Les Entraves de l Hiver
105 pages
Français

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Les Entraves de l'Hiver , livre ebook

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Description


Jack Frost a un plan.


Depuis des siècles, il n’existe que durant quelques semaines en décembre, veille au bon déroulement de l’hiver avant de retourner, contraint et forcé par le Gardien, au Sommeil.
Mais pas cette année. Il compte bien l’affronter et faire basculer le cours de son existence à jamais.


Mathilde, quant à elle, s’astreint à une vie bien ordonnée malgré une immense fratrie qu’elle tente de maintenir sur les rails.



Oui, Jack Frost a un plan. Sauf que ses pas croisent les siens, ceux de cette jeune fille au bonnet rouge. Celle qui fera chavirer tous ses desseins.

Sujets

Informations

Publié par
Nombre de lectures 0
EAN13 9782381990392
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0060€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Les Entraves
De L' Hiver
ISBN : 978-2-38199-039-2
ISSN : 2430-4387
Les Entraves de l’Hiver
Copyright © 2021 Éditions Plume Blanche
Copyright © Illustrations Tania Fortun-Sanchez
Copyright © Portrait Jack et Mathilde, Alba Kalisdice
Tous droits réservés
Djenny Bergiers

Les Entraves
De L' Hiver

(Roman)

« L’amour sans éternité s’appelle angoisse :
l’éternité sans amour s’appelle enfer. »
Gustave Thibon
L’ignorance étoilée , Fayard, 30 novembre 1983
À maman,
aucun mot ne suffira jamais pour exprimer combien je t’aime.
Prologue


La respiration laborieuse, il n’avait plus la force de tenir debout. 
Il attendait, genoux au sol, la venue de son bourreau. Toutes les entraves étaient à présent activées. À travers sa vision trouble, Jack observa les glyphes qui constellaient sa peau. Bleus et brillants, ils muselaient ses pouvoirs, diffusaient une douleur sourde, intolérable, dans tout son corps. 
Le Maître de l’Hiver exécrait sa mise en Sommeil. Pourtant, arrivé à ce jour précis de l’année, il guettait son Gardien avec une impatience difficilement contenue. 
Qu’on en finisse. 
Jack sut avant même de le voir qu’il était enfin là. Comme à chacune de leurs rencontres, il avait emprunté une silhouette différente, mais ce regard intransigeant demeurait le même. Un homme d’une quarantaine d’années s’approcha lentement de lui, trop lentement. 
La douleur à son paroxysme, le Maître de l’Hiver ne tint plus et courba la tête. Un sentiment de frustration gronda en lui à l’idée que le Gardien interprète ce geste pour un signe de déférence. Il ne se soumettait pas, il n’avait simplement pas le choix. 
— Ton temps est écoulé, annonça le Gardien de sa voix caverneuse. Retourne au Sommeil.
Aussitôt, la douleur commença à refluer et une langueur irrépressible s’empara de Jack. Le corps entier devint lourd, les paupières se fermaient déjà, son esprit saturé de mélancolie s’engourdissait peu à peu.

Un jour, cela cesserait, il se le promit. 

