Répliques
224 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Répliques , livre ebook

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
224 pages
Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Et si, au détour d’un événement somme toute ridicule, vous preniez conscience que vous n’êtes en fait que l’improbable fac-similé d’un scénario qui a marqué des générations et des générations de spectateurs ? Il s’agirait là certainement d’une mise en abyme quelque peu déconcertante ; pour ne pas dire foncièrement inquiétante, ne pensez-vous pas ? Eh bien, aussi surprenant que cela puisse paraître, c’est pourtant ce qu’un étrange phénomène venu de je ne sais où impose à Vito Battuta, un quarantenaire comme mille autres pareils qui n’aurait jamais pu envisager jusqu’alors d’être précipité dans les méandres d’un monde parallèle dont vous, lecteurs et lectrices, serez l’un des principaux personnages, et peut-être même l’unique main qui pourra être tendue à cet homme soumis aux diktats d'une invraisemblable articulation de répliques.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 23 septembre 2014
Nombre de lectures 0
EAN13 9782332768896
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0067€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composér Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-332-76887-2

© Edilivre, 2015
Répliques
 
 
– «  Tu sais ce que je viens de faire ?
– …
–  Je venais de passer cette porte, je suis tombé sur deux collègues, et je m’apprêtais à balancer sur toi un paquet de vacheries, mais je me suis abstenu parce que mon vieux m’a appris qu’un homme qui balance des vacheries dans le dos d’un autre est un lâche…
–  Waouh ! Entre nous je préfère ça !
–  Tant mieux ! Parce ce que je vais te le dire en face…
–  Non ! Rien ne t’y oblige !
–  Si ! Je ne peux pas te sentir !… Le bruit que fait ta pisse en tombant dans l’urinoir… On dirait une gonzesse ! Si on était dans la jungle, je te sauterais dessus ! Et même, si tu n’étais pas dans ma chaîne alimentaire, je serais près à faire un détour exprès pour te sauter dessus ! Et si j’étais un lion et que tu étais un thon, je nagerais jusqu’au milieu de l’océan, et je te becterais tout cru, et je baiserais le thon qui te sert de copine.
–  Ok ! Déjà, un lion traversant l’océan à la nage… Les lions n’aiment pas l’eau ! Si encore, tu parlais d’une rivière ou d’un quelconque point d’eau, ça tiendrait la route, mais tu te retrouves au milieu de l’océan avec des vagues de six mètres ! J’imagine qu’on est au large de l’Afrique du Sud ? S’attaquer à un thon de quatre cent kilos dans la force de l’âge accompagné de ces vingt ou trente copains… C’est sûr que tu perds ! C’est sûr que tu perds à 90 % ! Et devine quoi, tu t’es égaré dans notre boîte de thon, et maintenant on a gouté au steak de lion ! On a tenu un conciliabule, on a communiqué…
–  Ouais ???
–  Et tu sais ce qu’on s’est dit ? Le lion, c’est bon ! Allons chercher de la viande de lion ! On développerait un système pour établir une base sur la côte, et on te traquerait sans relâche toi et ta famille, et on t’acculerait toi et ta meute, tes enfants, ta descendance…
–  Comment vous feriez ça ?
– On va construire une série d’appareils respiratoires avec des algues brunes. On sera capable de piéger une certaine quantité d’oxygène. On ne tiendra pas des journées entières, mais une heure, une heure quarante-cinq même… Pas de problème ! Ça nous laissera le temps de trouver où tu habites, de retourner à la mer, faire le plein d’oxygène et de revenir te chasser ! En gros, tu viens de perdre à ton propre jeu ! Tu es désarmé et dépouillé !
– …
–  Tu t’y attendais à ce scénario ?… Non ?  » 1
Non, c’est certain, je ne m’attendais certainement pas à ce scénario. En même temps quand je suis rentré dans son bureau, je n’imaginais, ni n’envisageais même, pas la moindre chose ! Seul comptait alors pour moi de pouvoir lui cracher à la figure toute cette bile qui embrase mon œsophage depuis que j’ai appris ce qu’a fait ce pauvre mec. Que voulez-vous que je vous dise, ma vie et ainsi faite ! Depuis trois mois, chaque jour qui passe ressemble à un incroyable scénario que de talentueux auteurs auraient insidieusement écrit pour que chacun d’eux s’imposent sans crier gare dans le quotidien d’un gars qui n’a pas même envisagé ne serait-ce qu’une seconde de devenir un jour celui à qui l’on destine de fantastiques répliques, qu’un projecteur viendra ensuite dérouler dans une salle obscure devant des milliers de spectateurs.
D’aucuns pourraient penser qu’après tant et tant de jours, je sois, pour ainsi dire, vacciné. En effet, comme je vous l’ai dit, et aussi surprenant que cela puisse paraître, ce qui s’est passé il n’y a que quelques instants ne devrait a priori pas me surprendre plus que cela. Il n’y a plus un jour depuis trois mois qui ne m’ait pas confronté à cette surprenante réalité d’un quotidien qui me plonge bien malgré moi dans les méandres de mots et d’émotions sortis tout droit de l’imagination d’une multitude de scénaristes et dialoguistes qui ont marqué de leur empreinte, ce que l’on nomme avec révérence, le septième art.
Il est évident que pour celui ou celle qui n’a pas eu le plaisir de visionner le film, “Very Bad Cops”, tout ce que je viens de vous raconter est pour ainsi dire incompréhensible. Pourtant, si vous preniez le temps de vous intéresser un peu à ce film, vous comprendriez aussitôt ce que je vis au quotidien. Cette scène à laquelle vous avez assisté, n’a rien d’originale, du moins au sens où le commun des mortels l’entendrait.
