IPOTO-KA-KOMPO ou le blanc des palmiers
332 pages
Français

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IPOTO-KA-KOMPO ou le blanc des palmiers , livre ebook

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Description

Camille Camara, dans cet ouvrage captivant et riche en informations, nous raconte son histoire, celles de sa famille et de Tatéma, le village de ses parents, et du peuple baga dont ils sont issus. Il nous parle de sa naissance, lui, le seul métis blanc du pays baga - en Guinée Conakry - et de toute la contrée. Ipoko-Ka-Kompo ou Le Blanc des palmiers, tel fut son surnom. A travers cet ouvrage, Camille Camara vous fera voyager dans cette Afrique de début de la colonisation, cette Afrique où des mystères régissaient la vie de toute une communauté, et où l'homme blanc, tout puissant, émerveillait, faisait peur, impressionnait. L'homme blan qui apporta la << civilisation >>. Mais ce livre sera aussi le voyage à travers une partie de l'histoire de la Côte d'Ivoire, du Mali et du Sénégal, mais aussi de la France. Des témoignages inédits et édifiants, où l'histoire, sociologie, ethnographie et géographie font ménage.

Informations

Publié par
Date de parution 10 décembre 2018
Nombre de lectures 4
EAN13 9782372231305
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

CamilleCAMARA
IPOTOKAKOMPO OULE BLANC DES PALMIERS Une enfance heureuse dans le village de TatémaKoba (République de Guinée)
CIV3130
À ma fille Marie Agnès Camara Coundagbé et à ses enfants :
Laure Lise Mélin Coundagbé Lionel Mélin Coundagbé Avec ma profonde affection et mon éternel attachement.
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L’histoire qui va suivre est ma biographie. Elle prend naissance dans le village de Tatéma, dans le canton du Koba, en Guinée Conakry.
Les faits des premières années de ma vie sont basés sur le témoignage de ma sœur aînée, Nénéforie Cissé. Par ailleurs, les dates des événements n’ont pas été scientiquement vériées.
Le village de Tatéma est aujourd’hui une commune rurale, avec son conseil municipal et un nombre appréciable d’institutions de formation comprenant entre autres une École Nationale d’Agriculture et d’Élevage, un lycée, quatre collèges publics, dix écoles primaires et enn un Centre Cantonal de Santé.
À ma naissance, Tatéma, peuplé par à peine quelques milliers de paysans riziculteurs, faisait partie du cercle administratif de Boffa, dit cercle du Rio Pongo. Les habitants disaientRaponkapar déformation, souvenir du passage dans la région des colons portugais.
La géographie du village était très différente de ce qu’elle est aujourd’hui. L’ethnie qui le peuplait portait
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le nom de Baga, un peuple entièrement riziculteur, la seule activité digne de ce nom à leurs yeux.
Le village était ceinturé par une puissante forêt de colatiers, elle-même encerclée par une forêt où dominaient d’impressionnants kapokiers (fromagers) centenaires et sacrés. Les palmiers à huile surplombaient le village des Baga.
J’en étais le seul métis blanc, d’où mon surnom deIpoto-Ka-Komposorti tout droit d’une déformation du Portugais et qui voulait dire :Le Blanc des palmiers.
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C H A P I T R E I
Coundagbé de Tatéma ou la naissance de Séngbé (Moineau à longue queue qui se nourrit de graminées)
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l était cinq heures du matin. Dans le ciel, les étoiles I scintillaient avec une fréquence inhabituelle. Leur lumière ltrante pénétrait le village jusque dans ses entrailles. Elles instillaient un inux magnétique dans toutes les chaumières, à travers leurs coiffes de douce paille pointue.
Un léger voile de nuages blancs mordorés sur leurs franges barrait le ciel d’un bleu pur qui semblait aspirer le cœur et l’âme de la communauté villageoise vers les profondeurs sidérales de l’univers. Le silence de n de nuit et de début de jour exprimait la tranquillité et la douceur de vivre dans ce coin du rivage de l’Atlantique. Tout était calme ; les bruits que l’on percevait étaient amortis, se diffusant avec une douceur innie, sans heurt aucun, selon un rythme harmonieux, voire une mélodie qui ravissait l’oreille. Les demeures étaient sans lumière. Malgré cette obscurité et le calme général qui régnait, un léger frémissement se manifestait dans une case où un petit foyer restait allumé ; une petite amme jaune-or et bleue dansait en silence. M’Ma Bangoura était entourée de ses tantes Matchibaniko et Mamêt. Un tout petit enfant, presque un chaton, dormait, enveloppé dans un tissu indigo collé à elle. Ce bébé était un évènement dans ce village côtier au bord de l’immense Atlantique !
