De la confiture aux cochons
80 pages
Français

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De la confiture aux cochons , livre ebook

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Description

Madeleine se retrouve au milieu d’une route déserte, passé les lignes américaines, les mains tachées de sang. Elle ne se souvient de rien. Élyse rentre travailler à la taverne et s’inquiète de n’avoir aucune nouvelle de son amie Simone, partie quatre jours auparavant à New York avec le besoin de faire le deuil de sa mère. Les deux disparues découvriront bientôt à quel point leurs destins sont liés.
Ce que j’ai abandonné derrière moi cette nuit-là laisserait une partie de mon corps navré, à tout jamais. À ce moment, j’ignorais que la pos- sibilité de vivre avec un restant d’angoisse toujours prêt à m’agresser pouvait exister. Mais ce quelque chose de piquant à l’intérieur de la poitrine et cette ombre ramassée dans la mémoire allaient demeurer là. Ç’aura pris du temps avant de commencer, ne serait-ce qu’un tout petit peu, à me souvenir. Quand rien ne se confond avec rien. Quand démêler le chaos devient l’ultime projet de chaque jour qui s’amorce.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 22 mars 2017
Nombre de lectures 1
EAN13 9782764433881
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

De la même auteure
Voix migrantes, naître ailleurs, vivre ici , recueil de portraits d’immigrants, Québec Amérique, 2014.
Coïts , roman, collectif L’Orphéon , VLB Éditeur, 2013.
Aime-moi , récit, VLB Éditeur, Montréal, 2011.
BOUCHARD, Denis, Bang ! , préface et anecdotes de Véronique MARCOTTE, Éditions Michel Brûlé, 2008.
Tout m’accuse , roman, coll. Littérature d’Amérique, Québec Amérique, 2008.
Les revolvers sont des choses qui arrivent , roman, XYZ éditeur, 2005.
Dortoir des esseulés , roman, Éditions des Glanures, 1999.





Projet dirigé par Stéphane Dompierre, éditeur
Conception graphique : Nathalie Caron
Mise en pages : Andréa Joseph [pagexpress@videotron.ca]
Révision linguistique : Chantal Landry
En couverture : © Ruben Ireland, Both Only Skin
Conversion en ePub : Nicolas Ménard
Québec Amérique 7240, rue Saint-Hubert
Montréal (Québec) H2R 2N1
Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010
Nous reconnaissons l'aide financière du gouvernement du Canada par l'entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d'édition.
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de son soutien. L'an dernier, le Conseil a investi 157 millions de dollars pour mettre de l'art dans la vie des Canadiennes et des Canadiens de tout le pays.
Nous tenons également à remercier la SODEC pour son appui financier. Gouvernement du Québec – Programme de crédit d'impôt pour l'édition de livres – Gestion SODEC.



Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Marcotte, Véronique De la confiture aux cochons (Lattitudes)
ISBN 978-2-7644-3386-7 (Version imprimée)
ISBN 978-2-7644-3387-4 (PDF)
ISBN 978-2-7644-3388-1 (ePub)
I. Titre. II. Collection : Latitudes (Éditions Québec Amérique).
PS8576.A641D4 2017 C843’.54 C2017-940343-5 PS9576.A641D4 2017
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, 2017
Dépôt légal, Bibliothèque et Archives du Canada, 2017
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés
© Éditions Québec Amérique inc., 2017.
quebec-amerique.com



À ma mère. À Robert Clermont.


Le néant et la mort sont radicalement différents. Le néant se meut, génère de l’inquiétude, exaspère. Il n’y a pas de paix dans le néant.
Le néant se peuple rapidement de choses, de gens, d’intentions, d’illusions, de peur. Alors ce n’est plus le néant.
Et le combat recommence : il faut éliminer, dépeupler, faire en sorte que tout disparaisse excepté le trou dans l’âme.
Carlos Liscano, L’écrivain et l’autre


