Troubles

Etienne Philippe

Description

Au milieu des années quatre-vingt, ma sensibilité à l’égard de mon entourage, du plus près au plus lointain, m’a amené à écrire des poèmes dans lesquels je me livrais. Ils touchent à ce qui nous est commun à tous, l’amour, les autres, la vie en société, les rencontres, les joies et les désespoirs... Ce recueil chronologique regroupe ces textes dont certains font référence à des événements précis. Depuis je privilégie la peinture qui me réserve plus de liberté. Certaines de mes peintures illustrent les textes avec lesquels elles entrent en résonance.

Informations

• Publié par: Les Éditions du Net
• Date de parution: 21 juin 2013
• Nombre de lectures: 0
• EAN13: 9782312011493
• Langue: Français

Extrait

Troubles
Etienne Philippe
Troubles

















LES ÉDITIONS DU NET 22, rue Edouard Nieuport 92150 Suresnes
A Ghislaine,


































© Les Éditions du Net, 2013 ISBN : 978-2-312-01149-3

É CRIRE
J’ai couché bien des mots
Sur des papiers blancs finalement froissés
Je ne sais
Ni par quelle passion de ma langue natale
Ni par quelle déraison guidant et détournant ma pensée
J’ai pu
Je suis arrivé à
ÉCRIRE
Comme si
– Explosion d’une plume par ma main emportée-
L’encre noire
– jaillissant en chemin sur ce trait
Étalée en désordre parfait
Dépassant sans retenue la simple idée maladroite
Que par mon esprit inhibé
J’avais du mal à maîtriser-
M’avait possédé
S ECRETS
L’ombre du soleil s’abat sur ma mémoire
La politesse veut que je n’en montre rien
Si la peur me gagne je dois avec décence
Sourire aux gens aimables et cacher mes tempêtes
Cyclones et tornades dont vous vous foutez bien
J’aime quand le vent me livre ses horreurs
Dont vous ne saurez rien

Quand le ciel se renverse alors moi je vous jure
Que les sens insensés sont les seuls qui vaillent
Mais encore me faut-il ouvrir grand les yeux
Et brûler ma rétine jusqu’à sentir enfin
Mon corps tordu de flammes et hurler de douleur
En coupant sur mes lèvres un grand sourire blanc
Histoire de faire fuir (mais non c’est pas méchant)
Tous ceux que la raison habite en permanence

Ma foi ce type est fou je m’en doutais un peu
D’ailleurs il fait très beau et le ciel est tout bleu
Bien sûr il est midi il faut être prudent
Et savoir se méfier des ardeurs du soleil
Il suffit simplement de s’abriter un peu
J OURNALISTE SPORTIF
Quel manège
Les mécaniques vont sans faille
Sur le circuit de Kyalami
Nous sommes entre amis
Que des ballots de paille
Protègent

Quel régal
Sous les bannières et les drapeaux
Dans les tribunes grillagées
Je suis adepte sans danger
Du sport à haut régime turbo
Légal

Le cri
Des gommes sur le ruban noir
Du ministre fou de rage
Du coup de crosse sur ton visage
Que l’arme blanche de l’histoire
Meurtrit
Dommage
Qu’à cette chaîne tu sois lié
Par les poings et par la voix
Mais que dirais-je du tournoi
Quelle impression sur mon papier
En première page

A persifler
Je suis autruche
Tu es diamant
Et si je ments
Je suis baudruche
Mal gonflée

A la mi-temps
Demain
Par l’encre noire
L’espoir
Demain
J’aurai le temps
K ANAKOFONI FRANÇAISE
ALAMIMAY
ONMENOMA ANOUMEHA
ANOUNOUMEHA
MONAMINEHANIA MEMIAMENA
LAKANAKIHETAKI SENKINEHA ?
KONKIZLAKANAKI NOUZETAKIZ
SANIMA HINNOUMEHIN ENKIMONOKAKI
KANTON NAKITENKANAKIKI ONHAIKANAK ?
MAMANKINAKITANOUMEHA NICKELLEKANAKE
KOIMAMINICKELEKANAK ?!?
NOUNEHAEMOA LAKANAKIHONKONAI
MAIHONEKAMI KLAMAMAMAN
KELKON LEKINKINALLANICKE !
ANOULNIKELOUY !
« VIVLAKANAKI (française) ! »
KRIAHINMANIANIKELE
« Vive la lune américaine !
Vive la connerie humaine ! »
HURLATON OMAKI