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Le nouveau-né était un problème car il était venu au monde sans pousser les cris stridents usuels. En outre, il avait une taille très inférieure à la normale ; on aurait dit un nain. Pour certains, c’était un prématuré, ce qui expliquait ces caractéristiques physiques. Pour d’autres, l’attention était surtout portée sur son teint étrangement blanc, ses lèvres très nes et sa chevelure lisse et noire.
Le premier regard que sa mère posa sur lui suscita deux sentiments contradictoires en elle : cet enfant serait-il un métis de père blanc ? Son teint, ses lèvres, son nez si droit, ses cheveux d’un noir de jais tirant sur le vert jade ; les doigts de ses mains, notamment les pouces, si eflés, presque pointus, paraissaient anormaux en comparaison avec les bébés habituels du village. La maman sentait, par amour maternel, que ces traits si étranges ne pouvaient que présager de qualités ex-ceptionnelles dont son père à elle, Arimo Kagbana, avait parlé une fois de façon mystérieuse, en y insis-tant particulièrement ce jour-là, après une séance de tambour sacré. Cette séance avait eu lieu le matin vers six heures, alors qu’un décès de chef de tribu venait d’être annoncé. En effet, après cette séance, Arimo Kagbana, grand ofcier du tambour sacré, tambour sculpté sur un cheval de bois, avait été envahi par une impression forte, quoique diffuse et presque insaisis-sable par moment. Le visage de son père lui parut comme une sorte de symbole communautaire vénéré par tous, une image de sagesse, un signe de ralliement fascinant. Mais ce visage qui lui remontait se dissimulait derrière un nuage, un ou électrisant. Les impulsions
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qu’il recevait le secouaient violemment, brouillant son imagination et son intelligence de grand ofcier du tambour sacré, lui qui a pourtant été de tout temps le visionnaire imperturbable du village ! Que signiait ce ou, ce trouble de l’entendement ? Mystère, ou tout simplement difculté d’appréhension, d’appropriation des signes d’outre-tombe ? Interrogation dramatique restée sans réponse. Tempête dans le cerveau !
Pour l’instant, c’était la trop petite taille de l’enfant qui intriguait la mère : le ls tenait dans ses deux mains. Elle comprit alors, le feu dans l’âme, qu’elle venait de mettre au monde un prématuré ; une situation abo-minable, génératrice de toutes sortes de difcultés, de contraintes, voire de drames, dans la famille d’Arimo Kabgana Coundagbé,son père. Pour celui-ci, si tout était un affreux tourbillon cérébral, une chose restait cependant très claire : la naissance d’un prématuré dans la famille constituait le signe d’un malheur, d’une situation qui allait se corser d’autant plus qu’elle se produisait dans la famille du grand ofcier du tambour. Tout compte fait, le nouveau-né, être étrange, anormal, était le signe avant-coureur du malheur. La preuve ? Les jours qui suivirent cette naissance, les petites nièces de M’Ma Bangoura qui s’occupaient du prématuré le surnommèrentTagnari,ce qui voulait direChatonen baga. En entendant cet étrange sobriquet, M’Ma Ban-goura eut une frayeur, son sang se glaça dans ses veines et son cœur faillit se bloquer soudain dans sa poitrine.
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Le fer dans l’âme, M’Ma Bangoura demanda conseil à sa tante Matchibaniko: il fallait faire disparaître au plus vite le bébé porte-malheur en le jetant sur le tas d’immondices dans l’arrière-cour de la maison. Un drame inouï pour la maman mais c’était la seule issue possible. Un enfant anormal ne saurait naître dans la famille d’Arimo Kagbana ! C’était là une imposture de la nature. Il importait de réagir promptement en refusant l’intrus. Ce fut, en une fraction de seconde, la réexion deMatchibaniko. En apprenant cet horrible arrêt de sa tante, le corps de M’Ma Bangoura perdit toutes ses forces. Ses genoux se mirent à trembler. Or il était impérieux de rester digne en toutes circonstances chez les Kagbana. L’initiation rituelle d’usage chez les Baga préparait à la dignité dans toutes les réactions de l’adulte. Aussi M’Ma Bangoura s’efforça-t-elle de réprimer toute attitude irrééchie, tout mouvement in-contrôlé, tout réexe primaire. Mais en même temps, il fallait éviter tout atermoiement et prendre la déci-sion que commandait une situation grosse de dangers pouvant conduire à une évolution infernale pour la maman et pour toute la famille Coundagbé. D’un seul trait, tel un éclair, une lame blanche d’épée lui apparut dans l’imagination ! Cette image lui venait de l’épée de l’initiation. Au cours du rite initiatique, cet instrument inhabituel, sacré, toujours tenu caché, était enfoncé jusqu’au tiers de sa longueur dans le sol, à quelques millimètres de la tête du candidat étendu sur une natte au sol. L’initiation des jeunes lles atteignant l’âge du mariage était une expérience à nulle autre pareille.
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