Des nouvelles de Pickton Vale
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Des nouvelles de Pickton Vale , livre ebook

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Description

Une jeune femme modeste, privée d'émotions, se met soudain à découvrir les rêves qui l'habitent... Un homme maladivement anxieux explore la liberté dans les souterrains d'un ghetto noir... Une icône du cinéma développe un plan machiavélique pour assurer sa popularité posthume...
Des nouvelles de Pickton Vale regroupe sept histoires vives et graves, écrites dans un souffle, comme s'il fallait profiter de la vie dès maintenant, au maximum. De l'une à l'autre, on réalise que la plupart des protagonistes se connaissent. Qu'ils s'évitent. Que tous se fuient eux-mêmes, mais que le village de Pickton Vale les rattrape et leur rappelle ce qu'ils sont. Inexorablement.
Trait d'union des sept nouvelles qui constituent ce recueil, Pickton Vale est le théâtre d'une transformation chez autant de personnages. Qu'on le quitte, qu'on y arrive ou qu'on en revienne, ce bled perdu est le témoin bien involontaire d'un moment charnière dans la vie de ces hommes et de ces femmes en quête de perfection. Habités par une peur irraisonnée de l'échec, ceux-ci se veulent à la fois inattaquables, irréprochables et admirables. S'ensuit une lutte contre eux-mêmes, contre les autres, contre les tempêtes de neige qui ne cessent de s'abattre et contre le petit village de Pickton Vale, cette image de l'enfance, qui les hante, qu'ils repoussent et qui les attire tout à la fois.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 février 2013
Nombre de lectures 2
EAN13 9782764420546
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0550€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Littérature d’Amérique
 
 
Collection dirigée par
Normand de Bellefeuille et
Isabelle Longpré

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
 
Trottier, Benoît Des nouvelles de Pickton Vale (Littérature d’Amérique)
9782764420546
I. Titre. II. Collection: Collection Littérature d’Amérique. PS8639.R667D47 2008 C843’.6 C2008-941084-X PS9639.R667D47 2008


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Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés
 
