Des vacances pour Le Refuge
108 pages
Français

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Des vacances pour Le Refuge , livre ebook

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Description

Des vacances pour Le Refuge

Collectif

10 textes longs sur le thème de Jeunes gays en vacances.

398 000 caractères, 70 000 mots.

Des textes allant de 30 000 à 45 000 caractères (20 à 30 pages) au profit de l’association Le Refuge.

• Le hangar à bateaux, Jordan Béranger

• Hauterive, Nicolas Henri

• Des mots sur nos lèvres, Rose Darcy

• Le garçon sur la plage, Bravery

• Carpe Diem, Zéline Lebeau

• Si simplement, Mathias P.Sagan

• Le baiser du papillon, Eve Terrellon

• Plus loin, Ludovic Zadania

• David & Jérôme : une histoire simple, V.D PRIN

• Punta Punta !, Éric Chatillon

Le livre papier fait 256 pages

Retrouvez tous nos titres sur http://www.textesgais.fr/

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 30 juin 2016
Nombre de lectures 0
EAN13 9791029401558
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Des vacances
pour Le Refuge
 
 
 
Recueil de 10 textes longs
 
 
 
Le hangar à bateaux
Jordan Béranger
Hauterive
Nicolas Henri
Des mots sur nos lèvres
Rose Darcy
Le garçon sur la plage
Bravery
Carpe Diem
Zéline Lebeau
Si simplement
Mathias P.Sagan
Le baiser du papillon
Eve Terrellon
Plus loin
Ludovic Zadania
David & Jérôme : une histoire simple
V.D PRIN
Punta Punta !
Éric Chatillon
En mémoire aux victimes du massacre homophobe
du Pulse à Orlando, Floride, États-Unis, le 12 juin 2016
 
 
 