Un jour, il ne se rendormirait jamais plus. 
Chapitre I


Une faible lueur pointa dans la salle sombre. Cette lumière accrochée aux parois crût en intensité, révélant une illustration complexe gravée dans la roche. Les traits s’emplirent peu à peu d’un éclat blanc vif. Dans le plus parfait silence, un profil se dessina sur le mur de granit. L’esquisse enfla et une silhouette endormie jaillit de la pierre.
Prisonnier dans l’écrin du sommeil, il reprit ses courbes de chair. La magie affluait dans ses veines, le ramenant à la vie. En suspension dans l’air, recroquevillé comme un fœtus, il lui fallut encore quelques instants pour sortir de sa torpeur.
Puis vint la conscience.
La brutale, la soudaine, l’immédiate conscience.
Jack Frost ouvrit grand les yeux, papillonna des paupières. Une longue inspiration l’aida à s’extirper de sa léthargie. Rapidement, les sensations affluèrent, les sentiments l’envahirent. Il lutta contre le désespoir qui l’avait étreint au moment du Sommeil, contre la solitude qui l’avait bercé comme une mère durant ces mois de nuit imposée. Il chassa la peine et la souffrance d’un mouvement de tête, puis accueillit le renouveau.
Avec lenteur, le Maître de l’Hiver se laissa redescendre. Ses pieds nus s’ancrèrent sur le sol froid. Un regard rapide dans la salle lui apprit que, sans surprise, rien n’avait bougé durant son absence. Le corps encore engourdi, il testa les muscles de ses bras, dompta les fourmillements de ses jambes. La sensation dans ses mouvements était grisante. D’un coup d’œil critique, il observa le dos de ses mains et ses avant-bras, les entraves pâles le narguaient déjà.
Jack s’approcha de la console, caressa l’écorce rugueuse. La mousse qui s’y attardait chatouilla la pulpe de ses doigts. Et il sourit, car cette année, il serait prêt.
Le frisson de l’excitation dévala sa colonne vertébrale et le galvanisa d’une euphorie nouvelle.
Enfin.
Il fit rouler ses épaules, dodelina de la tête, écarta les orteils. Le sourire aux lèvres, il savoura la sensation de liberté, l’aisance de ses gestes. Chassant les derniers engourdissements de son corps par des mouvements toniques, il évolua dans la pièce, se la réappropria.
Chaque année, le même décor s’imposait à lui. La salle sommairement aménagée ne contenait que les rares meubles et bibelots accumulés au cours des siècles. Un canapé qui lui servait à rêvasser, une table basse où trônaient quelques ornements chargés de souvenirs, et une étagère haute rassemblant les maigres possessions d’une longue vie. Le tout était faiblement éclairé par des bougies de glace diffusant sans faillir un halo bleuté.
Une sensation oppressante saisit Jack à la vue des glyphes sur le mur de granit. D’ordinaire, il évitait de poser son regard sur la fresque, fuyant ce rappel permanent du temps qui lui était compté. Pourtant, cette année, le Maître de l’Hiver dompta sa peur et détailla avec une détermination farouche les traits de cette prison qu’il abhorrait. Il avait un plan.
Confiant, il se détourna pour rejoindre la seule pièce attenante : son atelier.
Les nuances bleutées de la salle d’Éveil cédèrent la place à des tons orangés. La chaleur pesante qui y régnait percuta Jack de plein fouet, s’insinuant dans chacun de ses pores. Le feu éternel ronronnait, impatient d’être sollicité. Jack actionna le soufflet et posa la pâte de verre dans le four afin de la rendre malléable. Les gestes revenaient avec aisance, l’habitude reprenait le dessus. D’ordinaire, il fuyait les températures élevées qui malmenaient aussi bien son corps que sa magie. Toutefois, celle générée par la forge lui procurait une sensation différente. Elle appartenait à ce processus de création que le Maître de l’Hiver affectionnait tant.
Il attrapa sa canne et préleva le verre alors pâteux. Il se laissa hypnotiser quelques secondes par les variations incandescentes de rouge et d’orange qui habillaient la matière. Les couleurs vives le happèrent. Son esprit vagabonda, l’espace de quelques instants à peine, dans un décor de printemps coloré. Il s’imagina les arbres en fleur dansant paresseusement au gré du vent ; les pétales qui s’envolaient et tourbillonnaient ; le doux chant des oiseaux aux premières lueurs du jour ; la brise d’un vent tiède sur sa peau froide. Toutes des images qui n’avaient jamais pris vie devant ses yeux qu’à travers un écran de télévision.
Il soupira.
À l’aide d’un papier humide, il enserra le matériau et le manipula pour le lisser puis l’arrondir. Tel un orfèvre, Jack berça sa création avec amour. Puis, lorsque la forme lui convint, il posa ses lèvres à l’autre extrémité de la canne et souffla. Par à-coups, il insufflait de l’air tout en faisant rouler l’outil sous ses doigts, encore et encore, laissant le temps au verre de se creuser. L’exercice lui demandait de l’effort, aussi un film de sueur couvrait sa peau. Il lui faudrait quelques jours pour récupérer l’entièreté de sa force et de son endurance.
La sphère était terminée. Il ne manquait que la touche finale, la partie délicate. Jack reprit une inspiration laborieuse, souffla, et la magie se déversa dans le réceptacle. Le centre du globe se gorgea d’une fumée jaune tourbillonnante. Avec des gestes vifs et précis, le créateur coupa l’orbe à l’aide d’une puissante pince, et d’un mouvement de la main, la fit léviter.
Jack aimait contempler ses créations. À ses débuts, les premières Galobas étaient loin d’être aussi belles. Il lui avait fallu du temps et de la pratique.
Satisfait, il envoya des salves de vent pour refroidir l’objet sans l’éclater.
L’orbe enfin prêt, Jack s’en saisit avec mille précautions, puis retourna dans la salle d’Éveil, près de la console. Il en contempla chaque socle et chassa les résidus de poussière accumulés. Avec beaucoup de soin, il déposa la Galoba sur le premier support. La brume jaune tourbillonna alors et, lentement, s’écoula. L’image lui évoqua une tornade miniature contenue dans une sphère de verre. Il faudrait déjà en fabriquer une nouvelle demain. L’hiver était en marche.



Invisible aux yeux des Hommes, Jack traversait le parc de l’Orangerie afin de savourer sa première sortie de l’année. Il s’éleva dans les airs et glissa ses doigts sur les branches nues des arbres pour interrompre la circulation de la sève à l’approche du gel. Des petits bourgeons s’étaient déjà formés, prêts à éclore à la première hausse de température. Après avoir reproduit son geste sur quelques végétaux, il poursuivit sa balade au sol. Les Galobas qu’il créait avaient pour fonction de lancer ce processus. Toutefois, Jack aimait aussi être en contact direct avec la nature, la transformer de ses mains. De tous les Maîtres, il était celui qui intervenait le moins sur la faune et la flore, pour la majorité endormie.
Durant sa promenade, il s’émoustilla de toutes les sensations qui le percutaient : les odeurs de viande grillée du stand de hot dogs, le vin chaud largement consommé en cette période de l’année, le parfum entêtant de la demoiselle qui passa à côté de lui, ou encore les effluves délicats du rayon de soleil contre l’écorce humide des arbres dénudés. Il se délecta de toute cette charge olfactive. Chaque jour d’éveil lui était rigoureusement compté et le Maître de l’Hiver se faisait un devoir d’en savourer chaque minute, de rattraper tout ce qu’il avait manqué pendant son Sommeil. Pour cela, Jack n’hésitait pas à user de ses pouvoirs afin de pénétrer dans l’esprit des gens en quête de leurs souvenirs.
Exceptionnellement lumineux pour ce début de décembre, le soleil se réverbérait sur les lunettes d’un homme d’affaires que croisa Jack. Les doux rayons de l’astre mettaient en exergue les courbes nues de cette nature endormie. Comme conscients de la période sombre à venir, les gens semblaient vouloir emmagasiner cette luminosité, cette chaleur, et la retenir encore un peu.
Profitez-en, songea le Maître de l’H

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