Dans l’absolu, chacun d’entre nous nait original et notre vie devrait l’être tout autant ! Pourtant en ce qui me concerne, c’est loin, mais alors très loin d’être le cas. En fait pour tout vous dire, il m’a fallu quelques longues semaines pour comprendre tout cela, ou du moins pour pouvoir appréhender ce singulier phénomène qui fait que chaque jour faisant je me retrouve embarqué par des scènes cultes du cinéma mondial qui dictent le moindre de mes mots, le moindre de mes actes. Ce que je vis au quotidien, c’est ce que des centaines, que dis-je des milliers, et même des millions de pellicules de celluloïd déversent chaque jour sur des grands et petits écrans pour nous offrir dit-on, l’illusion d’un monde réel.
Si dans toutes ces salles obscures, il n’est question que de divertissement, d’imaginaire et de fiction, en ce qui me concerne tout ceci se meut régulièrement en de surprenants instants de vie qui s’imposent à moi dans mon quotidien sans même que j’en prenne conscience, du moins jusqu’au jour où je découvre au hasard d’un film visionné, ce même instant que je pensais jusqu’alors être le mien.
Pour être honnête avec vous, dans un premier temps, j’ai même pensé qu’il s’agissait là, d’une incroyable coïncidence, ou mieux encore d’un manque certain d’originalité créative d’un scénariste. Je m’en suis à tel point convaincu, que j’ai même eu la faiblesse de penser qu’il y avait en moi ce je ne sais quoi de génial qui fait qu’un gars puisse avoir la prétention d’envoyer une cinquantaine de pauvres pages griffonnées à une maison de prod en étant persuadé qu’il s’agit là du scénario du prochain blockbuster.
Plus tard, avec un tant soit peu plus de recul, une dose certaine d’humilité, et quelques souvenirs de cours de philosophie et de psychologie du troisième cycle, j’ai alors envisagé que j’étais peut-être en train de perdre pied. J’ai envisagé que la force évocatrice de ces films que j’avais vu depuis mon plus jeune âge était venue court-circuiter mon inconscient jusqu’à faire que je ne puisse plus dissocier le réel de la fiction, et que mon moi le plus profond ne soit plus qu’une pâle et fade copie de tous ces personnages que j’avais eu le loisir de découvrir sur le grand écran. Mes mots étaient leurs mots, mes actes, leurs actes, aussi banals puissent-ils être.
Mégalomanie, schizophrénie, mythomanie, ou tout simplement carence évidente de personnalité, il y aurait là bien des choses à dire sur tous ces amoureux du canapé qui pourraient tirer sur moi alors des conclusions bien trop hâtives.
Non, je vous l’assure, croyez-moi, je n’ai rien d’un quelconque Nicholson qui aurait décidé de voler au dessus d’un nid de coucous. Ce que je vis chaque jour est réel, et aussi surprenant que cela puisse paraître, je n’emprunte ne serait-ce pas même un mot à un quelconque souvenir que le cinéma aurait insidieusement gravé dans mon esprit.
Quand j’ai franchi aujourd’hui la porte du bureau de mon collègue je n’avais pas même idée de ce que j’allais pouvoir lui dire pour lui faire part de ma colère. Les choses se sont naturellement enchainées, les mots se sont bousculés les uns contre les autres, pour faire que toutes ces phrases s’agglomèrent entre elles et s’imposent comme une simple discussion entre deux hommes.
N’avez-vous pas vous-même assisté à cette scène ? Tout est réel non ? Je n’ai rien inventé ? Vous m’avez entendu lui parler, et vous avez entendu ce qu’il m’a répondu ? Je veux bien croire qu’en ce qui me concerne je fus à tel point bercé trop près du mur que mon esprit défaille aujourd’hui, mais comment expliquez vous alors que mon collègue lui-même ait rejoué au mot près cette réplique culte du cinéma américain ?
Si je défaille, vous défaillez tout autant que moi, car sauf erreur de ma part, je pense que vous avez vécu en direct ce que j’ai moi-même vécu aujourd’hui en entrant dans ce bureau !
Pascal Bonitzer 2 a écrit : «  Le cinéma semble devoir toujours osciller entre deux tendances : la capture plus ou moins brute du réel (le document) et la construction d’un espace imaginaire (le rêve).  » 3
Dans l’absolu qui pourrait vouloir redire quelque chose à cela ? On pourrait même penser qu’il s’agit là d’un lieu commun ! Pourtant à bien y réfléchir et en s’attachant à vous expliquer ce qu’il m’arrive, je pourrais très bien m’en attribuer la paternité moyennant quelques petits arrangements.
En effet, sachant qu’il est d’usage de me voir déblatérer des mots qui a priori ne sont pas les miens, je pourrais cette fois-ci y mettre quoi qu’il en soit mon petit grain de sel en désarticulant quelque peu cet argumentaire et en faire : « Ma vie semble devoir toujours osciller entre deux tendances : La capture plus ou moins brute d’un espace imaginaire (Le cinéma), et une construction singulière d’un réel qui n’a plus rien d’original (Mon quotidien) ».
Si cela ne suffisait pas déjà à faire de moi un être à part, il faut savoir aussi que jamais, non jamais au grand jamais, ces captures d’espaces imaginaires qui s’imposent dans mon quotidien pèchent d’une quelconque médiocrité. Il s’agit toujours, et ça je peux vous l’assurer, de scènes cultes, d’incontestables dogmes cinématographiques qui brillent et brilleront à jamais au firmament de cet art qui se revendique être le septième.
Comme je vous l’ai dit, j’ai moi-même beaucoup de mal à pouvoir les identifier. J’ai bien souvent la faibles

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents