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Description
Informations
Publié par | Québec Amérique |
Date de parution | 17 septembre 2018 |
Nombre de lectures | 9 |
EAN13 | 9782764436561 |
Langue | Français |
Poids de l'ouvrage | 1 Mo |
Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.
Extrait
Du même auteur
L’Inextinguible , entretiens avec Paula Singer , Hamac, 2018.
Journal d’un étudiant en histoire de l’art , Marchand de feuilles, 2015.
Scellé plombé , Marchand de feuilles, 2013.
Rita tout court , Marchand de feuilles, 2013.
La Gestion des produits , Marchand de feuilles, 2011.
Les Trois Modes de conservation des viandes , Marchand de feuilles, 2006.
Pour une éthique urbaine , L’Effet pourpre, 2002.
Lettres à mademoiselle Brochu , L’Effet pourpre, 1999 ; Marchand de feuilles, 2007.
Marie-Hélène au mois de mars , Triptyque, 1998 ; Marchand de feuilles, 2016.
Risible et noir , Triptyque, 1997 ; Bibliothèque québécoise, 2015.
Potence machine , Triptyque, 1996.
Projet dirigé par Danielle Laurin, directrice littéraire
Conception graphique : Nathalie Caron
Mise en pages : Andréa Joseph [pagexpress@videotron.ca]
Révision linguistique : Isabelle Pauzé
En couverture : Photographie, gracieuseté de Maxime Olivier Moutier
Conversion en ePub : Marylène Plante-Germain
Québec Amérique
7240, rue Saint-Hubert
Montréal (Québec) Canada H2R 2N1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L’an dernier, le Conseil a investi 157 millions de dollars pour mettre de l’art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Moutier, Maxime Olivier, auteur
Roman familial / Maxime Olivier Moutier.
(Trois)
ISBN 978-2-7644-3654-7 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-3655-4 (PDF)
ISBN 978-2-7644-3656-1 (ePub)
1. Moutier, Maxime Olivier. 2. Écrivains québécois - 20 e siècle - Biographies. I. Titre.
PS8576.O983Z46 2018 C843’.54 C2018-941804-4 PS9576.O983Z46 2018
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2018
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2018
Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
© Éditions Québec Amérique inc., 2018.
quebec-amerique.com
À Mélody
1. Debbie
On en parle moins aujourd’hui, mais à cette époque, l’Assemblée générale des Nations Unies avait pris l’habitude de proclamer des années internationales. Elles étaient dédiées à des thèmes particuliers. Ainsi, 1979 avait été l’année de l’enfant. Car il fallait tous se rappeler à quel point les enfants, en tant que génération de l’avenir, étaient très importants. 1980 avait sans doute été l’année des adultes, on ne sait plus trop. Mais 1981 avait été consacrée aux handicapés. Les gens qui se déplaçaient en chaises roulantes, les manchots, ceux qui avaient perdu la tête dans un accident de même que tous les autres qui parvenaient malgré tout à peindre des paysages avec leurs pieds. En coinçant des pinceaux entre leurs orteils.
Cette année-là, dans une petite école primaire située sur l’île de Laval, j’étais en train de poursuivre gentiment ma scolarité. J’avais réussi à me rendre jusqu’à la cinquième année, dans la classe de Madame Solange, réputée pour être exigeante et très peu souriante. J’avais donc dix ans. Je faisais tout ce qu’on me disait, et même des bricolages avec de la colle à base de farine et d’eau. J’étais sage, et je ne posais aucun problème lorsqu’il s’agissait de faire semblant de comprendre ce que je ne comprenais pas. Je sortais mes cahiers quand on me demandait de les sortir et me retenais jusqu’aux pauses pour aller faire pipi. Tout allait pour le mieux.