Première partie


Ce que j’ai abandonné derrière moi cette nuit-là laisserait une partie de mon corps navré, à tout jamais. À ce moment, j’ignorais que la possibilité de vivre avec un restant d’angoisse toujours prêt à m’agresser pouvait exister. Mais ce quelque chose de piquant à l’intérieur de la poitrine et cette ombre ramassée dans la mémoire allaient demeurer là. Ç’aura pris du temps avant de commencer, ne serait- ce qu’un tout petit peu, à me souvenir. Quand rien ne se confond avec rien. Quand démêler le chaos devient l’ultime projet de chaque jour qui s’amorce.
Je me suis retrouvée sur la route à scruter nerveusement l’espace entre les sommets montagneux, mes mains pleines de sang, mon linge souillé, tenant entre mes bras l’unique sac que je possédais. Le silence était si opaque que je pouvais entendre mes os craquer sous la douleur, chaque pas me faisait si mal qu’on aurait dit que quelqu’un m’avait frappée, partout sur le corps.
Plus tard, j’allais effectivement découvrir qu’il me serait impossible de compter le nombre d’ecchymoses imprimées sur ma peau tellement il y en avait. Pourtant, aucune de ces meurtrissures n’était ouverte. Et donc le sang que j’avais sur moi n’était pas le mien.
J’ai d’abord commencé par nettoyer mes mains sur l’herbe mouillée. Il avait plu, mais je ne me souvenais plus à quel moment avait débuté la pluie ni quand elle s’était arrêtée de tomber. Je m’entendais respirer par petites bouffées, mon souffle était si court que je me demandais s’il se rendait à mes poumons, et c’est à cela que je pensais quand je me suis cachée derrière un arbre pour enlever mon chandail sali. Respire , que je me répétais, respire . J’ai enfoui le chandail dans mon sac, j’en ai revêtu un propre, et je me suis installée au bord de la route, le pouce bien en l’air, en me disant que la première étape était de continuer mon itinéraire. Ça me rassurait. Je n’avais pas tout oublié. Je ne savais pas encore pourquoi, mais deux informations cruciales clignotaient dans mon cerveau pendant que j’étais immobile à attendre une première voiture : je m’appelais Madeleine et j’allais à Key West. Je désirais rouler vers la borne qui balisait le point le plus méridional du continent américain. Cette image ne sortait pas de ma tête. Une borne rouge et jaune avec l’inscription « 90 miles to Cuba ».
Ça pouvait sembler effrayant de parcourir 3000 kilomètres en auto-stop, mais je voyais dans ce voyage quelque chose comme de la lumière, sorte de lueur encourageante, même si au début de mon périple cette clarté s’était engouffrée dans les montagnes qui bordaient la route. J’avais un but. Et même si j’avais voulu revenir en arrière cela m’était impossible. J’ignorais d’où je venais.
C’est un homme costaud d’une cinquantaine d’années au visage austère qui s’est arrêté en premier et qui m’a accueillie dans sa Ford usée. J’ai dormi durant tout le trajet qu’il me permettait de faire avec lui, et jamais Albert n’a tenté de déranger mon sommeil. Je ne sais pas combien de temps j’ai roulé comme ça, endormie aux côtés d’un étranger qui conduisait vers la Virginie. Je ne me sentais pas en danger, enveloppée par la chance du voyageur, même si je gardais au creux du ventre une certaine peur, on aurait dit une situation vécue, intégrée, qui vivait en moi, tremblante.
Alors j’avais pu dormir. De toute manière, j’étais si épuisée que faire la conversation était une gageure impossible. Lorsque Albert m’avait réveillée, le jour était levé, la lumière m’aveuglait, il s’était inquiété pour mon allure, vous vous êtes vue dans le miroir ? L’image que me retournait violemment la glace du pare-soleil m’avait sur le coup gravement troublée, mais cette image ne ravivait malheureusement aucun souvenir. Je savais alors qu’amenuiser la situation au maximum de mes capacités était la meilleure méthode pour me protéger et pour me permettre de me regarder sans disjoncter. La pommette de ma joue droite était rougeâtre, presque mauve, enflée. Le coin de mes yeux s’était gorgé de sang, une partie du sang de mon visage maintenant livide s’était logé dans mon regard.
J’ai mis les lunettes fumées enfouies sous le linge dans mon sac, j’ai remercié Albert et je suis sortie de la voiture. Il a baissé la fenêtre pour me demander avez-vous de l’argent Madeleine ?
En glissant la main dans la poche de mon jeans, j’ai touché une petite pile de billets, et j’ai répondu oui c’est bon en lui envoyant un geste d’au revoir.
Albert m’avait laissée dans le stationnement d’un restaurant de bord d’autoroute. J’avais faim. Je suis entrée sans enlever mes lunettes et j’ai commandé un hamburger que j’ai mangé en regardant par la fenêtre. C’est lorsque deux jeunes punks sont passés devant moi, leur sac à dos à l’épaule et un chien en laisse, que j’ai cru me souvenir de certains détails. Cette image ne m’apparaissait pas comme une évocation concrète, mais provoquait d’autres diagrammes qui, vraisemblablement, deviendraient des souvenirs.
Dans le stationnement, alors que je marchais pour retrouver la route, un couple de personnes âgées discutait du trajet à suivre pour se rendre à Jacksonville. Je me suis arrêtée et j’ai poliment demandé si je pouvais faire un bout de chemin avec eux. Je vais à Key West rejoindre ma mère et je voyage en auto-stop , que j’avais inventé, lor

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