 
Le hangar à bateaux
 
Jordan Béranger
 
 
Lorsque la cloche a retenti, j’ai ressenti un immense soulagement. J’entendais pour la dernière fois ce son strident qui avait rythmé mes quatre années de collège. Il symbolisait la fin d’un cauchemar, d’une époque que je ne regretterais pas. En septembre je rentrerais au lycée pour commencer une nouvelle vie. C’était pour moi une occasion unique de repartir à zéro, de me refaire une réputation, de rencontrer de nouveaux amis.
J’avais juste une dernière formalité à accomplir avant de profiter de mes vacances : passer le brevet. Mes seuls points accumulés en contrôle continu me garantissaient son obtention. J’abordais ce premier examen en totale sérénité.
J’habitais Lattes, une petite agglomération à la périphérie de Montpellier. Quelques années plus tôt, mes parents avaient acheté un terrain en bord de mer au Grau du Roi, pas très loin de la fameuse plage de l’Espiguette. C’est là où je passais mes étés.
Nous y avions installé une caravane dans laquelle mes parents dormaient ainsi qu’une grande tente qui m’était réservée. Malgré l’interdiction de l’urbanisme d’y établir la moindre construction, une vieille cabane en bois avait été érigée à son extrémité, à quelques mètres à peine d’un chenal qui conduisait à la mer. Nous y entreposions un bateau de plaisance que nous utilisions pour effectuer quelques sorties en mer. Il nous suffisait d’ouvrir le hangar et de pousser la remorque jusqu’à l’eau. Un treuil faisait le travail pour la remonter. La municipalité avait toujours fermé les yeux sur cette construction sauvage qui datait d’une autre époque, quand les plans d’urbanisation n’existaient pas encore. Nous avions donc fait en sorte de l’entretenir sans jamais attirer l’attention. Le seul écart que nous nous étions accordés avait été l’installation d’une douche et de sanitaires qui constituaient un îlot de confort dans un environnement spartiate et rudimentaire qui se voulait proche de la nature.
Mes grands-parents partant en cure au mois de juillet, ma mère n’avait pas de solution pour me garder. Elle avait donc élaboré une alternative complexe dont elle seule avait le secret :
— Voilà ce qu’on va faire : on va établir nos quartiers à la mer dès le début du mois de juillet. Avec ton père on partira travailler le matin et on rentrera le soir. L’après-midi, on te laissera sous la responsabilité des voisins. Ils ont un fils de ton âge à peu près, William. Et au mois d’août, on inversera. On gardera William la journée pendant que ses parents seront au travail.
— Je suis vraiment obligé ? Je ne le connais même pas.
— Tu n’as pas le choix, Arthur. Et ça te fera le plus grand bien de te faire un nouveau copain.
— Et si on ne s’entend pas bien ?
— Tu feras des efforts.
— Mais…
— Il n’y a pas de mais. C’est comme ça. Fin de la discussion.
Inutile de dire que je n’étais pas ravi du sort que m’imposait ma mère. Passer mon temps avec de parfaits inconnus alors que je n’étais pas un modèle de sociabilité ne m’enchantait guère. Cependant, malgré mon jeune âge, j’avais appris une chose fondamentale : quand on ne pouvait pas agir sur un événement, il était inutile de gaspiller son énergie pour s’y opposer. Je tenais cette philosophie de mon grand-mère qui n’avait d’ailleurs pas manqué de relativiser les choses lorsque je lui avais fait part de mon émotion vis-à-vis de l’initiative de ma mère :
— Arthur, tu te plains souvent d’être seul et de ne pas avoir d’amis. Tu es un garçon brillant. Profite de ces vacances pour inverser le cours des choses. Je sais que tu peux le faire.
Sur le coup, je l’avais soupçonné d’une collusion avec ma mère, d’un stratagème visant à me faire avaler des couleuvres afin de dissiper mon mécontentement. Et puis j’avais réfléchi. À cette solitude qui me pesait parfois. À mon manque de popularité. À mes échecs amicaux. J’avais conclu que je ne pouvais pas continuer ainsi et que cet été allait être déterminant pour le reste de ma vie. Parce que j’avais besoin d’un changement radical, mais surtout parce que je l’avais décidé.
Le premier samedi des vacances, nous avons donc chargé la voiture pour nous rendre au Grau du Roi. J’ai traîné les pieds par principe en me lamentant. Mes parents ont levé les yeux au ciel, exaspérés. Je n’ai bien évidemment pas prononcé un mot de tout le trajet. Je l’ai passé les yeux rivés sur mon iPhone à envier la vie de mes camarades sur les réseaux sociaux. En arrivant à destination, nous avons rangé toutes nos affaires, rempli le réfrigérateur. J’observais régulièrement le terrain d’à côté afin d’y déceler des signes d’activité, mais il n’y avait pas âme qui vive. Les voisins ne devaient pas être encore arrivés ou avaient dû partir tôt à la plage. Malgré mes réticences, j’étais curieux de voir à quoi ressemblait le fameux William avec qui j’allais passer ces deux mois de vacances. Je n’en soufflais évidemment pas le moindre mot à ma mère qui aurait été trop contente de voir que je n’étais pas totalement réfractaire à ses décisions.
Un peu avant le déjeuner, alors que j’étais occupé à installer quelques affaires dans ma tente, j’ai entendu ma mère crier :
— Arthur ? Youhou, Arthur ? Sors de ton repaire. Ils sont là !
— J’arrive, maman.
Je me suis précipité à l’extérieur. Les voisins étaient juste devant la caravane. Ils me tournaient le dos. Il y avait le père, la mère, un adolescent légèrement plus grand que moi qui devait être William et un petit garçon d’une dizaine d’années.
— Ah, voilà Arthur, s’est écriée ma mère.
Les visages se sont retournés dans ma direction. Et je me suis décomposé sur place.
— William Parmentier ? C’est une blague, j’espère ? ai-je crié, incapable de retenir mon exaspération.
— Arthur le boulet ! a-t-il répondu aussi surpris que moi.
— Maman, c’est hors de question que je passe mes vacances avec ce type.
— Je viens d’apprendre que vous étiez dans le même établissement. Vous vous connaissez ? a demandé ma mère qui n’avait rien compris à la situation.
Je connaissais effectivement William Parmentier. Âgé d’un an de plus, il passait le plus clair des récréations à me harceler. Nous n’étions pourtant pas dans la même classe, ni même dans la même section géographique du bahut – le collège et le lycée se voulaient séparés –, mais dès que je passais à côté de lui, il ne manquait pas de me balancer des insultes, me traitait de pédé. Il lui était même arrivé de me faire des croche-pattes dans l’espoir de me faire tomber. Ce type vouait à mon égard une haine inexplicable qui s’étendait par capillarité à l’ensemble de mes camarades. Comment expliquer tout cela à ma mère ? Comment lui avouer que j’étais victime de harcèlement et que mon pire tortionnaire se tenait là, à quelques mètres de moi ? Un millier de questions traversaient ma tête. Je ne savais pas comment gérer cette situation. Et alors qu’un silence pesant s’installait devant la caravane, j’ai décidé d’éviter la confrontation. J’ai dit bonjour aux parents de William et j’ai fait en sorte de changer de sujet :
— Oui on se connaît. De vue. Rien de plus.
— Parfait ! Puisque tout le monde est là, si on prenait un apéritif ? a proposé ma mère en s’improvisant Bree Van de Kamp.
Je suis resté tétanisé et n’ai pas prononcé un mot pendant tout l’apéritif. Maman a tenté d’en savoir plus sur le lycée en questionnant William qui ne lui a fourni que des réponses évasives. Je comprenais désormais que je n’aurais pas d’autre choix que de devoir le supporter pendant toutes les vacances. Je craignais de me faire martyriser et d’endurer des supplices physiques et psychologiques au quotidien. Il me restait moins de deux jours de répit avant le début des hostilités. Dès lundi, ma vie allait devenir un enfer.
 