Dans notre classe, il y avait cinq garçons qui s’appelaient Patrick. On comptait également quatre Isabelle, deux Stéphane et trois Dominique. Presque tout le monde avait le même prénom, en fait. Mais ce n’était pas si grave puisqu’on les reconnaissait quand même. Un des Patrick recevait des cadeaux de sa maman chaque fois qu’il allait chez le dentiste. Il était enfant unique, alors sa mère avait l’air de le gâter plus que la normale. S’il avait une seule carie, il méritait un Lego. S’il devait se faire enlever les amygdales, il revenait de l’hôpital avec toute la collection des bonhommes de La Guerre des étoiles . On le trouvait évidemment très chanceux, même s’il n’avait pas de frères ni de sœurs avec qui se disputer en rentrant chez lui. Il était seul dans sa maison avec ses deux parents, mais il avait beaucoup de jouets dans sa chambre. Avec lesquels il ne jouait jamais. Il avait même des jouets qui lui sortaient par les oreilles. Cela ne changeait pas grand-chose en bout de ligne, puisque des amis riaient quand même de lui parce qu’il était toujours habillé de la même façon.
Sur ce point, Patrick ressemblait à Natacha Portance, une Française qui était arrivée de nulle part au beau milieu de l’année, et qui portait de drôles de vêtements saugrenus, que ses parents avaient dû trouver dans des friperies pour les enfants pauvres. Elle faisait pitié à la récréation, et tout le monde se moquait d’elle. D’abord parce qu’elle parlait avec un accent français, mais aussi parce qu’elle pouvait arriver le matin avec des pantalons jaunes et une blouse trop grande pour elle de couleur mauve. Elle avait souvent l’air triste et n’avait pas beaucoup d’amis. En plus, elle était grande. Trop grande pour son âge. Elle regardait toujours vers le sol et se tenait le dos rond.
Dans cette petite école de quartier de quelque 300 élèves, il n’y avait qu’un seul Maxime Olivier. Tous les enfants habitaient dans le secteur, ce qui fait que tous les enfants rentraient chez eux sur l’heure du dîner pour dîner. Certains avaient une clé autour du cou. C’était déjà la mode à cette époque. Un repas les attendait, et ils pouvaient regarder la télévision pendant qu’ils mangeaient. Ils étaient seuls à la maison, ce qui leur permettait d’apprendre à être plus autonomes. Ensuite, ils revenaient jouer dans la cour de l’école jusqu’à ce que la cloche sonne. C’était l’école Jean XXIII . Une école primaire normale d’un quartier normal. Où les professeurs étaient toutes des femmes, qui étaient en poste depuis des siècles. Seul le directeur avait changé et ce, un an seulement avant que je fasse mon entrée à la maternelle. À ce qu’on disait, ce directeur sortant frappait les enfants avec sa ceinture lorsque ceux-ci n’écoutaient pas les consignes. J’étais donc arrivé juste à temps. Le concierge était le même depuis toujours. Monsieur Désilet. Un homme chauve et déjà vieux, qui avait participé personnellement à la construction du bâtiment. Il était là tous les jours. Et gardait sur lui toutes les clés de toutes les portes de toutes les classes, ainsi que celles du gymnase et des endroits où étaient entreposés les produits nettoyants. Il débloquait les toilettes, réparait tout ce qu’il y avait à réparer et tondait même la pelouse du devant. Il savait tout faire et ne prenait jamais de jours de congé. Il n’avait jamais besoin d’aide et connaissait tous les enfants par leur prénom. C’était une petite école. L’administration était composée d’un directeur, d’une secrétaire, qui servait également d’infirmière au besoin, et d’un concierge. Et c’était tout. Il n’y avait pas d’orthopédagogue, de psychologue, ni de psychoéducateur. Car à cette époque, aucun enfant n’était encore devenu fou. Il y avait bien sûr Marie-France Rivest, une fille de ma classe, qui avait des allergies et qui faisait de l’eczéma sur les mains et les bras, mais elle était la seule à avoir des problèmes particuliers. Elle transportait avec elle ses pommades en tube, et elle se débrouillait parfaitement très bien toute seule avec sa maladie. Il y avait également Luc Beaupré, qui devait sortir de la classe au moment où la professeure nous enseignait la religion, parce que ses parents n’étaient pas d’accord avec cette matière, mais c’est tout. Il attendait dans le corridor pendant ce temps, à se tourner les pouces, puis revenait nous rejoindre trois quarts d’heure plus tard. Il se sentait un peu exclu. D’autant qu’il était gros et qu’il commençait déjà à sentir la sueur. Il avait grandi plus vite que tous les autres, mais ce n’était pas de sa faute. Il attendait dans le corridor et il manquait tous ces moments où nous chantions en chœur les chansons de Johnny Littleto