Florence
161 pages
Français

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Description

Comment Florence se débrouillera-t-elle avec son enfant qu’elle doit élever seulement avec l’aide de Gabrielle, sa mère? Son travail lui apporte beaucoup de satisfaction, mais elle y vit de l’intimidation et même du harcèlement sexuel. Sans oublier son fils qui lui donne du fil à retordre, ainsi qu’une vie amoureuse tumultueuse et marginale pour l’époque.
C’est dans le contexte des années ‘70 et ‘80 que les personnages évoluent avec leurs peines, leurs joies et leurs problèmes. Une période contestataire qui est sans contredit passionnée, rude et parfois même violente.
Retraitée de l’enseignement depuis dix ans, Dolorès Leduc nous parle de l’homophobie de l’époque, dans un style littéraire psychosocial. Ce roman, à la fois rural et urbain, consacre bien son talent.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 11 février 2020
Nombre de lectures 8
EAN13 9782897753153
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0017€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Florence
 
Tome 2
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Dolorès Leduc
 

 
 
 
 
 
« N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. »
Simone de Beauvoir
 
 
 
 
 
 
 
 
Cet ouvrage est une œuvre de fiction. Toute ressemblance avec des personnes ou des faits réels n’est que pure coïncidence.
 
 
 
PREMIÈRE PARTIE
CHAPITRE 1
L’aménagement
 
 
Juin 1970
Déjà un mois que la famille Bertrand a quitté le petit village de Saint-Paul pour emménager à Montréal. Les armoires, placards et planchers ont été nettoyés. Quelques pièces ont aussi été repeintes afin d’imprégner une allure propre à leurs nouveaux arrivants. La veuve, Gabrielle Bertrand, Jacques, son demi-frère, ainsi que Raphaël s’affairent à l’organisation logistique du logis. Raphaël, le jumeau de Gabrielle, malgré la déficience qui lui enlève une partie de ses repères, semble s’y plaire le plus. Certes, les chatons de la campagne lui manquent un peu… Cependant, du haut du balcon, le brouhaha des autos et des autobus le fascine.
André, le cadet de Florence, fils de Gabrielle, sera pensionnaire dans un collège. Sa mère tient à ce qu’il ait les meilleurs cours ainsi que les professeurs les plus qualifiés en ville. « Surtout avec le talent qu’il possède et cette facilité qu’il a à apprendre. Tu as vu ses notes de bulletin toujours au-dessus de la moyenne… » se plaît-elle à répéter. Elle est prête à se serrer la ceinture afin de lui permettre de faire des études. Elle entrevoit quelques professions pour son fils : avocat, ingénieur ou journaliste !
— Tu le vois, toi, Jacques, ministre ? dit-elle à son frère en redressant ses épaules.
— Ah, Gabrielle ! Je ne te reproche pas d’aspirer à de belles ambitions pour André, mais laisse-le choisir son métier, réplique Jacques, un peu agacé par les propos de sa sœur.
Tout à coup, la porte s’ouvre dans un coup de vent. Voilà Florence, l’aînée de Gabrielle, qui entre avec son fils Daniel. Ce poupon n’est pas nécessairement très heureux de quitter la chaleur des bras de sa mère. Telle une locomotive, il hurle à pleins poumons. Gabrielle s’empresse de prendre son petit-fils afin de le calmer un peu. Le bébé de trois mois n’a pas nécessairement apprécié recevoir son vaccin.
— Sûrement qu’il fera de la fièvre cette nuit, s’inquiète Gabrielle. Je vais le prendre dans ma chambre.
Florence vocifère, expire fortement et jette un regard acéré à sa mère.
— Voyons, je suis parfaitement capable de m’occuper de mon fils. OK, Gabrielle ?
C’est ainsi que Florence nomme sa mère – par son prénom – lorsqu’elle se sent contrariée.
— Je disais ça juste pour te permettre de passer une bonne nuit, ma chérie, étant donné que tu te lèves de bonne heure le matin pour ton travail, réplique aussitôt Gabrielle, un peu confuse par sa proposition précipitée.
 
