Requiem pour Andali
168 pages
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Requiem pour Andali , livre ebook

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Description

Raissa et Masing sont les enfants de Victor Kasongo. Lui seul s’est opposé à l’ambitieux Muika qui ne rêve que de pouvoir et de grandeur, au détriment des habitants du petit village de Dusé.
Victor a élevé sa fille Raissa dans l’amour de la terre et, ensemble, ils partagent de longues heures de complicité dans la forêt, les pieds nus dans cette terre si fraîche et bienfaisante.
Malheureusement, lorsque le corps de Muika est retrouvé sans vie, tous ceux de Dusé se retournent contre Victor et le pauvre homme ainsi que sa femme sont lâchement tués. Raissa et Masing sont alors contraints de se réfugier dans la forêt où ils tentent tant bien que mal de survivre.
Les années passent ainsi, tandis que le sentiment de vengeance ne fait que croître dans le cœur de Raissa, vengeance à l’encontre du vieil Andali notamment, l’instigateur du meurtre de ses parents.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 09 janvier 2019
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414304059
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0052€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-30406-6

© Edilivre, 2019
Remerciements


• Merci à mon neveu, Wilson Tayeye Mpia, pour son magnifique dessin ;
• À Irène Lusikila Nkenge, mon amie, la meilleure qui soit ;
• À Raoul Migabo et Patty Bay Kabambi, mes amis, ceux « de tous les temps et de tous les moments ».
I
I ls se mesuraient du regard depuis quelques minutes déjà, d’une haine ancienne qu’ils se vouaient l’un à l’autre, bien enfouie dans leurs entrailles. L’homme, un vieillard de plus de soixante-dix ans, le visage ravagé par des rides profondes, respirait une animosité viscérale qui n’avait d’égale que celle de la jeune femme à quelques pas de lui, jeune femme à l’encontre de laquelle il éprouvait un ressentiment immense et profond. Il était comme englouti dans de vieux vêtements qui soulignaient sa maigreur et renforçaient davantage sa silhouette affaiblie par le poids de l’âge, mais aussi par la soif de vengeance qui était la sienne – et certainement aussi par les vieux démons qui l’habitaient. Cette femme, il la détestait plus que tout au monde ; il l’aurait tuée de ses propres mains, s’il l’avait pu. Il se demandait même parfois pourquoi il n’y était pas parvenu jusque-là, lui, l’homme le plus redouté de Dusé ; n’avait-il pas été jusqu’à consulter, en secret, les féticheurs et autres sorciers du village pour lui jeter un mauvais sort et mettre fin à ses jours exécrés ? Mais rien ni personne ne parvenait à l’éliminer, à son grand dam ! Il devait bien admettre que cette femme était une sorcière aux pouvoirs immenses, qu’elle avait dû obtenir directement des enfers. Le vieil homme en était convaincu : elle représentait le mal, elle incarnait le diable, elle symbolisait l’inachèvement brutal d’un projet. Elle n’était qu’un défi à la vie, du moins jusque-là. Cette jeune femme, maudite, honnie et vomie de tous, n’aurait pas dû vivre si longtemps ni se permettre de le toiser insolemment de la sorte. Elle aurait dû mourir avec les siens. La revoir de si près, après toutes ces années, la savoir vaquant paisiblement à ses occupations, à quelques mètres seulement du village, le rendait encore plus malade qu’il ne l’était. La revoir lui rappelait le deuil de son ami et frère, qu’il ne s’était jamais résolu à oublier, la perte incommensurable d’une vie fauchée prématurément. Un visage vaporeux défila en sa mémoire, en même temps qu’il ressentit une pointe lancinante en son cœur dolent. Le vieil homme cligna alors des yeux de douleur, mais se ressaisit aussitôt. Il ne lui était pas permis d’extérioriser le moindre signe de faiblesse en face de cette femme. Aussi Andali releva-t-il hardiment sa tête, un air de bravade dans le regard.
Ce regard menaçant et mauvais qu’elle soutenait sans ciller, Raissa le connaissait de mémoire, mais elle y décela, en plus, comme un air de triomphe. Que machinait encore ce vieux dément ? La jeune femme sentit ses yeux picoter, mais s’abandonner, en cet instant, eût été fatal ; que penserait-il ? Qu’elle s’effrayait par sa seule présence, alors qu’au fond d’elle grondait une rancœur inassouvie et qu’une sourde fureur étincelait dans ses yeux ? Que s’imaginerait-il ? Qu’elle capitulait, alors que les larmes qui couleraient ne seraient que le signe d’un trop-plein de rage et d’exaspération ? Elle méprisait ce vieillard… tout comme tous ceux du village, du reste.
Le monde autour d’eux s’était comme pétrifié par enchantement, retenant son souffle, attendant avec angoisse l’issue de ce duel sans nom. Pour preuve, le paysage qui les environnait baignait dans un brouillard épais à trancher au couteau, les oiseaux continrent leurs chants, les criquets et autres nombreux insectes cessèrent leurs babillages et les gros arbres se retinrent de balancer leurs frêles feuillages…
Le jeune homme qui accompagnait Andali eût préféré rebrousser chemin et prendre ses jambes au cou, sans demander son reste, car cette jeune femme était la sorcière la plus puissante du village. Ne s’était-il pas raconté, les années qui suivirent la « sombre affaire », qu’elle attaquait ceux qui se hasardaient à l’affronter ? Depuis, personne n’osait plus s’aventurer près de sa maison. Personne… sauf le vieil Andali.
– Andali ! aboya-t-elle, d’une voix vibrant d’une indignation à peine contenue. Comment oses-tu souiller, de ta présence, la terre de mon père ?
Le vieil homme, interdit par les propos outrecuidants, eut un rire courroucé, pas meilleur que le regard perçant et dur qu’il lui lançait.
– J’attendais ce moment depuis bien longtemps, tu t’en doutes, répliqua-t-il d’un ton narquois et arrogant. Vois-tu ce bout de papier ? Peux-tu seulement imaginer ce que c’est ? Eh bien, laisse-moi t’informer qu’il signe ton arrêt de mort. C’est une lettre d’Alena… Ah ! tu frémis, hein ? Eh bien, tu as raison de trembler. Sais-tu ce qu’elle m’y écrit ? Elle va arriver à Dusé d’ici quelques jours, elle se trouve déjà en ville, à l’heure qu’il est. Tu dois savoir le pourquoi de son retour : elle revient pour achever ce que nous aurions dû finir… Ton heure a enfin sonné, Raissa. Toi et ton idiot de frère allez bientôt payer pour votre crime. Alena a vécu à l’étranger, elle a étudié des sciences que toi, tu ignores. Sache qu’elle a des pouvoirs immenses, capables de t’anéantir. Comprends-tu ce que je suis en train de te dire ? Vous allez bientôt mourir !
– Eh bien, je vais lui briser les os et toi avec, vieux fou ! objecta la jeune femme en soutenant, sans broncher, le regard hostile de son interlocuteur.
Ce dernier retint un cri qui s’étrangla dans sa gorge. Il recula d’un pas, ses yeux rouges de colère lançant des éclairs.
– Parle toujours, oiseau de malheur ! Tu peux t’attendre au pire, car je vais aider Alena dans sa mission, ah ! tu peux en être certaine ! Je te conseille de savourer pleinement chaque instant de ce qui te reste de ta misérable vie, il ne te reste plus beaucoup de temps sur cette terre. Et ce que je dis vaut aussi pour ton bâtard de frère !
Raissa cracha au sol avec véhémence.
– Va-t’en ou je ne répondrai plus de moi ! Je préfère attendre ta protégée, pour en terminer avec vous deux une bonne fois pour toutes !
Le vieil homme serra ses poings, exacerbé, il froissait inconsciemment le bout de papier entre ses doigts qui tremblaient de courroux. Il fixa la jeune femme, sans se départir de son antipathie, haussa les épaules et, après un bref instant d’hésitation, s’en fut, le jeune homme à ses talons.
Dès qu’ils furent hors de sa vue, Raissa se relâcha, son visage se défit de son masque impassible, ses épaules retombèrent avec lassitude. Puis elle rentra à l’intérieur de ce qui était sa maison, une maison faite de glaise et de bois. La jeune femme considéra le décor autour d’elle : les quelques meubles antiques qui résistaient tant bien que mal à la vétusté, les murs dénudés, il n’y avait pas grand-chose. Depuis combien de temps vivaient-ils dans cette maison, elle et son frère, à l’écart de toute vie humaine normale ? Tout lui parut soudain lugubre ; elle était bien loin, la maison chaleureuse et pleine de vie et de bonheur, la maison familiale. Un jour, ils avaient perdu leur bonheur et tout avait basculé dans l’horreur…
–  Nous ne quitterons pas notre maison, Muika, répondit de manière énergique un homme, dussé-je perdre ma vie pour cela.
–  Tu es un abruti, Victor, répliqua son vis-à-vis d’une voix impertinente. L’hôpital que je construis aidera la population de Dusé… y compris ta famille…
En prononçant ces derniers mots, l’homme désigna du menton la jeune fille qui se trouvait à côté de celui qui le bravait. Cette dernière, d’instinct, recula et prit la main de son père.
–  Je ne mettrai jamais les pieds dans votre hôpital, réfuta-t-elle d’un ton déterminé.
–  Alors tu es aussi stupide que ton père, trancha l’autre.
–  De quel droit te permets-tu de nous insulter, ma famille et moi ? riposta Victor. Qui es-tu pour décider, du jour au lendemain, de nous déloger de chez nous ? J’ai accepté de te céder une partie de ma terre pour ton hôpital, et ce, sans réclamer un seul sou de ta part, mais cela ne suffit-il pas ? Il te faut aussi ma maison, maintenant, une maison que mon père a bâtie de ses mains et que tu détruiras sans aucun scrupule… Non, Muika, tu n’auras plus un seul centimètre carré de ma terre. Il ne sert à rien de m’intimider par tous les moyens. Pars et ne reviens plus jamais !
Muika éclata de rire. Cet inconscient illuminé n’avait-il donc pas compris qu’il n’était qu’un faible qui serait bientôt écrasé ? Il secoua la tête, amusé par l’acharnement de ce paysan qui se faisait passer pour un défenseur de la cause de ses pairs, à ses moments perdus… De tout le village, seul ce campagnard osait le défier. N’avait-il pas compris le fonctionnement du monde ? Seuls les puissants triomphaient. Et lui, Muika viendrait à bout de cet homme insignifiant.
–  Tout le village est de mon côté, tu le sais. dit Muika d’un ton qu’il se voulut serein. Ton prétendu combat est perdu d’avance. Que tu le veuilles ou non, ta terre sera mienne. Ce n’est qu’une question de jours. As-tu oublié qui je suis ?
Après avoir jeté un regard circulaire, comme pour s’imprégner d’un territoire déjà conquis, l’homme repartit de sa démarche sûre et altière, un jeune homme se tenant derrière lui, un parapluie à la main qu’il tenait bien haut pour le protéger des rayons dardant du soleil ; et à ses côtés, deux policiers l’encadraient. Mais de qui donc « l’élu du peuple » se protégeait-il ainsi ?
Muika était, sans conteste, l’homme le plus riche du village et de la contrée. Commerçant à l’origine, il avait fini par se convertir en politicien, ayant été élu député provincial depuis peu. S

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