*
* *
 
Un enfer… J’avais retardé le plus possible la confrontation. J’avais fait semblant de traîner au lit en m’assurant que la famille Parmentier partait bien à la plage. Puis, lors du déjeuner, la mère, Chantal, m’a appelé pour que je les rejoigne. Elle a attribué mon silence pendant le repas à une timidité excessive, bien compréhensible lors de l’adolescence. Mais une fois le dessert avalé, William a déclaré :
— Bon, moi je vais à la plage !
— Tu prends Arthur avec toi, a aussitôt enchaîné sa mère.
— Et moi ? a demandé son petit frère qui n’envisageait pas de rester tout seul.
— Non, toi tu restes avec nous et tu laisses les grands tranquilles, a conclu Richard, le père.
— Bon, allez bouge-toi ! m’a ordonné William sèchement. On va pas passer la journée ici.
Je me suis levé pour aller chercher mes affaires de plage. Quelques minutes plus tard, je rejoignais Parmentier sur le chemin qui menait à la mer. Il s’est mis en marche sans m’adresser la parole, en prenant soin de garder une distance de quelques mètres entre nous. Alors que nous étions presque arrivés à destination, il a emprunté un nouveau chemin derrière les dunes.
— Hey ? Tu vas où ? La plage est par là, lui ai-je lancé en pointant du doigt l’endroit où j’avais l’habitude de m’installer avec mes parents.
— Je vais à une autre plage. Un endroit où il n’y a personne et surtout pas de gamins comme à celle-ci. D’ailleurs je pense que tu y as totalement ta place donc je t’en voudrai pas si tu vas de ton côté et moi du mien.
— Non, c’est bon, tu me prends pour qui ?
— Pour un boulet que je suis obligé de me traîner pendant deux mois.
— Tu comptes jouer longtemps à ce jeu-là avec moi ?
— Aussi longtemps que nécessaire, a-t-il

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