois depuis que j’ai pénétré dans sa voiture.
Déjà stressée par ce qui m’attend, je n’essaie pas de défendre ma cause. Je préfère garder mon peu d’énergie pour la bataille à venir.
Par pitié, conduis et tais-toi, pesté-je, plus anxieuse qu’énervée.
Elle a pris du poil de la bête depuis qu’elle a goûté au grand méchant loup, se moque-t-elle affectueusement.
Habituée à ses gentilles moqueries, je lève les yeux au ciel tandis qu’elle se marre, pas du tout rancunière. Enfin, là, en l’occurrence, ce n’est pas le ciel que je vois, mais le plafond de l’habitacle.
Ava… soufflé-je, lasse de ses bêtises.
Sérieusement, ma bichette. T’es sûre de toi ? se mine-t-elle en me jetant un coup d'œil perplexe avant de poursuivre. Je trouve que tu oublies vite ce qu’il t’a fait.
Qu’elle me le remémore me fait l’effet d’un coup de poignard dans le cœur. Je comprends sa mise en garde. Seulement, j’ai retourné mentalement cette fichue histoire de vengeance dont j’étais le point central et j’en arrive toujours à la même conclusion. Je lui en ai voulu, c’est peut-être même encore un peu le cas, ça m’a blessé au plus profond de mon âme, mais c’est encore plus insupportable de m‘imaginer loin de lui.
Tu as raison… Sauf que j’ai décidé de lui pardonner. On a tous droit à une seconde chance et surtout, je l’ai dans la peau. Même si notre relation a débuté par un plan odieux, je le veux plus que tout.
Je lui livre le fond de ma pensée, émue par mes propres sentiments.
OK, OK. Bon, il habite où exactement, ton mec ? capitule-t-elle, me prouvant son amitié indéfectible.
Lorsque je lui ai envoyé un message hier soir, elle n’était pas d’accord avec mon plan, mais à force de persuasion, elle a fini par accepter de me conduire chez Zane. Ma première intention était de le confronter à la fac, cependant, Ava m’a appris qu’elle ne l’avait pas vu depuis plusieurs jours.
Au prochain croisement, tu tournes à gauche. C’est la résidence avec la double porte vitrée et les colonnes en métal, lui indiqué-je, l’angoisse montant crescendo.
 On aurait dû se mettre ensemble, balance-t-elle, probablement pour détendre l’atmosphère.
Même si je n’aipas la tête à ça, je souris malgré moi en nous imaginant en couple.
Tu en es certaine ? Toi qui sautes sur tout ce qui déborde de testostérone et moi qui suis un brin fleur bleue… la taquiné-je en laissant ma phrase en suspens.
Si je me tape un mec alors que je suis avec toi, ce n’est pas vraiment trompé, si ?
Cette nana à un pouvoir magique. Elle arrive à me tirer un fou rire malgré ma déprime ainsi que le stress qui monte de plus en plus à mesure qu’on s’approche de notre destination.
Désolée decasser ton délire, mais si, c’est tromper, m’amusé-je à la contredire pour me changer les idées.
! se marre-t-elle une seconde fois avant de reprendre plus sérieusement. Je Merde déconne qu'à moitié, en fait, tu sais. J’y songe de plus en plus. Après tout, je n’ai pas envie de mourir sans avoir testé les meufs.
Elle affiche un sourire éclatant la rendant solaire. Je ne sais pas si je dois rire ou être choquée par sa confession. Avec elle, plus rien ne me surprend, cependant j’avoue que celle-là, je nel’ai pas vu venir. Mais très vite, je sais que quoi qu’elle fasse, je serais à mille pour cent avec elle du moment que ça la rend heureuse.
C’est ici, lui indiqué-je lorsqu’on arrive à destination.
Eh ben… Il ne s’emmerde pas ton Zane de malheur. Mêmeen vivant dix vies, je n’aurais pas les moyens de me payer un appart dans ce quartier, s’émerveille-t-elle en se garant.
Et encore, elle n’a pas aperçu l’intérieur. Ça n’a vraiment rien à voir avec les logements minuscules sur le campus.
Qu’est-ce que tu fais ? la questionné-je alors qu’elle détache sa ceinture.
Je viens avec toi, réplique-t-elle, sur le point de sortir de la voiture.
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