Le logis loué par Gabrielle est quand même confortable, malgré l’étroitesse des pièces. Pour un logement en plein cœur de la ville, les fenêtres sont grandes, ce qui lui donne beaucoup de clarté. D’autant plus que le propriétaire a consenti à y installer un couvre-plancher neuf.
Aussi surprenant que cela puisse sembler, la rue porte le nom de Saint-Paul – ironie du sort – le même nom que celui du village qu’ils viennent de quitter. Montréal, cette ville aux cent clochers avec ses escaliers et ses balcons qui les prolongent, est la vitrine de chaque foyer. Les Montréalais y affichent leurs convictions religieuses ou politiques, ce qu’ils veulent montrer aux autres quant à leurs goûts, leur façon de vivre ou leur richesse. Les escaliers deviennent alors porte-drapeaux ou supports d’affiche. Pour tout dire, Gabrielle n’a pas encore eu le temps de s’occuper de l’état de son escalier, beaucoup trop accaparée par l’aménagement de leur nouveau logis.
Au premier abord, ce logement comporte cinq pièces, dont trois chambres à coucher. Jacques et Raphaël cohabitent dans la plus spacieuse. Deux lits à une place y sont installés, ce qui donne de l’espace pour les bureaux de rangement. De plus, Jacques a tenu à y installer un petit secrétaire afin d’écrire ses lettres. Écrire à ses anciens employeurs de la Saskatchewan lui est salutaire, ainsi qu’aux religieuses du couvent de la Miséricorde, l’endroit où il a vu le jour.
Florence partage sa chambre avec son fils Daniel. Un lit de bébé s’y trouve ainsi qu’un placard où petits et grands vêtements y sont alignés. Il y a également une table à langer pour la toilette du petit Daniel, ce qui accommode bien Florence quand vient le temps de prendre soin de lui.
Son refuge se situe du côté arrière de la bâtisse. Un chêne majestueux domine la cour, comme un roi domine son royaume. Il surpasse les toitures et ses branches descendent en cascades près des fenêtres. Des oiseaux y ont élu domicile et égayent de leurs chants les petits matins des occupants. Florence, qui a toujours aimé la nature – tout comme sa mère, d’ailleurs – privilégie de s’asseoir près de la fenêtre pour bercer son petit. Il est vrai que cette haute fenêtre à guillotine lui donne beaucoup de mal quand vient le temps de l’ouvrir ou de la fermer. Dans un autre ordre d’idées, assise près de cet espace vitré, son imagination est fertile. Cet arbre aux allures féériques habite ses plus beaux rêves. Elle fabule sur le roman de Marie-Antoinette, dans lequel le roi Louis XVI et sa reine sont morts guillotinés. Un coup de vent la fait sortir soudainement de sa léthargie. Elle regarde dehors et, compte tenu de ce qu’elle a lu, se promet que son petit ne jouera jamais près de cette dangereuse fenêtre qui risque de se fermer au moindre caprice de dame Nature.
En ce qui concerne la chambre de Gabrielle, celle-ci se situe du même côté que celle de Florence : sur la cour arrière. Par contre, elle est plus petite. De l’intérieur, on y aperçoit une porte qui mène à un petit balcon à demi fermé. Dans l’ensemble, cette petite loggia donne un air romantique digne de Roméo et Juliette. Gabrielle aime bien ce balcon qui lui rappelle la tranquillité de sa vie campagnarde passée. Néanmoins, son plus grand souci est que sa petite famille soit bien, qu’elle ne manque de rien même si l’espace est restreint.
Quant à André, étant donné qu’il passera la semaine au collège, le divan lui servira de lit.
Toutefois, Gabrielle s’inquiète :
— Ce n’est que pour deux nuits, se plaît-il à dire à sa mère qui, selon lui, se fait trop de soucis à son sujet.
En effet, les pièces du logement sont étroites pour cinq personnes et un enfant. Cependant, elles sont décorées avec grand soin. Gabrielle consacre beaucoup d’efforts afin d’enjoliver le logis : des courtepointes confectionnées par sa mère Éloïse et certaines par les mains habiles de sa grand-mère Dubois, l’aïeule de Gabrielle, recouvrent le lit de chacun. Et que dire de la solidité des meubles de son défunt mari ! Yvon les fabriquait dans les meilleurs matériaux : chêne, érable, pin, parfois merisier.
— Le printemps prochain, je vais repeindre certains meubles. J’ai vu des couleurs osées dans les vitrines des grands magasins : rouge, jaune, à la rigueur, violet. Des teintes criardes, certes, mais il faut oser dans la vie… Dans mes heures de bricolage, je vais m’amuser à donner à certaines commodes un aspect plus moderne en les repeignant de ces couleurs gaies. Ça va avoir l’air du neuf ! s’emporte-t-elle fièrement.
— Tu commences par ma chambre ? dit Florence, tout excitée par les propos de sa mère. J’ai vu ça dans les magazines au bureau. Tu sais, maman, c’est vraiment tendance !
— Mais oui, mais oui. Moi, j’avais l’intention de commencer par la cuisine.
Cependant, Jacques n’est pas tout à fait d’accord. Il dit :
— C’est quasiment un sacrilège de masquer le bois de ces meubles et, par le fait même, de leur enlever la couleur

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