E T APRÈS
Avant que la poussière blanche de tes cils
Ne tombe sur tes yeux à l’éclat finissant
Avant que les derniers grains de sable ne filent
Entre tes doigts presque raides déjà impuissants

Au milliardième instant de l’ultime seconde
Au dernier millimètre de la cataracte
Montre-moi d’un regard ce que la mort féconde
Dis-moi de quoi est fait le suivant de cet acte

Est-ce la flamme ou bien le bois est-ce la terre
Est-ce la mer le sel le chaud ou bien le froid
Est-ce la pluie ou le volcan est-ce l’éther
Ou bien le vent peut-être qui me rongera

Je deviendrai cristal de neige sur un glacier
Coulée de lave sur la pierre incandescente
Goutte de rosée sur une épine de rosier
Je serai l’écume sur la vague naissante
A moins que je ne devienne la chair putride
D’un mollusque pourri séchant sur le sable
Ou le gaz infecte dans l’atmosphère humide
Qui monte du fumier en plein cœur d’une étable

Quand un dernier soupir sifflera dans tes dents
Quand d’une dernière onde frémira ta peau
Je guetterai sur toi ce pathétique instant
Quand un dernier frisson parcourera ton dos
N ÉCROSE EXPRESS
Astéroïde nécrophyllé
L’arme bactérionucléaire
D’une ogive surarmée
De rayons ultra-laser
A fonctionné

Avant c’était la terre
Rosée du matin
Câlin
Bombe du soir
Désespoir

Oubliée la mer
Rondeur de la sphère
Que la bise caresse
Retire ta main
Et oublie tout-ça

Molécule de gaz
Explosant toujours
Le noyau fendu
Est en perdition
Dans l’univers éteint

Tempête du vide
Sombres turbulences
Choc des électrons
Brûlures du silence
Le futur est passé

Atomisée la raison
Evaporé le cosmos
Eteint le planétarium
Tic-crac
La fin du temps
L ASSITUDE
Entre aller et venir
Tu balances tes désirs
Tu voudrais avancer
Reculer pour sauter
Construire tes pas
Partir de rien
Tendre les bras
Courir enfin

Mais tu t’agites
Tu vas trop vite
Bascules parfois
Perds ton sang-froid
T’essouffles à repartir
Prendre l’élan
Vouloir sortir
Aller de l’avant
Ça finit pas
Moi j’arrête là
Et je m’assieds
J’en ai assez
Prendre le temps
Suivre le vent
Et s’il se pose
Me pose aussi
Et me repose
Je balance mes soupirs
Entre le rêve et le dormir
Je vais et je viens
Du soir au matin
De l’herbe grasse
Au temps qui passe
Entre deux pas tu penses à moi
Entre deux rêves je rêve de toi
Mais c’est en vain

Tu cours toujours
De loin en loin
Sur les chemins
N’est plus qu’un point
Ce caillou blanc
Que j’aimais tant
L ÉGIONS ÉTRANGÈRES
Soldat russe écorché vif
Perdu en Afghanistan
Ouvrier soldat juif
Abattu au Sud Liban
Soldat noir américain
Sautant sur la Grenade
Souvenir vietnamo-cambodgien
Que la mémoire lézarde

Mais j’oublie
D’autres combats
D’autres soldats
D’autres fusils

Ouvriers soldat juif
Sautant sur la Grenade
Perdu en Afghanistan
Soldat noir américain
Abattu au Sud Liban
Soldat russe écorché vif
Souvenir vietnamo-cambodgien
Que ma mémoire lézarde
Mais j’oublie
D’autres batailles
Où se mitraillent
D’autres vies

Soldat vietnamo-cambodgien
Sautant sur la Grenade
Souvenir russe écorché vif
D’un soldat noir américain
Abattu en Afghanistan
Ouvrier soldat juif
Perdu au Sud Liban
Ta mémoire se lézarde

Mais j’oublie
Des baïonnettes
Des épaulettes
Et des Képis

Ouvrier américain
Russe vietnamo-cambodgien
Soldat écorché juif
Sautant sur la Grenade
Perdue en Afghanistan
Souvenir d’un soldat vif
Abattu au Sud Liban
Ma