©2008 Éditions Québec Amérique inc. www.quebec-amerique.com
 
Imprimé au Canada
Sommaire
Page de titre Page de Copyright Dedicace Le Vert Le Rose Le Noir Le Rouge Le Jaune Le Blanc Le Bleu Des nouvelles de Pickton Vale
À P., qui dessine des châteaux à l’envers.
Le Vert
Agathe cousait l’ourlet d’un rideau, le tissu vert tombant en cascade de ses genoux sur la table à café puis sur le tapis du salon, et prenait plaisir à se laisser envahir par des pensées qu’elle avait déjà eues des milliers de fois, mais qui lui semblaient toujours aussi neuves et inspirées : décidément, ce n’est pas un hasard si j’aime tant le vert, le vert c’est la vie, la fertilité et même la prospérité, ne dit-on pas « billet vert » ? sur le ton d’une trouvaille qu’elle aurait pris plaisir à partager en faisant un brin de causette, non mais regardez-moi ce beau tissu , il s’allongeait devant elle, dessinant à ses yeux un avenir parfaitement orchestré et faisant jouer la musique cristalline des sommes qu’elle allait gagner, ainsi pâmée d’admiration elle vit soudain beaucoup plus qu’une cascade de verdure et d’argent, c’était plutôt un torrent, véritable Niagara, sapristi que la vie est belle ! ces trois généreux verts ton sur ton l’emballaient ! particulièrement ce splendide vert chartreuse , plus acide, plus vivant que les deux autres, plus insistant, chaque année c’est un miracle après des mois de neige et de gel, pouf! ça sort de terre comme ça, véritable résurrection tout droit venue du monde des morts où le vert nous cache ses racines, le vert est joie, lumière, feu de circulation, « mais avancez que diable » , nous dit-il en élevant ses tiges et ses feuilles, il nous emmène vers Dieu ! le regard plongé dans ce vert chartreuse, par une sorte de renversement, elle voyait mieux le bleu du ciel, un peu comme lorsqu’on regarde le reflet d’un clocher dans un étang, n’a-t-on pas l’impression de s’édifier et d’être emporté encore plus haut? merci Seigneur de tant de beauté, ce sera le plus beau rideau de cette maison, la plus belle chambre de l’univers, quels beaux verts riches, cette maison sera somptueuse, en fait, en plongeant mon fil et mon aiguille dans ce tissu, je donne sens à l’idée vieille comme le monde que le vert est espoir , et c’est au moment de cette envolée que le téléphone sonna.
Téléphone ?
Référés par le bureau de tourisme? par-le-bu-reau-de-tou-ris-me , se dit-elle en martelant les syllabes une à une pour mieux les mâcher, épouser leurs formes avec sa langue et s’en gargariser joyeusement, ils savent bien au bureau de tourisme que ce n’est pas encore ouvert officiellement, mais dans leur esprit, c’est déjà tout vu, déjà une référence, car si Agathe Alary ouvre un bed and breakfast, ce sera parfait, probablement le meilleur du comté de Pickton, en fait ils oublieront vite le mot « probablement » et le remplaceront par « certainement », car ce sera encore mieux que ce qu’ils avaient imaginé, ils en tomberont à la renverse, paf! devant Agathe Alary , elle toujours droite, dressée, vaillante, recevante, intérieur douillet, coquet, petits déjeuners royaux sans parler du reste, ils pénétreront dans cette maison comme dans mon corps, rien à cacher, pas une parcelle de honte, chaque fenêtre, meuble ou accessoire remplissant sa fonction comme un organe, rien qui manque, rien d’inutile, tout ordonné, astiqué, l’air santé, elle s’identifiait parfois à ces religieuses qui frottent et polissent sans relâche les balustrades des églises dont le marbre finit par briller comme un os de relique patiné , eh bien regardez cette rampe d’escalier qui conduit aux chambres, voyez comme elle reluit, montez montez vers les chambres, tout est si propre vous pouvez même vous agenouiller et vous passer la langue sur le parquet (ha! ha! c’est une blague, je ne vous en demanderai pas tant, vous savez) , elle voyait déjà s’allonger la liste d’attente, les prix grimper d’année en année, la clientèle de classe citer l’endroit pour sa simplicité, son chic, son bon goût, son calme, son recueillement – un véritable sanctuaire – et sa palette de verts ! elle sentait que tout le monde allait craquer, elle-même sentit un long frisson lui parcourir l’échine lorsqu’elle entendit au téléphone un homme à la voix d’or : « on m’a dit que ce n’était pas encore ouvert officiellement, mais... », « non, en effet l’ouverture n’a pas encore eu lieu... », « accepteriez-vous... la neige... la route est dangereuse, en fait, impraticable, le service des routes a émis une alerte », «une alerte?» répondit-elle, n’a-t-elle pas une responsabilité ? elle qui avait même songé à baptiser son bed and breakfast Le Petit Benoît en hommage aux Bénédictins dont la règle depuis le VI e siècle prescrit le secours aux voyageurs, elle considéra qu’il était de son devoir de les accueillir, qu’après tout, rien n’était plus simple, en une heure elle pouvait fort bien finir l’ourlet, installer le rideau, pelleter encore une fois la neige sur le perron, donner un coup d’aspirateur, nettoyer cette vilaine marque de doigt sur ce téléphone, en fait elle le frotta avec sa propre jupe pour aller plus vite en se jurant que c’était la dernière fois, si jamais des clients me surprenaient en train de faire ça ! refaire sa coiffure, mettre un disque de Mozart « eh bien c’est entendu, je vous attends, 16, rue du Cèdre, à 20 heures... »
Il lui restait soixante minutes.
Mais oui, pourquoi attendre encore huit jours rien que pour respecter une date alors qu’en fait je suis déjà prête, je dois écouter mon destin, il ne restait que ce rideau, elle savait ce qu’elle devait faire, elle pouvait le terminer en deux coups de cuiller à pot, chacun de ses gestes s’accomplit d’ailleurs dans l’ordre sans qu’elle ait à y réfléchir, chacun d’eux conduisant au suivant comme lorsqu’un rite s’accomplit, et l’image qu’elle eut d’elle-même, assise sous cette lampe jaune, fut celle d’une madone tenant avec humilité une broderie de verdure sur ses genoux, elle se mit alors à fredonner une chanson apprise à sa première communion, il neige neige dans mon pays, milliers d’oiseaux, d’étoiles blanches , il neige neige au fond des nuits , bouquet de blanches blanches prières , elle était fière de sauver ce couple de la tempête, elle y voyait un présage, elle se mit à penser mon premier client possède une véritable voix d’or, c’est un signe, il doit avoir des cheveux blonds, sa femme une chevelure noire de jais à laquelle les flocons s’accrochent comme des bijoux, ils retireront leur manteau, ruisselants, ébouriffés, reconnaissants, et gnan ! elle coupa le fil avec ses dents, rideau terminé, maintenant l’installer, encore quarante minutes, ah où avais-je la tête, les draps, les serviettes assorties! elle monta l’escalier entièrement recouverte d’une montagne de tissus verts qui semblait se mouvoir d’elle-même.
Le geste était précis, clac ! le dernier crochet de rideau mis en place, elle descendit de l’escabeau, s’empressa de couvrir le lit des draps couleur sapin, bordés d’un liseré vert tendre, qu’elle avait cousu elle-même, et prit quelques secondes pour vérifier si l’effet d’ens

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